La Guinée clôture une violente journée de référendum et de législatives


La
Guinée a vécu dimanche un référendum et des législatives ternis par des
violences, avec la mort d’au moins 10 manifestants tués par les forces
de l’ordre selon l’opposition, qui a boycotté ces scrutins pour faire
barrage à un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé.

Ce
bilan n’a cependant pu être confirmé de source indépendante et les
autorités n’étaient pas joignables pour réagir aux affirmations de
l’opposition.

Le vote, dont le terme était fixé à 18H00 (GMT et
locales), a été progressivement clôturé dimanche à Conakry où des
bureaux ont fermé plus tôt que prévu à cause des incidents, selon un
journaliste de l’AFP.

Les manifestants anti-Condé ont “bravé les balles des forces de l’ordre qui ont arrêté massivement, tiré aveuglément, molesté cruellement, tuant au moins 10 personnes et blessant par balle plusieurs dizaines” de personnes, a indiqué dans un communiqué le FNDC, le collectif de partis d’opposition et de la société civile qui lutte contre un éventuel troisième mandat de M. Condé

Le
FNDC “appelle à intensifier les manifestations demain lundi 23 mars et
mardi 24 mars 2020 avec pour objectif ultime le départ du dictateur
Alpha Condé”.

Au moins 32 manifestants avaient jusqu’à dimanche après-midi été tués depuis le début à la mi-octobre de la vague de protestation, qui a également coûté la vie à un gendarme, selon un décompte de l’AFP. M. Condé, 82 ans, a été élu en 2010 et réélu en 2015.

Aucune indication n’était disponible dimanche soir sur la
participation, les résultats et leur date de publication. Les
responsables de l’Administration territoriale (Intérieur) et la
Commission électorale n’ont pas répondu aux sollicitations de l’AFP.

L’actuelle
Constitution limite à deux le nombre de mandats, la nouvelle que
propose M. Condé également. Mais, accusent ses opposants, elle lui
permettrait de remettre son compteur à zéro afin de se succéder à
lui-même fin 2020.

– attaque contre des gendarmes –

Le début
du vote, prévu à 08H00 (GMT et locale), a commencé à l’heure indiquée
dans un bureau proche du palais présidentiel à Conakry mais il a été
perturbé à de nombreux endroits, selon un journaliste de l’AFP et des
témoins qui ont affirmé avoir constaté une faible participation.

A
Ratoma (banlieue de Conakry), des jeunes ont attaqué des gendarmes
devant des bureaux de vote dans une école. Une autre école dans la même
zone a été attaquée et le matériel électoral saccagé.

Des affrontements ont eu lieu dans des banlieues de Conakry comme Cosa, Hamdallaye, Dar-es-salam et Lambanyi.

Des
troubles sont aussi survenus à Mamou (centre), à Boké (ouest) et à
N’Zérékoré (sud-est), selon des témoins. Du matériel électoral a été
détruit dans des localités comme Kobéla (sud), Dinguiraye (nord-est) et
Konah (nord-est).

“J’espère que tout se passera dans la paix et la
tranquillité et que le peuple guinéen, comme en 1958, montrera sa
maturité”, a déclaré, après avoir voté à Conakry, le président Condé, en
allusion au “non” de la Guinée, alors colonie française, au référendum
organisé par De Gaulle et qui a ouvert dès 1958 la voie à l’indépendance
du pays ouest-africain.

Le référendum et les législatives
avaient été reportés à la dernière minute il y a trois semaines dans un
climat de vives tensions.

C’est surtout le projet de nouvelle Constitution qui déchaîne les passions.

– Troisième mandat? –

M.
Condé assure qu’il s’agit de doter son pays d’une Constitution
“moderne”. Elle codifierait l’égalité des sexes, interdirait l’excision
et le mariage des mineurs. Elle veillerait à une plus juste répartition
des richesses en faveur des jeunes et des pauvres. Mais M. Condé
entretient le flou sur sa volonté ou pas de briguer un troisième mandat.

Les remises en cause internationales quant à la crédibilité du vote se sont succédé, étayées par la présence sur les listes électorales de 2,5 millions de noms douteux, soit le tiers du fichier.

Les
recommandations des organisations internationales sur le fichier ont été
“intégralement prises en compte”, a affirmé le président Condé dans un
discours publié samedi sur la page Facebook de la présidence guinéenne.

L’opposition
avait promis de boycotter le vote et d’en empêcher la tenue. La
persistance des troubles n’a pas dissuadé le gouvernement d’organiser
les scrutins, pas même l’apparition récente du coronavirus.

La
Guinée a déclaré deux cas de contamination dont un a été guéri, a
annoncé samedi le gouvernement. La présence du Covid-19 suscite
l’attention dans un pays où la fièvre Ebola a fait 2.500 morts entre
2013 et 2016.

Des chefs d’Etat ouest-africains ont annulé leur mission de bons offices prévue au cours de la semaine. Avant le vote, deux grandes organisations régionales avaient renoncé à déployer leurs observateurs ou bien les avaient rappelé.

Par Mouctar BAH AFP


Cet article est republié à partir de information.tv5monde.com. Lire l’original ici