Afrique 2019: le courage des populations face à la répression [Amnesty International]


En Guinée, où les autorités ont interdit plus de 20 manifestations pour des motifs flous et excessivement généraux, les forces de sécurité ont continué à attiser les violences lors des rassemblements et au moins 17 personnes ont été tuées en 2019.


Dans
toute l’Afrique subsaharienne, des manifestants ont bravé des tirs et
les coups pour défendre leurs droits. Face aux conflits et la répression
qui perdurent, ils ont fait preuve d’un courage immense. Bilan d’un an
d’enquête en Afrique.

En
2019, nous avons vu l’incroyable pouvoir du peuple s’exprimer lors de
manifestations de grande ampleur organisées dans toute l’Afrique
subsaharienne. Du Soudan au Zimbabwe, de la République démocratique du
Congo (RDC) à la Guinée, des personnes ont bravé une répression brutale
pour défendre leurs droits.

Dans certains cas, ces manifestations ont abouti à des changements importants : après la chute d’Omar el Béchir, qui dirigeait le Soudan de longue date, le nouveau régime a promis des réformes favorables aux droits humains. De la même façon, à la suite de manifestations, une série de réformes relatives aux droits humains ont été lancées par l’État éthiopien. Malheureusement, d’autres changements nécessaires sont bloqués par des gouvernements répressifs, qui continuent à commettre des violations en toute impunité.

Répression violente orchestrée par l’État

Dans toute la région, des défenseurs des droits humains ont été persécutés et harcelés pour s’être opposés ouvertement aux autorités. Le Burundi, le Malawi, le Mozambique, l’Eswatini (anciennement Swaziland), la Zambie et la Guinée équatoriale ont intensifié la répression du militantisme en 2019.

Au Malawi, par exemple, les militants qui ont organisé et
conduit des manifestations contre une fraude électorale présumée, à la
suite des élections de mai, ont été attaqués et intimidés par de jeunes
cadres du parti au pouvoir et poursuivis en justice par les autorités.
Le scrutin présidentiel a finalement été annulé par les tribunaux et le
pays se prépare à une autre élection, qui se tiendra cette année.

Au
Zimbabwe, au moins 22 défenseurs des droits humains, militants, membres
de la société civile et responsables de l’opposition ont été inculpés
pour leur rôle présumé dans l’organisation de manifestations contre la
hausse du prix des carburants décidée en janvier 2019. Les forces de
sécurité se sont livrées à une répression violente, qui a fait au moins
15 morts et des dizaines de blessés.

En Guinée, où les
autorités ont interdit plus de 20 manifestations pour des motifs flous
et excessivement généraux, les forces de sécurité ont continué à attiser
les violences lors des rassemblements et au moins 17 personnes ont été
tuées en 2019.

Dans 17 pays d’Afrique subsaharienne, des journalistes ont été arrêtés et détenus arbitrairement en 2019. Au Nigeria, par exemple, on a enregistré 19 cas d’agression, d’arrestation arbitraire et de détention de journalistes, dont beaucoup faisaient l’objet d’accusations controuvées.

Au Burundi, les autorités ont continué à réprimer les activités des défenseurs des droits humains et des organisations de la société civile, notamment en leur infligeant des poursuites et de longues peines d’emprisonnement.

Malgré tout… des victoires !

En dépit du contexte maussade, certaines victoires notables ont été remportées dans le domaine des droits humains l’an dernier.

Au
Soudan, des manifestations de grande ampleur ont mis fin au régime
répressif d’Omar el Béchir en avril 2019 et les autorités désormais au
pouvoir ont promis de vastes réformes destinées à améliorer l’exercice
des droits humains. L’État éthiopien, quant à lui, a abrogé la
législation encadrant la société civile qui restreignait les droits aux
libertés d’association et d’expression et a présenté au Parlement une
nouvelle loi remplaçant la législation antiterroriste draconienne.

En RDC, les autorités ont annoncé la libération de 700 détenus, dont plusieurs prisonniers d’opinion.

On a aussi constaté des victoires individuelles. En Mauritanie, le blogueur et prisonnier d’opinion Mohamed Mkhaïtir a été libéré après avoir été détenu arbitrairement pendant plus de cinq ans.

L’impunité pour les violations des droits humains était toujours monnaie courante, mais de modestes avancées ont été réalisées en 2019. En Somalie, la population a vu pointer une lueur d’espoir lorsque le Commandement des États-Unis pour l’Afrique (AFRICOM) a reconnu pour la première fois, en avril 2019, avoir tué des civils lors de frappes aériennes visant Al Shabaab, ouvrant ainsi la possibilité pour les victimes d’obtenir réparation.

Par ailleurs, les tribunaux de droit commun de la République
centrafricaine ont progressé dans l’examen d’affaires concernant des
atteintes aux droits humains commises par des groupes armés. La Cour
pénale spéciale a reçu 27 plaintes et commencé ses enquêtes l’an
dernier.

En 2019, des militants et des jeunes ont défié l’ordre établi. En 2020, il faut que les dirigeant·e·s écoutent leurs revendications et œuvrent à des réformes qu’il est nécessaire d’amorcer de toute urgence et qui respectent les droits de tous.


amnesty.fr


Rapport complet





Issoufou, la voix Amoulanfé de la CEDEAO «le temps des hommes qui s’autoproclament providentiels et donc irremplaçables [ ] tire à sa fin»


[ ] le temps des hommes qui s’autoproclament providentiels et donc irremplaçables, des hommes qui cherchent à s’incruster à vie au pouvoir, tire à sa fin. Cela se traduira par des alternances plus fréquentes et par une respiration démocratique qui consolident les institutions démocratiques dont nos peuples ont tant besoin.

Mahamadou Issoufou, président du Niger


Cela nous permettra de faire l’économie des crises comme celles que nous connaissons actuellement en Guinée Conakry et en Guinée Bissau. Je lance un appel à tous les acteurs politiques, dans ces deux pays, de se ressaisir afin de créer les conditions de l’apaisement et de la paix.

Mahamadou Issoufou, président du Niger


Discours du Président de la République, Président en exercice de la CEDEAO à l’ouverture de la 5e législature du Parlement de la CEDEAO

Monsieur le Président du Parlement de la CEDEAO

– Monsieur les Présidents des Assemblées Nationales du Niger et de la Sierra Leone,

– Monsieur le Premier Ministre,

– Monsieur le Haut Représentant du Président de la République,

– Madame et Messieurs les Présidents des institutions de la République

– Monsieur le Président du Conseil des Ministres de la CEDEAO

– Monsieur le Président de la Commission de la CEDEAO

– Mesdames et Messieurs les membres du Gouvernement,

– Honorables Députés, 

– Mesdames et Messieurs les Membres du Corps Diplomatique et Représentants des Organisations internationales

– Monsieur le Gouverneur de la Région de Niamey

– Honorables chefs traditionnels et religieux

-Distingués Invités, Mesdames et Messieurs

La cérémonie solennelle d’installation de la cinquième législature du parlement de la CEDEAO est la première cérémonie qu’accueille le prestigieux centre Mahatma Gandhi symbole de la transformation non seulement de la ville de Niamey mais de l’ensemble de notre pays dont le peuple vous souhaite la chaleureuse bienvenue.

Mesdames, Messieurs 

Le 29 Juin 2019 à Abuja, à l’occasion de mon discours de clôture de la 55eme session ordinaire de la conférence de notre organisation, j’avais décliné les priorités de mon mandat : la sécurité, la démocratie, la monnaie unique et les infrastructures. Cela résulte de ma conviction que sécurité, démocratie et développement sont intimement liés et que ce triptyque constitue une base d’un progrès économique et social solide de notre espace communautaire. 

Mesdames, Messieurs

L’agenda 2063 de l’Union Africaine s’est fixé pour ambition de faire taire les armes en 2020. Il est probable que notre région, malheureusement secouée par les menaces des organisations terroristes et criminelles ainsi que par les conflits intercommunautaires, n’y parviendra pas. En effet, dans le Sahel comme dans le bassin du lac Tchad, certains pays membres font face à ces menaces qui sont amplifiées par la crise Libyenne. Il est nécessaire donc de renforcer notre solidarité pour faire face à cette situation. C’est dans cette perspective que la Force Mixte Multinationale (FMM) et la Force Conjointe ont été respectivement mises en place dans le bassin du lac Tchad et dans le Sahel. C’est dans cette perspective que la CEDEAO a décidé, à l’occasion de son sommet extraordinaire du 14 septembre 2019 de Ouagadougou, de définir un plan 2019-2023 qui sera financé à hauteur de 1 milliard de dollars. Elle a aussi décidé de prévoir le recours à la force en attente de notre organisation. C’est également dans cette perspective que  les États membres du G5 Sahel et la France ont appelé, à l’occasion du sommet de Pau tenu le 13 Janvier 2020, à la mise en place d’une coalition Sahel de lutte contre le terrorisme autour de 4 points : l’intensification de la lutte contre le terrorisme, le renforcement des capacités militaires des pays du G5 Sahel, le renforcement de la présence des États et des administrations dans les zones menacées et le développement économique et social. Dans le cadre de ce combat, Il est prévu la mise en place d’une Task Force (Takuba) composée d’unités des forces spéciales européennes. Les pays membres de notre organisation doivent prendre leur part  dans cette coalition soit collectivement (à travers la force en attente) soit individuellement. Ils sont tous invités au prochain sommet qui se tiendra à Bruxelles afin de donner un contenu au Plan de Sécurité et de Stabilisation du Sahel(P3S) annoncé par la France et l’Allemagne au dernier sommet du G7.

Mesdames, Messieurs

Une autre menace sécuritaire qui plane sur notre espace communautaire est la pandémie de la pneumonie liée au corona virus COVID 19. Cette maladie virale très contagieuse et d’apparition récente vient malheureusement de faire l’objet de déclaration de cas confirmés dans au moins trois pays membres de notre communauté. Nous devons nous préparer et organiser une riposte commune dans le cadre de notre institution communautaire en charge des questions de santé, j’ai nommé l’OOAS. Je ne doute point que notre région, qui, il y a quelques années avait durement été frappée par l’épidémie de la fièvre hémorragique Ebola, beaucoup plus mortelle et dont elle a tiré une riche expérience de gestion de crise sanitaire, saura y faire face avec efficacité.

Mesdames, Messieurs 

Les parlements nationaux et le parlement de la CEDEAO sont le cœur de la démocratie dans notre espace communautaire. Je me réjouis de ce que les valeurs démocratiques y progressent. En témoigne la généralisation de la limitation des mandats à deux et de leur durée à cinq ans, dans les constitutions de la quasi-totalité de nos États membres. En témoigne également la décision récente prise par mon frère et ami Alassane Ouattara, Président de la République de Côte d’Ivoire, de ne pas briguer un 3eme mandat malgré la possibilité offerte par la constitution de son pays. Permettez-moi de saluer son courage et de l’en féliciter. Il s’agit là d’un évènement majeur qui intervient dans un des pays les plus importants de notre communauté. Cet évènement confirme ce que j’ai déjà dit à d’autres occasions : le temps des hommes qui s’autoproclament providentiels et donc irremplaçables, des hommes qui cherchent à s’incruster à vie au pouvoir, tire à sa fin. Cela se traduira par des alternances plus fréquentes et par une respiration démocratique qui consolident les institutions démocratiques dont nos peuples ont tant besoin. Cela nous permettra de faire l’économie des crises comme celles que nous connaissons actuellement en Guinée Conakry et en Guinée Bissau. Je lance un appel à tous les acteurs politiques, dans ces deux pays, de se ressaisir afin de créer les conditions de l’apaisement et de la paix. En guinée Bissau, l’élection Présidentielle s’est déroulée dans des conditions de transparence et de crédibilité reconnues par tous les observateurs. Je renouvelle mes félicitations au vainqueur et demande à tous les autres acteurs de contribuer à la normalisation de la situation. En Guinée Conakry notre organisation souhaite un dialogue inclusif permettant d’aboutir à des solutions consensuelles et apaisées.

Mesdames, Messieurs

Le projet de la monnaie unique constitue un chantier majeur de notre communauté. Nous avons fait beaucoup de progrès vers cet objectif commun. Les parlements, qui contrôlent l’action des gouvernements, doivent encourager les États à mener des politiques macroéconomiques permettant de réaliser les critères de convergence nécessaires à la réalisation de cette ambition. Maitriser les déficits et l’inflation, disposer de réserves suffisantes pour couvrir les importations, surveiller le financement des déficits par les banques centrales, maitriser l’endettement et le ratio de la masse salariale par rapport aux recettes internes, tels sont les critères que les États doivent respecter pour que ce projet qui date de plusieurs décennies devienne enfin une réalité. Je crois pouvoir dire que le Niger est prêt pour le lancement de la monnaie unique en 2020. Il en remplit tous les critères depuis 2019. Le Niger se réjouit de ce que nous ayons trouvé un accord sur deux questions majeures : le régime de change et le type de banque centrale. Nos peuples veulent la monnaie unique car elle servira leurs intérêts. En particulier elle permettra de soutenir la croissance des économies de nos États en renforçant notamment les échanges intra-CEDEAO , échanges qui s’amplifieront avec la promotion des infrastructures routières, ferroviaires, énergétiques, numériques, aéroportuaires, portuaires, autant de projets qui permettront à notre région de contribuer à la mise en œuvre de l’agenda 2063 , en particulier de la zone de libre-échange continentale africaine. J’insiste sur la nécessité de faire baisser les couts des facteurs transport et énergie en vue d’améliorer la compétitivité des économies de notre région. Les parlements nationaux et le parlement de la CEDEAO ont un rôle éminent à jouer dans la promotion de tous les chantiers qui transformeront non seulement notre région mais aussi l’ensemble du continent.

Mesdames, Messieurs

Si l’exécutif constitue la tête de l’État, l’armée sa colonne vertébrale, la justice et l’administration ses articulations, les récompenses et les punitions ses nerfs, la prospérité et la richesse sa force, les conseillers sa mémoire, l’équité et les lois sa raison et sa volonté, les troubles civiles sa maladie, les guerres civiles sa mort, la souveraineté est son âme. Vous êtes les représentants du peuple souverain. Vous êtes l’incarnation de l’âme de nos nations.   

Pour renforcer votre rôle dans l’espace CEDEAO, nous devons accélérer votre désignation au suffrage universel direct. Cela donnera à notre parlement régional davantage de prérogatives.

D’ores et déjà le Parlement de la CEDEAO représente l’Assemblée des peuples de notre Communauté. Il a la responsabilité d’adopter des lois et des législations communautaires. Ce travail législatif communautaire contribue indéniablement à la création d’une région intégrée, paisible, prospère et cohérente, bâtie sur la bonne gouvernance.

Mesdames, Messieurs

Cette tribune m’offre l’occasion de rendre un hommage mérité au Parlement sortant de la 4ème Législature et à son Président, l’Honorable Moustapha CISSE LO, qui s’est attelé au cours de son mandat à promouvoir l’intégration régionale à travers le dialogue, la consultation et le consensus, conformément aux articles 6 et 13 du Traité révisé de 1993 de la CEDEAO.

Le Parlement sortant a su donner une nouvelle impulsion aux activités de notre Communauté.Son dynamisme a permis au parlement de mieux jouer son rôle de représentation des populations de la CEDEAO dans la réalisation des objectifs et des missions de notre Communauté.

Il me plait à cet égard de relever que le parlement s’est fortement impliqué dans le processus de prise de décision de la Communauté, les questions de paix et de sécurité, de démocratie et des droits de l’homme, ainsi que dans les relations avec les autres Institutions de la Communauté, notamment les Parlements nationaux, les organes interparlementaires et les organisations partenaires.

Des actions spécifiques ont ainsi permis au Parlement d’enregistrer des acquis importants à travers :

• l’adoption de résolutions relatives à divers domaines sectoriels du processus d’intégration,

• la sensibilisation des populations sur des thématiques importantes, dont la migration irrégulière, la transhumance, les conflits intercommunautaires et la libre circulation des personnes, des biens et des services,

• l’organisation de réunions délocalisées ayant abouti à la formulation de recommandations portant sur la création d’emplois à travers l’entreprenariat et le développement des petites et moyennes entreprises (PME) et les sources alternatives et innovantes de financement des projets et programmes communautaires;

• la conduite de diverses consultations et réflexions sur la monnaie unique de la CEDEAO et la formulation de recommandations pour contribuer à assurer sa viabilité.

Pour toutes ces actions, les députés de la 4ième législature et le Président CISSE LO méritent notre reconnaissance et nos félicitations.

Mesdames, Messieurs

Je voudrais également, au nom de la Conférence des Chefs d’État et de Gouvernement de la CEDEAO, exprimer mes chaleureuses félicitations aux nouveaux députés élus pour représenter les citoyennes et citoyens de notre espace communautaire durant les quatre prochaines années. Je ne doute pas que chacun de vous a pleinement conscience de la responsabilité qui lui incombe en tant que député communautaire.

Votre engagement personnel est indispensable pour la réussite de l’exaltante mission que les peuples de notre sous-région vous ont confiée. Il vous revient de procéder notamment à :

-la mobilisation de vos Parlements respectifs pour soutenir et appuyer les États membres dans la lutte contre le terrorisme et la mise en œuvre de programmes et projets de l’agenda de l’intégration régionale notamment s’agissant de la monnaie unique et des infrastructures ;  

– de vous impliquer pleinement en qualité de gardiens des us et coutumes démocratiques et de la bonne gouvernance, dans le cadre de la mise en œuvre du Protocole sur la Démocratie et la bonne Gouvernance ;

– de procéder au plaidoyer nécessaire auprès de vos Parlements respectifs pour la ratification des Traités et autres documents connexes de la CEDEAO.

Je reste convaincu que vous serez à la hauteur de toutes les attentes de nos peuples et que de concert avec les autres Institutions, vous contribuerez au rayonnement de la CEDEAO, qui reste un exemple de réussite en matière d’intégration. 

En vous assurant du soutien des Autorités de la CEDEAO dans l’accomplissement de votre mission, je

déclare solennellement ouverts les travaux de la session inaugurale de la cinquième législature du Parlement de la CEDEAO.

Vive la CEDEAO

Vive l’intégration Africaine

Je vous remercie


Discours presidence.ne





Le président Alassane Ouattara ne sera pas candidat à sa succession en octobre


Le président ivoirien Alassane Ouattara, qui entretenait depuis des mois le mystère sur son éventuelle candidature à un troisième mandat, a annoncé, ce jeudi 5 mars, qu’il ne se présenterait pas à l’élection présidentielle en octobre 2020.

Il laissait planer le doute depuis plusieurs mois. Le président ivoirien Alassane Ouattara
a annoncé, ce jeudi 5 mars, qu’il ne serait pas candidat à un troisième
mandat lors de la présidentielle d’octobre. Âgé de 78 ans, Alassane
Ouattara avait été élu en 2010 et réélu en 2015.

Je vous annonce solennellement que j’ai décidé de ne pas être candidat à la présidentielle du 31 octobre 2020 et de transférer le pouvoir à une jeune génération, a-t-il lancé devant les parlementaires du Sénat et de l’Assemblée nationale réunis en Congrès extraordinaire à Yamoussoukro.

Cette annonce faite au terme d’un discours d’une trentaine de minutes
a été accueillie par un tonnerre d’applaudissements de la part des élus
mais aussi de centaines d’élève et étudiants invités au Congrès. Prési ! Prési ! Merci ! Merci !, ont scandé des jeunes.

On est content qu’il laisse la place à la jeune
génération. C’est un homme de parole. Je suis fier de mon président même
si je ne suis pas un de ses partisans. Je suis fier qu’on fasse
confiance à la jeunesse, a affirmé Daouda Bakayoko, élève-maître au Cafop (équivalent de l’École Normale) de Yamoussoukro.

Un climat politique tendu

Le climat politique est tendu en Côte d’Ivoire
avant la présidentielle d’octobre, qui se tiendra dix ans après la
crise post-électorale de 2010-2011 qui avait fait 3 000 morts. Les
élections municipales et régionales de 2018 ont été marquées par de
nombreuses violences et des fraudes.

Pour le moment, l’ancien chef de la rébellion Guillaume Soro,
actuellement en France et sous le coup d’un mandat d’arrêt en Côte
d’Ivoire, est le seul à s’être déclaré candidat.

L’ancien président Henri Konan Bédié, qui aura 86 ans lors du scrutin, n’a pas écarté l’idée de se présenter.


Cet article est republié à partir de ouest-france. Lire l’original ici





L’Union Africaine (aussi) rappelle sa mission déployée pour l’observation électorale en Guinée


Communiqué

Addis Abéba, le 28 février 2020: Le Président de la Commission, S.E. Moussa Faki Mahamat reste préoccupé par les récents développements pré-électoraux en République de Guinée caractérisés par la poursuite d’une forte controverse sur le fichier électoral et l’impossibilité du déploiement de la mission de bons offices composés de quatre chefs d’État de la CEDEAO.

La position de l’organisation continentale alignée, en vertu du principe de la subsidiarité, sur celle de l’organisation régionale, en l’occurrence la CEDEAO, amène à reconsidérer le maintien de la mission d’observation de l’Union africaine déjà en place.

En conséquence de tous ces faits, il est décidé de rappeler la mission d’observation déployée pour l’observation des élections législatives prévues en République de Guinée le 1er mars 2020.

La Commission de l’Union africaine reste et demeure entièrement disposée, en concertation avec la CEDEAO, et en solidarité avec le gouvernement et tous les acteurs politiques et sociaux de Guinée à accompagner le processus électoral dans ce pays conformément aux principes de l’organisation qui régissent l’observation des élections en Afrique.


Lien du communiqué de l’UA ici

Lire aussi: La CEDEAO renonce « à déployer une mission d’observation des élections en Guinée »





Afrique: un problème avec la démocratie?


ÉTUDE. Publié par « The Economist », le rapport annuel sur la démocratie est riche d’enseignements sur les raisons de son recul en Afrique, en 2019.

Une présidentielle au Togo et en Côte d’Ivoiredes législatives en Guinée et en Éthiopie. L’année 2020 sera riche en élections pour les Africains. Sont-elles pour autant garantes d’une démocratie pleine et entière ? Rien n’est moins sûr. Car malgré la vigueur de la sphère politique africaine, la démocratie y est en recul. C’est le constat du dernier indice de The Economist Intelligence Unit (EIU), un groupe de chercheurs rattaché au magazine britannique du même nom, sur le sujet. Dans cette 12e édition, les analystes, réputés exigeants, ont évalué le niveau de démocratie des pays selon cinq critères : le processus électoral et le pluralisme, le fonctionnement du gouvernement, la participation politique, la culture politique et l’état des libertés civiles. En résulte un classement, où les 165 États étudiés y sont classés selon quatre types de régimes : « pleine démocratie », « démocratie imparfaite », « régime hybride » ou « régime autoritaire ».

L’état de la démocratie dans le monde en 2019.PUBLICITÉAds by Teads© Economist Intelligence Unit

L’Afrique en régression

Même si un recul global de la démocratie a été constaté en 2019 – l’indice, à 5,44, est le pire score observé depuis sa création en 2006 – l’Afrique subsaharienne fait figure de mauvaise élève aux côtés de toutes les régions du monde. Son indice, à 4,26, est le plus bas depuis 2010. En cause, selon le rapport : des régressions constatées dans les processus électoraux, et moins de pluralisme politique. Au Niger et aux Comores, par exemple, « les autorités ont mis en œuvre des règles interdisant aux personnalités de l’opposition de se présenter à l’élection présidentielle », justifie l’étude. Au Nigeria, même si les élections générales de février 2019 ont été jugées libres et équitables, le processus électoral est resté insatisfaisant, estime EIU.

Le classement des pays africain en matière de démocratie. © Economist Intelligence Unit

Pour les économistes, la situation sécuritaire qui prévaut dans le pays a en effet entravé le vote, et constitue l’une des principales raisons de la faible participation électorale, à seulement 34,8 %. « Des taux de participation faibles, engendrés par un intérêt en baisse pour le vote, mais aussi par des problèmes de transport ou d’électricité, ont entravé les processus électoraux qui ont eu cours en 2019 », explique Benedict Craven, économiste chargé du Moyen-Orient et de l’Afrique au sein de l’EIU. Autre élément pointé du doigt par le chercheur, « les changements de Constitution ». Une initiative qui a le vent en poupe en Afrique et qui, pour Benedict Craven, est « une porte ouverte à la manipulation de la population ».

De l’espoir quand même

Malgré de médiocres résultats constatés dans la plupart des pays africains, les analystes ont relevé tout de même quelques progrès. Ils saluent, par exemple, le scrutin à Madagascar, qui, malgré les controverses autour de ses candidats, « a tenu des élections libres et équitables ». Autre bon élève africain de l’étude, la Gambie, dont les analystes saluent le lancement de la Commission vérité et réconciliation. Chargée de faire la lumière sur les crimes perpétrés sous Yayah Jammeh, l’instance a participé à la promotion des droits de l’homme dans le pays, et du débat citoyen. Au Maghreb, c’est la Tunisie qui récolte les bons points des analystes de EIU. Le pays, dont le classement a de nouveau progressé cette année au 53e rang mondial, a passé avec brio le test des élections libres, malgré un contexte peu favorable avec le décès brutal de Béji Caïd Essebsi.

Les initiatives des nouveaux présidents éthiopien et angolais, Abiy Ahmed et Joao Lourenço, sont également accueillies avec optimisme par l’étude. Mais à cause de « la rigidité de ces systèmes basés sur le favoritisme, enracinés depuis des décennies, ils seront difficiles à réformer », prévient-elle. « En Éthiopie, des réformes positives ont été lancées, mais il faudra être patient pour en récolter les fruits, affirme Benedict Craven. La création du Parti de la prospérité, la grande coalition d’Abiy Ahmed, est aussi sujette à interrogations. Maintenant que l’opposition l’a rejoint, où est le contre-pouvoir ? Ce n’est pas bon signe pour la démocratie éthiopienne. » Un constat qui, pour l’économiste, justifie la position du pays à la 125e place de l’index, et son classement dans le groupe des « régimes autoritaires ».

Attentes autour de l’Algérie et du Soudan

Un statut que l’Algérie n’a plus dans le nouveau classement. Désormais « régime hybride », le pays remonte de 13 places, et passe du 126e au 133e rang. Les nombreuses et régulières manifestations, qui ont débouché sur une élection présidentielle en décembre, ont dynamisé la démocratie dans le pays. Malgré tout, la situation reste fragile. Certes « Abdelmajid Tebboune a remporté une nette victoire avec 58 % des voix », explique l’étude. « Cependant, les candidats étaient tous globalement proches de l’armée, et de nombreux partisans de l’opposition ont boycotté les élections ». Benedict Craven confirme : « Malgré un an de hirak et des élections, l’armée est toujours là. »

Cette mainmise militaire sur les révolutions, l’étude l’observe également au Soudan. Le pays, qui a gagné huit places dans le classement grâce à l’explosion de la « participation politique », est à l’aube d’un profond changement. Omar el-Béchir écarté, les membres du Conseil souverain ont la lourde tâche de conduire la transition démocratique. Mais là aussi, le processus reste tangent. Car l’influence de l’armée dans la sphère politique reste forte. Abdel Fattah al-Burhan, le chef du Conseil militaire de transition, est en effet le président du Conseil pour ses 21 premiers mois. « Il y a un vrai risque de ne pas voir les promesses de la transition se matérialiser. Le Soudan en encore un long chemin à parcourir », prévient Benedict Craven.

Un des plus gros points d’interrogation de l’étude reste le Sahel. La crise sécuritaire violente dans laquelle la région est engluée amplifie « des lacunes » déjà constatées depuis plusieurs années en matière de démocratie. Surtout, elle rend le Burkina Faso et le Mali « de plus en plus dépendants de leur ancienne métropole, la France », que les analystes qualifient de « protectorat de bas niveau ». Un piège, dans lequel s’enferment peu à peu la région et ses gouvernements, « qui ont perdu le contrôle sur la situation », déplore Benedict Craven. Les élections prévues cette année dans la région constitueront un ultime test.


Cet article est republié à partir de lepoint.fr. Lire l’original ici





ICG dénonce les recours à la Constitution pour se maintenir au pouvoir


Republication de contenu*







L’ONU exprime son inquiétude «face aux tensions et à la violence politiques actuelles» en Guinée


À l’invitation du Représentant spécial du Secrétaire général et Chef
du Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel
(UNOWAS), Mohamed Ibn Chambas, les chefs des missions des Nations Unies
en Afrique de l’Ouest ont tenu leur 35eme réunion de haut niveau le 4
février 2020 à Dakar, au Sénégal.

L’objectif était de renforcer la coordination afin d’améliorer les
synergies pour relever les défis communs auxquels sont confrontées les
régions de l’Afrique de l’Ouest et du Sahel.

Les représentants spéciaux du Secrétaire général des Nations Unies au
Mali (MINUSMA), Mahamat Saleh Annadif, en Guinée-Bissau (BINUGBIS),
Rosine Sori-Coulibaly, et pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel
(UNOWAS), Mohamed Ibn Chambas, étaient présents. Le représentant spécial
du Secrétaire général des Nations unies pour l’Afrique centrale
(ONUCA), François Loucény Fall, les coordinateurs résidents des Nations
unies pour la Côte d’Ivoire, Philippe Poinsot et le Libéria, Kingsley
Amaning, et le directeur de la division Afrique de l’Ouest du
Département des Affaires Politiques et de la Consolidation de la Paix et
des Opérations, Abdel-Fatau Musah, étaient également présents.

Les discussions ont porté sur la situation et les tendances
politiques, socio-économiques et sécuritaires en Afrique de l’Ouest et
au Sahel, ainsi que sur leur impact sur les régions voisines, notamment
la région d’Afrique centrale. Les participants ont exprimé leurs
condoléances aux familles des victimes d’attaques d’extrémistes
violents, tant civils que militaires, notamment au Mali, au Burkina Faso
et au Niger, ainsi que dans le bassin du lac Tchad, tout en condamnant
fermement les attaques contre les civils et les casques bleus. Ils ont
souligné la nécessité d’une approche multidimensionnelle et régionale
pour s’attaquer aux causes profondes de l’insécurité et ont appelé à une
coopération renforcée entre tous les acteurs et gouvernements
concernés.

1. Les représentants spéciaux, les chefs de mission et les
coordinateurs résidents ont salué les efforts déployés pour maintenir la
paix et la stabilité en Côte d’Ivoire et se sont félicités du lancement
récent par le gouvernement d’une nouvelle phase de dialogue politique
sur le code électoral, à l’approche de l’élection présidentielle de
2020. Ils ont exprimé leur préoccupation face à la crise de confiance
croissante entre les principaux acteurs du processus électoral et ont
encouragé un engagement constructif de toutes les parties prenantes au
dialogue, afin de garantir un large consensus et une inclusion de tous
dans le processus électoral. Les participants ont salué les efforts du
coordinateur résident et de l’équipe pays des Nations unies pour mettre
en œuvre les recommandations de la mission d’évaluation des besoins
électoraux des Nations unies, déployée du 11 au 22 novembre 2019. Les
participants ont également salué les initiatives régionales et
internationales visant à renforcer la crédibilité du processus
électoral, et ont exhorté tous les acteurs politiques à promouvoir la
paix et la stabilité.

2. Les chefs de mission ont exprimé leur inquiétude face aux tensions et à la violence politiques actuelles ainsi qu’aux violations des droits de l’homme en Guinée, et ont appelé tous les acteurs à faire preuve de retenue et à engager un dialogue constructif pour résoudre leurs différends avant les prochaines élections législatives et présidentielles dans le plus grand respect des principes démocratiques et de l’État de droit. Ils ont encouragé tous les acteurs à prendre des mesures pour promouvoir la cohésion sociale et éviter l’utilisation d’un langage incendiaire.

Lire l’intégralité du compte rendu ici





La si préoccupante crise politique guinéenne


RÉACTIONS. En interne ou à l’international, personnalités, partis, ONG et presse y vont de leur commentaire. Tous s’accordent à dire que l’heure est grave.

La répression a eu raison de la contestation guinéenne. Après trois jours de manifestations ayant fait au moins trois morts, le Front national
pour la défense de la Constitution (FNDC), le collectif de partis, de
syndicats et de membres de la société civile qui mène la protestation
depuis trois mois contre un éventuel troisième mandat d’Alpha Condé,
« suspend à partir de ce jour 15 janvier 2020 les manifestations »,
selon un communiqué publié mercredi soir. À travers cette suspension, le
parti vise à « procéder dans le calme à l’enterrement de nos victimes
et permettre aux Guinéens de se réapprovisionner » en produits de
consommation. Lundi, il avait pourtant appelé à une mobilisation
« massive » et « illimitée » à travers le pays. Les victimes de cette
semaine s’ajoutent donc à la vingtaine de civils tués depuis le début de la mobilisation, mi-octobre.

La diplomatie internationale inquiète

Une situation qui fait réagir à l’international. Devant la commission des Affaires étrangères à l’Assemblée nationale,
le ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian a notamment
appelé à « l’apaisement » cette semaine, tout en affirmant être
« particulièrement soucieux de la situation en Guinée ». « C’est la
situation la plus sensible aujourd’hui [dans la région] et l’engagement
du président Alpha Condé à demander une réforme de la Constitution ne
nous paraît pas être obligatoirement partagé ni par sa population ni par
ses voisins », a-t-il souligné. L’opposition en Guinée
est en effet convaincue qu’Alpha Condé, élu en 2010 et réélu en 2015,
entend se représenter fin 2020 alors que la Constitution limite à deux
le nombre de mandats présidentiels. Elle a été confortée dans ses
craintes en décembre quand le chef d’État guinéen, 81 ans, a indiqué
qu’il comptait soumettre aux Guinéens un projet de nouvelle Constitution, même s’il ne s’est pas exprimé sur ses intentions personnelles.

L’homologue de Jean-Yves Le Drian, Mamadi Touré, n’a guère apprécié la réaction française. Vendredi, il a rétorqué que « la République de Guinée, respectueuse de la souveraineté de tous les États, reconnaît le droit de tous les peuples du monde de faire le choix de leur avenir et de décider de leur destin. Tout comme ouverte aux débats et à la contradiction propre à la démocratie, la Guinée reconnaît à chacun de ses citoyens et à d’autres le droit et la liberté de donner leurs points de vue sur n’importe quel sujet qui ne peut faire l’unanimité dans aucun pays et dans aucune société démocratique ». « Dans le respect des lois qui la régissent, la République de Guinée rassure tous ses partenaires que ses choix tiendront compte, dans la transparence et l’équité, dans la volonté du peuple seul souverain, de ses engagements internationaux », a-t-il rappelé à la télévision nationale.

Du côté des États-Unis, le ton est le même. Tout en rappelant sa relation amicale avec le président Alpha Condé, Tibor Nagy, le secrétaire d’État adjoint aux Affaires africaines, affirme : « c’est une chose de modifier sa Constitution en donnant la parole au peuple et en suivant un processus clair. Mais là où nous avons un problème, c’est quand les dirigeants changent une Constitution uniquement pour se maintenir en place », déplore-t-il sur les ondes de RFI. « Nous surveillons cela de très près. Il y a eu des événements très inquiétants, avec des violences, des manifestations violentes et une répression violente. Notre ambassadeur est très impliqué et, à Washington, on regarde également cela de très près. » Sur le changement de Constitution proposé aux Guinéens, Tibor Nagy tâtonne. « Dans ma position, il est très inconfortable de dire : ceci peut avoir lieu ou pas, ceci est bien ou mal. Car au bout du bout, ce n’est pas aux autres pays ou à quiconque d’autre de décider, c’est au peuple. Le pouvoir doit rester au peuple. »

Une crise « préoccupante » pour l’Afrique

En Afrique, peu de réactions du côté des institutions et des personnalités. L’ancien président béninois Nicéphore Soglo n’a cependant pas mâché ses mots à l’égard d’Alpha Condé. « La période des monarchies qui ne disent pas leur nom est révolue. La balle est dans son camp », a-t-il assuré après une semaine en Guinée, dans le cadre d’une mission organisée par le National Democratic Institute (NDI) en collaboration avec la Fondation Kofi Annan à l’approche des élections législatives. « Faire une nouvelle Constitution, effacer ce qu’il s’est passé avant et recommencer… ces tours de passe-passe, personne ne l’accepte plus désormais », a affirmé l’ex-chef d’État à la BBC. « C’est l’un des éléments qui fait marcher les gens dans la rue, avec la répression qu’on a […] Comme l’a dit Goodluck Jonathan [qui a accompagné Nicéphore Soglo en Guinée, NDLR], il ne faut pas attendre qu’il y ait des génocides pour intervenir. » 

Des inquiétudes partagées également par les chefs religieux chrétiens de Guinée. Dans un communiqué publié par le site d’informations guinéen Le Djely, ils constatent « avec une vive préoccupation les crises sociopolitiques récurrentes qui troublent et endeuillent fort malheureusement l’ensemble du peuple de Guinée ». Et déplorent « la situation sociopolitique que traverse [le] pays aujourd’hui, situation émaillée de tueries, de pillages, d’agressions violentes, de ruptures, de dialogues, d’injustice, d’impunité, d’incivisme, du non-respect des textes ».

Le calme avant « la tempête » ?

Pour la presse de la région, aussi, la situation en Guinée est préoccupante. Pour le quotidien burkinabé Le Pays,
Alpha Condé ne renoncera pas à sa feuille de route. « Tout porte à
croire que malgré la clameur, le président Condé – qui est toujours
resté droit dans ses bottes face à la mobilisation de son peuple tout en
faisant la sourde oreille aux appels à la – est décidé à aller jusqu’au
bout de sa forfaiture qui fait de moins en moins l’objet de doute »,
est-il écrit dans un article publié le 16 janvier. « Quoi qu’il en soit,
avec la montée en flèche de la tension, la situation en Guinée est
devenue fort préoccupante », poursuit le journal.

Dans son dernier rapport mondial sur les droits de l’homme, Human Rights Watch (HRW) n’est, elle non plus, pas tendre avec la Guinée. Pour l’ONG, il y a eu, en 2019, une répression croissante des libertés de réunion et d’expression. « La répression brutale des manifestations par le gouvernement guinéen et l’impunité quasi totale pour les abus commis par les forces de sécurité est la recette d’une détérioration préoccupante de la situation en matière de droits humains », avait d’ailleurs déjà affirmé en octobre Corinne Dufka, du bureau Afrique de l’Ouest de HRW. « Au lieu d’arrêter des dirigeants de la société civile, le gouvernement devrait enquêter sur les inquiétantes allégations de violences, y compris par les forces de sécurité, et sanctionner les responsables. »

Une opinion répétée dans le rapport publié ces derniers jours. Et que les autorités guinéennes, à l’image du ministre guinéen de la Sécurité et de la Protection civile, Damantang Albert Camara, n’ont guère apprécié. « Nous sommes conscients qu’il y a un enjeu très important à déterminer les violences qui se déroulent pendant les manifestations, à rechercher les auteurs des crimes qui font aussi mal au gouvernement. […] Cette volonté, nous la partageons, à condition que cela se passe dans la sérénité et qu’il n’y ait pas, des fois, des prises de position qui ne se justifient pas », a-t-il réagi. Pour Le Pays, la crise en Guinée n’en est en tout cas qu’à ses débuts. « On se demande si la trêve annoncée n’est pas une veillée d’armes qui annonce une grande tempête », s’inquiète le journal. Les prochaines manifestations, annoncées par le FNDC les 21 et 22 janvier prochains, donneront le ton.


Cet article est republié à partir de lepoint.fr. Lire l’original ici





[Rétro 2019] Afrique : la démocratie à l’épreuve des réformes [Éthiopie, Bénin, Guinée]


Abonnée aux crises politiques, l’Afrique n’a pas dérogé à la règle en 2019. Et une fois de plus, c’est le jeu démocratique qui a fait les frais de réformes initiées par des dirigeants. Quelques exemples.

Éthiopie : des réformes mal comprises ?

Abiy Ahmed sera-t-il élu aux législatives de cette année, mieux
sera-t-il reconduit à son poste de Premier ministre en Éthiopie ? Oui a
priori, vu l‘œuvre que le leader de 43 ans réalise dans son pays depuis
son arrivée au pouvoir en avril 2018.

La normalisation des relations avec l‘Érythrée après plus de deux
décennies de conflit, la médiation dans de nombreux différends
inter-États et bien d’autres initiatives ont fait d’Ahmed un grand
artisan de la paix dans la corne de l’Afrique.

Dans une Éthiopie fragilisée par des divisions ethniques, la
privation des libertés et bien d’autres pratiques frisant
l’autoritarisme, Abiy Ahmed marque les esprits. Libération des
prisonniers politiques, loi sur la parité absolue, nomination d’une
opposante à la tête de la commission électorale… Pour le Premier
ministre, il fallait recourir à ces grands remèdes pour guérir les maux
qui jusqu’ici mettaient à mal la paix dans le pays.

Seulement voilà. En concevant toutes ces réformes qui lui ont
pourtant valu le prix Nobel de la Paix en octobre 2019, Abiy Ahmed n’a
pas imaginé qu’un de ses anciens compagnons et frères de la région
d’Oromia se mettrait en embuscade pour lui mettre les crocs en jambe.

« Je ne suis pas d’accord avec la voie qu’il suit », déclarait le 31
décembre dernier, Jawar Mohammed, fondateur du média d’opposition
Oromia Media Network (OMN), alors qu’il
rejoignait l’opposition tout en qualifiant Ahmed de dictateur et en
promettant de le défier aux législatives qui auront lieu cette année.

Avant cette défiance dans les urnes, ces réformes ont déjà été à la
base de la défiance dans la violence. Ainsi qu’en témoigne la mort en
octobre dernier de près de 67 personnes lors des violences nées des
manifestations de partisans de Jawar Mohammed.

Il faudra donc désormais composer avec cette nouvelle donne imposée par le chef de l’OMN pour qu’Abiy Ahmed mène à bien ses réformes. Une tâche aussi difficile qu’une épreuve de funambule.

Bénin : de l’exemplarité à l’autoritarisme ?

Si l’année 2019 marque le 30e anniversaire de la chute du mur de
Berlin, suscitant le discours de la Baule de Mitterrand, élément
déclencheur du processus de démocratisation en Afrique, c’est bien le
pionnier africain de la démocratie des années 1990 qui a focalisé toutes
les attentions au cours de l’année écoulée.

Au commencement, la réforme du code électoral. Adoptée en août 2018
par l’Assemblée nationale et promulguée un mois plus tard, la loi
2018-31 portant code électoral avait modifié les conditions
d‘éligibilité à différentes élections. Et là où le bât a le plus blessé,
c’est au niveau de la caution.

Il faudra par exemple débourser 250 millions de francs CFA (environ 380 000 euros) pour la présidentielle, contre 15 millions auparavant, et 249 millions de francs CFA par liste présentée pour les législatives (contre 8,3 millions auparavant).

Mais auparavant, il y a eu une nouvelle charte des partis politiques
destinée principalement à redéfinir ou réduire le paysage politique en
deux blocs politiques : la majorité et l’opposition.

Des mesures saluées par le camp présidentiel, mais boudées par
l’opposition et des observateurs qui redoutent l’exclusion de certaines
formations ou acteurs politiques.

Et c’est ce qui s’est produit lors des législatives d’avril 2019,
car aucun parti d’opposition ne s‘était conformé aux nouveaux critères.
Conséquence : une grave crise politique qui a fait quelques décès et le
départ en exil de l’ancien président Boni Yayi. Ce dernier a fini par
rentrer en fin décembre.

Jamais le Bénin qui incarnait l’exemplarité même en matière de la
pratique de la démocratie depuis les années 1990 n’avait un offert une
telle image au monde.

Guinée : le « Mandela de l’Afrique de l’Ouest » sur le chemin de la dictature ?

« Je vous garantis que seule la volonté du peuple sera la décision
finale qui s’imposera à nous tous ». Ainsi parlait le président guinéen
Alpha Condé le 31 décembre dernier dans son message de vœux de nouvel an
à son peuple.

Et comme dans toute société démocratique, les urnes restent la
meilleure manière de faire triompher la volonté du peuple. Les Guinéens
devraient ainsi avoir rendez-vous avec les urnes pour approuver ou
rejeter la modification de leur Constitution votée en 2010.

La mouture du nouveau texte fondamental disponible depuis décembre
dernier après avis favorable des présidents de la cour constitutionnelle
et de l’Assemblée nationale entend apporter des modifications majeures.

L‘éventuelle future nouvelle constitution guinéenne stipule par
exemple que le mandat présidentiel devrait passer de cinq à six ans
renouvelable une seule fois, comme on peut lire en son article 40.

Il y a aussi que le Premier ministre devrait cesser de n‘être
responsable que devant le président de la République. Le président de la
Cour constitutionnelle ne devrait plus être élu par les membres de
l’institution pour être directement nommé par le chef de l‘État.

Sur le plan social, la mouture prévoit des mesures comme la gratuité
de l‘éducation pour les enfants jusqu‘à 16 ans. Sans oublier
l’assistance aux personnes âgées.

Pour Alpha Condé qui aime dire avoir hérité d’un pays plutôt que
d’un État, ces réformes sont destinées à « moderniser » les
institutions.

Argumentaire insuffisant pour persuader l’opposition et des
organisations de la société civile dont la campagne « Tournons la page »
qui y voient un stratagème pour M. Condé de briguer un troisième mandat
consécutif. Mieux, « un coup d‘État ».

« Modifier une Constitution ou adopter une nouvelle Constitution
pour se maintenir au pouvoir et empêcher l’alternance démocratique est
une forfaiture, une haute trahison sévèrement condamnée par la
Constitution du 7 mai 2010 et par les organisations africaines »,
expliquait en décembre dernier, Fodé Oussou Fofana, vice-président de
l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG), principal parti d’opposition.

Mais le « Mandela de l’Afrique de l’Ouest » (il s‘était surnommé
ainsi à sa sortie de prison en 2001) s’abstient jusqu’ici de dévoiler
ses intentions quant à la présidentielle de 2020.

Reste à savoir si l’actuel locataire du Palais Sékhoutouréya n’y sera pas obligé par son peuple.

Le débat sur la constitution a déjà fait des victimes humaines. En novembre 2019, plus de trois personnes ont trouvé la mort lors des manifestations de l’opposition contre la réforme constitutionnelle.


Cet article est republié à partir de fr.africanews.com. Lire l’original ici





Limites et durée de mandat des dirigeants africains liés à la stabilité


Les progrès vers l’institutionnalisation de la norme des limites du
mandat présidentiel en Afrique ont été mitigés. Les dirigeants de cinq
pays ont éludé les limites de mandats depuis 2015, portant à 18 le
nombre de pays n’ayant pas de limite de mandat. Par contraste, 21 pays
africains ont maintenu les limites de mandats présidentiels et 15 autres
ont instauré des limites qui n’existaient pas auparavant. Ces limites, à
leur tour, ont de vastes implications:

  • Sur les 21 pays africains qui ont maintenu les limites de mandats, les chefs d’Etat sont au pouvoir depuis 4 ans, en moyenne.
  • Le temps moyen au pouvoir pour les 10 dirigeants africains qui ont éludé les limites de mandats est de 22 ans.
  • Les pays qui n’ont pas de limite de durée tendent à être plus
    instables. Un tiers de ces 18 pays sont confrontés à un conflit armé. En
    revanche, seuls deux des 21 pays qui ont maintenu les limites de
    mandats présidentiels sont en conflit.
  • De fortes variations régionales dans le respect des limites de durée sont évidentes.
    • Huit des dix pays où les limites de mandats ont été supprimées sont en Afrique centrale.
    • La Corne de l’Afrique a la plus forte concentration de pays sans limite de durée de mandat.
    • L’Afrique australe et occidentale ont fait les plus grands progrès dans le respect les limites de durée de mandat.
    • Bien que fragiles, les lois sur les limites de mandat sont maintenant en place pour la plupart des pays d’Afrique du Nord.

Par le Centre d’études stratégiques de l’Afrique (7 mars 2018)





La Guinée va manifester contre son président qui veut rester au pouvoir


Le pays d’Afrique de l’Ouest s’apprête à vivre une journée à haut risque jeudi avec des manifestations massives contre le chef de l’Etat Alpha Condé.

C’est un pays dont on parle rarement : la Guinée, et ses 13 millions d’habitants (dont la moitié a moins de 20 ans). Un pays situé entre le Sénégal, au nord, et la Côte d’Ivoire, au sud. Des manifestations massives s’y préparent, jeudi 26 décembre, dans cette ancienne colonie française, en particulier dans la capitale Conakry. Vingt partis de l’opposition appellent à défiler contre le président Alpha Condé. Ils s’élèvent contre les manœuvres du président pour rester au pouvoir.

À 81 ans, Alpha Condé achève son deuxième mandat, ses dix années à la présidence, et il semble bien décidé à ne pas lâcher les rênes. Jusqu’à présent, c’était seulement une rumeur. Mais le 19 décembre, Alpha Condé est effectivement sorti du bois. Il veut faire adopter par référendum une nouvelle Constitution, qui instituerait un mandat présidentiel de six ans renouvelable (et non plus cinq ans renouvelable). Sous-entendu : les compteurs seraient remis à zéro, et il pourrait alors rester 12 ans de plus ! C’est un classique en Afrique : au cours des 20 dernières années, pas moins de 11 leaders ont ainsi fait modifier la Constitution de leur pays pour se maintenir au pouvoir. L’opposition guinéenne est évidemment vent debout et dénonce “une mascarade”.  

Dix ans au pouvoir, 12 ans de plus ?

Même
si les marches se veulent pacifiques, le risque est élevé de voir la
journée dégénérer, vu les habitudes répressives du pouvoir. Les
premières manifestations ont débuté il y a deux mois, depuis que la
rumeur court de cette révision constitutionnelle. Les affrontements ont déjà fait 20 morts,
et plusieurs leaders de l’opposition ont déjà été brièvement
interpellés. Alpha Condé voit dans ces protestations une “atteinte à
l’ordre public”.

La Guinée est familière, dans son histoire, des répressions violentes. Il y a 10 ans, 157 personnes, opposantes à la junte militaire de l’époque, avaient été tuées lors d’un véritable massacre. À l’origine, Alpha Condé est pourtant un adversaire historique de la dictature militaire. Il a été le premier à instituer un régime véritablement civil en Guinée. Mais comme beaucoup d’autres sur le continent, il s’accroche désormais au pouvoir et refuse l’idée même d’une alternance.

Les visées du parrain russe sur la bauxite

Jusqu’à
présent, la communauté internationale ne dit pas grand-chose ! Pour
l’instant c’est silence radio. Mais les grandes ONG et les principales
institutions internationales (notamment l’ONU) ne cachent plus leur
inquiétude.

Alpha Condé possède un parrain : la Russie de Poutine, qui ne cesse de s’implanter davantage en Afrique noire. L’ambassadeur russe a déjà manifesté son soutien à la réforme constitutionnelle, et on prête aux compagnies russes l’intention de tirer profit de la situation, en obtenant de nouvelles concessions d’exploitation dans le pays. Si les Guinéens sont pauvres, en revanche le sous-sol de la Guinée est riche : de l’or, des diamants, et surtout les premières réserves au monde de bauxite, d’où est extrait l’aluminium.


Cet article est republié à partir de francetvinfo.fr. Lire l’original ici


Mis à jour de l’information

Le front national pour la défense de la constitution (FNDC) a reporté sa marche prévue ce jeudi, 26 novembre. Elle se tiendra finalement le lundi, 6 janvier 2020.

Lisez le communiqué





Réformé, le franc CFA va glisser vers l’Éco


Un accord franco-africain pour un changement de nom du franc CFA vers l’Éco a été décidé. L’annonce a été faite à Abidjan par les présidents Ouattara et Macron.

Le pas presse dans les relations financières entre les pays africains de la zone franc et la France. À l’occasion de la visite du président Macron en Côte d’Ivoire, le président Ouattara a annoncé que huit pays d’Afrique de l’Ouest et la France ont décidé une réforme d’envergure du franc CFA. « Le franc CFA a été un outil essentiel, mais nous devons entreprendre des réformes encore plus ambitieuses afin de consolider notre dynamique de croissance, préserver le pouvoir d’achat de nos populations », a dit le président ivoirien, qui a tenu à préciser qu’il s’agit là d’une « décision prise en toute souveraineté ». Le premier changement va concerner la dénomination de la nouvelle monnaie. Ce sera l’Éco. « Nous avons décidé une réforme du franc CFA avec trois changements majeurs […], dont celui du nom », « l’arrêt de la centralisation de 50 % des réserves au Trésor français ». Point important : il n’y aura désormais plus de représentants français siégeant au sein des instances de la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest (BCEAO).

Réaction du président Emmanuel Macron : il s’est félicité de la « réforme historique majeure » que représente cet accord. « L’Éco verra le jour en 2020, je m’en félicite », a déclaré le président français ce samedi au cours d’une conférence de presse avec son homologue ivoirien Alassane Ouattara. « Le franc CFA était perçu comme l’un des vestiges de la Françafrique », a-t-il estimé, expliquant que c’est en entendant la jeunesse africaine qu’il a voulu engager cette réforme. « Le franc CFA cristallise de nombreuses critiques sur la France. Je vois votre jeunesse qui nous reproche une relation qu’elle juge post-coloniale. Donc rompons les amarres », a-t-il poursuivi.

Une décision « historique » qui accompagne la mise en place de l’Éco

L’annonce
de cet accord intervient au moment où la Communauté économique des
États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) exhorte plus que jamais ses États
membres à poursuivre les efforts visant le respect des critères de
convergence requis pour la mise en œuvre de la monnaie commune si l’on
en croit, cité par l’AFP, Jean-Claude Kassi Brou, président de la
Commission de la Cédéao à la clôture d’un sommet extraordinaire des
chefs d’État à Abuja.

Quel est le cadre prévu à cet effet ? D’abord, ce sera celui des critères clés de convergence. Il est prévu qu’ils restent en dessous de 3 % du Produit intérieur brut quant au déficit, de 10 % pour l’inflation, avec une dette inférieure à 70 % du PIB. En tout cas, tout en se félicitant des « progrès enregistrés », la conférence a demandé au comité ministériel en charge du dossier d’« accélérer » ses efforts en vue de « la création de l’union monétaire de la Cédéao en 2020 ». Les chefs d’État des 15 pays de la région ont par ailleurs adopté le symbole de l’Éco – « EC » – ainsi que le nom de la future banque centrale de la Cédéao, la « Banque centrale de l’Afrique de l’Ouest ».

Pas de calendrier annoncé officiellement…

Interrogée par l’AFP en marge du sommet, Zainab Shamsuna Ahmed, ministre des Finances du Nigeria, poids lourd économique régional, s’est montrée cependant prudente, affirmant que la mise en œuvre de l’Éco en 2020 « n’est pas certaine ». « Il reste encore du travail à faire individuellement pour répondre aux critères de convergence », a-t-elle souligné. Selon la ministre, le principe acté est que les pays doivent avoir rempli ces critères « trois années de suite », ce qui est uniquement le cas du Togo pour l’instant. « Beaucoup de nos pays n’ont pas été en mesure de le faire, il y aura donc une session de surveillance pour évaluer les progrès des pays, puis une autre réunion en juin [2020] pour faire le point », a-t-elle affirmé.

… mais la fin d’une époque

Quoi qu’il en soit, il faut retenir que les changements qui vont être opérés autour du franc CFA confirmés par les présidents Ouattara et Macron mettent fin à une situation particulière au sein de la Cédéao. Jusqu’à présent, les monnaies au sein de l’organisation économique régionale se divisaient en deux camps : d’un côté, celui des huit pays utilisant le franc CFA, dont la parité fixe est arrimée à l’euro, et celui de sept autres pays avec autant de devises qui ne sont pas convertibles entre elles.

Pour rappel, établi en 1945, une quinzaine d’années avant l’indépendance des colonies françaises, la valeur du franc CFA est aujourd’hui indexée sur l’euro (1 euro = 655,96 francs CFA). Les États utilisant le CFA devaient par ailleurs déposer 50 % de leurs réserves en France. En contrepartie, leur convertibilité illimitée avec l’euro leur donnait une crédibilité internationale. C’est désormais terminé pour les réserves et aussi pour la présence de Français dans les organes de gouvernement de la BCEAO, la Banque centrale des États d’Afrique de l’Ouest. Malgré tout, la France va continuer à accorder sa garantie. Voilà donc un chantier monétaire nouveau qui s’ouvre et qui promet bien des débats. Il se greffe à une question sur la table depuis des années, celle d’une devise unique dans la région qui a longtemps suscité les réticences du Nigeria, lequel exigeait que l’éventuelle monnaie commune soit déconnectée du Trésor français. Il semble qu’un verrou soit sur le point de sauter. Reste à savoir les modalités précises des changements opérés au niveau du franc CFA et leur adaptabilité à la nouvelle donne d’une greffe avec d’autres monnaies qui, elles, ne bénéficient pas de la garantie du Trésor français.


Le Point





Quel avenir pour le franc CFA? [Édito François Lenglet]


ÉDITO – La semaine du 16 décembre, Emmanuel Macron se rend en Afrique, où il évoquera notamment l’avenir du franc CFA, une monnaie très critiquée par bon nombre d’États africains comme n’étant plus adaptée aux réalités économiques modernes.


Emmanuel Macron se rend en Afrique la semaine du 16 décembre pour parler de l’avenir du franc CFA. Il doit notamment rencontrer le président de Côte d’Ivoire pour évoquer ce legs de l’histoire coloniale : il s’agit d’une monnaie liée à l’euro par un taux de change fixe, gérée par la France, et utilisée par 14 pays africains (8 en Afrique de l’Ouest dont la Côte d’Ivoire et le Bénin et 4 en Afrique centrale dont le Gabon).

Lancé en 1944, ce franc CFA a été pensé pour
créer un espace économique intégré, principalement au bénéfice des
entreprises françaises. Mais aujourd’hui, la contestation monte dans beaucoup de pays africains, qui veulent retrouver leur souveraineté monétaire.
Le mois dernier, c’est le président du Bénin qui indiquait vouloir
rapatrier les réserves monétaires des pays africains concernés. En Afrique de l’Ouest, il y a même un projet de monnaie commune alternative entre plusieurs pays : l’Eco.

Le CFA déséquilibre les pays

Aujourd’hui,
la moitié des réserves monétaires des pays qui utilisent le franc CFA
son déposées à la Banque de France, qui les rémunère à 0,75%
.
Mais l’influence de la France est aujourd’hui déclinante en Afrique, au
profit de la Chine et de la Russie notamment. La survivance du CFA
apparaît donc un peu baroque aujourd’hui. L’Élysée semble prête à accompagner cette évolution.

Pour les 14 pays concernés, le franc CFA représente à la fois des inconvénients et des avantages. D’abord, l’euro est une monnaie beaucoup trop forte pour les économies africaines,
qui les empêche d’être compétitives sur les marchés extérieurs. À
l’inverse, une monnaie forte facilite leurs importations, ce qui
déséquilibre commercialement les pays de la zone CFA.

L’indépendance monétaire est illusoire

Par ailleurs, le CFA englobe des pays aux réalités très différentes : rien à voir entre l’économie pétrolière du Gabon et une zone sahélienne dominée par l’agriculture. Pour cette raison, le FMI a longtemps été très critique sur la zone franc. 

Mais le CFA est une monnaie stable
: cela empêche les 14 pays qui l’utilisent de connaître l’inflation et
les crises monétaires qui touchent bon nombre de leurs voisins. En
contrepartie du handicap de compétitivité, ils bénéficient de la
crédibilité de l’euro.

Dans l’idéal il faudrait faire évoluer le système vers un taux de change ajustable garanti par la France, avec la souplesse nécessaire pour dévaluer en cas de besoin. Bien sûr, cela ne donnerait pas aux pays africains une souveraineté intégrale. Mais pour des petits pays africains ou européens, l’idée d’une indépendance monétaire totale est largement illusoire dans un monde où les capitaux sont libres : il n’y a que les États-Unis qui en profitent.


Cet article est republié à partir de rtl.fr. Lire l’article original





Guinée : ma CENI et mon fichier, le « trousseau de l’autocrate »


Les signes sont inquiétants, les incertitudes se multiplient, les positions se radicalisent, les enjeux sont importants, les élections à venir en Guinée présentent tous les éléments d’alerte d’une crise majeure.


En affirmant lors d’un meeting de soutien à N’Zérékoré le 16 novembre 2019 qu’il y a désormais « deux Guinée », Alpha Condé ôte le manteau de président censé rassembler tous les guinéens (qu’il n’a d’ailleurs jamais véritablement porté) pour celui d’un autocrate prêt à tout pour se maintenir au pouvoir aux termes de ses deux mandats consécutifs. La réalisation de ce projet plongera le pays dans une profonde instabilité politique, sociale et économique. Tous les scénarios sont ouverts. Revivre les périodes sombres de coup d’état serait tout simplement catastrophique pour ce pays. En affaiblissant les institutions et les instruments légaux de transfert du pouvoir, Alpha Condé fait le travail préalable que tout potentiel putschiste aspire : avoir des raisons valables de passer à l’acte et compter sur la légitimation de la subversion par le peuple.

En Mauritanie, lorsque le général Aziz prend le pouvoir en août 2008,
il affirme vouloir « sauvegarder les acquis démocratiques » en accusant
le président déchu d’avoir violé « les dispositions de la
Constitution », de n’avoir rien fait contre la hausse vertigineuse des
prix des denrées alimentaires, d’avoir « créé un climat propice à la
généralisation de la mauvaise gestion, du détournement des deniers
publics et de la corruption ». La légitimité des coups d’Etat se construit également sur l’idée d’un risque de troubles ethno-tribaux,
en renvoyant l’instabilité potentielle du pays non seulement à une
mauvaise gestion politique et économique, mais aussi à une nature
intrinsèquement anarchiste de la société. L’appropriation de tels
arguments dans le contexte guinéen est aujourd’hui facilitée par les
agissements du pouvoir de Conakry.

Certes, un chef d’Etat peut toujours compter sur des loyalistes au
sein de la grande muette pour protéger son pouvoir mais parfois les
évènements s’accélèrent de façon inattendue. Au Soudan, tout à commencer
par une décision du gouvernement de confier les importations
céréalières au secteur privé, qui a occasionné l’augmentation du prix du pain. Pour des raisons bien calculées, les officiers militaires soudanais ont préféré sacrifier le puissant Omar El Béchir.

La Guinée doit réussir sa première transition pacifique du pouvoir.
Il revient à la majorité rassemblée autour de l’esprit du FNDC de
combattre tous les projets (le plus souvent pilotés par de groupes
d’individus aux intérêts convergents) qui mettraient en péril la paix et
la stabilité du pays. Après avoir été une terre d’accueil pour des milliers de sierra léonais,
libériens et ivoiriens, la Guinée ne peut se permettre de sombrer dans
le chaos parce que tout simplement un petit groupe a décidé de modifier
les règles du jeu démocratique qui garantissent la paix, la stabilité et
le vivre ensemble.

Manipulation du fichier électoral

Depuis le 21 novembre 2019, les opérations d’enrôlement et de révision du fichier électoral se déroulent sur toute l’étendue du territoire national en prélude aux élections législatives du 16 février 2020.

La problématique du fichier électoral a toujours été au centre des
crises de confiance entre les acteurs politiques guinéens. L’opposition
politique n’a cessé de dénoncer les « anomalies » sur le fichier
électoral. Selon Sidya Touré,
président de l’Union des forces républicaines (UFR), le fichier
électoral « comporte plus d’un million et demi d’électeurs fictifs
répartis dans les régions de Kankan, Faranah, Nzérékoré et même Labé ».
C’est aussi l’avis de Aliou Condé,
le secrétaire général de l’Union des forces démocratiques de Guinée
(UFDG) « Le fichier électoral comporte 77 % d’anomalies, trois millions
de personnes, soit la moitié de l’électorat, n’ont pas de données
biométriques ». Si le président de la CENI dément l’existence de fictifs,
en reprenant une des conclusions du rapport d’audit à savoir des
électeurs inscrits mais dont les données biométriques sont manquantes,
les signalements des cas d’enrôlement de mineurs dans les zones acquises
au parti au pouvoir sont nombreux et des preuves vidéos circulent sur les réseaux sociaux depuis le début des opérations.

Déjà en 2015, les révélations de la députée de l’opposition Fatoumata Binta Diallo assurant avoir observé dans la région de Faranah l’enrôlement de mineurs
avaient suscitées de vives réactions des responsables du parti au
pouvoir qualifiant ces accusations d’infondées. Face à l’ampleur des
accusations de l’opposition sur cette question d’enrôlement de mineurs,
le comité technique de suivi du fichier électoral était sorti de sa
léthargie en publiant un rapport
le 12 septembre 2015 avec une recommandation spécifique sur la
question de l’âge : « Renforcer le contrôle de l’âge lors de la
distribution des cartes et prendre les dispositions pour que les
directives de la CENI en la matière s’imposent à tous ».

Le dialogue politique inter-guinéen (Accords du 12 octobre 2016)
avait mis un accent particulier sur le recrutement d’un « cabinet pour
réaliser un audit complet du fichier électoral ». Deux ans après,
débutaient les travaux d’audit du fichier électoral pilotés par des experts de l’Union européenne, de l’OIF et du PNUD. Le 10 octobre 2018,
les membres du comité technique d’audit du fichier électoral ont remis
le rapport d’audit du fichier électoral au ministre de l’Administration
du Territoire et de la Décentralisation. Interrogé sur le contenu du
rapport, le président dudit comité Mamady III Kaba affirmait ceci : « Il
y a effectivement un nombre très élevé, un million cinq cent trente
mille et quelques (1 530 000) électeurs, qui n’ont pas leurs données
biométriques au complet
 ». Sans parler de l’existence d’électeurs
fictifs comme le dénonce l’opposition, Kaba avance une toute autre
explication : « L’équipe d’experts, composée de sept (7) personnes, a
trouvé des raisons pouvant justifier cet état de fait. Et l’une de ces
raisons majeures, il y a eu plusieurs opérateurs qui ont travaillé sur
le fichier électoral guinéen au fil du temps. Les opérateurs
n’utilisaient pas le même système et du coup, le transfert d’un
opérateur à un autre, a altéré certaines données biométriques notamment,
les empreintes. » Pour l’opposition politique, les anomalies sont nombreuses :
« plus de 1 564 388 électeurs inscrits dans le fichier sont sans
empreintes digitales, plus de 3 051 773 d’électeurs non dédoublonnés,
plus de 3.000.000 d’électeurs sont nés entre un 1er janvier et un 1er
juillet, et donc un peu plus de la moitié des électeurs ne peuvent pas
produire un acte d’état civil avec une date de naissance exacte ». Pour
corriger ces anomalies, elle recommande :
« Au vu des doublons persistants du nombre de citoyens sans données
biométriques et de décédés qui pourraient encore figurer dans la base
des données, un contrôle physique de l’ensemble des électeurs s’impose.
Chaque citoyen revient confirmer ou compléter ses données
alphanumériques et biométriques pour qu’il soit maintenu dans la base. »

Malgré toutes les recommandations formulées dans le rapport d’audit
et les dénonciations sur le manque de transparence dans l’établissement
du fichier électoral, l’enrôlement de mineurs reste une pratique
frauduleuse redoutable que le pouvoir en place compte rééditer pour
remporter les élections futures. Pour vanter les efforts de la CENI, un
expert de l’OIF n’avait pas hésité à affirmer lors d’une conférence de
presse tenue à Conakry le 21 octobre 2019 que : « la CENI a fourni
l’effort d’acquérir un autre programme d’appui, c’est le programme ABIS
qui est un programme hautement performant pour la détection des
enrôlements multiples ». Selon cet expert «  l’ABIS permettra aussi à faire d’autres recherches telles que la reconnaissance de l’âge potentiel de l’électeur ». Aujourd’hui, les images montrant l’enrôlement de mineurs
dans la région de la haute Guinée font penser à des actions coordonnées
et encouragées par les autorités locales avec la bénédiction des
commanditaires basés à Conakry.

Face à l’ampleur des dénonciations de ces pratiques sur les réseaux sociaux, le président de la CENI s’est fendu d’un communiqué
ce dimanche 2 décembre 2019 pour annoncer les dispositions prises par
son institution : « le Président de la CENI constate sur les réseaux
sociaux des images faisant allusion à des cas d’enrôlement de mineurs.
La CENI mène des enquêtes et prend déjà des dispositions informatiques
pour déceler et radier tout enregistrement de mineurs. Sur la question
il demande : – Aux présidents de CEPI de faire le tour des CAERLE et de
prendre des dispositions disciplinaires contre tout membre de CAERLE
impliqué dans un cas d’enregistrement illégal. – A ETI-Bull de mener des
enquêtes et de relever de sa fonction tout opérateur de saisie qui
aurait enrôlé un mineur. – Et, le logiciel dont dispose la CENI permet
de faire un audit et de savoir exactement quel operateur et à quel
moment il ou elle a enrôlé un électeur. » En attendant, la fabrique d’un
électorat composé de mineurs se poursuit dans les fiefs du parti au
pouvoir.

L’enrôlement des mineurs, une tradition politique africaine

Si certains observateurs n’hésitent pas à réduire les consultations
électorales à de « simples formalités administratives » qui seraient
dominées par des acteurs politiques se livrant à un « banditisme
électoral plutôt qu’à une compétition loyale », pour reprendre la
formule de Kassoum Tapo l’ancien président de la Commission électorale
nationale indépendante du Mali, il faut toutefois noter que les graves
dysfonctionnements observés dans le déroulement des opérations
d’enrôlement des électeurs en Afrique de façon générale résultent d’une
volonté manifeste des pouvoirs en place de violer les règles du jeu
démocratique. Quantin dans son article intitulé « les élections en Afrique: entre rejet et institutionnalisation » explique
ces dysfonctionnements comme : « des stratégies jouées par les groupes
au pouvoir menacés dans leur hégémonie par une installation durable de
la règle de la majorité».

Pour Mokamanede cité par le chercheur Koné, auteur d’un article intitulé : TIC et processus de démocratisation en Afrique
: pour un système de gestion transparente des élections par
l’expérience du « Parallel Vote Tabulation » (PVT), le processus
électoral en Afrique souffre de deux contraintes : les contraintes
institutionnelles et socio-culturelles. Il note que les structures des
régimes à parti unique n’ont pas changé et les pays africains ne
disposent pas de données démographiques fiables.

L’enrôlement des mineurs est une recette politique très prisée dans
les palais africains où les présidents autocrates cherchent par tous les
moyens à contourner les exigences de transparence et de sincérité des
opérations électorales. Lors des élections générales au Burundi de 2015,
l’opposition ne cessait de dénoncer des distributions massives de
cartes nationales d’identité à des mineurs et aux seuls militants du
parti au pouvoir le CNDD-FDD. Les mêmes pratiques ont été observées en
RDC lors des élections présidentielle et législatives de novembre 2011, dans la province du Katanga (sud-est du pays), où des cartes d’électeur étaient distribués à des enfants d’une dizaine d’années. Dans la déclaration préliminaire de la Mission d’observation de l’Union africaine
aux élections législatives du 20 Décembre 2018 au Togo, les
observateurs n’ont pas manqué de rappeler que l’audit des listes
électorales avait pour but « d’éliminer certaines irrégularités
constatées notamment l’enrôlement des mineurs et les inscriptions
multiples ». Toujours au Togo, la mission d’observation électorale de l’Union européenne
pour l’élection présidentielle de 2010 soulignait déjà des cas
d’enrôlements de mineurs : « La MOE UE a relevé dans tous les CRV
(Centre de révision et de vote ) des régions de la Kara et des Savanes
(nord du pays) observés le jour de la révision supplétive des cas
d’enregistrement d’individus dont l’apparence portait à croire qu’ils
étaient mineurs.» Au Tchad lors de l’élection présidentielle de 2016,
les opposants accusaient l’administration chargée du fichier électoral
d’enrôler des mineurs, des électeurs fictifs et des réfugiés.

Il faut noter que les expériences ont démontré que les processus
électoraux peuvent stimuler ou catalyser des conflits sociaux majeurs.
Dans une publication du bureau des nations unis en Afrique de l’Ouest et
le Sahel intitulée « Comprendre la violence électorale pour mieux la prévenir ».
Nous pouvons lire ceci : « La violence électorale est déclenchée
pendant la période électorale quand des parties en position de force ou
de faiblesse constatent que l’autre partie établit de manière
unilatérale les règles du jeu électoral qui la favorisent. Les sujets
sur lesquels ce déclenchement est plus rapide restent : la mise en place
du fichier électoral, la mise en place de l’administration électorale
et les résultats électoraux. »


Sékou Chérif Diallo
Fondateur/Administrateur
www.guineepolitique.com




Élection présidentielle en Guinée-Bissau : quels enjeux?


La Guinée-Bissau élit son président ce dimanche 24 novembre. Sur les douze candidats, deux favoris : le président sortant José Mario Vaz, et Domingos Simoes Pereira, ex-Premier ministre et chef de la formation dominante au Parlement, le PAIGC.


Près de 700 000 Bissau-Guinéens sont appelés aux urnes ce dimanche 24
novembre entre 7 heures et 17 heures (GMT et heure locale). Les
premières tendances sont attendues en début de semaine. Quant au second
tour, sa date est fixée au 29 décembre.

  • Douze candidats

Les électeurs doivent départager douze candidats – tous des hommes. Les
favoris sont des acteurs des crises politiques qui ont ébranlé
l’ancienne colonie portugaise ces dernières années :

– le président sortant, José Mario Vaz. Exclu du Parti africain pour
l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert (PAIGC), il concourt en
indépendant. Il est le premier chef d’Etat en 25 ans à avoir terminé son
mandat, les autres ayant été tués ou renversés.

–  le Premier ministre entre 2014 et 2015, Domingos Simoes Pereira, chef de l’historique PAIGC,

– Umaro Sissoco Embalo, à la tête d’une dissidence du PAIGC,

– Nuno Nabiam, battu au second tour en 2014.

  • Vote anticipé des militaires

Jeudi 21 novembre, les membres des forces armées et de sécurité ont
donné le coup d’envoi de l’élection présidentielle. Ils ont voté dans
les isoloirs installés dans la cour de la Commission nationale
électorale (CNE). Le scrutin s’est déroulé dans le calme, ont constaté
des journalistes de l’AFP.

  • Une campagne pacifique malgré les tensions

Peu de violence pendant cette campagne qui aura vu des caravanes
tapageuses scander les noms des candidats à travers le pays, et des
posters géants à leur effigie dans la capitale.

Dans une banlieue de Bissau, en campagne ce mercredi 20 novembre, José
Mario Vaz jouait la carte de la différence avec la classe politique
régnante. Il a assuré refuser “de faire le jeu d’un petit groupe de gens qui pillent et volent les deniers publics”.

Au siège du PAIGC paré de banderoles, Dan Yala, une responsable de la campagne de Domingos Simoes Pereira, assure que celui-ci “s’occupera des couches vulnérables comme les femmes, les enfants, les vieillards et les anciens combattants”, règlera le problème crucial des salaires impayés des fonctionnaires et attirera les investisseurs.

José Mario Vaz et Domingos Simoes Pereira promettent de respecter le résultat des urnes. “S’il est transparent et sans tripatouillage”,
assure le président sortant. Les Etats ouest-africains, médiateurs
historiques en Guinée-Bissau, et d’autres ont dépêché leurs
observateurs.

Il faut dire que la crise en cours au sommet du pouvoir a fait douter
jusqu’au bout de la tenue de la présidentielle. La faute à une paralysie
quasi complète depuis des années : la Constitution bissau-guinéenne
neutralise les pouvoirs respectifs du président et du Premier ministre.

  • Le spectre d’une guerre civile

Le président José Mario Vaz a engagé le bras de fer le 28 octobre 2019
en limogeant et remplaçant son Premier ministre Aristides Gomes. Ce
dernier était chargé par la communauté internationale de diriger les
affaires du pays, et d’organiser l’élection présidentielle.

Aristides Gomes refuse de quitter son poste, le président menace de
recourir à la force. La légalité est avec Aristides Gomes, s’accordent
la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao),
l’ONU et l’Union européenne.
Les agissements du président font courir “des risques de guerre civile”,
s’est alarmée la Cédéao. Ce coup d’éclat n’est pas le premier qu’ait
connu le pays lusophone, abonné aux crises institutionnelles.

  • Un pays instable

La Guinée-Bissau a connu quatre putschs (le dernier en 2012), seize
tentatives de coup d’Etat et une valse des gouvernements, depuis son
indépendance en 1974.

L’actuel président José Mario Vaz a été élu en mai 2014, après un accord
entre les autorités de transition et les putschistes. Deux ans plus
tôt, le chef d’état-major dirigeait un coup d’Etat à deux semaines du
second tour de la présidentielle.

La présidence de José Mario Vaz a vécu au rythme des changements de
Premier ministre, et de sa confrontation avec le PAIGC. Élu sous
l’étiquette de ce parti, l’actuel chef de l’État limoge en 2015 Domingos Simoes Pereira du poste de Premier ministre.

Cette paralysie est toujours d’actualité, et pourrait se prolonger si la
présidentielle était remportée par un adversaire de la PAIGC, la majorité parlementaire élue en 2019. À ces tensions politiques s’ajoutent la pauvreté et la corruption endémiques.

  • Narco-trafic et corruption en Guinée-Bissau

Sécurité, développement, démocratie. L’Afrique de l’Ouest, déjà
confrontée à la propagation djihadiste au Mali et au Burkina Faso, ne
souhaite pas que l’instabilité de la Guinée-Bissau se renforce. Ce pays
est fragile. Ses ressources, telles que la bauxite, les phosphates et
les forêts, sont en grande partie inexploitées. Les trafics, de bois
mais aussi de drogue, prospèrent.

L’instabilité et la pauvreté ont favorisé l’implantation de
narcotrafiquants, qui utilisent la Guinée-Bissau comme zone de transit
de la cocaïne entre l’Amérique latine et l’Europe, parfois sous la
protection de hauts gradés de l’armée.

L’ONU a salué les progrès réalisés dans la lutte contre le narco-trafic
depuis l’élection de José Mario Vaz. Mais elle a regretté que, depuis
avril 2018, la volonté des autorités en la matière se soit “peu affermie”. Le pays pâtit d’une corruption endémique : il était classé 172e sur 180 pays en 2018 selon l’indice de perception de la corruption de l’ONG Transparency International.


La Guinée-Bissau en chiffres

1, 87 : million d’habitants en 2018 (selon la Banque mondiale)

3e : producteur africain de noix de cajou

4,3% : prévision de la croissance du PIB en 2019 Banque mondiale.

177e : sur 189 pays dans l’indice de développement humain du Pnud (classement 2018)

70% : de la population vit sous le seuil de pauvreté, avec moins de 2 dollars par jour.

58 ans : l’espérance de vie moyenne


tv5monde




La fétichisation du pouvoir en Afrique : l’exemple de la Guinée [Par Dr Babacar Diop]


La tyrannie par excellence […] repose sur la contrainte, car aucun homme libre ne supporte de son plein gré un tel pouvoir, Aristote, Les politiques, GF Flammarion, 1993, p.310.

Dr Babacar Diop

L’Afrique
est encore frappée par ce que le philosophe sénégalais Djibril Samb
appelle le «syndrome Bâsi», une maladie qui affecte dangereusement les
chefs d’Etat africains et qui est pire que l’épidémie de l’Ebola. Bâsi
était un souverain de l’empire du Ghana qui arriva au pouvoir à un âge
assez avancé ; frappé de cécité qu’il dissimula, il s’accrocha au
pouvoir avec la complicité de son entourage en usant de toutes sortes de
subterfuges (D. Samb, L’Afrique dans le temps du monde, 2010, p.91).

Le
pouvoir est une drogue qui fait perdre la raison. Des chefs d’Etat
africains découvrent subitement, avec déraison, qu’ils sont
irremplaçables et nourrissent la folle ambition de régner à vie sur leur
pays. Ils sont prêts à tout, au nom disent-ils de l’intérêt supérieur
de leur pays : ils tuent des enfants, massacrent leur peuple,
emprisonnent des innocents pour satisfaire des ambitions démesurées et
démoniaques. Ils prétendent terminer les projets qu’ils seraient les
seuls à pouvoir achever. C’est dans cette logique que Djibril Samb
explique cette maladie contagieuse et mortelle des hommes politiques
africains : «Ce syndrome consiste, pour ces chefs d’État […], même parvenus démocratiquement au pouvoir, à capturer l’appareil d’État,
à vassaliser toutes les institutions, à concentrer tous les pouvoirs
entre leurs mains et celles de leurs familles, avant d’instituer une
espèce de «royauté barbare» d’extraction tyrannique fondée sur le règne
du pouvoir personnel. Ce syndrome est d’autant plus justement nommé que
certains chefs d’
Etat africains, n’ayant pourtant exercé le pouvoir au plus que quelques années, se découvrent subitement irremplaçables» (L’Afrique dans le temps du monde,
p.92). Le syndrome Bâsi constitue une politique du pire qui repose sur
la violence brutale et une concentration de tous les pouvoirs entre les
mains d’un individu omnipotent qui devient l’alpha et l’oméga de tout un
peuple soumis à ses désirs, fantasmes et caprices les plus burlesques.

À titre d’illustration, le président Alpha Condé, arrivé au pouvoir à un âge fort avancé, après plusieurs décennies passées dans l’opposition, apparaît comme un nouveau Bâsi des temps modernes. Frappé de cécité politique, il utilise la violence contre son peuple pour s’accrocher à un pouvoir personnel et clanique qui a tourné le dos au peuple guinéen depuis longtemps. Ses partisans entonnent la chanson déjà entendue ailleurs:

«la Guinée a besoin du Pr Alpha Condé, il faut le laisser terminer ses chantiers pour le grand bonheur du peuple guinéen». C’est pourquoi, F. Mitterrand avait bien raison de dire : «Il y a toujours une clientèle pour les dimensions hors série» (Le coup d’Etat permanent, 2010, p.109).

Alpha Condé ne reculera devant aucune honte, il tuera pour le pouvoir, il piétinera le peuple pour conserver les privilèges égoïstes de son clan politique. L’Afrique est malade de ses dirigeants ! C’est la raison pour laquelle, «la question fondamentale qui se pose à l’Afrique […] demeure celle de son leadership politique» (D. Samb, L’Afrique dans le temps  du monde, p.9).

Les manifestions organisées à Conakry et à l’intérieur du pays, entre
le 14 et 16 octobre par le Front national pour la défense de la
Constitution (FNDC) ont déjà fait onze morts, une centaine de blessés
dont certains sont dans un état critique et plus de deux cents
arrestations. Malgré cette situation chaotique, Alpha Condé refuse
d’entendre la voix de la raison ; il est décidé à aller jusqu’au bout de
sa logique meurtrière du troisième mandat en marchant sur des cadavres.
Le peuple de Guinée a trop souffert pour supporter à nouveau qu’on
sacrifie innocemment ses enfants. Il faut préserver le sang sacré des
guinéens. A-t-on oublié le massacre du 28 septembre 2009 qui a fait plus
de 150 morts ? A-t-on oublié la douleur des femmes violées dans
l’enceinte du stade du 28 septembre de Conakry ? A-t-on besoin de
rappeler toutes les luttes du peuple guinéen pour la démocratie et la
dignité ? A-t-on rangé aux oubliettes le rôle pionnier et héroïque de la
Guinée dans les indépendances africaines. Il est évident qu’Alpha Condé
refuse de marcher dans le sens de l’histoire, il veut replonger la
Guinée dans les ténèbres à ce moment décisif de son histoire.

Malgré
la grande défaillance d’un homme face à sa population, la belle
jeunesse de Guinée est décidée à marcher dans le sens l’histoire. Elle
assure la résistance populaire pour arrêter la révision
constitutionnelle qui ouvrirait à Alpha Condé la voie à une candidature
et à un troisième mandat au forceps. Saint-Just disait, avec son cœur
plein de jeunesse dans son Discours sur la Constitution de France :
«La liberté d’un peuple est dans la force et la durée de sa
constitution ; sa liberté périt toujours avec elle, parce qu’elle périt
par des tyrans qui deviennent plus forts que la liberté même» (Œuvres complètes, 2004, p.539).

Au regard de l’idéal de démocratie que nous souhaitons en Afrique, la jeunesse doit soutenir ce noble combat pour dissuader d’autres «Bâsi» en puissance qui observent avec intérêt l’évolution de la situation en Guinée. Sans aucune hésitation, les peuples africains doivent adopter des positions radicales contre les chefs d’État qui seraient tentés par l’idée d’un troisième mandat, en violation flagrante de la Constitution de leur pays. C’est l’occasion d’inviter la jeunesse africaine à s’inspirer de ces propos pleins d’enthousiasme, d’engagement et d’actualité du jeune Abraham Lincoln de Springfield qui venait d’entrer en politique ; il disait à ses compatriotes américains dans un discours du 27 janvier 1838, à la veille de son vingt-neuvième anniversaire: «[Que chaque amoureux de la liberté, que tout citoyen qui veut le bien de sa postérité jure, au nom du sang versé par la révolution, de ne jamais violer en quoi que ce soit les lois du pays et de ne jamais tolérer que d’autres les violent. […], que chaque [citoyen] accepte de soutenir la Constitution et les lois au prix de sa vie, de ses biens et de son honneur sacré ; qu’aucun n’oublie que transgresser la loi, c’est piétiner le sang de son père et mettre en lambeaux sa propre liberté comme celle de ses enfants. […] Bref que [le respect de la loi] devienne la religion politique de la nation ; que les anciens et les jeunes, les riches et les pauvres, les esprits graves et les êtres joyeux, quels que soient leur sexe, leur langue, leur couleur, leur condition, ne cessent jamais de lui offrir des sacrifices sur les autels qui sont les siens» (Le pouvoir des mots. Lettres et discours, 2009, pp.20-21).

Alpha Condé, un passionné de pouvoir absolu en arrive à se considérer
comme la source légitime du pouvoir, oubliant que la légitimité émane
de la volonté de la communauté politique. Pour cet homme, sa propre
volonté et la volonté particulière du clan au pouvoir deviennent la
volonté générale. C’est ce processus de corruption de la politique qui
coupe la légitimité de sa source originaire (la communauté) que le
philosophe argentin Enrique Dussel appelle la «fétichisation du
pouvoir», c’est-à-dire, son absolutisation, et sa divinisation.

La fétichisation du pouvoir est la manifestation de la corruption la plus achevée de la politique. Ainsi, les représentants cessent de représenter le peuple pour incarner des intérêts particuliers, les intérêts du groupe au pouvoir et des lobbies qui les soutiennent. Le pouvoir se corrompt quand il dévie de sa fonction première qui est d’obéir à la volonté générale de la communauté politique. En ce sens, E. Dussel soutient : «La corruption originaire du politique, que nous nommerons le fétichisme du pouvoir, consiste en ce que l’acteur politique (les membres de la communauté politique, qu’ils soient citoyens ou représentants) croit pouvoir affirmer que sa subjectivité propre ou l’institution dans laquelle il accomplit une fonction (et qui lui permet donc d’être appelé «fonctionnaire», qu’il soit président, député, juge militaire policier, est le siège ou la source du pouvoir politique. Ainsi, par exemple, l’État qui s’affirme comme souverain, comme l’instance ultime du pouvoir, représente le fétichisme du pouvoir de l’État et la corruption de tous ceux qui prétendent exercer le pouvoir étatique ainsi défini» (Vingt thèses de politique, 2018, p.29-30). Celui quit nie son peuple s’affirme lui-même comme maître absolu et se divinise. Ainsi, le pouvoir est considéré comme une idole à laquelle on sacrifie la vie du peuple qui devient un instrument, un objet, c’est-à-dire une chose. Le pouvoir fétichisé est un pouvoir corrompu, coupé des préoccupations du peuple pour satisfaire des intérêts particuliers ; c’est aussi un pouvoir oppressif qui use des formes les plus brutales de la violence.

Alpha Condé croit exercer le pouvoir par son « autorité autoréférentielle » (E. Dussel, Vingt thèses de politique, p.30), c’est-à-dire référée à lui-même,
oubliant la communauté politique, «l’instance ultime» qui est la seule
source du pouvoir légitime. Alpha Condé, candidat au pouvoir absolu,
devient à lui seul toute la Guinée, sa volonté particulière vaut la
volonté générale du peuple. Ainsi le pouvoir en Guinée se corrompt, se
fétichise, s’absolutise et se tyrannise. Le pouvoir fétichisé est un
pouvoir despotique qui use de la violence pour exercer sa domination sur
le peuple. Il ne consiste plus en un exercice délégué par la
communauté, mais plutôt en une dictature qui persécute le peuple afin
d’assouvir les ambitions particulières et égoïstes d’une oligarchie
politique corrompue. Dans un tel schéma, ceux qui s’opposent à
l’oppression sont persécutés et réprimés jusqu’à la mort. Ainsi, le
pouvoir fétichisé se nourrit du sang de ceux qui résistent.

Le
peuple doit faire face au monstre afin de construire un nouvel ordre
qui consacre la volonté de la communauté. En Afrique, il est temps que
les despotes comprennent que le peuple est le seul détenteur légitime du
pouvoir. La Guinée doit user de tous les moyens pour se libérer de
cette nouvelle domination. Devant un Bâsi infirme et assoiffé de pouvoir
absolu, il faut un peuple éveillé et prêt à défendre sa liberté à tout
prix. En vérité, «un dictateur n’a pas de concurrent à sa taille tant que le peuple ne relève pas le défi» (Le coup d’État permanent,
2010, p.238). Aujourd’hui, la Guinée engage la lutte pour sa «Seconde
Emancipation» ; ce noble combat mérite une solidarité continentale.

Pour
conclure, les onze victimes des manifestations du 14 au 16 octobre 2019
doivent être élevées au rang de martyrs de la démocratie. À leur
endroit, nous prononçons ces vers de Senghor remplis symboles : « Non,
vous n’êtes pas morts gratuits. Vous êtes les témoins de l’Afrique
immortelle /Vous êtes les témoins du monde nouveau qui sera demain »
(L.S. Senghor, Œuvre poétique, 1990, p.95). La jeunesse africaine est invincible.


Dr Babacar DIOP

Enseignant-chercheur au département de Philosophie de l’Université Cheikh Anta DIOP





Comprendre la crise politique en Guinée-Bissau

Alors que la Guinée-Bissau s’acheminait vers une élection présidentielle, elle s’est subitement enfoncée dans une nouvelle crise politique née du limogeage, le 28 octobre dernier, du Premier ministre Aristides Gomes par le président José Mário Vaz.


Intervenue à quelques semaines seulement de la présidentielle, le 24 novembre, au détriment d’un gouvernement en charge de l’organisation de la compétition électorale, la décision a provoqué une véritable levée de bouclier au niveau régional et international.

Pour l’ONU et la CEDEAO, le gouvernement légitime demeure celui d’Aristide Gomes, et pas celui de Faustino Fudut Imbali, récemment désigné, le 31 octobre par le président Mário Vaz.

L’organisation régionale a même donné un ultimatum aux membres du nouveau “gouvernement illégal” pour qu’ils se retirent et se mettent à la disposition des “institutions légales” du pays sous peine de “sanctions sévères”.

Selon la CEDEAO, l’installation du nouvel appareil exécutif contesté a “aggravé” la crise dans le pays.

Finalement, suites aux multiples pressions, le clan Mário Vaz a dû reculer et le nouveau Premier ministre démissionner ce vendredi.

La CEDEAO se prononçait ce même vendredi sur la situation de ce pays, lors d’un sommet à Niamey.

“Alors que nous sommes indépendants depuis 46 ans, certains acteurs internes et externes prétendent nous imposer une sorte de tutelle internationale”, a déclaré le président Vaz au début de cette nouvelle crise.

Un comité interministériel de la CEDEAO s’est même rendu à
Bissau pour essayer de faire entendre raison au Président dont le mandat
actuel est censé prendre fin le 24 novembre.

Il a été dirigé par
le ministre nigérien des Affaires étrangères et président du Conseil des
ministres de la CEDEAO, Kalla Ankourao.

La délégation était composée du ministre d’État et secrétaire général de la présidence de la République de Guinée, Naby Kiridi Bangoura, président de la Commission de la CEDEAO, de Jean-Claude Kouassi Brou, le commissaire pour la Paix, la Sécurité et les Affaires politiques, de Francis Behanzin et des responsables des forces ECOMIB (Mission de la CEDEAO en Guinée-Bissau).

Il a réaffirmé son soutien au Premier ministre Aristides Gomes, à son
gouvernement et au plan gouvernemental approuvé par l’Assemblée
nationale, qui, selon lui, est la preuve du soutien du parlement guinéen
au gouvernement Gomes.

En outre, le communiqué de la délégation régionale a exhorté les forces de défense et de sécurité à s’abstenir de suivre des “ordres illégaux”.

Rien n’y fit. Le président était resté campé sur sa position, se contentant d’évoquer les raisons qui ont sous-tendu sa décision de limogeage.

Dans un élan de défiance vis-à-vis de la communauté internationale, le président a même convoqué, lundi 05 novembre, “un conseil de défense”, réunissant des militaires y compris le Chef d’Etat-Major Général de l’Armée, évoquant son titre de “commandant en chef des forces armées”.

Les ambassadeurs en soutien au gouvernement limogé

Les ambassadeurs des différents pays accrédités en Guinée-Bissau ont
déclaré qu’il n’y a aucune raison de renverser le gouvernement actuel
car il ne reste que quelques jours pour l’élection présidentielle.

L’avis des ambassadeurs a été exprimé ce lundi (4 novembre) par l’ambassadeur des Etats-Unis Tulinado Mussingi après une brève rencontre avec Aristide Gomes et quelques membres de son gouvernement.

“Nous ne voyons aucune raison de changer de gouvernement puisqu’il ne reste plus que 20 jours avant les élections, mais à partir de maintenant, le gouvernement Aristides continuera à travailler pour le processus démocratique”.

“Aujourd’hui, nous sommes venus déclarer notre soutien au
gouvernement d’Aristides Gomes alors qu’il prépare les élections et nous
continuerons à travailler avec ce gouvernement jusqu’à ce que les
élections présidentielles aient lieu”, a-t-il déclaré.

Réunis ce
vendredi à Niamey, les Chef d’Etats de la CEDEAO ont examiné le rapport
de la Commission de la CEDEAO et réaffirmé leur soutien au Premier
ministre limogé, mandaté de poursuivre l’organisation de l’élection. Il
ont invité la Commission à leur soumettre des noms personnes qui
entraveraient le processus, en vue de leur appliquer sanctions ciblées.

« La Conférence décide de l’envoi à Bissau d’une mission de chefs d’État et de gouvernement dirigée par le président de la conférence [le Nigérien Mahamadou Issoufou] et composée des chefs d’État de la Côte d’Ivoire, de la Gambie, du Ghana, de la Guinée et du Nigeria pour transmettre au président Vaz les décisions de la Conférence. Cette mission sera précédée d’une mission des chefs d’état-major de la CEDEAO», annonce le communiqué sanctionnant les travaux des Chefs d’Etats.

Une histoire d’inimitié

L’inimitié
entre les deux hommes n’est pas nouvelle. Issu pourtant du PAIGC, plus
vieux parti du pays, José Mário Vaz a fini par en être exclu alors que
ses relations avec des représentants dudit parti, majoritaire à
l’Assemblée, n’ont cessé de se dégrader, y compris avec Aristides Gomes,
son nième Premier ministre en 5 ans.

Dans une déclaration rendue publique le vendredi 1er novembre, le Conseil de sécurité de l’ONU a “appelé le président José Mario Vaz et le gouvernement dirigé par le Premier ministre Aristides Gomes, chargé de conduire le processus électoral, à résoudre leurs divergences dans un esprit de respect et de coopération”.

bbc




Révision constitutionnelle au Bénin : un président ne pourra faire “plus de deux mandats dans sa vie”

Le Parlement
béninois a adopté vendredi une révision constitutionnelle prévoyant qu’un
président ne pourra faire “plus de deux mandats dans sa vie”, limitant à trois
le nombre de mandats législatifs et créant un poste de vice-président, dans un
contexte de crise politique.

La loi
portant révision de la Constitution – une première depuis son adoption en
1990-, a été votée à l’unanimité des 83 députés de l’Assemblée.

Une
quarantaine d’articles ont été modifiés en un temps record par les
parlementaires qui avaient indiqué jeudi leur volonté de voter la révision
rapidement.

La
Constitution garde inchangée la limitation à deux du nombre de mandats présidentiels
mais indique que “le Président de la République ne peut faire plus de deux
mandats dans sa vie”. L’ancienne formulation  évoquait un mandat
renouvelable une fois.

Les députés
“ne pourront plus excéder trois mandats”, alors qu’aucune limitation n‘était
jusque-là prévue pour les parlementaires.

Le nouveau
texte prévoit en outre la création d’un poste de vice-président élu en duo
avec le président de la République à la majorité absolue des suffrages lors
d’un scrutin à deux tours.

La patrie “en danger”

L’abolition
de la peine de mort, une meilleure représentation des femmes au Parlement,
l’organisation d‘élections générales (présidentielle, législatives, municipales
et locales) à partir de 2026 sont également prévues par la révision.

Le Parlement
béninois est composé uniquement de députés de la majorité présidentielle,
l’opposition ayant été exclue des législatives du 28 avril dernier à l’origine
d’une crise politique qui avait provoqué des manifestations et des violences
avec une dizaines de morts par balles.

L’opposition
a annoncé son intention d’organiser une nouvelle manifestation pour protester
cette fois contre la révision constitutionnelle, sans en préciser la date.

Jeudi,
plusieurs leaders de l’opposition se sont réunis à l’invitation de l’ancien
président Nicéphore Soglo, pour définir les actions à mener.

“Notre
patrie est en danger”, a déclaré l’ancien chef d’Etat (1991-1996). Le parti des
Forces Cauris pour un Bénin émergent (FCBE) de l’ancien président Boni Yayi
(2006-2016), actuellement en exil, a également fustigé “une révision précipitée
et unilatérale”.

Avant
d’entrer en vigueur, la nouvelle Constitution doit être validée par la Cour
constitutionnelle et être promulguée par le chef de l’Etat.

AFP




Sommet Russie-Afrique à Sotchi : peut-on réellement parler d’un retour des Russes sur le continent ?

Près d’une quarantaine de dirigeants africains sont attendus ces 23 et 24 octobre 2019 à Sotchi en Russie. Vladimir Poutine et son homologue égyptien, Abdel Fattah al-Sissi, organisent un sommet Russie-Afrique inédit censé marquer le grand retour de la Russie sur le continent africain. Voilà pourtant près de vingt ans que ce retour est amorcé, après une décennie de désengagement.

Mars 2006. Vladimir Poutine vient d’entamer son deuxième mandat à la tête de la Russie. La visite est courte, une journée, mais elle est fructueuse. Le président russe est en Algérie et signe des contrats mirobolants. Plus de six milliards de dollars d’armement qu’Alger s’engage à acheter en échange de l’annulation de sa dette évaluée à près de 5 milliards de dollars. Quatre mois plus tard, les géants gaziers russe et algérien, Gazprom et Sonatrach concluent un accord de prospection et d’extraction.
La Russie se propose également de remettre à neuf le réseau algérien de gazoducs . Cet épisode vieux de quinze ans préfigure ce que sera, au cours des années suivantes, le retour de la Russie sur le continent africain.
Dès 2001, Vladimir Poutine, déjà lui, avait envoyé le président de la chambre de commerce et d’industrie de Russie, l’ancien Premier ministre Evgueny Primakov, effectuer une tournée en Afrique du Sud, en Angola, en Namibie et en Tanzanie.
Au cours de cette même décennie 2000, le président russe tentera de reproduire -sans grand succès- avec la Libye de Mouammar Kadhafi les accords conclus avec Alger en 2006.
L’année 2013 sera ensuite marquée par d’énormes contrats d’armement entre Moscou et l’Egypte. La Russie se chargera aussi de construire près d’Alexandrie la première centrale nucléaire égyptienne, chantier estimé à près de 25 milliards de dollars sous la forme d’un prêt.

C’était du jamais vu. Les Soviétiques ont plié bagage du jour au lendemain. 

Un diplomate ghanéen

Dès lors, peut-on parler, en octobre 2019, d’une “reprise” des relations entre la Russie et l’Afrique ? Le sommet de Sotchi sera surtout l’occasion de montrer aux autres acteurs internationaux présents en Afrique qu’il faut aussi compter avec Moscou. Des acteurs au premier rang desquels la Chine, premier partenaire commercial du continent, très friande de grands sommets, à l’image du forum Chine-Afrique qui s’est tenu en septembre 2018 à Pékin en présence d’une cinquantaine de dirigeants.

Désengagement russe en Afrique

Les relations entre la Russie et l’Afrique ont bien connu un trou d’air. Mais il fût assez bref. Une décennie environ. Le désengagement débute avec la fin de l’Union soviétique il y a une trentaine d’années.

La Perestroïka de Mikhaïl Gorbatchev passe aussi par un abandon brutal du continent africain. “C’était du jamais vu. Les Soviétiques ont plié bagage du jour au lendemain et l’URSS a été rayée de la carte”, raconte un fonctionnaire ghanéen au chercheur Arnaud Kalika dans une note d’avril 2019 publiée par l’Institut français de relations internationales (IFRI), ajoutant que ce départ était “une aubaine pour les autres”.

Dans une note publiée par l’observatoire franco-russe, le chercheur Arnaud Dubien relate les propos du ministre russe des Affaires étrangères de Boris Eltsine, Andreï Kozyrev qui, dans les années 90, explique ce désengagement de manière assez abrupte : la priorité de la Russie est alors de “rejoindre la communauté des Etats civilisés”. Arnaud Dubien rapporte ainsi que “dès 1992 (sous la présidence Eltsine, NDLR), Moscou annonce la fermeture de neuf ambassades, de quatre consulats et de treize des vingt centres culturels dont elle disposait sur le continent (…) et les échanges commerciaux entre l’Afrique et la Russie ne représentent plus que 760 millions de dollars en 1993, soit moins de 2% du commerce extérieur du pays”.

Aujourd’hui, le volume des échanges entre la Russie et le continent représente 17 milliards de dollars (200 milliards avec la Chine et 275 avec l’Union européenne), dont 12 milliards pour la seule Afrique du nord, et “nous sommes en train de préparer et de réaliser des projets d’investissement avec des participations russes qui se comptent en milliards de dollars”, a dit Vladimir Poutine ce lundi 21 octobre dans un entretien avec l’agence de presse Tass.

Moscou a finalement plus besoin de l’Afrique (…) que l’Afrique n’a besoin de la Russie.

Arnaud Kalika, chercheur

Ce départ soudain et sans sommation mettra fin à près d’un siècle d’implication russe en Afrique marquée notamment par le quatrième congrès du Kommintern, l’Internationale communiste, qui, en 1922, se penche sur la “question africaine”, voyant là un bon moyen de “marquer des points dans la compétition qui les opposait au camp capitaliste”, explique Arnaud Kalika.

Manifestation concrète, notamment, de cette coopération : des générations de jeunes africains partiront étudier en Russie. Une grande partie des élites du continent aujourd’hui est passée par Moscou ou Saint-Pétersbourg du temps de l’Union soviétique. Parmi cette élite, reste un seul chef d’Etat, l’Angolais João Lourenço.

Aujourd’hui, s’il ne s’agit donc pas à proprement parler d’un retour sur le continent africain, la Russie reste à la traîne. Son départ brutal et sa décennie d’absence ont laissé des traces. Certes, le drapeau du Mozambique est toujours orné de la Kalachnikov emblématique de la Russie, mais si l’implication des Russes en République centrafricaine ces deux dernières années a été largement analysée, notamment en France, comme une volonté d’impérialisme poutinien, la réalité est nettement plus prosaïque. Selon le chercheur Arnaud Kalika, il s’agit essentiellement pour Moscou de répondre à un besoin en ressources naturelles et de pallier les sanctions économiques occidentales qui frappent la Russie depuis l’épisode ukrainien de 2014.
Et le chercheur de conclure : “Nain économique du continent, Moscou a finalement plus besoin de l’Afrique (…) que l’Afrique n’a besoin de la Russie”.

tv5monde




Seules des élections libres et transparentes peuvent assurer l’avenir démocratique en Afrique (Communiqué)

Présent à Niamey du 1er au 4 octobre 2019, à l’occasion du Sommet sur le « Constitutionnalisme pour la consolidation démocratique en Afrique » organisé par le National Democratic Institute (N.D.I), le mouvement Tournons la page félicite le Président de la République du Niger Mahamadou ISSOUFOU pour son attachement au respect de la limitation des mandats et son engagement à organiser des élections présidentielles de 2021 libres et transparentes. Tournons la Page se félicite de ce que son appel à l’alternance démocratique soit entendu par M. ISSOUFOU après une période de remise en cause de l’espace civique marquée par le harcèlement des militants pro-démocratie. Le chef d’Etat nigérien et les anciens Présidents présents à Niamey doivent continuer de promouvoir le principe d’alternance démocratique, acquis indispensable à la paix et au développement de l’Afrique.

Le mouvement « Tournons la page » prend activement part à ce Sommet de haut-niveau aux côtés de plusieurs anciens Chefs d’Etat dont le Béninois Nicéphore Soglo, le Nigérian Jonathan Goodluck, la Centrafricaine Catherine Samba-Panza et le Nigérien Mahamane Ousmane et aux côtés d’activistes et journalistes africains. Lors de la cérémonie d’ouverture, le Président M.Issoufou  a indiqué que quitter le pouvoir pacifiquement en 2021, à la fin de son second et dernier mandat légal, serait sa plus belle réalisation. Offrir au Niger, sa première passation pacifique du pouvoir entre deux Présidents élus, est en effet un exemple à saluer Alors que le bilan de l’alternance pacifique au pouvoir est mitigé sur le continent africain.

Au-delà de cet engagement, TLP invite le Président à tout faire pour assurer un processus électoral libre et transparent en 2021 car la transition démocratique ne peut reposer que sur la mise en place d’un cadre électoral inclusif et équitable.  Par ailleurs, de la République du Niger en sa qualité de Président en exercice de la CEDEAO et hôte du sommet sur le Constitutionnalisme à de tout faire pour convaincre les autres leaders de la sous-région à se plier à l’exigence démocratique de la limitation des mandats. Le développement de l’actualité politique en Guinée nous oblige à lancer cet appel et rappeler qu’il est encore temps d’agir d’écouter le désir d’alternance démocratique exprimé par le peuple guinéen. Il nous faut insister que le non-respect des dispositions constitutionnelles et le refus d’alternance est une source d’instabilité et de conflits sur un continent déjà trop meurtri par la violence.

Tournons la Page félicite les anciens Chefs d’Etats présents au Sommet pour leurs actes ayant permis des passations de pouvoir pacifiques et démocratiques dans leurs pays respectifs. Notre mouvement les invite plus que jamais à partager leurs expériences aux Chefs d’états qui s’accrochent encore au pouvoir et de leur rappeler qu’une autre vie est possible après la présidence.

Tournons la page est reconnaissant au NDI et aux autres partenaires du sommet pour la tenue de cet événement qui nous a permis de porter encore plus haut les demandes légitimes des jeunes, des femmes, et de tous les citoyens africains pour une Afrique débarrassée des dynasties au pouvoir.

Pour qu’il en soit ainsi, Tournons la page demande aux chefs d’Etats Africains en général et à ceux qui connaissent qui ne se sont pas encore approprié le principe de  l’alternance démocratique en particulier :

  • De renoncer aux changements des constitutions pour se maintenir au pouvoir.
  • De mettre en place des conditions qui permettent l’alternance démocratique en s’abstenant de toutes manœuvres qui pourraient empêcher la tenue d’élections libres, transparentes et crédibles ;
  • de relancer le dialogue politique véritablement inclusif partout où cela s’impose en dépassant les points de tensions sur les processus électoraux et d’impliquer toutes les parties à s’investir pour des élections sans heurts ;
  • Inciter les citoyens africains, en particulier les jeunes et les femmes, à s’inscrire massivement sur les listes électorales afin que les institutions mises en place puissent bénéficier d’une légitimité forte auprès des populations ;
  • Garantir les libertés fondamentales de toutes les parties prenantes au processus électoral et notamment de la société civile, garante d’un processus électoral de qualité.

En Afrique, comme ailleurs, il n’y a pas de démocratie sans alternance !

 

Tournons La Page est un mouvement citoyen qui entend rassembler le plus largement possible autour d’une vision et des valeurs communes de respect des droits humains fondamentaux et des principes démocratiques.

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