Dans une déclaration, l’opposition politique guinéenne accuse le président de la Commission Électorale Nationale Indépendante (CENI) Maître Salif Kébé de violation du Code électoral et du serment qu’il a prêté devant la Cour constitutionnelle. Elle exige sa “récusation et son remplacement par une personnalité consensuelle issue du Barreau”.
Lisez l’intégralité de la déclaration
On vous explique pourquoi la crise couve en Guinée
La transmission du pouvoir pose problème dans ce pays d’Afrique de l’Ouest où des consultations ont été lancées pour modifier la Constitution.
La Guinée est en proie depuis plusieurs jours à des protestations meurtrières qui inquiètent les observateurs. La tension est liée à l’élection présidentielle prévue en octobre 2020.
Qui dirige le pays ?
Alpha Condé, 81 ans, est à la tête de la Guinée depuis 2010. L’ancien opposant historique, qui a connu l’exil et la prison est le premier président démocratiquement élu après des années de dictature militaire. Son deuxième et dernier mandat se termine en 2020 avec un bilan relativement positif. Mais on prête au président sortant l’intention de vouloir rester au pouvoir.
Pourquoi la colère gronde ?
La Constitution de Guinée est claire et limite à deux les mandats présidentiels. Pour pouvoir se présenter une troisième fois en octobre 2020, Alpha Condé n’a pas d’autre choix que de modifier la Constitution, une pratique répandue en Afrique. Le débat est lancé dès janvier 2019, mais le projet est aussitôt rejeté par l’opposition. Les adversaires politiques d’Alpha Condé créent un front regroupant des partis, des syndicats et des membres de la société civile pour s’opposer à cette initiative.
La Constitution sera-t-elle modifiée ?
Malgré un refus clair de l’opposition et des manifestations dans la rue, le gouvernement maintient le cap de la réforme constitutionnelle. Lors d’une rencontre fin septembre avec des Guinéens à New York, le président Alpha Condé leur demande explicitement de se “préparer pour le référendum et les élections”. Cette annonce ravive la tension et les appels à la mobilisation sont relancés.
Comment réagit l’opposition ?
L’opposition dénonce un projet de coup d’Etat institutionnel et une dérive “dictatoriale”. Le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), collectif réunissant des partis politiques et des organisations de la société civile, a organisé des manifestations malgré l’interdiction imposée par le gouvernement qui invoque les risques pour la sûreté publique. Pour les opposants, c’est la seule façon de faire pression sur le pouvoir. Depuis, des dizaines d’opposants, dont des dirigeants du mouvement, ont été arrêtés et jugés. Les instigateurs de la contestation ont été condamnés à des peines allant de 6 à 12 ans de prison. La contestation a déjà fait au moins neuf morts, dont un gendarme. Des dizaines de manifestants ont été blessés par balles.
La crise, jusqu’où ?
L’opposition maintient la pression dans un climat d’inquiétude générale. La communauté internationale et les défenseurs des droits humains craignent une escalade. L’histoire de la Guinée indépendante est jalonnée de protestations et de répressions sanglantes. En 2009, plus de 150 personnes avaient été tuées lors d’un rassemblement contre la candidature à la présidentielle du chef de la junte, Moussa Dadis Camara. Plus récemment, des affrontements autour d’élections locales et d’une grève d’enseignants ont fait plusieurs morts en 2018.
Faute de dialogue, le blocage risque d’avoir des répercussions graves sur “la nouvelle démocratie”, selon Human Rights Watch. “On est vraiment au moment où le président Condé et son gouvernement sont face à un choix : soit laisser les libertés s’épanouir, soit aller vers un Etat plus autoritaire”, précise le chercheur de l’ONG Jim Wormington, cité par l’AFP.
Dans un communiqué publié ce mercredi 23 octobre 2019, le président de la Commission de la CEDEAO exprime son inquiétude devant les récents développements en Guinée, caractérisés par une montée des tensions et des violences ayant entrainé des pertes en vies humaines lors des manifestations des 14 et 15 octobre dernier.
Voici l’intégralité du communiqué
Marche de femmes contre un troisième mandat d’Alpha Condé en Guinée
Des centaines de femmes opposées à un troisième mandat du président guinéen Alpha Condé ont défilé mercredi à Conakry, au lendemain de la condamnation des principaux initiateurs des manifestations qui agitent la Guinée depuis une semaine et qui ont fait une dizaine de morts.
Environ 400 femmes, majoritairement vêtues de blanc, ont entamé en fin de matinée une marche devant les mener de Hamdallaye, quartier populaire de Conakry et fief de l’opposition, à l’esplanade du Stade du 28 Septembre, a constaté un correspondant de l’AFP.
Des manifestantes scandaient des slogans tels que «Mort aux assassins de nos enfants» et «Justice pour nos martyrs», ou portaient des pancartes où l’on pouvait notamment lire «Libérez nos leaders injustement condamnés». «Nous marchons contre ces tueries et demandons à M. Alpha Condé de partir maintenant», a expliqué une des manifestantes.
Le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), dont se réclament les manifestantes, a appelé à manifester et à paralyser l’économie à partir du 14 octobre pour faire obstacle à un éventuel troisième mandat du président Condé en 2020. A la suite de cet appel, Conakry et plusieurs villes guinéennes ont été la proie la semaine dernière de heurts violents. Au moins huit manifestants (10 selon l’opposition) et un gendarme ont été tués, des dizaines d’autres blessés.
Abdourahamane Sanoh, coordonnateur de cette alliance de partis d’opposition, de syndicats et de membres de la société civile, a été condamné mardi à un an de prison ferme et quatre autres responsables à six mois ferme.
Alors que les défenseurs des droits de l’homme dénoncent les arrestations arbitraires, un usage excessif de la force par les services de sécurité et le long historique d’impunité de ces dernières, le gouvernement a souligné que la marche des femmes avait été «autorisée, conformément aux textes relatifs à l’exercice des droits fondamentaux, dont la liberté de manifestation». Mais il a fait état d’«informations concordantes et persistantes sur la possible infiltration de la marche des femmes par des personnes décidées à troubler l’ordre public par des actes de violence».
Aucune sortie de crise ne paraît en vue, le FNDC annonçant une nouvelle «grande marche pacifique» jeudi -qui a été autorisée- pour faire échouer le projet prêté au président Condé de briguer sa propre succession en 2020 et de changer à cette fin la Constitution, qui l’empêche de concourir à un troisième mandat.
Depuis une semaine, le pays est agité par un mouvement de contestation visant à faire obstacle à un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé.
Un tribunal de Conakry a condamné à des peines allant de six mois à un an de prison ferme, mardi 22 octobre, les principaux initiateurs des manifestations qui agitent la Guinée depuis une semaine et qui ont fait une dizaine de morts. Le jugement a été accueilli dans la salle par des cris de « Justice corrompue ! ». « C’est un procès inique dirigé par des magistrats sous influence de l’exécutif, s’est indigné Mohamed Traoré, l’un des avocats des prévenus. C’est une manière pour le pouvoir d’intimider la population [et de dire] que quiconque essaie de s’opposer au projet de troisième mandat [du président Alpha Condé] sera jugé et condamné. »
Abdourahamane Sanoh, coordinateur du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), a été condamné à un an de prison ferme et quatre autres responsables à six mois ferme. Trois autres prévenus ont été relaxés. Ils étaient jugés pour avoir causé des troubles graves aux yeux de la justice guinéenne, en appelant à manifester et à paralyser l’économie à partir du 14 octobre pour faire obstacle à un éventuel troisième mandat du président Condé en 2020. Le procureur avait requis contre sept prévenus la peine maximale de cinq ans de prison ferme, et la relaxe du huitième. Les avocats des prévenus ont dit leur intention de faire appel.
A la suite de l’appel à la mobilisation lancé par le FNDC, Conakry et plusieurs villes guinéennes ont été en proie, la semaine dernière, à des heurts violents. Au moins huit manifestants (dix selon l’opposition) et un gendarme ont été tués, des dizaines d’autres blessés. « Nul ne peut être détenu pour avoir organisé ou appelé à une manifestation pacifique. Les leaders du FNDC doivent être libérés immédiatement et sans condition, a réagi François Patuel, chercheur à Amnesty International. Ces condamnations de leaders de la société civile confirment la volonté des autorités guinéennes d’écraser toute forme de dissidence. »
La contestation a aussi donné lieu à l’arrestation et au procès de dizaines de membres du FNDC et de manifestants à travers le pays. Un tribunal de Mamou, à 300 km de Conakry, a condamné lundi trois personnes à un an de prison avec sursis, 20 à six mois avec sursis et en a relaxé 19.
« Semer la pagaille »
Les défenseurs des droits humains dénoncent un usage excessif de la force par les services de sécurité, des arrestations arbitraires et une répression visant à faire taire l’opposition. Le pouvoir dit que le mouvement est illégal faute de déclaration préalable et, pour justifier la répression, invoque les risques causés à la sécurité publique.
La communauté internationale s’alarme du danger d’une escalade. L’ONU, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), les Etats-Unis, l’Union européenne et la France ont appelé au dialogue et, de la part des autorités, au respect des libertés. Mais aucune sortie de crise ne paraît en vue et le FNDC, coalition de partis d’opposition, de syndicats et de membres de la société civile, appelle de nouveau à manifester cette semaine.
Le FNDC entend faire barrage au projet prêté au président Condé de briguer sa propre succession en 2020 et de changer à cette fin la Constitution qui l’empêche de concourir à un troisième mandat. Elle dénonce une dérive de la part de M. Condé, opposant historique dont l’accession au pouvoir, en 2010, avait marqué l’instauration d’un gouvernement civil après des décennies de régimes militaires et autoritaires.
M. Condé ne confirme ni n’infirme les intentions qu’on lui attribue. Mais en septembre, il a lancé des consultations sur la Constitution et, peu après, appelé ses partisans guinéens à New York à se préparer à un référendum et à des élections. Le président guinéen a assuré samedi que la contestation était limitée et accusé ses adversaires de chercher à « semer la pagaille pour décourager les investisseurs ». « Quand on accuse les gendarmes de tirer à balles réelles, sachez que ce sont les manifestants eux-mêmes qui tuent des gens pour ensuite faire accuser le gouvernement et ternir l’image du pays », a-t-il dit.
La date du 28 décembre proposée par le chef de la commission électorale n’étant pas tenable, a annoncé lundi 21 octobre l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), en présence de la Commission électorale nationale indépendante (CENI). L’OIF demande la révision du fichier électoral.
Cette nouvelle intervient en pleine crise politique causée par l’ambition prêtée au président Alpha Condé de briguer sa propre succession en 2020 et de changer à cette fin la Constitution qui l’empêche de concourir à un troisième mandat.
L’actuel Parlement est entré en fonctions en janvier 2014 pour cinq ans. Des élections devaient se tenir fin 2018 ou début 2019, mais n’ont pas eu lieu pour des raisons politiques et techniques, au milieu de querelles exacerbées entre la majorité du président Alpha Condé et l’opposition. En janvier, M. Condé a prolongé le mandat du Parlement jusqu’à l’installation d’une nouvelle législature à une date non spécifiée.
Le chef de la commission électorale, Salif Kébé, avait proposé en septembre la date du 28 décembre pour élire les nouveaux députés. L’opposition avait immédiatement dénoncé un projet irréaliste et servant, selon elle, les desseins présidentiels de M. Condé en 2020.
Lundi, l’envoyé spécial de l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) en Guinée, Tiema Coulibaly, a déclaré devant la presse que la date du 28 décembre était “à reconsidérer”. L’OIF est un acteur accompagnant le processus électoral, responsable de la mise en œuvre des recommandations d’un audit du fichier électoral.
M. Coulibaly a invoqué des raisons techniques comme la mise à jour du fichier électoral, obstacle majeur à la tenue des élections jusqu’alors, et l’entrée en service d’un nouveau logiciel.
Tieman Coulibaly, l’émissaire de l’Organisation Internationale de la Francophonie
La non-tenue du scrutin était acquise avant même la conférence de presse, le président Condé n’ayant pas convoqué les Guinéens aux urnes dans le délai légal de 70 jours.
Ce nouvel atermoiement survient alors que la Guinée est en proie à une agitation meurtrière depuis qu’un collectif de partis d’opposition, de syndicats et de la société civile a appelé à manifester pour faire barrage à un éventuel troisième mandat de M. Condé.
Au moins huit manifestants (dix selon l’opposition) et un gendarme ont été tués la semaine passée. Un tribunal de Conakry doit rendre mardi un jugement très attendu contre huit responsables du collectif. Le parquet a requis vendredi la peine maximale de cinq ans de prison ferme à l’encontre de sept d’entre eux et demandé la relaxe du huitième prévenu.
Petit à petit, Alpha Condé est en train de tomber le masque. Quant à son intention de briguer un nouveau mandat. C’est le moins que l’on puisse dire. En effet, après une semaine de manifestations sur fond de répression violente, le président guinéen, par le biais de la justice, vient de condamner des activistes opposés à son projet de révision constitutionnelle à des peines des peines d’emprisonnement ferme, et cela alors que l’opposition et la société civile appellent à de nouvelles manifestations.
On se demande si le poids de son âge et son obnubilation du troisième mandat ne lui jouent pas des tours
En tout cas, alors que l’on croyait que le sang versé des Guinéens à l’occasion des journées de protestation de la semaine dernière, serait un signal suffisamment fort pour amener le président Condé à jouer balle à terre, c’est avec surprise que l’on a appris ces condamnations en séries. Si ce n’est pas jeter de l’huile sur le feu en aiguisant la polémique, cela y ressemble fort. On a l’impression que l’opposant historique devenu président a opté pour la stratégie de la terre brûlé. Car à entendre le chef de l’Etat guinéen qui, à défaut de se taire, s’est fendu d’arguments si spécieux qui convaincraient difficilement même ses partisans les plus crédules, l’on se demande si le poids de son âge et son obnubilation du troisième mandat ne lui jouent pas des tours au point de lui faire perdre toute lucidité. Car, c’est peu de dire que si le Professeur n’était pas mû par la volonté irrépressible de goûter au fruit défendu du troisième mandat dans le jardin …du Fouta Djallon, la Guinée aurait certainement fait l’économie des pertes en vies humaines de la semaine écoulée. Aussi, loin de lui dénier le droit de recourir à l’arbitrage du peuple, l’on se pose des questions sur l’opportunité d’une telle démarche quand la moitié de la population, voire plus, est déjà vent debout contre son projet. Comment, dans ces conditions, peut-il raisonnablement penser pouvoir organiser un référendum et recueillir l’assentiment du peuple guinéen si ce n’est qu’en Afrique, on n’organise pas des consultations électorales pour les perdre ? C’est pourquoi l’on est fondé à croire, à la suite de l’artiste-musicien reggae man ivoirien, Tiken Jah Fakoly, qu’«Alpha Condé devient fou ». Ce d’autant qu’il continue de jouer l’autruche, en tentant de réduire l’ampleur de la contestation à quelques poches résiduelles de la capitale et dans quelques rares villes, alors que la contagion est en train de gagner visiblement tout le pays.
A 80 ans révolus, Alpha Condé devrait suffisamment craindre le Ciel pour ne pas se laisser aveugler par le pouvoir
Mais moins qu’une attitude irrévérencieuse à l’endroit du chef de l’Etat guinéen, cette interpellation énergique de l’artiste est une invite à un examen de conscience, pour éviter au Professeur de dresser le bûcher contre son peuple. D’autant qu’à 80 ans révolus, Alpha Condé devrait suffisamment craindre le Ciel pour ne pas se laisser aveugler par le pouvoir. Déjà, son obstination à vouloir jouer les prolongations à la tête de l’Etat guinéen, a entraîné la mort de bien de ses compatriotes. Refuser de voir la réalité en face en se croyant suffisamment fort pour résister à la bourrasque de la colère de son peuple, c’est faire preuve d’une folie aventurière ou d’une myopie politique qui pourrait être fatale à son pouvoir. L’expérience humiliante en 2014 de l’ex-président burkinabè, Blaise Compaoré, devrait lui servir de leçon. Mais si malgré ce rappel de l’Histoire, et malgré les appels à la raison de personnalités politiques du continent comme le Sénégalais Abdoulaye Bathily et d’anciens chefs d’Etat africains signataires de l’appel de Niamey, le chef de l’Etat guinéen se montre autiste au point de ne pas reconnaître sa responsabilité et de rejeter la faute à autrui, il faut croire que rien ne le fera reculer dans sa volonté de tenir son référendum querellé pour s’ouvrir le chemin d’un troisième mandat. En tout état de cause, comme le dit l’adage, « il n’est jamais tard pour bien faire ». Et Alpha Condé a encore toutes les cartes en main, pour sortir de l’histoire politique de son pays par la grande porte. Mais, pour paraphraser un autre dicton, s’il choisit malgré tout de semer le vent, qu’il s’attende à récolter la tempête. Car, dans l’histoire du monde, aucun dictateur n’est jamais venu à bout d’un peuple déterminé.
Le mythe savamment monté de l’exception Alpha Condé n’aura duré que le temps d’un bluff, l’espace d’un cillement.
Pourtant, les plus lucides avaient déjà ouvert les yeux pour faire tomber le masque de celui que les officines parisiennes tiennent à faire passer pour « l’opposant historique, le premier président démocratiquement élu, le Mandela de son pays : la Guinée. Hélas, cela ne se pas passe comme ça aujourd’hui : les juments de course sortent des meilleurs haras et les grands leaders, des meilleures agences de communication. Le produit est fignolé, l’emballage impeccable. Mais le manant a vite fait de montrer ses zones d’ombre, ses lignes de faille et sa part cousue de fil blanc.
À l’aise dans une démocratie du troisième type
La baudruche « Mandela guinéen » se dégonfle le jour même de sa confection, je veux dire le jour même de son élection. Péniblement arrivé au second tour avec 18 % contre 44 à son adversaire, Alpha Condé sera déclaré vainqueur (53 %) au second, alors qu’entre-temps, cinq mois se seront écoulés et que le fichier électoral aura été ravagé par un feu venu de nulle part ! Ne rigolons pas : c’est cela, la démocratie du troisième type ! Vérité des urnes ou pas, l’essentiel est fait : il est investi président de la République de Guinée. Sous les doux cieux d’Afrique, point besoin de mérite pour accomplir ce genre de prouesse. Quelques amis bien placés suffisent largement. Et des amis riches et puissants, Alpha Condé en a à revendre : Bernard Kouchner, Michèle Alliot-Marie, Abdou Diouf, Omar Bongo, Denis Sassou Nguesso, François Soudan, Jacob Zuma, François Hollande, Eduardo Dos Santos, Vincent Bolloré, Tony Blair, etc. Des gens de bien, des gens comme il faut, surtout les gens qu’il faut : à eux seuls, ils pèsent plus lourd que la vérité des urnes.
Une réincarnation de ses prédécesseurs
Les plus pessimistes pensaient que notre président-professeur se dépêcherait de nous faire oublier sa désastreuse élection en s’occupant de guérir les Guinéens des méfaits de ses prédécesseurs. C’était mal le connaître. Au contraire, le tribalisme et la corruption, le pouvoir personnel et les violences policières ont repris de plus belle. À croire que Sékou Touré, Lansana Conté et Dadis Camara se sont ligués pour redoubler de férocité. Dix ans de mandat et rien de bien positif. L’économie ? À vau-l’eau. La démocratie et les droits de l’homme ? Le cadet de ses soucis. Son parti, le RPG, fonctionne sur le modèle du PDG de Sékou Touré, le parti-État type. C’est là que se prennent les grandes décisions. Il en est toujours le chef, en violation totale de la Constitution qui lui interdit d’occuper une charge autre que celle de chef de l’État. On puise davantage dans les caisses de l’État qu’au temps de Lansana Conté et la police a la gâchette aussi facile qu’au temps de Dadis Camara. Cent vingt manifestants tués à bout portant, neuf rien que la semaine dernière ! Et tenez-vous bien, les massacres du 28 Septembre n’ont toujours pas fait l’objet d’un procès au grand dam de l’ONU et des organisations comme Amnesty International et Human Rights Watch.
Un président comme les autres et même pire
Bref, les masques sont tombés, « l’opposant historique » est devenu un chef d’État africain comme un autre. Il fait ce qu’il veut, fût-ce au mépris de la morale et du droit. La date des élections législatives n’est toujours pas fixée alors que le mandat des députés a expiré depuis un an et demi. Les municipales, elles ont eu lieu depuis le 4 Février 2018, mais les conseils de quartier, les conseils municipaux de certaines villes et les conseils régionaux ne sont toujours pas formés. C’est vrai que le gouvernement a intérêt à lambiner sinon l’opposition emporterait 5 conseils régionaux sur 8 et à Conakry, l’UFDG de Cellou Dalein Diallo, à elle seule, occuperait 75 sièges de conseil de quartier sur 128. Et puis, de toute façon, « le Mandela de la Guinée » a un autre souci en tête : s’octroyer coûte que coûte un troisième mandat, quitte à marcher sur des monceaux de cadavres. Je vous le disais, (les slogans lénifiants des cabinets de communication n’y peuvent rien), Alpha Condé est un vrai chef d’État africain : le pouvoir, tout le pouvoir, le pouvoir par tous les moyens, le pouvoir pour le pouvoir, le pouvoir pour toujours.
Cinq ans de prison ferme. Le parquet a requis vendredi devant un tribunal de Conakry la peine maximale à l’encontre des principaux initiateurs des manifestations contre un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé. Le tribunal rendra son jugement mardi 22 octobre.
Dans un tribunal placé sous haute protection policière et devant une salle bondée, le procureur Sidy Souleymane Ndiaye a requis contre sept des huit prévenus la même peine d’emprisonnement de cinq ans, assortie d’une amende de deux millions de francs guinéens chacun (194 euros). Il a demandé la relaxe du huitième prévenu.
Les prévenus sont des dirigeants du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), collectif à l’origine de l’appel aux manifestations qui ont secoué Conakry et plusieurs villes de Guinée. Ces manifestations ont fait plusieurs morts en début de semaine.
Le procureur a assimilé cet appel à “un appel à l’insurrection”. Il a parlé de “propos insidieux, graves et dangereux pour l’ordre public”.
Les autorités affirment que le mouvement est illégal, faute de déclaration préalable. Il justifie depuis le début la répression de la contestation par le risque pour la sécurité publique. Le procureur a aussi noté que le FNDC avait appelé à paralyser les mines, les banques et toute l’activité économique.
Les avocats des prévenus ont contesté que leurs clients aient appelé aux troubles et ont plaidé leur relaxe.
“En prison ou en liberté, je me battrai contre la politique d’Alpha Condé pour un troisième mandat, je me battrai pour empêcher Alpha Condé d’avoir un troisième mandat”, a dit un des prévenus, Ibrahima Diallo.
“La Constitution guinéenne n’est pas un chiffon”, a dit une des avocates, Halimatou Camara, qualifiant les partisans d’un troisième mandat de “pyromanes”, dans une mise en garde contre le risque d’escalade si Alpha Condé confirmait les desseins qui lui sont attribués.
La contestation a déjà fait dix morts parmi les manifestants et 70 blessés par balle, et donné lieu à près de 200 arrestations, selon le FNDC. Les autorités parlent de neuf morts.
Le FNDC entend faire barrage au projet prêté au président Condé de faire réviser la Constitution pour se présenter à sa propre succession à l’expiration de son deuxième mandat en octobre 2020. L’actuelle Constitution limite à deux le nombre de mandats.
L’ONG Human Rights Watch a réclamé l’arrêt de la répression, la libération des personnes arrêtées et une enquête sur les violences. Les autorités ont interdit toute manifestation depuis juillet 2018, mais la répression s’est durcie ces derniers jours.
Elle rappelle avoir abondamment dénoncé par le passé “l’usage excessif de la force létale” par les policiers et les gendarmes guinéens lors de manifestations et les actes de brutalité contre les manifestants. Elle fustige “l’impunité quasiment totale” des forces de sécurité.
“L’interdiction systématique de toute manifestation, l’arrestation arbitraire de responsables de la société civile et le recours à la violence pour disperser les manifestants montrent que le gouvernement est prêt à fouler au pied les droits humains pour réprimer la contestation”, écrit-elle.
La communauté internationale s’alarme des tensions actuelles dans un pays pauvre malgré ses importantes ressources minières, à la stabilité incertaine, coutumier des protestations et des répressions extrêmement violentes.
Plongé dans les archives de RFI de 2011 à 2019, nous avons lu 121 articles de presse sur la Guinée qui traitent des sujets : répressions de manifestations, violences policières, arrestations d’opposants, de journalistes et d’ artistes, condamnation d’opposants, manifestants tués, violations de droit de l’homme, torture, violences interethniques, interdiction de manifestations, violation de la liberté de la presse, assassinats ciblés. De façon chronologique, nous vous rappelons les faits qui témoignent du caractère répressif du régime de Alpha Condé.
Avril 2011, sept partisans de l’opposant guinéen Cellou Dalein Diallo ont été condamnés à 1 an de prison ferme pour avoir participé le 3 avril à un rassemblement interdit par le gouverneur de Conakry. Au total, 60 membres de l’UFDG étaient jugés devant les tribunaux.
Mai 2011, au moins 25 morts, plusieurs blessés dont 17 dans un état grave et 21 bâtiments incendiés, c’est le bilan d’un conflit interethnique qui a dégénéré dans le district de Galakpaye, localité du sud-est de la Guinée. Les violences, entre autochtones originaires de la région des Kpèles et des Malinkés venus d’autres parties de la Guinée, ont éclatées dans la nuit du lundi 2 mai au mardi 3 mai 2011. Les tensions entre ethnies sont courantes en Guinée, mais habituellement à l’occasion de scrutins électorales, comme se fut le cas lors de l’élection présidentielle de 2010.
Mai 2011, les trois militaires affectés à la protection rapprochée du leader de l’opposition Cellou Dalein Diallo, ont été condamnés jeudi 12 mai 2011 à deux ans de prison ferme pour « participation à un rassemblement interdit et trouble à l’ordre public ». Ils s’étaient rendus le 3 avril à l’aéroport de Conakry pour accueillir Cellou Dalein Diallo de retour en Guinée après près de quatre mois d’absence
Juillet 2011, des tirs nourris ont été entendus pendant près de trois heures ce mardi 19 juillet 2011 au matin dans le quartier de la résidence du président guinéen Alpha Condé à Conakry. Selon la radio d’Etat guinéenne, la résidence aurait été touchée par une roquette. François Fall, ministre-secrétaire général de la présidence, a déclaré que le président Condé était « sain et sauf ». Alpha Condé qui s’est exprimé dans la matinée appelant au calme et à la vigilance. Les combats auraient fait un mort. A la suite de l’attaque, l’ancien chef d’état-major de l’armée guinéenne, le général Nouhou Thiam a été arrêté, selon sa femme.
Juillet 2011, au lendemain de la tentative d’assassinat contre Alpha Condé, 37 militaires guinéens ont été arrêtés ce mercredi 20 juillet 2011. Il s’agit pour la plupart de proches du général Sékouba Konaté, ancien président du régime de transition, et de l’ancien chef de la junte militaire Moussa Dadis Camara. Tous sont détenus au siège de l’état-major de la gendarmerie nationale à Conakry.
Juillet 2011, le parquet a ouvert une information judiciaire en Guinée après l’attaque contre la résidence du président Alpha Condé mardi dernier. Selon l’avocat général, des véhicules, des armes, des munitions et une importante quantité de drogue ont été saisis. Au total, ce sont maintenant 40 militaires qui ont été interpellés depuis l’assaut. On a appris ce vendredi 22 juillet l’arrestation du colonel Algassimou Barry, longtemps préfet de N’Zérékoré et celle du général Bachir Diallo, ancien directeur de cabinet du général Sékouba Konaté, qui a dirigé la transition.
Septembre 2011, il s’agit d’accusations graves. Le président guinéen Alpha Condé accuse les autorités sénégalaises et gambiennes d’avoir été complices de l’attentat qui l’a visé le 19 juillet 2011. Dans une interview accordée au quotidien sénégalais l’Enquête et à la radio Sud FM, Alpha Condé affirme, ce dimanche 11 septembre 2011, que les gouvernements de ces deux pays ont laissé les préparatifs de cette attaque se dérouler sur leur sol sans réagir. Il dit s’en être déjà ouvert à Madické Niang, le ministre sénégalais des Affaires étrangères, ainsi qu’à son homologue gambien. Lors de cet entretien, Alpha Condé cite le nom de certains guinéens qui selon lui ont été associés d’une manière ou d’une autre aux préparatifs de l’attaque : Bah Oury, le numéro 2 de l’UFDG, le parti de Cellou Dallein Diallo, Tibou Camara ou encore Amadou Oury Diallo dit Sadaka.
Septembre 2011, le gouvernement sénégalais a déclaré le 12 septembre avoir appris « avec surprise » les accusations d’Alpha Condé, qui le soupçonne de complicité dans un attentat dont il est sorti indemne en juillet. Il nie toute implication après un démenti de la présidence sénégalaise. De son côté, le gouvernement gambien a réfuté les accusations du président Alpha Condé.
Septembre 2011, au moins deux personnes ont été tuées hier mardi [ 27 septembre] à Conakry et une trentaine d’autres blessées, selon le bilan officiel des violences qui ont éclaté après l’interdiction d’un rassemblement de l’opposition. Certaines sources avancent le chiffre de quatre morts. Les affrontements ont opposé des partisans de l’opposition aux forces de l’ordre. L’opposition entendait manifester contre l’organisation de législatives le 29 décembre. Elle conteste les modalités d’organisation du scrutin et sa date, décidées selon elle, sans concertation par le gouvernement et la Commission électorale.
Novembre 2011, « La torture reste une pratique courante, voire ordinaire » en Guinée. C’est le constat qui ressort d’un rapport de plusieurs organisations de défense des droits de l’homme dont l’ACAT, Action des chrétiens pour l’abolition de la torture. Ce rapport est le fruit d’une enquête menée pendant un an par ces organisations.
Février 2012, l’opposition politique guinéenne, réunie autour de l’Alliance pour le progrès et la démocratie, a appelé, le lundi 13 février 2012, à une « journée ville morte » dans le pays. Elle accuse le pouvoir de multiplier les violations des droits de l’homme et de liberté.
Août 2012, des violences ont éclaté dans la nuit de vendredi 3 à samedi 4 août entre forces de l’ordre et villageois guerzés et tomas dans la localité de Zogota, proche de N’zérékoré, principale ville de la Guinée forestière. Les forces de l’ordre ont tiré à balles réelles : au moins cinq personnes ont été abattues et plusieurs autres ont été blessées.
Septembre 2012, le président de la Commission nationale électorale indépendante (Ceni) de Guinée, Louceny Camara, a annoncé mercredi 5 septembre qu’il quitterait prochainement ses fonctions, à la faveur d’une réorganisation – en cours – de cette institution chargée d’organiser les prochaines élections législatives. Louceny Camara était contesté par l’opposition qui réclamait son remplacement. Cependant, cette concession est jugée mineure par l’opposition qui est encore loin de vouloir revenir au sein de la Ceni.
Novembre 2012, La directrice nationale du Trésor public de Guinée, Aïssatou Boiro, a été assassinée, ce vendredi 10 novembre dans la soirée à Conakry, par des inconnus qui n’ont pas encore été retrouvés. Elle était l’une des personnalités les plus importantes dans la lutte contre le détournement de fonds au sein des services de l’Etat.
Décembre 2012, la ville de Guéckédou, en Guinée forestière, est secouée depuis le 8 décembre par des manifestations pour réclamer le départ du préfet. Boukary Keita exige, selon ses détracteurs, l’adhésion obligatoire de tous les fonctionnaires de la ville au le Rassemblement du peuple de Guinée (RPG), le parti présidentiel. Il y a eu au moins une vingtaine de blessés lors de ces manifestations.
Février 2013, à trois mois des élections, l’opposition fait de nouveau entendre sa voix. Des milliers d’opposants ont manifesté dans les rues de Conakry, ce lundi 18 février, pour exiger que les élections législatives prévues le 12 mai prochain soient libres et transparentes. Ils réclament notamment le renvoi, sans condition, de l’opérateur sud-africain Way Mark, chargé de mettre à jour le fichier électoral. C’est l’une des rares fois où les autorités ont levé l’interdiction de manifester.
Avril 2013, des affrontements entre forces de l’ordre et manifestants ont marqué la marche de l’opposition organisée à Conakry ce jeudi 18 avril. Les affrontements ont fait une quinzaine de blessés, et sept personnes ont été interpellées, dont deux leaders de l’opposition. L’opposition dénonce les conditions de l’organisation des élections législatives du 30 juin prochain. En février dernier, une précédente marche s’était soldée par des violences qui avaient alors entraîné la mort de neuf personnes.
Avril 2013, les manifestations et les violences ont repris de plus belle à Conakry. Lors d’une manifestation de l’opposition, ce jeudi 25 avril, dans la capitale guinéenne, au moins une personne a été tuée et dix autres blessées par balle. Des milliers de personnes sont descendues dans les rues à l’appel des opposants au président Alpha Condé. Ces derniers dénoncent toujours les conditions d’organisation des élections législatives du 30 juin prochain.
Mai 2013, la contestation se poursuit en Guinée. L’opposition dénonce toujours les conditions d’organisation des législatives du 30 juin prochain. Et réclame le départ de l’opérateur technique Waymark censé réviser le fichier électoral ainsi que la prise en compte du vote des Guinéens de l’étranger. Après la manifestation de jeudi, de nouvelles échaufourrées ont opposé vendredi 3 mai militants de l’opposition et forces de l’ordre dans des quartiers réputés proches de l’opposition à Conakry. Des coups de feu ont éclaté vendredi et il y aurait au moins deux morts. Trois, selon Cellou Dallein Diallo, le président de l’UFDG.
Mai 2013, en Guinée, les pénuries d’eau et d’électricité à Conakry font des dégâts ! La population manifeste tous les soirs dans les quartiers de la capitale pour protester contre ces pénuries qui s’aggravent de jour en jour et qui occasionnent des affrontements entre forces de l’ordre et jeunes dans les quartiers comme ce fut le cas dans la nuit de vendredi 10 mai à samedi 11 mai.
Mai 2013, de nouvelles manifestations de l’opposition ont dégénéré jeudi 23 mai. Des dizaines de milliers de manifestants se sont opposés aux forces de l’ordre, dénonçant un processus électoral trop favorable au président sortant, Alpha Condé. Ces heurts ont fait un mort par balle et plusieurs blessés. Si le scrutin législatif a bien lieu le 30 juin prochain, l’opposition ne sera pas représentée, faute d’avoir présenté une liste.
Mai 2013, les échauffourées entre des jeunes de l’opposition et ceux favorables au pouvoir ont continué ce samedi 25 mai. Des sources médicales dénombrent au moins 15 personnes tuées depuis jeudi. Les premières violences ont éclaté jeudi, lors d’une marche d’opposants protestant contre un décret fixant au 30 juin la date des législatives, et se sont poursuivies vendredi. Face à cette situation, l’action des forces de l’ordre suscite des questions.
Novembre 2013, des violences ont éclaté le mardi 19 novembre 2013 à Fria. Dans cette ville minière de l’Ouest guinéen, des milliers de jeunes gens et de femmes ont laissé éclater leur colère en raison des pénuries récurrentes d’eau et d’électricité. Cette manifestation a fait de nombreux blessés et de dégâts matériels.
Novembre 2013, l’opposition guinéenne entend protester contre ce qu’elle appelle le « hold-up » du pouvoir aux élections législatives du 28 septembre, des élections remportées par le parti du président Alpha Condé. L’appel de l’opposition pour une « journée ville morte », ce lundi 25 novembre, a été relativement suivi. Et la journée a surtout été marquée par des violences.
Décembre 2013, en Guinée, la situation reste tendue à Fria. Mardi, la ville située à environ 160 km à l’est de Conakry, a été le théâtre d’affrontements entre les forces de l’ordre et les manifestants, faisant six blessés légers d’après les hôpitaux. La tension s’accentue dans la cité minière depuis que son usine d’alumine a fermé il y a 20 mois. La ville, qui dépendait entièrement de l’activité de l’usine, continue de s’enfoncer dans la crise. Seul le centre-ville est alimenté en électricité.
Décembre 2013, la criminalité refait surface en Guinée. L’inquiétude grandit dans la population. Le bilan est lourd pour cette fin d’année 2013 : on a enregistré en quelques mois plus d’une vingtaine d’attaques à mains armées dont certaines meurtrières dans le pays.
Décembre 2013, ces dernières années, les cas de violence meurtrière se sont multipliés en Guinée. Lundi 16 décembre, à Kankan, le fief traditionnel du parti présidentiel d’Alpha Condé dans l’est du pays, des affrontements ont fait au moins trois morts depuis samedi. La gendarmerie a été saccagée lors d’une manifestation contre la mort d’un footballeur frappé par les forces de l’ordre. Un cycle de violences alimenté par le règne de l’impunité.
Février 2014, Deux personnes ont été tuées et au 33 légèrement blessées lors d’émeutes, à Conakry, ce mardi 18 février. Ces violences ont eu lieu à la suite du manque chronique de courant électrique en Guinée. Des milliers de jeunes gens ont laissé éclater leur colère dans plusieurs quartiers de la banlieue de Conakry où les forces de l’ordre, déployées en masse, ont affronté les manifestants.
Avril 2015, six personnes ont comparu suite aux violentes manifestations du début de semaine à Conakry, jeudi 16 avril, au tribunal de Mafanco, en banlieue de la capitale. Cinq ont été condamnées à des peines de deux à six mois de détention pour « troubles à l’ordre public ». Dans le même temps, 36 personnes devaient comparaître devant un autre tribunal, à Dixinn, dans une procédure de flagrant délit. Mais le jugement a été reporté à lundi prochain.
Avril 2015, l’opposition avait appelé à manifester à Conakry, ainsi que dans plusieurs villes de l’intérieur du pays, ce jeudi 23 avril, pour contester le calendrier électoral. Elle exige en effet que les élections communales se tiennent avant le scrutin présidentiel prévu en octobre prochain. Mais jeudi soir, l’opposition déplore l’usage de la force par les autorités pour empêcher ce rassemblement qu’elle juge « pacifique ». Une manifestation dans la ville de Labé a fait un mort.
Mai 2015, C’est le bilan de la manifestation nationale organisée lundi 4 mai à Conakry et dans les principales villes du pays pour demander une révision du calendrier électoral. Une trentaine de personnes ont par ailleurs été déférées devant la justice. Une trentaine de personnes arrêtées ont été déférées devant la justice mardi 5 mai. Parmi elles, des mineurs de 11, 12 ou 13 ans.
Juin 2015, la Haute autorité de la communication de Guinée s’est attiré les foudres de la profession cette semaine avec une série de décisions que les journalistes qualifient de liberticides. Après une levée de boucliers de la presse, la HAC a fait marche arrière sur certains points. Mais pour les journalistes, c’est l’ensemble du texte qu’il faudrait modifier. Depuis le 1er juin et jusqu’à l’élection, la Haute autorité de la communication (HAC) entend surveiller de près ce qui se dit et s’écrit dans les médias guinéens.
Août 2015, en Guinée, un journaliste est porté disparu depuis deux semaines. Chérif Diallo travaillait pour le groupe privé Hadafo médias et il est introuvable depuis le 23 juillet dernier. La police ne dispose pas de piste fiable pour le moment, mais ses proches n’excluent pas un enlèvement. Ce mercredi, des dizaines de journalistes et des membres de la société civile guinéenne ont organisé une marche silencieuse à Conakry pour exiger des autorités guinéennes de faire toute la lumière sur cette affaire.
Mai 2016, la douleur s’est abattue sur la principale formation de l’opposition guinéenne. Le parti de l’ancien Premier ministre Cellou Dalein Diallo a enregistré la mort d’un de ses agents de sécurité, en détention depuis mi-février 2016. Mamadou Saïdou Bah avait été arrêté au lendemain d’échauffourées, qui avaient conduit à la mort d’un journaliste indépendant près du siège de l’Union des forces démocratiques de Guinée (UFDG).
Août 2016, Véritable démonstration de force de l’opposition guinéenne ce mardi 16 août, dans les rues de Conakry où, au moins 700 000 personnes selon les organisateurs (moins de 500 000 selon les forces de l’ordre), ont défilé à l’appel de l’opposition pour exiger plus de démocratie, de justice, de sécurité et de liberté face au régime d’Alpha Condé. « Alpha démissionne », c’est par ce slogan que le porte-parole de l’opposition, Aboubacar Sylla, a entamé son discours sur l’esplanade du stade du 28 septembre.
Février 2017, des fumées noires visibles dans la banlieue de Conakry. Depuis ce lundi matin, en Guinée, des affrontements opposent des jeunes aux forces de l’ordre. Des barricades ont été érigées, des véhicules brûlés. Les manifestants réclament la reprise des cours alors que les enseignants sont en grève depuis deux semaines. Les écoles sont fermées, mais un accord a été trouvé dimanche soir entre les syndicats et le gouvernement.
Mars 2017, Un enfant a été tué mardi 14 mars à Guéckédou, en Guinée forestière, et quatre autres personnes ont été blessées, a confirmé le préfet. C’est le bilan de graves incidents qui ont éclaté à l’annonce de la condamnation de l’ancien maire de la ville de Koundou, Désiré Koundouno, qui avait refusé d’entrer au RPG, le parti du président Alpha Condé, avant d’être démis de ses fonctions. Il a été condamné mardi à trois ans de prison ferme pour détournement de fonds. Quand le jugement a été rendu, la foule dispersée, les forces de l’ordre auraient fait usage de leurs armes, selon plusieurs témoignages. Un enfant a été tué. Deux femmes seraient encore à l’hôpital.
Septembre 2017, ce vendredi 22 septembre, cela fait déjà dix jours que les habitants de Boké, dans le nord-ouest du pays, protestent contre l’absence d’électricité et d’eau, notamment. Des violences qui ont déjà fait deux morts et des dizaines de blessés. Jeudi, les manifestants, en majorité des jeunes, s’en sont pris à des bâtiments publics de la ville voisine de Kolaboui. Les manifestants se sont en fait attaqués à des symboles de l’Etat. Les manifestants s’en sont pris aux symboles de l’Etat et aux symboles de l’activité minière. Des édifices publics comme la sous-préfecture, la mairie, ou encore le poste de gendarmerie ont été incendiés.
Novembre 2017, sale temps pour la presse privée guinéenne : des dizaines de journalistes venus soutenir un des leurs, détenu, ont été brutalisés dans une gendarmerie de Conakry. Pour avoir campé dans la cour de l’escadron de gendarmerie de Matam, pour soutenir un des leurs, détenu dans ces locaux, les journalistes guinéens ont eu droit à un traitement inhumain et dégradant. Des bastonnades à l’aide de ceinturons, des coups de matraque, des coups de pied, tout était permis pour faire comprendre aux journalistes qu’ils n’étaient pas les bienvenus.
Novembre 2017, en Guinée, Espace FM est suspendue pour 7 jours. Cette décision émane de la Haute autorité de la communication. L’instance reproche à la radio d’avoir diffusé des informations « susceptibles de porter atteinte à la sécurité de l’Etat ». Dernier épisode d’une semaine de tensions entre autorités et journalistes. Lundi déjà un patron de presse avait été placé en garde à vue et mardi une dizaine de journalistes ont été violentés par des forces de l’ordre.
Novembre 2017, en Guinée, plusieurs manifestations d’élèves ont eu lieu dans de nombreux quartiers de la capitale. Un collégien a été tué ce lundi 20 novembre et plusieurs autres personnes ont été blessées. Les écoliers réclament la reprise des cours, car depuis une semaine, une partie des enseignants du primaire et du secondaire sont en grève et désertent les salles de classe.
Mars 2018, trois jeunes gens ont été assassinés lors de la dernière manifestation de l’opposition, mercredi dernier, ce qui a provoqué un déferlement d’une foule de mères de familles jusque dans les bureaux du médiateur de la République, Mohamed Saïd Fofana. Jeudi 15 mars, au cours d’un point de presse, le parquet de Conakry a essayé de défendre les forces de l’ordre en accusant des manifestants armés dont un a été mis aux arrêts en février 2018.
Mars 2018, en Guinée, une nouvelle journée de mobilisation de l’opposition a eu lieu jeudi 22 mars. Son chef de file, Cellou Dalein Diallo, continue de contester, et ce depuis le 4 février dernier, les résultats des élections locales. A l’appel de l’UFDG, son parti, des militants et sympathisants ont manifesté. Si la marche a été acceptée par les autorités, l’itinéraire lui n’a pas été validé. Tibou Camara, ministre conseiller et émissaire de la présidence a même tenté une médiation de dernière minute au domicile de Cellou Dalein Diallo, avant le départ. Mais le leader de l’UFDG a campé sur ses positions. Dès le début de la manifestation, des affrontements ont éclaté entre manifestants et forces de l’ordre.
Mars 2018, les femmes de l’opposition guinéenne ne décolèrent pas. Elles sont une nouvelle fois descendues par centaines dans les rues pour exprimer leur mécontentement face aux exactions policières et aux tueries de leurs militants dont est victime l’opposition à chacune de ses manifestations. Selon celle-ci, au moins 94 des leurs ont été tués depuis 2011 rien qu’à Conakry par les forces de l’ordre dans les manifestations politiques. Hier, mercredi 28 mars, elles étaient chez le ministre de la Justice pour exiger des enquêtes et des poursuites contre les auteurs des crimes.
Juillet 2018, en Guinée, l’augmentation du prix du carburant à la pompe de 25% n’est pas du goût des forces sociales et des syndicats dont la mobilisation ne faiblit pas depuis le 1er juillet. Hier lundi, des affrontements ont éclaté un peu partout dans la capitale guinéenne entre forces de l’ordre et manifestants à la suite de l’interdiction, par le gouvernorat de la ville de Conakry, d’une marche de protestation dite « marche de la dignité » par ses organisateurs.
Octobre 2018, alors qu’un adolescent a été tué par balle, mardi 23 octobre, en marge de la manifestation interdite de l’opposition guinéenne, Cellou Dalein Diallo, chef de file de l’opposition, a indiqué que sa voiture avait été visée par un tir.
Novembre 2018, le 7 novembre, deux jeunes Guinéens étaient tués devant leur concession dans le quartier de Wanidara, en banlieue de Conakry. Selon les témoignages recueillis par notre correspondant sur place, les proches des victimes imputent le drame à des « militaires portant des bérets rouges ». La diffusion de ce reportage a entraîné l’annulation de l’accréditation de notre confrère par la HAC, la Haute autorité de la communication, après une plainte du ministère de la Défense. Mouctar Bah a tenté, dès le lendemain, de joindre les autorités civiles et militaires pour obtenir leurs commentaires sur ces témoignages, sans succès. La HAC a demandé que la parole soit donnée au ministère de la Défense.
Février 2019, ce samedi 16 février, des affrontements se sont déroulés à Conakry, à l’occasion du retour en Guinée du principal opposant Celou Dallein Diallo, qui revenait d’un voyage en Europe et au Sénégal. Une trentaine de personnes ont été blessées lors d”échauffourées avec les forces de l’ordre près de l’aéroport de Conakry, ce samedi 16 février. L’opposant Celou Dallein Diallo affirme que son véhicule a été pris à partie par des blindés de la police et qu’il a reçu des gaz lacrymogènes à l’intérieur de sa voiture
Juin 2019, en Guinée, le débat sur le changement de Constitution continue à agiter le pays. Les manifestations violentes sont courantes. Ce jeudi 13 juin, c’est Nzérékoré dans le Sud qui a été le théâtre de violents affrontements. Au moins un mort et 28 blessés sont à déplorer. Ce qui devait être, jeudi un rassemblement des partisans du « Non » s’est transformé en affrontements. C’est en tout cas ce qu’indique, le FNDC, le Front National de la défense de la Constitution, créé en avril dernier pour s’opposer à un troisième mandat d’Alpha Condé.
Juin 2019, en Guinée, les députés ont adopté cette semaine une série de textes relatifs à l’organisation des services de défense et de sécurité. La plupart ont fait l’objet d’un large consensus sauf une : la loi relative à l’usage des armes par la gendarmerie. Les députés d’opposition ont voté contre, en mémoire, disent-ils, des nombreuses victimes tuées par balles lors des manifestations et dont les auteurs n’ont jamais été inquiétés. Le texte, qui élargit le cadre de l’usage des armes à feu par les gendarmes, inquiète également les défenseurs des droits de l’homme.
Août 2019, en Guinée, des dizaines de journalistes se sont rassemblés ce lundi dans les rues de Conakry devant le siège de la Haute Autorité de la communication. Ils pointent le harcèlement de l’Etat sur les médias privés. La colère suit de nombreuses convocations dans des commissariats et des tribunaux, ainsi que le placement sous contrôle judiciaire de dizaines de journalistes.
Octobre 2019, l’organisation Human Rights Watch dénonce, dans un rapport publié ce jeudi, la répression du droit à manifester en Guinée. Depuis plus d’un an, le gouvernement interdit de fait les manifestations de rue, explique l’ONG. Les autorités locales auraient interdit au moins 20 manifestations depuis juillet 2018.
Octobre 2019, au moins cinq morts et des dizaines de blessés, selon nos informations, deux décès selon le gouvernement. C’est le bilan provisoire de la première journée de manifestations contre un potentiel 3e mandat du président Alpha Condé en Guinée ce lundi 14 octobre.
Octobre 2019, le procès des membres du FNDC arrêtés ce weekend à Conakry avant des manifestations et de deux autres personnes a débuté ce mercredi 16 octobre. Ils sont poursuivis pour « manœuvres et actes de nature à compromettre la sécurité publique et à occasionner des troubles à l’ordre public ».
Octobre 2019, en Guinée, huit responsables du Front national de défense de la Constitution (FNDC) sont poursuivis pour « manœuvres et actes de nature à compromettre la sécurité publique et à occasionner des troubles à l’ordre public ». La seconde audience a débuté en fin de matinée et le procureur requiert cinq ans de prison contre sept des huit prévenus.
Les manifestations en Guinée ont fait au moins neuf morts, inquiétude internationale
“Environ neuf morts”: les manifestations qui agitent la Guinée depuis lundi ont eu des “conséquences tragiques”, ont reconnu mercredi les autorités de Conakry, alors que des opposants à un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé comparaissent devant la justice et que la communauté internationale s’inquiète de “l’escalade de la tension”.
“Il a été enregistré au total environ neuf cas de décès, dont huit dans notre capitale, ainsi que de nombreux blessés”, a déclaré le ministre de l’Administration du territoire, le général Bouréma Condé. Les autorités avaient jusqu’ici confirmé seulement la mort d’un habitant de Conakry et d’un gendarme.
Ces manifestations “non-autorisées” ont “engendré des conséquences tragiques”, a commenté le ministre, selon qui le “calme est revenu sur la quasi-totalité du territoire”, même si les forces de maintien de l’ordre “s’évertuent à normaliser la situation dans les zones où des échauffourées persistent”.
L’opposition et la société civile militent depuis des mois contre un projet de nouvelle Constitution, évoqué par le pouvoir, qui permettrait à Alpha Condé, 81 ans, de se présenter fin 2020 pour un troisième mandat. Leur nombre est actuellement limité à deux.
Quelques commerces ont timidement rouvert à Matoto, grande agglomération de la capitale, mais les manifestations se poursuivaient dans d’autres quartiers comme Hamdallaye, Cosa, Koloma, Lambanyi et Kobaya. “Ces jeunes sont fous, nous on est fatigués, nous voulons qu’ils rentrent chez eux, mais impossible”, a déclaré une source policière.
– ‘Traitements inhumains’ –
Le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), coalition de partis d’opposition, de syndicats et d’associations de la société civile, à l’origine des manifestations, a dénombré 10 morts côté manifestants, 70 blessés par balle et de près de 200 arrestations. L’AFP a quant à elle pu établir un bilan de sept tués chez les manifestants, selon des proches et des médecins.
Huit des dirigeants du FNDC interpellés samedi ont comparu dans une ambiance tendue devant un tribunal de Conakry. Ils ont dénoncé des traitements inhumains et dégradants au cours de leur garde à vue, notamment le fait d’avoir été confinés dans des cellules exigües ou d’avoir été mis à nu.
Ils encourent de 3 à 5 ans de prison pour avoir tenu des propos de nature à troubler l’ordre public en appelant à manifester, selon l’accusation. Leur défense a annoncé qu’elle plaiderait “non-coupable” lors de la reprise de leur procès vendredi.
A Kindia (ouest), le procureur a requis six mois d’emprisonnement à l’encontre de sept manifestants pour “participation à un attroupement interdit”.
“On continue d’assister à de nombreuses incursions des forces de l’ordre dans les domiciles des citoyens où des femmes ont été agressées physiquement et verbalement et leurs marmites de riz renversées”, a dénoncé le FNDC.
Le gouvernement assure que les forces de sécurité ne font pas usage d’armes à feu et dénonce la diffusion d'”images montées de toute pièces”, en allusion à des vidéos présentées comme reflétant des exactions des services de maintien de l’ordre. Il estime que l’appel à manifester constitue en réalité “une action de déstabilisation de l’Etat (…) et une sérieuse menace pour la sécurité nationale”.
“Les innombrables intimidations du pouvoir doivent cesser, elles ne nous feront pas abandonner le combat pour la démocratie”, a rétorqué le chef de l’opposition politique, Cellou Dalein Diallo.
– ‘Dialogue insuffisant’ –
Ces tensions alarment la communauté internationale, dans ce pays pauvre malgré ses importantes ressources minières, à la stabilité incertaine, coutumier des protestations et des répressions extrêmement violentes.
“L’insuffisance de dialogue (…) provoque une escalade de la tension avec des recours à la violence, susceptible de porter gravement atteinte aux acquis démocratiques”, ont conjointement averti les représentants à Conakry de l’ONU, de la Cédéao, de l’UE, des Etats-Unis et de la France notamment.
“Nous appelons tous les acteurs à renouer le dialogue” et à “faire preuve de calme et de retenue en bannissant tout recours à la violence ou un usage disproportionné de la force”, ont-il dit, en suggérant qu’une “éventuelle libération rapide des personnes détenues de façon préventive serait de nature à aider à l’apaisement”.
Sans dévoiler explicitement ses intentions, M. Condé a lancé en septembre des consultations sur la Constitution. Il s’exprimera “le moment venu”, selon la présidence. Ses desseins ne font cependant aucun doute pour ses adversaires.
“Il a suffi juste que le mot Constitution soit prononcé pour que certains partent dans toutes les interprétations”, a regretté mardi le ministre de l’Administration du Territoire.
En réalité, estiment les défenseurs des droits humains, la répression prolonge le durcissement du régime observé depuis des mois en même temps que se cristallisait l’idée d’un troisième mandat.
Communiqué des Missions en République de Guinée des Nations Unies, de la CEDEAO, de la Délégation de l’Union européenne, des Etats-Unis, de France, de Belgique, d’Italie, d’Allemagne et du Royaume-Uni.
CONAKRY – 16 OCTOBRE 2019 – La crise politique que traverse la République de Guinée est source de préoccupations pour la communauté internationale. L’insuffisance de dialogue entre les différents acteurs politiques provoque une escalade de la tension avec des recours à la violence, susceptible de porter gravement atteinte aux acquis démocratiques. Nous appelons tous les acteurs à renouer le dialogue dans le cadre du comité de suivi.
La communauté internationale rappelle que le droit de manifester est un élément essentiel de l’expression démocratique, au même titre que la liberté de la presse. Il appartient aux différents acteurs de faire preuve de calme et de retenue en bannissant tout recours à la violence ou un usage disproportionné de la force. Il importe que les libertés fondamentales soient respectées et que le gouvernement guinéen veille à garantir le respect de l’Etat de droit.
La communauté internationale est convaincue que la seule voie vers la stabilité, la croissance et la démocratie réside dans l’esprit de collaboration et de consultation de toutes les parties prenantes afin de développer une Guinée pacifique et prospère. Il est ainsi indispensable d’organiser dans les délais légaux des élections, législatives et présidentielles, libres, crédibles et transparentes, dans le respect du cadre constitutionnel et dans un environnement apaisé. Une éventuelle libération rapide des personnes détenues de façon préventive serait de nature à aider à l’apaisement.
De retour du Forum de Rhodes en Grèce, l’ancien Premier ministre de Guinée, Kabine Komara, a rendu visite à L’Opinion pour évoquer la situation politique dans son pays. Il appelle au calme et met le pouvoir devant ses responsabilités à la suite des violences des derniers jours. L’opposition et la société civile manifestent contre le projet d’adoption d’une nouvelle constitution qu’elles perçoivent comme un moyen du président Alpha Condé de se représenter devant les électeurs en 2020 après son deuxième et dernier mandat (conformément à la Constitution actuelle).
Le 16 octobre, les Nations Unies, la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), les délégations de l’Union européenne, des Etats-Unis, de France, de Belgique, d’Italie, d’Allemagne et du Royaume-Uni, ont fait part de leur préoccupation à la suite des violences enregistrées. « L’insuffisance de dialogue entre les différents acteurs politiques provoque une escalade de la tension avec des recours à la violence, susceptible de porter gravement atteinte aux acquis démocratiques, expliquent-elles dans un communiqué conjoint. Nous appelons tous les acteurs à renouer le dialogue… Le droit de manifester est un élément essentiel de l’expression démocratique, au même titre que la liberté de la presse. Il appartient aux différents acteurs de faire preuve de calme et de retenue en bannissant tout recours à la violence ou un usage disproportionné de la force. Il importe que les libertés fondamentales soient respectées et que le gouvernement guinéen veille à garantir le respect de l’Etat de droit.»
En réaction à l’homicide d’au moins quatre personnes lors des manifestations du 14 octobre 2019 contre une éventuelle révision de la Constitution qui permettrait au président guinéen Alpha Condé de se présenter aux prochaines élections, François Patuel, spécialiste de l’Afrique de l’Ouest à Amnesty International, a déclaré :
« L’utilisation généralisée de gaz lacrymogène et de munitions réelles pendant les affrontements entre des manifestant·e·s et les forces de sécurité à Conakry le 14 octobre a fait au moins quatre morts et plusieurs blessés, selon les groupes de défense des droits humains présents en qualité d’observateur. Il faut que les forces de sécurité s’abstiennent d’avoir recours à une force excessive et meurtrière. Les autorités ont signalé au moins deux morts, dont un gendarme dans la ville de Mamou (centre du pays).
« Le recours à la force meurtrière contre des manifestant·e·s et des passant·e·s et l’arrestation des organisateurs des rassemblements sont une tentative honteuse des autorités guinéennes d’étouffer la dissidence par tous les moyens. Il faut que ces actes fassent l’objet d’une enquête indépendante et que les auteurs présumés soient traduits en justice dans le cadre de procès équitables.
« Alors que le climat politique est déjà tendu, les homicides du 14 octobre et les arrestations arbitraires d’au moins 14 personnes le week-end précédent ne font qu’ajouter de l’huile sur le feu dans un pays où plus de 100 personnes sont mortes lors de manifestations ces 10 dernières années.
« Au vu de ce bilan désastreux, il faut que les autorités prennent des mesures immédiates pour briser le cercle vicieux de la violence avant que la situation ne devienne incontrôlable. Elles doivent commencer par faire en sorte que les personnes arrêtées arbitrairement pour avoir organisé les manifestations soient libérées immédiatement et sans condition et prendre toutes les mesures nécessaires pour faciliter les manifestations pacifiques et permettre à la population de s’exprimer pacifiquement sans craindre de représailles. »
Complément d’information
Au moins 14 personnes, y compris des membres du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC) et certains de leurs proches, ont été arrêtées au cours du week-end précédant les manifestations du 14 octobre contre la révision de la Constitution en Guinée. Le 14 octobre à midi, elles n’avaient pas encore été inculpées.
Le 12 octobre, la police a interrompu une réunion au domicile du coordonnateur national du FNDC, Abdourahamane Sanoh, et l’a arrêté avec au moins cinq autres personnes, notamment le secrétaire général de l’Association des blogueurs de Guinée (ABLOGUI), Abdoulaye Oumou Sowh, l’administrateur général du mouvement Balai citoyen, Sékou Koundono, et le coordonnateur de Tournons la page (TLP), Ibrahima Diallo. Le frère d’Abdourahmane Sanoh a été arrêté alors qu’il était à la recherche de celui-ci dans différents centres de détention. Après avoir rencontré leurs avocats le 12 octobre, ils ont été emmenés dans un centre de détention inconnu.
Le 13 octobre, sept autres personnes, dont le secrétaire général de la section jeunesse de l’Union des forces républicaines (UFR), Badara Koné, ont été arrêtées au domicile de ce dernier, dans le quartier de Matam. Elles sont détenues à la brigade de recherche, dans le quartier de Kenien.
Le même jour, le procureur du tribunal de Dixinn a accusé le FNDC de « graves déclarations portant atteinte à la sécurité publique » et a annoncé qu’une procédure juridique serait engagée afin d’« arrêter quiconque ayant commis des actes ou entrepris des manœuvres visant à compromettre la sécurité publique ou aboutissant à de graves troubles de l’ordre public ».
Les groupes locaux de défense des droits humains ayant observé les manifestations du 14 octobre ont signalé des affrontements entre des manifestant·e·s et des membres des forces de sécurité, qui auraient fait au moins quatre morts par balle et plusieurs blessés par munitions réelles à Sonfonia et Wanindara, deux quartiers de la capitale, Conakry. Dans une déclaration publique, les autorités guinéennes ont reconnu deux décès : celui d’un homme à Sonfonia et celui d’un gendarme à Matam.
La Constitution guinéenne en vigueur interdit au président Alpha Condé de se présenter pour un troisième mandat.
Alors que le pays compte encore ses morts après les premières manifestations contre un éventuel troisième mandat d’Alpha Condé, les pistes de sortie de crise politique se font rares.
La Guinée semble s’enfoncer dans l’instabilité. Au moins cinq manifestants et un gendarme ont été tués lundi dans des heurts entre les forces de sécurité massivement déployées dans la capitale Conakry et des milliers d’opposants à un éventuel troisième mandat de l’actuel président Alpha Condé, rapporte l’AFP dans un dernier bilan. Alors que le pays compte encore ses morts, les sources surgissent de toutes parts, rendant difficile le travail de vérification des chiffres tant les images et les vidéos circulent rapidement de plusieurs endroits à l’intérieur du pays et à l’extérieur aussi.
Appel à manifester
Ce que l’on sait, c’est que des milliers de Guinéens sont descendus dans les rues lundi et mardi à l’appel d’un collectif d’opposition et de la société civile. D’après de nombreux témoignages publiés sur les réseaux sociaux ou les médias, des violences ont émaillé les différents cortèges. L’Agence France-Presse relate que « des centaines de jeunes très mobiles ont érigé des barricades, brûlé des pneus et lancé des pierres sur les policiers et gendarmes à nouveau massivement déployés à Cosa, Koloma ou encore Bambéto, quartiers périphériques de la capitale et fiefs de l’opposition ». Ajoutant que le bilan « des heurts s’est encore alourdi, passant à cinq manifestants tués après la mort d’un chauffeur de 27 ans, atteint par balle à l’abdomen, selon le médecin qui l’a traité et son père ». Les autorités ont fait état, elles, de deux morts, dont un gendarme.
En effet, le gouvernement avait prévenu qu’il ne céderait « pas le moindre centimètre carré au règne de l’anarchie ». Le ministre de l’Intérieur, le général Bouréma Condé, a indiqué que la mobilisation s’était limitée à « quelques regroupements et échauffourées ». Plusieurs personnes ont été arrêtées et « les forces de l’ordre maîtrisent globalement la situation », a-t-il dit dans un communiqué. Et pourtant c’est une tout autre histoire que racontent plusieurs Guinéens.
« Comme d’habitude, des forces de sécurité ont débarqué à Conakry en partance de Kindia pour aller réprimer les manifestants à Conakry, plus particulièrement dans la banlieue de la commune de Ratoma, Hambdallaye, Bambéto, Cosa, Sonfonia, etc. Il faut également souligner que les acteurs politiques sont confinés chez eux par la police et la gendarmerie ; des acteurs de la société civile (membre du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), dont Abdourahmane Sano (coordinateur de la PCUD et du FNDC) ; Sékou Koundouno (coordinateur du Balai Citoyen), Alpha Soumah (Bill de Sam, membre de l’UFR), Ibrahima Diallo, Badra Koné (2e vice-maire de la commune de Matam, Malal Diallo (l’un des responsables du mouvement politique MoDeL, Élie Kamano (artiste) ont été arrêtés manu militari dans leurs domiciles pour certains, et d’autres lors des manifestations. Tout cela, sans compter les jeunes manifestants arrêtés à Conakry et à l’intérieur du pays », explique au Point Afrique Bah Oumar Rafiou, un agent administratif membre actif de la société civile actuellement basé en Belgique. Photos et vidéos reçues depuis son pays d’origine, ce dernier a confié que les Guinéens se préparaient depuis un long moment à de telles actions.
« Lors de son dernier séjour aux États-Unis, le chef de l’État, Alpha Condé, avait exprimé sa volonté de changer la Constitution en appelant ses militants à se préparer pour le référendum et les législatives, alors qu’il avait instruit son Premier ministre à mener des consultations afin de donner l’opportunité aux acteurs politiques, organisations de la société civile et syndicats d’exprimer leurs avis sur la Constitution », poursuit-il. « Mais les principaux acteurs politiques ont refusé de participer parce qu’ils estiment que c’est légitimer un projet qu’ils considèrent être une farce », conclut-il.
Éventuel troisième mandat
En effet, la tension n’a cessé de monter depuis l’appel à la manifestation lancé il y a une semaine par le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC). Cette coalition rassemblant des partis d’opposition, des syndicats et des membres de la société civile s’oppose résolument à une révision de la Constitution évoquée par le pouvoir. Elle permettrait à Alpha Condé de se présenter pour un troisième mandat, alors que la Constitution en limite le nombre à deux.
L’opposition s’attend à ce qu’il officialise bientôt la tenue d’un référendum constitutionnel. Elle dénonce un projet de coup d’État institutionnel et la dérive « dictatoriale » de celui qui fut lui-même un opposant historique ayant connu la prison pour son engagement contre différents régimes autoritaires, avant de devenir le premier président démocratiquement élu de cette ex-colonie française d’Afrique de l’Ouest.
Le point de départ de ces mobilisations ? L’appel du président Alpha Condé à devoir réécrire la Constitution actuelle après des consultations générales. Mais pas seulement. Le contexte est très complexe, puisque l’article 27 de la Constitution guinéenne indique que « la durée du mandat présidentiel est de cinq ans, renouvelable une fois. En aucun cas, nul ne peut exercer plus de deux mandats présidentiels, consécutifs ou non. » Seulement, Alpha Condé, élu une première fois en 2010 puis réélu en 2015, achèvera son deuxième et dernier mandat en 2020. Il lui est impossible de modifier l’article 27 en cas de révision constitutionnelle, car « le nombre et la durée des mandats du président ne peuvent faire l’objet d’une révision » (article 154). Reste alors, pour le dirigeant guinéen, la possibilité de réécrire une nouvelle Constitution ensuite, de faire accepter ce projet par le Conseil constitutionnel, en passant par l’avis consultatif des députés, puis d’organiser un référendum afin que le peuple valide le texte.
Un contexte explosif
Plusieurs facteurs expliquent la dégradation de la situation en Guinée : d’une part, malgré une amélioration par rapport aux sombres régimes précédents, des dizaines de manifestants ont été abattus par les forces de sécurité depuis l’accession du président Alpha Condé à la présidence en 2010. Plusieurs policiers et gendarmes ont été tués par des manifestants. Depuis plus d’un an, le gouvernement interdit de fait les manifestations de rue, dit l’ONG Human Rights Watch. « Étant donné leur bilan désastreux [en termes de respect des libertés, NDLR], les autorités doivent prendre des mesures immédiates pour briser le cycle de la violence avant qu’il n’échappe à tout contrôle », a dit Amnesty International dans un communiqué.
Les forces de sécurité guinéennes déployées massivement à Conakry ont dispersé des rassemblements en cours de formation à plusieurs endroits de la capitale lundi matin, à l’aube d’une journée de mobilisation politique à hauts risques, a constaté un correspondant de l’AFP.
Aux premières heures d’une journée de mobilisation des opposants à un éventuel troisième mandat du président guinéen Alpha Condé, deux journalistes internautes ont fait état auprès d’un correspondant de l’AFP de deux jeunes blessés par balles dans un des quartiers de la capitale, sans que ces informations aient pu être confirmées par ailleurs.
Le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), une coalition rassemblant des partis d’opposition, des syndicats et des membres de la société civile, a appelé les Guinéens à descendre dans la rue ce lundi à partir de 06H00 pour s’opposer à une révision de la Constitution évoquée par le pouvoir.
Elle permettrait à Alpha Condé, 81 ans, de se présenter fin 2020 pour un troisième mandat, alors que la Constitution en limite actuellement le nombre à deux.
La tension n’a cessé de monter ces derniers jours, avivant l’inquiétude dans un pays où les manifestations prennent communément une tournure violente. Les autorités ont fait arrêter une vingtaine de membres de la société civile et de l’opposition depuis samedi, selon le FNDC.
Les policiers et les gendarmes se sont déployés massivement dans la capitale, intervenant pour couper court à toute velléité de rassemblement, a constaté un correspondant de l’AFP.
A Cosa, un des quartiers chauds de la capitale et fief de l’opposition, les gendarmes ont tiré des grenades assourdissantes et lacrymogènes contre des partisans du FNDC qui commençaient à converger.
Les principales figures du Front national pour la défense de la Constitution, en Guinée, sont toujours détenues. Au moins six hommes ont été interpellés, samedi matin et leur avocat ne sait toujours pas où ils se trouvent.
Où les leaders du FNDC interpellés ont-ils été emmenés ? C’est la question que se pose leur avocat. Maître Salifou Béavogui ne les a pas vus depuis qu’ils ont été emmenés, samedi soir 12 octobre au soir après avoir été interrogés par la police judiciaire.
« Depuis hier, nous ne savons pas où ils se trouvent, nous sommes très inquiets. Est-ce qu’ils sont en train de les réinterroger ? Qu’est-ce qu’il se passe ? Nous quittons clairement le droit pour entrer dans une situation de non-droit », déplore l’avocat.
Selon les autorités guinéennes, ces interpellations se sont produites dans le cadre d’une procédure judiciaire ouverte suite à une dénonciation des ministres de la Sécurité et de l’Administration du territoire après les appels à la mobilisation, lancés par des membres de la société civile.
Aucune lettre d’intention rédigée selon le gouvernement
Les autorités précisent que les rapports d’enquêtes doivent être remis ce lundi 14 octobre au procureur, qui décidera de la suite à donner à la procédure.
Le porte-parole du gouvernement, Aboubacar Sylla, explique que les manifestations sont autorisées en Guinée, mais dans certaines conditions. « Il faut faire une déclaration d’intention au niveau des autorités locales qui sont concernées par le droit de manifestation. On doit définir, s’il s’agit d’une marche, quel est son itinéraire et quel est son objectif, explique-t-il. En ce qui concerne les manifestations projetées au 14 octobre, aucune lettre d’intention n’a été rédigée ».
Le FNDC appelle à la mobilisation à partir de ce lundi contre un éventuel 3e mandat du président Alpha Condé. Aboubacar Sylla précise que la sécurité sera assurée par des éléments de la police et de la gendarmerie, uniquement équipés d’armes conventionnelles de maintien de l’ordre, comme des matraques ou du gaz lacrymogène. Les militaires, eux, ont reçu l’ordre de rester cantonnés dans les casernes.