Durée de la transition: pour le FNDC «[] il est inadmissible, inconcevable et inacceptable que le CNT entérine cette proposition de la junte[]»


Politique


Après l’adresse à la nation de Colonel Mamadi Doumbouya, le chef de la junte, annonçant la durée de la transition qu’il “souhaiterait” de 39 mois, le FNDC, dans un communiqué, désapprouve cette proposition et dénonce « cette attitude des autorités de la transition qui constitue une menace pour la paix et l’unité nationale dans notre pays ».


Lire Mamadi Doumbouya souhaite une transition de 39 mois


Communiqué

La Coordination Nationale du FNDC a suivi avec regret l’adresse à la nation du président de la transition ce samedi 30 avril 2022 proposant une durée de la transition en violation flagrante de l’article 77 de la charte. 

Dans le souci de la consolidation de la paix, la cohésion sociale et l’unité nationale, la Coordination Nationale du FNDC considère que le discours du président de la transition est inopportun dans un contexte où les acteurs sociopolitiques exigent la mise en place d’un cadre de dialogue inclusif sous la supervision de la communauté internationale.

La Coordination Nationale du FNDC prend à témoin l’opinion nationale et internationale de cette attitude des autorités de la transition qui constitue une menace pour la paix et l’unité nationale dans notre pays. 

La Coordination Nationale du FNDC rappelle au président du CNRD qu’il est inadmissible, inconcevable et inacceptable que le Conseil National de la Transition entérine cette proposition de la junte qui ne repose sur aucun fondement juridique. 

La Coordination nationale du FNDC rappelle aux membres du CNT qu’ils sont individuellement et collectivement co-responsables de la paix et de la stabilité de notre pays en cette période particulièrement sensible de la transition.

La Coordination Nationale du FNDC appelle les citoyens guinéens pro  démocratie à rester mobilisés sur chaque périmètre du territoire national pour sauver la transition en cours. Dans les jours à venir, la Coordination Nationale du FNDC fera une adresse importante au Peuple de Guinée épris de paix, de justice sociale et de démocratie. 

Ensemble unis et solidaires, nous vaincrons ! 

Conakry, le 01 Mai 2022 

La Coordination Nationale du FNDC





Crimes et exactions: le cabinet «Bourdon et associés» transmet des preuves et une liste de personnalités au Procureur général

Politique/Justice


Le cabinet d’avocats « Bourdon et associés » en qualité de Conseils du FNDC (Front national pour la défense de la Constitution) vient de transmettre au Procureur général près la cour d’appel de Conakry un « premier lot de preuves des dénonciations des crimes et exactions commis sous le régime d’Alpha Condé et transmission de la liste des personnalités directement ou indirectement impliquées ».


Télécharger le document ICI

Quelques extraits

Par voie de conséquence, il convient désormais, pour prévenir les violations futures des droits de l’homme, de punir les responsables de ces actes répréhensibles, aux fins de les contraindre à respecter les obligations qui leur incombent en vertu du droit international, y compris le droit international humanitaire, le droit des droits de l’homme et des instruments internationaux (Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, Pacte international des droits civils et politiques, Chartes africaines des droits de l’homme et des peuples, Accords de Cotonou) qui en assurent la protection.


Ainsi donc, Nous conseils du FNDC, réitérons notre entière disponibilité et celle des victimes et familles de victimes, en étroite collaboration avec nos homologues guinéens, à participer à toutes les phases de la procédure d’information judiciaire ouverte auprès des différents parquets de votre juridiction.






Une volonté manifeste du pouvoir de mettre fin à la vie d’Oumar Sylla alias Foniké Menguè [Tournons La Page Guinée]


Tournons La Page exprime ses vives inquiétudes concernant l’état de santé d’Oumar Sylla, coordinateur-adjoint de TLP-Guinée et responsable de la mobilisation du Front National pour la Défense de la Constitution. Arrêté à cause de ses opinions, entre le 17 avril et le 27 août 2020 puis le 29 septembre 2020, l’état de santé de Oumar Sylla se dégrade de jour en jour en raison des conditions carcérales très difficiles à la prison centrale de Conakry. Depuis janvier 2021, il a été hospitalisé sept fois.

Après une grève de la faim le 25 décembre 2020 pour exiger la tenue de son procès. Il a mis fin à sa grève le 8 janvier 2021, après que la date de son audience a été programmée. Très faible, il a dû être hospitalisé le jour même. En mars, il a contracté la Covid-19 à cause de la grande promiscuité dans les prisons guinéennes et n’a pu bénéficier d’assistance médicale que sous la pression de l’opinion publique et de ses avocats.

Le 27 juillet, Oumar Sylla a été évacué à l’hôpital de Ignace DEEN où un collège de médecins cardiologues ont exigé son hospitalisation d’urgence et immédiate à cause de la dégradation avancée de son état de santé, deux électrocardiogrammes ayant révélé de sérieux problèmes du cœur et l’impossibilité pour Oumar Sylla de marcher. Mais les autorités guinéennes ont refusé de donner suite à cette injonction des médecins en dépit de l’urgence, des constatations et recommandations des médecins, en maintenant Oumar Sylla en détention. Aujourd’hui 2 août 2021, Oumar Sylla a de nouveau été interné à l’hôpital suite à une crise.

Cette attitude du pouvoir guinéen de refuser les soins de l’activiste montre une volonté manifeste de le laisser mourir. En outre, son épouse craint un risque d’empoisonnement comme l’avaient subi les quatre opposants morts en prison en début d’année.

Tournons La Page exige que le ministère de la justice permette à Oumar Sylla de recevoir les soins dont il a besoin.

La coalition Tournons La Page Guinée

Contact Presse : Ibrahima Diallo – pdhguinee2011@gmail.com





« Je suis inquiète pour la vie de mon mari » [Par l’épouse de Foniké Menguè, prisonnier politique]


Tribune


J’écris ces mots dans une situation inimaginable dans un pays qui se dit démocratique en ce 21eme siècle. J’écris ces mots avec un cœur qui bat dans une totale inquiétude. Depuis que j’ai quitté mon mari à l’hôpital mardi, mon cœur ne cesse de battre et mes larmes couler chaque fois que je pense à ce que Alpha Condé, Kassory et leur ministre de la justice veulent faire de mon mari. Je suis inquiète pour la vie de mon mari, inquiète pour nos enfants, inquiète pour moi-même. 

Hawa Djan DOUKOURE

Quand l’état de santé de mon mari s’est dégradé mardi à cause des conditions de détention inhumaines qu’il subit depuis plus de 15 mois, il a été évacué à l’hôpital Ignace Deen en ma présence.

Malgré la conclusion du collège des médecins cardiologues qui exigeaient une hospitalisation d’urgence, Alpha Condé à travers son ministre de la justice Mory Doumbouya et son directeur de l’hôpital Ignace Deen Dr Awada ont refusé d’accéder à cette demande. Les médecins ont pourtant précisé qu’il s’agit d’une question de vie ou de mort, jusqu’à ce qu’un médecin conseille à mon mari de se déplacer dans une chaise roulante, avec le risque qu’il ne tombe en marchant. 

Cet acte prouve davantage que ce pouvoir, après avoir échoué à convaincre mon mari à joindre leur complot contre le peuple, veut maintenant ôter sa vie ou le contraindre à demander pardon en mettant sa vie à risque. Toute la Guinée se rappelle encore la mort de notre camarade Roger Bamba (Paix à son âme), dont la femme est actuellement en veuvage avec des bébés orphelins. 

Je tiens à préciser que mon mari a fait l’objet de deux diagnostics en électrocardiogrammes qui ont tous confirmé qu’il a un problème sérieux au niveau du cœur qui nécessité une hospitalisation d’urgence et immédiate. Mais ce pouvoir sans pitié a ordonné son maintien en prison, certainement dans l’objectif de l’obliger à demander pardon pour un crime qu’il n’a pas commis. Mais c’est mal connaître mon mari qui est un homme de courage et de dignité, et qui a mon soutien indéfectible. Par ailleurs, le premier test de mon mari a été retardé d’une journée malgré l’urgence, parce que le fameux Dr Awada, sans cœur et sans foi, a dit que son hôpital n’a pas 650.000 FG pour faire le bilan cardiaque pour voir si mon mari ne souffre pas d’un infarctus. Il mettait ainsi la vie de mon mari en danger à cause de 50 euros en quelque sorte. Mon mari a décidé de ne plus payer les frais médicaux que nous avons toujours supportés depuis sa détention. Il leur a rappelé ceci avant hier en ces termes :

« Je ne paye plus rien, chaque fois que je tombe malade, vous me faites payer de l’argent et pourtant c’est votre pouvoir qui m’a mis en prison, qui m’empêche de travailler pour nourrir ma famille, c’est donc lui qui doit payer pour mes soins quand je tombe malade, je ne paierai plus rien, j’ai déjà payé beaucoup d’argent en prison ces mois pour mes soins, c’est terminé. » 

Ce premier jour donc, malgré l’insistance des médecins, mon mari est retourné en prison dans une chaise roulante, sans savoir que son cœur tiendra jusqu’au lendemain. C’est hier que le ministre de la justice aurait payé les frais pour le prélèvement. En dépit de l’urgence et de la recommandation que les médecins ont signalé pour son hospitalisation, jusqu’à présent mon mari n’a entamé aucun traitement. Le résultat de son diagnostic n’est aussi pas transmis aux médecins.

C’est sûr qu’ils ont décidé de le tuer à petit feu sous les ordres d’Alpha Condé, son PM et son ministre de la justice. 

Nous prenons le peuple de Guinée et la communauté internationale à témoin sur la volonté de ce régime à éliminer physiquement mon mari. Aujourd’hui, le garder illégalement et injustement ne leur suffit plus, donc il faut l’éliminer stratégiquement à petit feu comme ils l’ont fait à Roger Bamba et plusieurs autres compatriotes.

Qui sait s’ils ne sont pas en train de l’empoisonner en ce moment même car depuis une semaine je ne contrôle plus la chaîne de repas de mon cher époux à cause de la présence d’une équipe mixte composée des gendarmes et policiers dans les mains desquels les repas passent. Depuis la présence de cette équipe mixte et illégale, tout est devenu encore pire. Il faut rappeler que ce sont ceux qui l’ont kidnappé et déféré en prison qui sont actuellement les mêmes qui contrôlent la chaîne de repas. Ce qui est un conflit de compétence et un risque direct pour lui.

Je finis cette tribune par informer l’ensemble du peuple de Guinée que mon mari reste serein car il sait que la justice populaire et la justice de Dieu sont plus fortes qu’une justice aux ordres d’un seul homme. Nous sommes une famille de croyants, et avons la foi en Dieu. Devant Dieu et les hommes, ce régime est en train de priver mon mari de son droit fondamental aux soins sanitaires, en violation des droits universels. L’histoire en est témoin !

Hawa Djan DOUKOURÉ, épouse de Fonikè Manguë, prisonnier politique





Sidy Souleymane Ndiaye, figure tristement célèbre de la justice guinéenne au service de la dictature


Justice


Sidy Souleymane Ndiaye est la figure tristement célèbre de cette justice aux ordres d’un pouvoir exécutif illégitime et illégal. A l’instar des responsables de la police et de la gendarmerie, ce procureur est l’un des bras répressifs du régime de Alpha Condé.

Ce mercredi, ce multirécidiviste de la répression d’État vient d’obtenir la condamnation de deux activistes pro-démocratie et membres du FNDC. Souleymane Condé et Youssouf Dioubaté sont condamnés à un an de prison ferme et au paiement par chacun d’une amende de 20 millions de francs guinéens.

Il faut rappeler que ces opposants au 3ème mandat de Alpha Condé ont passé près de quatre mois à la maison centrale de Conakry.

Selon la justice de la dictature, ils sont coupables de «production, diffusion, et mise à la disposition d’autrui de données et nature à troubler l’ordre et la sécurité publique».

Pour l’avocat de la défense Maître Salifou Béavogui, cette décision de justice est injuste, inique et cynique «Nos clients sont simplement arrêtés pour leur conviction et opinions politiques. [  ] ce n’est pas le droit qui a parlé, c’est l’injustice qui a triomphé. »

Quant à Maître Traoré, il se dit choqué mais pas surpris par cette décision. Pour lui, ce sont des innocents qui ont été condamnés. Il dit regretter que « la machine judiciaire continue à être mise à contribution pour broyer des opposants ».

Les avocats ont annoncé qu’ils feront appel de cette décision.


Le Chérif




Présidentielle en Guinée: l’alternance, l’unique option [Par Alpha Boubacar Baldé]


Point de vue


Le 18 octobre prochain, le peuple martyr de Guinée se rendra dans les urnes pour choisir le futur Président de la République. Dans cette joute électorale, douze candidats ont été retenus par ce qui nous sert de « COUR CONSTITUTIONNELLE ». Cette cour, en violation de tous les principes juridiques, a validé une constitution falsifiée qui aurait été adoptée lors du « REFERENDRAME » du 22 mars 2020.

La logique et le respect de la lutte menée au sein du FNDC, auraient voulu que les partis membres de ce front ne participent pas à l’élection. Par principe et par respect vis à vis des martyrs de cette lutte, beaucoup n’adhèrent pas à la participation de certains partis membres du FNDC. J’ai moi aussi émis des réserves sur la participation à cette élection dans un premier temps, avant de me raviser pour en comprendre plus ou moins les motivations.

Le boycott des législatives et du « REFERENDRAME » n’a pas empêché le pouvoir despotique du PRAC, de mettre en place un « PARLE-MENT » et des « DÉPITÉS » élus avec moins de 1000 voix. Selon des éléments de langage sortis des laboratoires de communication du RPG, véhiculés çà et là par des « COMIS-NIQUANT », en participant à l’élection présidentielle, les partis d’opposition reconnaissent implicitement le « PARLE-MENT » et la « Pseudo constitution ». Conscients du caractère illégitime du double scrutin de mars 2020, ils cherchent par tous les moyens à lui donner un semblant de légitimité. Les stratèges du RPG sont en réalité déboussolés par la participation de l’UFDG. Cette participation ne faisait pas partie des scénarii envisagés.

Dans le paysage politique Guinéen actuel et parmi les participants à l’élection du 18 octobre, l’UFDG est le seul qui soit en mesure de battre le RPG à plate couture. Depuis 10 ans, c’est le seul parti qui a refusé de se compromettre avec le RPG.

En réalité, toutes les luttes pouvant mener à l’alternance sont à mettre en œuvre pour déloger cette inaptocratie.

Oui, l’Espoir est permis

L’espoir est certes mince mais il existe tout de même. Nous n’avons pas le droit de nous résigner. « La résignation est un suicide quotidien » disait BALZAC. Charly Teddy lui disait ceci : « La folie du pouvoir se nourrit de la résignation de ceux qui en subissent les affres ».

Il est vrai que :

  • Le scrutin du 18 octobre se déroule dans des conditions particulièrement défavorables aux opposants à ce régime de sociopathes ;
  • Toutes les institutions sont inféodées à cette administration de roublards;
  • Le fichier électoral est taillé sur mesure ;
  • Le candidat du RPG est le président en exercice qui utilise les moyens de l’Etat pour se pérenniser au pouvoir ;
  • Ce qui nous sert de FDS et Armée est à la solde d’un homme et non au service du peuple ;
  • La probabilité est forte que le vote des citoyens ne soit pas correctement retranscrit par une CENI partisane ;
  • Les opposants (partis politiques, FNDC et société civile) ont des stratégies différentes pour arriver à l’alternance.

L’espoir est certes mince mais il existe tout de même. Nous n’avons pas le droit de nous résigner.


Une chose est actuellement perceptible en Guinée, le ras le bol de la population vis à vis de cette administration immorale et décadente. Il y a comme une brise marine de changement qui souffle sur toute l’étendue du territoire national. Elle souffle si fort qu’elle part de la cote atlantique pour rentre dans les terres pour atteindre les bastions jusque-là jugés imprenables du RPG.

La déception des populations face au calvaire qu’elles vivent a fini par transcender les considérations tribales. Ces considérations qui jusqu’aujourd’hui, les rattachaient à un parti qui, en 10 ans de gouvernance n’a pas été en mesure d’améliorer leur condition de vie. La population est déçue du Président qui, lorsqu’il était opposant a promis monts et merveilles et qui à l’exercice du pouvoir s’est révélé être de la plus grande incompétence. Il s’est en réalité révélé être la plus grande imposture politique de notre pays. D’opposant qui prêchait la démocratie et l’alternance, une fois au pouvoir il se veut Président à vie. Quelle roublardise !

Le peuple de Guinée doit cesser d’être passif pour se libérer de l’imposture.

Pour une convergence des luttes pour l’alternance

Dans cette configuration politique, tous les mouvements d’opposition ont le même objectif : L’ALTERNANCE. Il est vrai que les stratégies retenues sont différentes, participation pour certains, boycott pour d’autres.

Il est de la responsabilité des leaders de ces différents mouvements de sensibiliser leurs militants respectifs sur l’objectif commun qui est « L’ALTERNANCE ». Il ne sert à rien de s’invectiver mutuellement sur les stratégies retenues par les uns et les autres, cela rend service à la mouvance présidentielle et au RPG. Les forces doivent être mise en commun pour dénoncer le 3ème mandat et les résultats médiocres du PRAC.

Aux partis politiques dans les starting-blocks pour l’élection du 18 octobre, le peuple de Guinée accueille favorablement la coalition pour l’alternance mise en place cette semaine. Ne décevez pas l’espoir du peuple d’arriver à l’alternance au soir du 18 octobre 2020. Vous devez restaurer la morale et l’éthique dans le paysage politique Guinéen. Montrez-nous qu’il y a encore des gens honorables parmi les hommes politiques Guinéens qui méritent d’être suivis. Vous devez mobiliser au-delà de vos électorats traditionnels. Il est vrai que certains partis qui ne participent pas à l’élection disent qu’ils ne donneront pas de consigne de vote, cela est tout à fait logique avec leur posture et c’est leur plein droit.


Il est de la responsabilité des leaders de ces différents mouvements de sensibiliser leurs militants respectifs sur l’objectif commun qui est « L’ALTERNANCE ».


Cependant, vous devez respecter, les décisions des états-majors des partis politiques qui ont choisi le boycott. Néanmoins, ils ne vous interdisent pas de séduire leur électorat lors de votre campagne par des discours inspirants, apaisants, rassembleurs et optimistes. À vous de séduire au-delà de vos militants, à vous de faire voter pour l’alternance.

Le peuple est prêt pour le changement, il cherche le Leader qui l’incarne. Celui qui portera la lutte et mènera à cette alternance qui est vitale à la survie de notre Nation.


Alpha Bakar Le Kaizer
Un citoyen concerné

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SCAN : «[ ] les deux constitutions qui se catapultent… Il faut les retirer» Sidya Touré


SCAN POLITIQUE [des paroles et des écrits]


Sidya Touré, Président de l’UFR (les conditions pour un éventuel dialogue avec le pouvoir) – 4 Juillet 2020

Les conditions : « la première chose, il faut qu’il (le pouvoir, ndlr) renonce au troisième mandat d’Alpha Condé qu’on n’en veut pas. La deuxième, les deux constitutions qui se catapultent… Il faut les retirer. L’Assemblée Nationale qui a été votée dans les conditions qu’on connaît, avec une distribution de députés, il faut la reprendre. Voilà les conditions dans lesquelles nous irons à un dialogue. Si ce n’est pas le cas, … nous continuerons à nous y opposer »

La source ici


Cellou Dalein Diallo, Président de l’UFDG (à l’occasion de l’inhumation des huit jeunes tués lors des manifestations du FNDC) – 3 juillet 2020

« Depuis qu’Alpha Condé est au pouvoir, nous avons enterré 194 jeunes personnes dont la plupart ont moins de 20 ans. Ce qui se passe aujourd’hui est plus grave par rapport à ce qui s’est passé au stade du 28 septembre où il y a eu 159 morts en 2009 ».

La source ici


Aliou Bah, Président de l’organe provisoire du MoDeL – 5 juillet 2020

« Au lieu de rester dans la critique passionnelle, l’indifférence naïve et l’équilibrisme hypocrite, regardons objectivement d’où nous venons et faisons ce que nous pouvons, autant que possible, pour faire bouger les lignes dans la bonne direction ».

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De la survie de l’opposition et du FNDC face enjeux futurs [Lettre ouverte aux personnalités politiques de l’opposition guinéenne – Par L. Petty Diallo]


Point de vue


Si l’opposition peut être perçue comme une entité horizontale, le front national pour la défense de la constitution (FNDC) est plutôt une organisation transversale par sa nature. Il est une coalition de mouvements, de partis politiques de plusieurs obédiences et aux parcours variés.

Face aux défis et enjeux à court et long terme, une réflexion excluant toute polémique tant sur la survie du FNDC que sur l’appartenance au mouvement est presque cruciale. L’actualité immédiate l’impose d’autant plus. 

De la marche du 8 juillet à la nécessité d’une approche contextuelle et programmatique du futur

La marche projetée le 8 juillet 2020 devrait, plus que les précédentes, prendre en compte le contexte actuel qui risque de devenir plus aigu dans les mois à venir.

Avant tout, une réflexion s’impose sur le mot d’ordre de la manifestation à venir. La récurrence d’appels : « Pour faire partir Alpha Condé » apparait de moins en moins crédible. Tout simplement, de marche en marche, d’appel en appel, c’est le même mot d’ordre qu’on voit partout : sur les banderoles, les poteaux, les véhicules, les arbres, carrefours et ronds-points. Sans compter la nuance entre « pour faire partir » et « faire partir ». Autrement dit, la nuance entre l’intention et de l’action.

Quoi qu’il en soit Alpha est toujours là. Comme un termite, il bâtit sa termitière. J’allais dire, prépare son troisième mandat. Il faudrait donc être plus pragmatique en adaptant la stratégie et la finalité. En prenant en compte le nouveau contexte politique né au lendemain du 22 mars 2020.


Lire aussi Donner la solution au-delà de l’espoir [Lettre ouverte aux personnalités politiques de l’opposition guinéenne – Par L. Petty Diallo]


Les arguments qui militent en faveur de cette approche ne manquent pas.

La constitution de 2010 a été mise dans les tiroirs. Pire, enterré au dire du pouvoir. Le référendum du 22 mars 2020 voté et promulgué dans les conditions bien connues. Du coup, la donne a changé tant de forme que de nature. Désormais, il s’agit plus de sauver la République et la Nation dépositaires des institutions et des lois.

A ces impératifs, s’ajoutent d’autres qui montrent que le FNDC ne saurait faire l’économie d’une autodiscipline en fixant clairement les limites à ne pas dépasser par les acteurs politiques qui s’en revendiquent. 

Il est aberrant qu’il y ait des guerres intestines, des dénonciations, des calomnies parfois, des contestations notoires, des initiatives individuelles au sein de l’organisation. Elles rappellent à bien des égards des pratiques politiques auxquelles le mouvement devrait être exempté. De tels comportements font dire aux mauvaises langues, que la FNDC est en voie de se transformer en « front national de la division et de la confusion ».

L’intention de certains responsables de partis politiques de participer à une hypothétique élection sont comparables aux fidélités politiques des amis du chef de file de l’opposition d’alors. Glorieusement plébiscités, sans appartenance à l’UFDG, ni mérite, ces derniers se beurrent et s’engraissent actuellement où l’on sait. Leur cible à abattre étant désormais leur promoteur.

La nécessité d’un choix excluant toute réponse alambiquée

Face au nouveau tour de magie qui est tendu aux ténors de l’opposition et du FNDC, plus aucune hésitation ni compromis n’est possible.

Les adhérents, militants et sympathisants attendent de vous une position claire, une attitude ferme et un comportement digne des espoirs jusque-là placés en vous. Le rejet de la date du 18 octobre 2020 pour la présidentielle doit être conséquent et vos décisions non négociables. Dorénavant vous devriez penser et œuvrer pour une troisième voie et non contre un troisième mandat en soi.

Pourquoi une troisième voie ? Deux premières ont été épuisées : celle des manifestations et du dialogue incluant les organisations internationales. La nouvelle voie a déjà été évoquée par certains sous la terminologie de « Transition politique ». Elle pourrait être le dernier gilet qui puisse sauver la Guinée à court et long terme. Peu importe son appellation.

Cette troisième voie ne devrait revêtir ni l’image des alliances du passé ni en prendre les contours. Tout autant, elle ne devrait se fonder sur un conglomérat de partis d’opposition, aux décisions fluctuantes et qui, on l’a vu, se révèleront au fil du temps en partis de position.

Des exigences s’imposent face aux enjeux

Le FNDC doit faire faire peau neuve. Il devrait taire les divisions tant de l’intérieur qu’à l’étranger où certaines antennes, si elles ne sont pas comateuses, sont dans la contestation. Au cas contraire, il risque fort bien de se révéler ingérable, caduc et inopérant face aux enjeux actuel et futur.

Il faudrait donc une rupture conséquente ; des réformes adéquates ; une fermeté de ton et d’action dans les prises de position face à l’adversaire. C’est l’une des manières d’éviter que les arbitrages du futur n’échappent au peuple ou à l’opposition.

Il est connu de tous, que ceux qui veulent être les maitres du jeu se préparent en douceur. Ils sont déjà à pied d’œuvre pour le troisième mandat et se posent peu de questions. Ils sont persuadés que tout passe par une élection qui octroierait une nouvelle mandature au président actuel avant de mettre en branle la machine de succession. Inexorablement, dirions-nous.

Il est donc grand temps que l’opposition ait une conscience aiguë des défis et enjeux en acceptant cette terrible réalité : s’il y avait, dans les conditions actuelles, une élection, rien ni personne ne pourrait empêcher la victoire du futur candidat de la majorité. La question n’est pas savoir s’il s’agit d’un postulant pour un troisième mandat ou pas.

Enfin, la stratégie de l’adversaire découle, faut-il le savoir, des leçons tirées de la fin politique tant de Sékou Touré que de Lansana Conté et des lendemains désenchanteurs de l’entourage ou des héritiers. L’alerte lancée, n’allons pas loin.

Des préconisations face au jugement de l’histoire

Si l’opposition guinéenne négligeait les préconisations évoquées, il ne serait pas étonnant que bien de choses changent en sa défaveur.

Sûrement certains pourraient considérer ces préconisations comme des lubies d’un analyste perturbateur de sommeil ou d’un lanceur d’alerte agité. Quoi qu’il en soit, les responsables politiques ont un devoir à assumer face à l’histoire, à leurs militants et sympathisants, à toutes celles et ceux qui ont tant sacrifié et tant perdu.

Ils devraient assumer afin de :

  • mettre fin aux injustices de toutes sortes : arrestations et emprisonnements arbitraires ; destructions de biens privés ; inégalités socio- professionnelles ; meurtres et assassinats de toutes sortes ; corruption généralisée et gabegie économique ;
  • soustraire la Guinée des aventuriers politiques qui nous mène dans les méandres de l’inconnu ; les affres de la division, de la misère et de la discrimination ethnique, etc ;
  • rendre plus utiles et constructives les dix années de manifestations qui ont, à ce jour, plus conduit au cimetière qu’à la victoire ;
  • venir à bout d’un système qui a perdu tout repère et légitimité en violant les textes fondateurs de la République ;
  • répondre en fin aux mille et une attente d’un peuple qui a souvent été berné, trahi et délaissé par ses représentants.

Pour relever ces différents défis, il faudrait que vous taisiez les divisions dues à des alliances de façade et de concupiscences politiques de mauvais alois ; aux embrassades diurnes qui cachent des coups de pattes la nuit tombée.

Vous devez tout simplement assumer la Guinée. C’est- à- dire la délivrer du système en place ; des relents ethnocentriques d’un pouvoir presque séculaire aux mains d’une poignée d’héritiers, de clans et de gangs politico-affairistes.

Si vous en êtes incapables, la présidentielle d’octobre 2020 risque de sonner tant le glas du pouvoir actuel que le vôtre. Au pire, ce dernier vous survivra. N’est-ce pas que des voix sourdent d’un peu partout qui n’en peuvent plus d’attendre et qui revendiquent la victoire maintenant et pas après ?

En définitive, les responsables politiques de l’opposition, FNDC compris, ont l’impérieuse obligation morale et politique d’empêcher un président de 82 ans de continuer d’envoyer, à ses dépens, ou sous ses ordres, peu importe, des jeunes de 22 à 32 ans, (moyenne d’âge des victimes) au cimetière.

Vous devez vous remettre des faiblesses inhérentes à toute organisation sociale ou politique en palliant aux incohérences internes.  Ainsi, la Guinée parviendrait-elle à sortir de l’impasse actuelle.

Dans ce cas, et dans ce cas seulement, vous, responsables politiques actuels de l’opposition, aurez assumé la Guinée.

Telle est l’attente, une lancinante attente, de la majorité de nos concitoyens.


Par M. Lamarana Petty Diallo – Guinéen – Professeur Hors-Classe, lettres-histoire, Orléans- France

 




Donner la solution au-delà de l’espoir [Lettre ouverte aux personnalités politiques de l’opposition guinéenne – Par L. Petty Diallo]


Point de vue


A quelques jours de la reprise programmée des manifestations de l’opposition guinéenne sous la bannière du front national de défense de la constitution, (FNDC), il me semble opportun de lancer l’alerte, d’interpeler, de proposer des pistes de réflexion.

Je n’userai ni de langue de bois ni de propos laudateurs à l’image de certains louangeurs à la recherche de pitance : ces squatteurs qui ont induit plus d’un homme politique en erreur. Des encenseurs qui vous font croire que vous êtes déjà Président de la République alors que les temps sont au combat. Autant dire que je ne me préoccuperai point de caresser dans le sens du poil. J’essaierai en revanche de relever les failles sans trop insister sur les acquis.

Cette lettre ouverte est l’expression de mes craintes d’assister à nouveau à la reproduction du passé. Elle expose mes pressentiments face aux dangers qui menacent le futur de notre pays.

 Elle est, tout naturellement, l’expression de mon engagement politique, de mes convictions personnelles et de mon amour patriotique et inaliénable pour la Guinée d’hier et celle de demain. Ces sentiments nourrissent les propos qui suivent et qui s’adressent aux acteurs politiques de notre pays.

Donner de l’espoir ne suffit plus

Les responsables politiques, présidents ou leaders des différents partis politiques : UFDG, UFR, PEDEN, Bloc Libéral entre autres, ne doivent plus se contenter de donner de l’espoir. Ils doivent désormais apporter des solutions. La solution.

La même exigence s’applique aux représentants des mouvements civiques, membres ou non du FNDC. Les uns et les autres doivent tout simplement assumer la Guinée. Assumez un pays, c’est le comprendre, le prendre en responsabilité, le libérer ou le délivrer. C’est cela la mission de l’homme politique.

Cependant, en invitant les uns et les autres à assumer la Guinée, une question me taraude en tant qu’historien et analyste. Dans la classe politique actuelle qui s’en donnera les moyens ? Qui réalisera le rêve des Guinéens tant leurs espoirs se sont souvent évanouis au fil de notre histoire ?

Qui va assumer notre pays : ses turpitudes, ses victoires, ses défaites, son avenir face aux flots d’interrogations, aux innombrables rivières de sang et de larmes dans lesquelles nous nageons depuis plus d’un demi-siècle ?

J’en ai une idée : ne pourrait le faire que celui-là qui revêtira, au-delà du manteau d’un simple président de parti politique d’opposition, l’habit d’un grand homme au sens historique du terme.

De Gaulle a assumé la France par l’appel du 18 juin 1940. Sékou Touré, l’indépendance de la Guinée par le non du 28 septembre 1958. Nelson Mandela a assumé l’Afrique du Sud en mettant fin à l’apartheid.  En cela, ce sont des grands hommes. Celui qui voudrait s’inscrire dans cette lignée devra sortir des sentiers politiques empruntés ces derniers temps. Il devra inventer, imposer et ne pas se complaire de titres, fermer la porte, autant que l’adversaire le fait, aux dialogues creux et interminables.

Je ne doute point de la capacité de vous, hommes politiques de l’opposition d’adopter de telles initiatives ou attitudes. Loin s’en faut.

Je me dis juste qu’il va falloir dépasser le courage dont certains d’entre-eux ont fait preuve en exposant leur vie dans la lutte pour un système démocratique en Guinée. Il faudrait désormais plus que le simple courage : il faut l’audace d’antonien de 1789.  Et pour cause ?

Un dictateur, africain en tout cas, n’est jamais vaincu sur la table des négociations : Compaoré, Mugabe, El Béchir, Moubarak, j’en passe.

Qui voudrait ouvrir la nouvelle page de la lutte politique en Guinée devrait se fonder sur ce précepte de l’histoire politique du continent.

L’histoire comme repère politique pour façonner le futur

Se baser sur l’histoire générale de la Guinée pourrait préserver de la répétition d’écueils ou d’erreurs du passé.

Notre histoire politique, de 1958 à nos jours est jalonnée de fuite en avant, d’attitudes passives ou complices, des mea-culpa tardifs, d’omissions volontaires, du laisser-aller. Si ce n’est de larmes et de sang. A se demander si nos ancêtres n’ont pas emporté les secrets de la geste, ces hauts-faits, ces grands actes héroïques, qui fondent les grandes nations et font les grands hommes. 

A nos hommes politiques, je leur dis, l’état actuel de notre pays vous impose une interrogation collective. L’heure vous oblige à jeter un regard en arrière. De procéder à une rétrospective de vos combats, de vos parcours, de vos stratégies, de vos réussites et surtout de nos échecs. C’est la seule manière de vous conforter dans vos convictions ou provoquer une remise en cause.

Cela est d’autant plus nécessaire qu’un responsable politique qui ne se remettrait pas en question ne peut courir qu’à l’échec. La clé de vos victoires comme de vos défaites futures en dépendent.

Il faudrait vous remémorer, à chaque instant, les espoirs que vous avez faits naître et les ratages qui en ont découlé afin de mieux vous préparer à la nouvelle adversité.  Pour ce faire, un bilan d’étape s’impose. Il vous appartient de le faire ou pas. Mais pour guérir notre pays qui se gangrène de jour en jour, de grandes actions et de nouvelles stratégies sont incontournables et sont possibles.

Faire l’autopsie du passé pour un diagnostic du lendemain

Il est temps de procéder à l’autopsie des dix années de marches et de manifestations, de négociations et de dialogues, de tête-à-tête, de bras de fer avec le pouvoir en place. Mais aussi de vos alliances ou coalitions, de vos stratégies de conquête du pouvoir individuellement et collectivement. Les appels et attentes de solutions qui devraient venir de la communauté internationale ne sauraient non plus échapper à cette mise à plat.

Une telle démarche rétrospective, condition sine-qua-non de toute prospective, fait appel à une vision politique clairvoyante qui réponde à l’éthique de conviction et à l’éthique de responsabilité. (Max Weber).

Cette théorie wébérienne, qui se prête tout particulièrement aux échéances électorales décisives, que l’auteur conseille aux hommes politiques en « période de gros temps », comme c’est le cas chez nous, pose l’équation de la fin et des moyens en politique.

La proposition de la tenue de l’élection présidentielle le 18 octobre 2020, phase ultime de la stratégie du pouvoir, qui a toutes les chances d’être validée par un décret présidentiel met au centre du débat cette théorie. A l’opposition de voir quels moyens usés pour quels résultats : aller et perdre ; ne pas aller et sortie vainqueur ? Et comment ?

Quant au pouvoir, nul doute qu’il n’hésitera pas d’user, à nouveau, des moyens les plus condamnables pour parvenir à ses fins. Déjà, le piège habituel commence à s’ouvrir alors que l’étau est en train de se resserrer, peu à peu, autour de vous, chers membres de l’opposition.

Le resurgissement de la question du dialogue avec les pièges qu’il traine n’est pas hasardeux. Voilà que vous y avez déjà mis un pied et de la manière la moins adroite en égrenant des « si » ; des « on » et des « il faut que ». Du genre : « si je dois aller ; on n’a pas dit que… ; on n’ira lorsque… ; pour qu’on y aille… ».

Loin de propositions carrées, de refus catégoriques, ces conditionnelles n’ébranleront pas le dernier chef de quartier de notre pays. L’arrogance d’en face, celle du pouvoir, appelle des positions fermes et catégoriques. Si ce n’est radicales.

A défaut, rien n’empêchera les scénarios de 2010 et 2015. En tous les cas, celui qui est habitué à rouler sa bosse pour escalader la montagne, ne craint point la colline. Alors, comme je l’ai souligné plus haut, le système ne reculera devant aucun obstacle ni danger dans l’optique de la conservation du pouvoir dans les prochains mois.

La deuxième partie étayera les enjeux, les défis, les stratégies et les choix qui s’offrent à vous.


Par M. Lamarana Petty Diallo – Guinéen – Professeur Hors-Classe, lettres-histoire, Orléans- France

Lire aussi De la survie de l’opposition et du FNDC face enjeux futurs [Lettre ouverte aux personnalités politiques de l’opposition guinéenne – Par L. Petty Diallo]





Trois scénarios pour une sortie de crise en Guinée? [Par Ibrahima SANOH]


La Guinée est à la croisée des chemins et son avenir est plus que jamais en jeu. Le double scrutin du 22 mars 2020 a eu lieu et a rendu la réalité politique  plus compliquée. L’avènement de la crise sanitaire  liée  au COVID-19 qui nous affecte de diverses manières doit conduire à réfléchir dès maintenant sur l’avenir proche du pays d’autant plus qu’une échéance électorale, à l’occurrence la présidentielle, est prévue cette année.  Aura-t-elle lieu ?  L’opposition y prendra-t-elle part au cas où Alpha Condé  serait candidat ? Alpha Condé sera-t-il candidat ? Voilà  de petites  questions  qui n’ont pas de réponses toutes faites. Il faudra  les répondre si nous ne voulons pas  que notre avenir nous échappe. Ne pas prévoir demain, c’est aller les yeux bandés vers l’avenir imprédictible  et souvent, droit  dans l’abîme. Ne pas anticiper la survenue des évènements et faits qui feront demain, c’est vivre une vie de chien. Un  pays et ses citoyens doivent se l’éviter.

Dans le présent papier, mon dessein est d’esquisser quelques scénarii pour  la présidentielle de 2020 et d’amener la classe politique, les acteurs  de diverses   institutions  qu’elles soient nationales ou étrangères à réfléchir à l’avenir du pays et créer les conditions d’un dialogue inclusif, sincère et prompt  afin d’éviter à la Guinée le fourvoiement et une  impasse politique imminente. Le pays est la quête du temps perdu. Ne faudra-t-il pas  lui éviter les crises inutiles, procédant de nos excès de confiance  et de nos cécités politiques ?

Scénario I : Report de la présidentielle de 2020.

La  tenue du double scrutin du 22 mars  a eu des conséquences fâcheuses  et a fait des victimes collatérales.  Pour assez d’observateurs, j’en fais partie,  elle a aggravé  la crise sanitaire alors latente et a favorisé la propagation du coronavirus. Aujourd’hui, le nombre de contaminés augmente plus que celui des guéris  et  celui des cas contacts évolue à un rythme alarmant.  Ce qui conduit, sous certaines conditions,  à douter de la capacité du pays à venir à bout de la crise sanitaire à  moyenne échéance.  Peut-être apprendrons-nous à vivre avec le coronavirus. Il faut rappeler que la Guinée n’est venue à bout d’Ebola que lorsqu’un vaccin fut mis au point et  mis à la disposition des pays alors frappés par le virus à fièvre hémorragique. 

Dans ce contexte de crise sanitaire, il serait déraisonnable que la CENI  et même le Président de la République  tiennent la présidentielle à la date prévue. Les mesures adéquates pourraient être prises à cet effet, dira-t-on. Le  vote sera-t-il électronique et  les élections sans campagnes électorales ? Les mesures qui seront prises permettront-elles de protéger les Guinéens qui seront appelés aux urnes  contre le risque de contamination au coronavirus ? 

La date de la présidentielle est éloignée, diront certains. N’est-ce pas que l’organisation de la présidentielle de 2020 est tributaire  de  la capacité du pays à  triompher du coronavirus  qui  éprouve  la Guinée et le monde ?  A l’hypothèse que le coronavirus soit circonscrit, ne faudra-t-il pas un consensus  sur  certaines questions à savoir : la CENI qui n’inspire pas confiance à une certaine opposition, le fichier électoral  et d’autres questions subsidiaires.

Quand bien même Alpha Condé ne serait pas candidat  et  que la crise sanitaire due au Coronavirus serait finie, l’opposition qui n’a pas pris part au double scrutin du 22 mars 2020  acceptera-t-elle la CENI  qu’elle a décriée ?  Va-t-elle se renier et se dédire ? 

Il est des plus probables que la présidentielle  de 2020 connaisse un report !  Ce ne  serait pas un mal eu égard  aux réalités susmentionnées. Seulement, il faudra se mettre d’accord sur certaines questions qui divisent. Cela suppose que les différentes parties prenantes au processus électoral s’accordent sur le principe qu’elles doivent se parler  et dialoguer. Mais la confiance entre ces acteurs n’est-elle pas entamée ? Alpha Condé qui a eu  une grande peine à se faire  féliciter après  l’adoption par le pays d’une nouvelle constitution, aura-t-il le courage d’organiser la présidentielle en étant lui-même candidat  et cette année, sans que le coronavirus  soit vaincu ?   Cela semblerait absurde. Et, s’il venait à l’essayer, il sera de plus en plus isolé et donnera raison à tous ceux qui ont dit qu’il se donnait à travers la nouvelle constitution la possibilité de saper le principe de l’alternance en se portant candidat à un autre mandat.  Lui qui a survécu à de nombreuses crises politiques, à Ebola, aux nombreuses manifestations de rue, à la honte qu’aurait engendré l’échec de son double scrutin, voudra-t-il ouvrir un autre front de combat en temps de crise sanitaire mondiale ?  On le sait téméraire et entêté. Survivra-t-il  à cette autre épreuve ?

S’il y a report de la présidentielle, c’est que le pays connaîtra une nouvelle transition. Combien de temps durera-t-elle ? N’est-ce pas que les transitions aiguisent  les appétits  et conduisent souvent aux substitutions de priorités ?   Alpha Condé qui l’assurera pourra-t-il être candidat à un autre mandat ? Peut être que  l’apport de la communauté internationale  et aussi qu’une certaine pression étrangère   favoriseront  un dialogue  sur les questions   dont  les résolutions sont reportées : fichier électoral, présidence de la CENI et sa composition, candidature d’Alpha Condé à un autre mandat,   acceptation de la constitution du 22 mars 2020 par l’opposition au sein du FNDC. Peut-être  aussi, Alpha Condé aura-t-il des garanties  et  incitations qui l’emmèneront à ne pas se porter candidat  à la présidentielle.


S’il y a report de la présidentielle, c’est que le pays connaîtra une nouvelle transition. Combien de temps durera-t-elle ? N’est-ce pas que les transitions aiguisent les appétits et conduisent souvent aux substitutions de priorités ?


Tout cela ne sera pas sans conséquences. Il aura, lui  qui s’est toujours plaint d’avoir été empêché, la possibilité de rattraper quelques années perdues.  Mais cela lui permettra-t-il d’être performant ? Voilà un sophisme : celui de l’amortissement. Le temps écoulé ne se rattrape pas ! Le mandat d’une transition est contraignant . Aussi, il aura la possibilité de se mettre à l’abri de certains ennuis judiciaires si la communauté internationale venait à lui faire des propositions de poste au sein de certaines institutions.  Mais les récriminations de l’opposition sont plus grandes et vont au-delà de sa personne. On pourrait lui éviter certains procès en raison de son rang,  ce qui serait inadmissible pour d’autres présumés coupables de crimes de sang et économique. On pourrait lui accorder le pardon, mais  jamais l’amnésie à ses supposés suppôts.  Le RPG devra alors avoir un candidat pour lui éviter une triste fin et la justice des victorieux. Alpha Condé, Président de la transition, sera-t-il neutre ?  N’aura-t-il pas une inclination pour un candidat ? N’influera-t-il pas sur la sincérité du scrutin ?  On pourrait perdre d’autres années et la transition pourrait bien donner lieu à une confiscation du pouvoir.  Le risque d’une instabilité politique  est réel.

Scénario II : Candidature d’Alpha Condé à la présidentielle de 2020.

Ce scénario, me paraît improbable dans les conditions actuelles. Certaines raisons évoquées dans le scénario précédent  sont aussi en vigueur dans le présent cas.  L’hypothétique candidature d’Alpha Condé à la présidentielle de 2020 est liée à sa capacité à  venir à bout du coronavirus et aussi à faire accepter par une certaine communauté internationale sa réforme constitutionnelle. Le dernier trimestre de 2020 est encore loin et assez de choses peuvent encore se passer.

Si Alpha Condé se porte candidat  alors qu’il n’a pas  vaincu le coronavirus , c’est qu’il aura compris qu’il ne viendra jamais à bout de cette crise sanitaire  avant la découverte  d’un vaccin dont l’attente serait inconcevable  et aussi , qu’il n’a pas à chercher l’approbation d’une certaine communauté internationale. N’est-ce pas qu’il avait avant la réforme constitutionnelle reçu le soutien des dirigeants placés sous la même enseigne  que lui et qui l’ont  félicité  après le double scrutin : ceux  de la  Russie, de la Chine, de la Turquie ?   La CEDEAO, les pays occidentaux, certains  pays africains ayant une tradition démocratique avérée ne lui ont envoyé aucun message de félicitations.  Cherchera-t-il à leur plaire ?  Reculera-t-il  alors que le plus difficile est fait et qu’à présent, il a possibilité d’être candidat à un autre mandat ?

La  récente plainte  du FNDC contre le pouvoir guinéen  à la CPI pourrait avoir des conséquences insoupçonnées  que  les initiateurs  n’ont pas eux-mêmes soupesées. En effet, une nouvelle constitution veut dire : ne pas ouvrir la boîte de pandore. Si  plusieurs dirigeants sont tentés de  mourir au pouvoir, c’est qu’ils ont renoncé aux hypothétiques honneurs d’après règne pour se mettre à l’abri des ennuis judiciaires. Aussi longtemps qu’ils dirigent, ils le savent, ils jouissent d’une certaine  l’immunité les protégeant contre les actions judiciaires.  Si Alpha Condé n’est pas candidat alors  qu’il désespère, son parti avec, de trouver un dauphin  qui sera à même de remporter la présidentielle  à l’issue d’un scrutin dûment constitué. S’il n’a pas l’assurance qu’il  sera, après le pouvoir, exempt de poursuites judiciaires, eh bien, il sera tenter d’être candidat à un autre mandat et  voudra aller aux élections même dans les conditions les plus discutables.  


Si plusieurs dirigeants sont tentés de mourir au pouvoir, c’est qu’ils ont renoncé aux hypothétiques honneurs d’après règne pour se mettre à l’abri des ennuis judiciaires.


L’opposition au sein du FNDC doit entendre cela et entrevoir une lutte politique plus habile que celle des muscles dont les résultats sont très contrastés.  Impénitente, elle doit avoir son travail de conscience ! Les menaces  n’engendrent toujours pas les résultats escomptés. Elles peuvent  produire l’effet contraire : la fossilisation des dirigeants.

Scénario III : Désistement volontaire d’Alpha Condé à être candidat à un autre mandat.

Ce scénario est trop optimiste pour être des plus probables.  Les faits conduisent à croire qu’il est irréaliste.  Sa survenue  pourrait avoir des conséquences dont la mort  subite du FNDC et la révélation des contradictions au sein de l’opposition.  En effet, si Alpha Condé annonçait qu’il ne serait pas candidat à un autre mandat, cela apaiserait une certaine tension politique et  favoriserait un  dialogue sur certaines questions de l’heure et surtout celles électorales.  Une telle annonce sera  favorablement accueillie  par la communauté internationale qui lui aura prêté des intentions et qui, sans nul doute œuvrera à l’aider à s’acquitter de la promesse qu’il aura tenue : celle de ne pas être candidat à une autre échéance électorale. Là, il pourrait, intelligemment se soustraire  de certains ennuis judiciaires après le pouvoir et  se réconcilier avec ses combats historiques. Encore, il aura évité à sa postérité d’être dédaigneuse.  Saura-t-il dominé  le ressentiment  qu’il a vis-à-vis  de cette classe politique qui lui a livré un combat implacable pendant assez d’années ? Il ne faut pas désespérer qu’il puisse encore se révéler homme d’Etat et que, même dans les moments d’incertitudes, il puisse se montrer à la hauteur de ses combats historiques.


En effet, si Alpha Condé annonçait qu’il ne serait pas candidat à un autre mandat, cela apaiserait une certaine tension politique et favoriserait un dialogue sur certaines questions de l’heure et surtout celles électorales.


S’il venait à faire une telle annonce, l’opposition serait confrontée à deux opinions contradictoires. La première sera celle de ceux qui diront : «  Allons aux élections et sans préalables. »  La seconde, celle des circonspects qui diront : « Créons les conditions d’une élection inclusive et transparente dès lors que cela est possible et mettons-nous d’accord  sur les questions essentielles. »  Cette dernière frange  ne voudra pas se dédire alors qu’elle ne porte pas une grande admiration à la CENI, ne croit pas à la fiabilité du fichier électoral. Une telle annonce permettra d’acquérir une certitude que la nouvelle constitution tant décriée est acceptable et le sera et, qu’en supposant à lui, le FNDC  s’opposait à la possibilité qu’Alpha Condé soit candidat  à une autre échéance électorale.   !  Les déclarations cocardières et patriotardes  s’estomperaient. «  2020, Un autre  », voilà son  slogan dénotant de peu d’ambitions 

Que cette hypothèse soit validée ou non, il faut bien se poser la question qui est : au cas où Alpha Condé ne serait pas candidat,  et au cas où il se donnerait les chances de tenir des élections inclusives et transparentes, n’est-ce pas qu’il faudra que la classe politique s’accorde sur certaines questions ?

En définitive, quel que soit le scénario, une chose est claire, nous vivons une grande crise qui n’est pas que sanitaire. Elle est multidimensionnelle. Elle est  aussi politique.  La crise sanitaire a permis d’éluder les clivages politiques et de créer une harmonie de  façade, foncièrement  factice, de  réduire les angles de nos contradictions idéologiques et politiques, de rengainer l’expression de certaines méchancetés. Elle a favorisé la politique de temporisation. Elle ne résoudra pas nos problèmes politiques et ne mettra pas fin à nos contradictions, même si elle a la vertu de  reporter leurs résolutions.  N’est-ce pas qu’il faudra alors qu’il est grand temps de poser les bases d’un dialogue national en faisant les compromis forts pour éviter au pays une crise politique majeure ? N’est-ce pas qu’il faut asseoir les bases d’un dialogue politique national  sur le processus électoral ? Devons-nous reporter la présidentielle de 2020 ? Si oui, pourquoi ? A quelle échéance ?  Au cas contraire, avec quelle CENI, quel fichier électoral  et dans quelles conditions ?  L’opposition doit  s’intéresser à ce sujet et poser les conditions raisonnables pour un dialogue sincère et franc. La communauté internationale doit aider la Guinée  à réussir ce pari.

Ceux qui croient naïvement –  peut-être sont-ils forts d’autres choses que nous autres ignorons – que les muscles et la tactique  de la surenchère régleront les problèmes servent  de cautions politiques à Alpha Condé  et lui font le plus grand bien qu’ils ne peuvent imaginer : ils le  réconfortent dans ses positions  et hâteront  ses réactions par le mal de notre démocratie.  Cela suffira pour sacrifier l’idéal de l’alternance qui est un  triple impératif : moral, politique et constitutionnel.


Ibrahima SANOH
Citoyen guinéen
Président du Mouvement  Patriotes Pour l’Alternance et le Salut.

[NDLR] L’auteur avait proposé le titre : Comment éviter le piège de la transition qui trahirait l’alternance démocratique en Guinée ?





L’heure est grave pour la Guinée [Centre d’études stratégiques de l’Afrique]


Faisant fi des manifestations de masse, des mises en garde des responsables de la CEDEAO et des critiques internationales, le président Alpha Condé a imposé la tenue d’un référendum constitutionnel en Guinée le 22 mars. Le référendum, ainsi que les élections législatives, ont été boycottés par l’opposition qui les juge illégitimes du fait qu’ils ont été autorisés uniquement par le président de l’Assemblée nationale, un allié de Condé, mais non par le Parlement, comme l’exige la Constitution. Au moins 32 manifestants ont été tués par les forces de police avant la tenue du vote. Arguant du non-respect manifeste des règles électorales et de la validité douteuse des listes électorales, les observateurs électoraux internationaux ont refusé d’y prendre part.

Au cœur de la controverse, la demande du président de 82 ans de supprimer la limitation du nombre de mandats présidentiels qui aurait dû mettre fin à son « règne » au mois d’octobre, après 10 ans d’exercice du pouvoir, et permettre à la Guinée de connaître enfin sa toute première succession dans le respect des règles démocratiques. En vertu de la nouvelle Constitution, Alpha Condé pourrait prétendre rester en fonction pendant encore 12 ans. Le pays ayant enduré pendant 50 ans despotisme et abus de pouvoir avant d’entamer sa transition démocratique en 2010, la question de la limitation du nombre de mandats présidentiels revêt une importance particulière pour la plupart des Guinéens. Cette longue période de mauvaise gouvernance vaut aujourd’hui à la Guinée d’être l’un des pays les plus pauvres d’Afrique.

L’heure est grave pour la Guinée. En effet, l’expérience montre que les chefs d’État africains qui sont restés au pouvoir pendant plus de 10 ans ont accumulé les actes de répression et de corruption et généré instabilité financière, sous-développement et conflits dans le pays. Le régime de Condé a été marqué par un autoritarisme grandissant, qui s’est traduit par le remplacement du responsable de la Commission électorale nationale indépendante (CENI), le limogeage du président de la Cour constitutionnelle et la destitution forcée du Ministre de la justice (hostile à ces changements constitutionnels), mais aussi par la mise sous contrôle des médias et l’arrestation de représentants de l’opposition.

Le non-respect des règles de cumul des mandats et le recul démocratique en Guinée constituent un défi pour la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO) qui s’efforce d’instituer des contrepouvoirs et d’obliger à rendre des comptes comme l’exige toute démocratie. Ces efforts s’attaquent à la tendance antidémocratique récente observée dans les 15 États membres de l’organisation. La Cour de justice de la CEDEAO est d’ailleurs actuellement saisie d’une affaire dans laquelle une coalition de l’opposition allègue la violation par le gouvernement Condé de droits de l’homme et de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance.

Cette régression de la Guinée vers un pouvoir de type autoritaire est source d’instabilité politique et de difficultés économiques dans ce pays de 12 millions d’habitants dont les ressources minérales n’ont pas prémuni contre la pauvreté. Les implications pourraient être graves dans les pays voisins qui seront directement affectés par cette instabilité.

Crédibilité et pluralisme, les grands absents du processus

Selon les organisations non gouvernementales de Guinée, de nombreux citoyens ont suivi l’appel au boycott du référendum lancé par l’opposition, le taux de participation n’ayant pas dépassé les 30 % en province, pour tomber à moins de 15 % dans la capitale, Conakry, alors que ce taux atteignait par le passé 75 % au niveau national. Le jour du référendum, les médias et les réseaux sociaux ont indiqué que le nombre de bulletins « non » était insuffisant dans certains bureaux de vote. D’autres se sont vu confisquer leur carte électorale et ont dû attendre à l’extérieur pendant qu’un autre votait pour eux. D’autres encore ont signalé avoir été contraints de voter « oui ». Au moins 12 morts sont à déplorer, et des dizaines de personnes ont été arrêtées, notamment des représentants de l’opposition. En Guinée forestière, un conflit autour du vote a suscité des violences entre groupes religieux menant à l’incendie de plusieurs églises et mosquées faisant plus de 15 morts. Par ailleurs, les forces de l’ordre auraient confisqué des urnes afin de procéder elles-mêmes au dépouillement du scrutin. Selon les déclarations officielles du gouvernement, le référendum aurait été adopté à 89 % des voix, avec une participation de 58 %.

Avant le vote, l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF) et la CEDEAO ont conclu à la participation au scrutin de plus de 2,5 millions d’« électeurs fantômes ». Lorsqu’Alpha Condé a consenti à un report symbolique de deux semaines pour corriger le problème, les observateurs internationaux de la CEDEAO, de l’Union africaine et de l’UE ont annoncé leur retrait.

Les irrégularités du processus électoral sont venues se greffer sur une série de mesures qui ont mené au référendum en l’absence de crédibilité et de soutien populaire. Alpha Condé s’était attelé pendant des années à transformer les institutions chargées d’organiser le vote et de valider les résultats, notamment la CENI et la Cour constitutionnelle. À la veille du référendum, trois des propres ministres de Condé, le Ministre de la justice Cheik Sako, le Ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche Abdoulaye Yero Baldé et le Ministre de la citoyenneté Gassama Diaby avaient même démissionné pour protester contre son projet d’adoption d’une nouvelle Constitution.

Après le référendum, les principaux acteurs internationaux, dont la CEDEAO, le Bureau des Nations Unies pour l’Afrique de l’Ouest et le Sahel (UNOWAS), les États-Unis, la France et l’Union européenne, ont exprimé d’une même voix leurs inquiétudes quant à la crédibilité du processus et son caractère pluriel. D’autres pays dépourvus de traditions démocratiques comme la Chine, la Russie et la Turquie se sont par contre empressés de féliciter le président.

La nouvelle Constitution comme outil de consolidation du pouvoir

La nouvelle Constitution, qui est entrée en vigueur le 7 avril, comporte plusieurs dispositions de nature à affaiblir les contre-pouvoirs démocratiques en Guinée. Elle porte d’abord la durée du mandat présidentiel de 5 à 6 ans et révise les limites de cumul des mandats, permettant ainsi à Condé de briguer un troisième mandat.

Elle modifie ensuite la structure de la Cour constitutionnelle afin d’accroître le contrôle du président sur cette institution cruciale. Le nombre de juges nommés par le président passe notamment de un à trois (sur un total de neuf). Par ailleurs, la responsabilité de désigner le président de cette Cour n’incombe plus à ses membres mais au chef de l’État. Le président de l’Assemblée nationale (un allié de Condé) ayant également la faculté de désigner deux juges, Condé peut ainsi choisir jusqu’à cinq des neuf juges qui composent la Cour.

La nouvelle Constitution supprime également plusieurs articles clés en matière de responsabilité. Selon certains des de l’ancienne Constitution, la corruption, la criminalité financière et les atteintes aux droits de l’homme échappaient à la prescription. Ainsi, si les présidents étaient couverts par une immunité pendant leur mandat, ils pouvaient dès la fin de celui-ci être poursuivis pour abus de pouvoir. Cette disposition est désormais supprimée. De la même manière, un article qui garantissait aux citoyens un droit de recours en cas d’atteintes aux droits de l’homme commises par des membres du gouvernement a également été retirée. La nouvelle Constitution élargit donc en substance le champ de l’impunité.

Elle accroît également le pouvoir exécutif au détriment du pouvoir législatif. L’ensemble des nouvelles lois doivent ainsi être promulguées par le Président, lui donnant de fait un droit de véto face à l’Assemblée. La seule possibilité serait pour le président de l’Assemblée nationale de saisir la Cour constitutionnelle afin de permettre l’adoption d’une loi en l’absence de promulgation du Président. Cette option a toutefois peu de chance de s’appliquer en pratique. En effet, le parti RPG de Condé détenant 79 des 116 sièges du Parlement après les élections boycottées qui ont été couplées au référendum, il est peu probable que des lois auxquelles Condé est opposé voient le jour, compromettant ainsi l’indépendance du pouvoir législatif. La nouvelle Constitution supprime également des dispositions qui interdisaient au Président de dissoudre le Parlement plus d’une fois au cours d’un même mandat présidentiel ou après la troisième année de la législature. Par ailleurs, elle supprime une autre disposition qui contraignait le Président à démissionner si, après que le Parlement a été dissous par suite d’un désaccord sur une question, son parti ne parvenait pas à rallier une majorité dans le cadre des nouvelles élections.

Autre point non négligeable, la nouvelle Constitution supprime les articles 141 à 145 du titre XV de la Constitution de 2010 qui concernent la finalité et le rôle du secteur de la sécurité. Outre qu’ils interdisaient les milices privées, ces articles stipulaient que :

« Les forces de défense et de sécurité sont républicaines. Elles sont au service de la Nation. Elles sont apolitiques et soumises à l’autorité civile. Nul ne doit les détourner à ses fins propres. Les forces de défense sont chargées de la défense du territoire national. Les forces de sécurité sont chargées de la protection civile, de la sécurité publique, de la sécurité des personnes et de leurs biens et du maintien de l’ordre public ».

La suppression de ce libellé est des plus problématiques car la Guinée souffre depuis longtemps de la politisation et du manque de responsabilité des acteurs de la sécurité, situation qu’Alpha Condé a fait perdurer en se servant des forces de sécurité comme d’un instrument pour écraser la dissidence. La suppression de ces clauses de responsabilité rend moins probable encore la tenue du procès longtemps reporté des forces responsables du massacre du stade de Conakry en 2009. Cet incident, où plus de 150 manifestants furent tués et de nombreuses femmes et jeunes filles violées, reste un symbole d’impunité qui suscite beaucoup d’émotion. Ces nouvelles conditions auront pour effet de mettre en échec les efforts de réforme du secteur de la sécurité et ne feront que creuser le faible niveau de confiance des citoyens guinéens à l’égard des acteurs de la sécurité, qui atteint selon les sondages 41 % pour la police et 52 % pour les forces armées. La suppression de cette clause est une manière pour Condé de s’assurer la loyauté des acteurs de la sécurité au détriment des citoyens ou de l’État.

Solidité de l’opposition et de la société civile

Le fait de redéfinir les limites applicables au cumul des mandats et d’accroître les prérogatives présidentielles est contraire aux vœux de la population guinéenne, dont 82 % se sont prononcés, dans un sondage d’Afrobaromètre, en faveur d’une limitation à deux mandats. La société civile et l’opposition politique guinéennes ont fait preuve d’une vigueur et d’un leadership remarquables dans la lutte contre la mise en œuvre du projet de Condé et ce, malgré la brièveté de l’expérience démocratique dans le pays. L’opposition a commencé à organiser des manifestations publiques et pacifiques dès mars 2018, alors que Condé tentait pour la première fois de remplacer le président alors en place de la Cour constitutionnelle, Kéléfa Sall, qui avait publiquement dissuadé le président de modifier la Constitution. Les forces de sécurité ont systématiquement répondu par une violence meurtrière : les groupes de défense des droits de l’homme évaluent à plus de 100 le nombre de personnes tuées depuis le début des manifestations.

Le Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), une coalition réunissant des partis politiques de l’opposition et des organisations non gouvernementales, a orchestré l’opposition au projet de Condé en dépit de l’interdiction faite à ses responsables de participer à des manifestations (contrôle des forces de sécurité autour de leur domicile) et des détentions arbitraires dont ils font l’objet. La presse a également montré une certaine résistance, malgré les arrestations de journalistes et les mesures de suspension et d’interdiction qui la frappent.

À l’approche du référendum, le FNDC a saisi la Cour de justice de la CEDEAO en guise de recours. Dans le cadre de cette saisine, le FNDC a allégué que toute modification de la Constitution entraînerait une violation de la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance, mais aussi du protocole de la CEDEAO sur la démocratie et la bonne gouvernance. Le FNDC soutient également que la Guinée a porté atteinte aux droits de l’homme de ses citoyens en réprimant avec violence les manifestations, ce qui constitue une nouvelle violation des chartes de l’UA et de la CEDEAO. La Cour de justice de la CEDEAO doit se prononcer sur l’affaire le 30 avril.

La voie à suivre

Condé, premier dirigeant démocratiquement élu de Guinée, semble vouloir poursuivre l’exercice de son pouvoir après son second mandat, alors même que sa façon de l’exercer se teinte de plus en plus d’autoritarisme. Son mode opératoire a déçu les citoyens qui espéraient que le pays tournerait enfin la page de son passé autoritaire.

Malgré l’opposition suscitée par l’adoption d’une nouvelle Constitution, Condé a réussi à porter un coup aux contrepoids démocratiques en Guinée. L’histoire des transitions démocratiques est toutefois marquée par une succession de périodes de progrès et de reculs, avant que la reprise ne se fasse vers de nouveaux progrès. Les aspirations démocratiques de la Guinée ne sont par conséquent pas déplacées. La clé des progrès futurs réside dans la persévérance des réformateurs de Guinée et dans le soutien des acteurs locaux et internationaux.

Les Guinéens ont fait la preuve de leur volonté constante de défendre les valeurs démocratiques par des moyens pacifiques et légaux. Il s’agit de protéger les droits qui doivent être les leurs dans une démocratie digne de ce nom. Cet engagement remonte directement au temps de l’opposition au régime de Dadis Camara, auteur d’un coup d’État, durant lequel a eu lieu le « massacre du stade » de 2009. L’une des priorités essentielles pour aller de l’avant sera par conséquent de donner à la société civile et aux réformateurs démocratiques l’espace nécessaire pour exprimer leur volonté de changement, mais aussi de s’atteler à rechercher des solutions en faveur d’un véritable dialogue politique national. Il conviendra notamment de libérer l’ensemble des opposants politiques emprisonnés pour cause d’opposition au gouvernement ou d’organisation de manifestations.

La réforme du secteur de la sécurité en Guinée doit être l’autre priorité. Le processus de dialogue politique est mis à mal lorsque des dirigeants s’appuient sur les acteurs de la sécurité pour favoriser leurs intérêts politiques. Le respect l’État de droit et des droits de l’homme est par ailleurs indispensable à la stabilité et au développement économique. Selon les groupes de défense des droits de l’homme, les violences commises par l’armée et la police contre les chefs de l’opposition et les manifestants n’ont pas cessé. Il incombe par conséquent aux partenaires locaux et internationaux d’accentuer leurs efforts pour que les institutions chargées de la sécurité en Guinée améliorent leur connaissance des règles de professionnalisme applicables à l’armée sur son territoire ainsi que du rôle qu’elles jouent dans la sécurité des citoyens.

La CEDEAO a un rôle décisif à jouer à deux égards : maintenir la Guinée sur les rails de la démocratie et institutionnaliser le processus de succession politique afin d’apporter une stabilité au plan local. Le protocole de la CEDEAO de 2001 sur la démocratie et la bonne gouvernance fournit un certain nombre d’options que l’entité régionale peut exercer lorsqu’un État porte atteinte aux éléments inhérents à toute démocratie. Elle pourrait d’abord organiser des échanges à un haut niveau avec Condé afin de le persuader de renoncer à ses fonctions en vue d’une transition dans la dignité. Une délégation de chefs d’État avait prévu une visite avant le référendum, une initiative annulée à la dernière minute après que Condé a indiqué qu’il se refuserait à les recevoir. En l’absence d’efforts de la part de la Guinée pour nouer de bonne foi un dialogue avec ses voisins, la CEDEAO pourrait interdire les voyages et geler les actifs des dirigeants guinéens, leur retirer les droits de vote ou exclure temporairement la Guinée de cet organe régional. La CEDEAO avait déjà procédé ainsi lors de crises précédentes, notamment en Gambie, au Burkina Faso et en Côte d’Ivoire. Les exemples des présidents Mahamadou Issoufou au Niger et Alassane Ouattara en Côte d’Ivoire, qui quitteront tous deux leurs fonctions cette année au terme de leur second mandat, donneront à la CEDEAO des moyens de pression accrus sur cette question.

Les acteurs démocratiques internationaux doivent également concourir au dialogue national et aux efforts diplomatiques de la CEDEAO. Leur intervention permettra d’opérer une transition sans heurt et de faire respecter les normes démocratiques en Guinée. Elle pourrait aussi favoriser l’engagement diplomatique, le retrait de certaines aides financières mais aussi des sanctions ciblées. Les organes bilatéraux et multilatéraux qui œuvrent en faveur de la démocratie, parmi lesquels l’OIF et la Communauté des démocraties, devraient également envisager de retirer à la Guinée sa qualité de membre et de ne pas reconnaître la validité du référendum ou des élections législatives.

Il est difficile de rompre avec cet héritage d’un pouvoir présidentiel incontrôlé en Guinée. Le pays est maintenant à la croisée des chemins et se doit de faire un choix parmi différentes conceptions de l’avenir. En orchestrant l’adoption d’une nouvelle Constitution, Condé cherche bien évidemment à consolider son propre pouvoir présidentiel. Les citoyens quant à eux aspirent à une gouvernance démocratique où règne la séparation des pouvoirs. La capacité de résistance des réformateurs nationaux et le soutien qu’ils recevront des acteurs locaux et internationaux dicteront la vision qui prévaudra à l’avenir.


Cet article a été initialement publié sur le site africacenter.org (4 mai 2020) sous le titre “Désamorcer la crise politique en Guinée”


Le Centre d’études stratégiques de l’Afrique est un organisme du Département de la défense des États-Unis, créé et financé par le Congrès américain, pour l’étude des problèmes de sécurité se rapportant à l’Afrique et sert de forum de recherche bilatérale et multilatérale, de communications, d’échange d’idées et de formations ouvert aux civils comme aux militaires.





Guinée: HRW rappelle que les restrictions pour raisons de santé publique ne doivent être ni arbitraires ni discriminatoires


En Guinée, les autorités ont harcelé, intimidé et procédé à l’arrestation arbitraire de membres et partisans de l’opposition au cours des dernières semaines, dans une atmosphère d’insécurité liée aux restrictions imposées dans le cadre de la lutte contre la pandémie de Covid-19, a déclaré aujourd’hui Human Rights Watch.

Le 27 mars 2020, le président guinéen Alpha Condé a décrété l’état d’urgence dans le pays et annoncé une série de mesures pour freiner la propagation de Covid-19, notamment la fermeture des frontières, l’interdiction des grands rassemblements, la fermeture des établissements scolaires et la restriction des déplacements à l’extérieur de Conakry, la capitale. Trois jours plus tard, un couvre-feu a été imposé de 21 heures à 5 heures et, le 13 avril, le port des masques de protection a été rendu obligatoire et l’état d’urgence a été prolongé jusqu’au 15 mai.

« Face au coronavirus, la confiance des Guinéens dans leur gouvernement doit être renforcée pour que soit respectée la distanciation sociale et d’autres comportements-barrières », a déclaré Ilaria Allegrozzi, chercheuse senior sur l’Afrique centrale à Human Rights Watch. « Dans un pays doté d’un faible système de santé, des leçons devraient être tirées de l’expérience d’Ebola, en impliquant et en gagnant la confiance des communautés locales. »

Au 29 avril, 1 240 cas de Covid-19 et sept décès avaient été confirmés par les autorités sanitaires, la majorité à Conakry. Le nombre d’infections est en hausse constante depuis que le premier cas a été recensé le 13 mars, mais compte tenu des capacités limitées de dépistage, il est probablement plus élevé. La Guinée ne dispose que de quatre laboratoires d’analyse compétents pour dépister le coronavirus, dont trois à sont situés à Conakry.

Entre le 26 mars et le 26 avril, Human Rights Watch s’est entretenu avec 15 victimes, membres des familles des victimes et témoins, ainsi qu’avec 15 agents de santé, journalistes, avocats, membres de l’opposition politique et activistes. Nos conclusions ont été transmises par e-mail le 23 avril à Albert Damatang Camara, ministre de la sécurité et de la protection civile, qui n’a pas répondu aux questions spécifiques qui lui ont été adressées.

La Guinée ne s’est remise que récemment de l’épidémie d’Ebola, qui a touché plus de 3 800 personnes et fait plus de 2 500 morts avant que l’éradication de ce virus ne soit annoncée en juin 2016. Le système de santé guinéen n’est pas en mesure de faire face à un déluge de cas de Covid-19, une situation qui rend le suivi des directives de distanciation sociale d’autant plus importantes, a observé Human Rights Watch. Cependant, les forces de sécurité, qui se livrent à des abus sur la population civile, appliquent les mesures d’urgence en vigueur d’une manière qui fragilise la confiance de l’opinion publique dans les autorités.

Des membres de l’opposition et des représentants d’organisations non gouvernementales ont exprimé leurs craintes que le gouvernement instrumentalise la crise comme excuse pour réprimer la dissidence et bafouer les droits humains. Un leader du Front National pour la Défense de la Constitution (FNDC), une coalition d’ONG et de partis d’opposition, a déclaré : « Nous avons fait des manifestations publiques le principal moyen d’exprimer nos frustrations. Les mesures d’urgence entravent notre liberté de réunion. Nous les acceptons à cause du Covid-19. Mais nous n’allons pas les accepter éternellement. »

Le droit international relatif aux droits humains exige que de telles restrictions pour raisons de santé publique ou d’urgence nationale ne soient ni arbitraires ni discriminatoires dans leur application, d’une durée limitée, respectueuses de la dignité humaine et soumises à réévaluation.

Le 18 avril, le FNDC a appelé à la tenue d’une « journée ville morte » le 21 avril à Conakry, afin de protester contre la décision du président Condé d’organiser une session en vue de nommer le président de l’Assemblée nationale et installer les 114 députés nouvellement élus, une décision qui contraindrait ces derniers à se réunir. La décision, a noté le FNDC, contrevient à l’interdiction par le gouvernement de vastes rassemblements pour freiner la propagation du coronavirus.

Au cours des derniers mois, avant et pendant le référendum constitutionnel et les élections législatives controversés du 22 mars, les forces de sécurité ont violemment réprimé les membres et partisans de l’opposition. Les partis d’opposition ont boycotté le vote, accusant le président Condé d’avoir l’intention d’instrumentaliser la révision constitutionnelle pour prolonger son mandat.

Le 14 avril, des gendarmes ont passé à tabac et arrêté, à son domicile de Tougue, en Guinée centrale, un membre du FNDC âgé de 38 ans qui était suspecté d’avoir incendié le poste de gendarmerie local le 28 février. « Il avait le paludisme et était sous perfusion au moment de son arrestation », a déclaré un membre de la famille. « Six gendarmes ont fait irruption chez lui, l’ont roué de coups de pied et giflé à plusieurs reprises. Lorsque je lui ai rendu visite le lendemain au poste de Labe, dans la région du Fouta-Djalon, j’ai demandé aux gendarmes de le faire hospitaliser. Ils ont refusé, préférant envoyer un médecin dans sa cellule. »

Le 16 avril, un policier est entré par effraction dans la maison d’une infirmière, dans le quartier Hamdallaye de Conakry et l’a passée à tabac, l’accusant de soutenir l’opposition. « Le policier qui l’a battue lui a dit : ‘‘Vous dérangez trop’’- parce qu’elle vit dans un bastion de l’opposition », a confié un témoin. « Ensuite, il l’a encore frappée à l’aide d’une matraque, sur tout le corps, y compris au visage. Son nez était enflé. Elle était souffrante pendant plusieurs jours ».

Le 17 avril, la police a procédé à l’arrestation arbitraire d’Oumar Sylla, un membre du FNDC, à son domicile de Conakry. Il a été détenu au siège du renseignement général et à la direction de la police judiciaire de Conakry jusqu’au 24 avril, date à laquelle il a été présenté au tribunal de première instance de la capitale, accusé de disséminer de fausses informations, avant d’être incarcéré à la prison centrale de Conakry. Les avocats de Sylla avaient refusé d’assister leur client jusqu’à ce que son casait été présenté au procureur pour protester contre ce qu’ils avaient qualifié de « procédures illégales » de la police.

Les habitants de Conakry ont fait état d’une atmosphère d’insécurité dans le cadre du couvre-feu.

Le 8 avril, une femme âgée de 30 ans a déclaré qu’un homme en uniforme qui l’accusait d’avoir enfreint le couvre-feu l’avait cambriolée et rouée de coups. « Vers 22 heures, j’étais couchée », a-t-elle expliqué. « Il n’y avait pas de lumière dans le quartier. J’ai entendu du bruit et j’ai ouvert ma porte. Je me suis trouvée devant un homme en uniforme avec une arme à feu. Il faisait trop sombre pour savoir s’il s’agissait d’un policier ou d’un gendarme. Il m’a dit que j’enfreignais le couvre-feu. J’ai répondu que non, car j’étais dans ma propre maison. Il a menacé de m’arrêter, puis m’a giflée et frappée à coups de poing. Il a volé mon téléphone et mon ordinateur portable avant de partir. Je n’ai pas réagi parce que j’avais peur qu’il me viole. »

Six personnes ont déclaré que leurs magasins du marché de Kagbélen, à Conakry, avaient été pillés les 1er et 2 avril, pendant le couvre-feu. L’un des propriétaires a déclaré : « Je suis arrivé dans mon magasin de vêtements le matin du 3 avril et j’ai découvert qu’il avait été cambriolé. La porte avait été détruite et tous mes biens, d’une valeur d’environ 60 millions de francs, [l’équivalent de 624 dollars], avaient été volés. »

Le 3 avril, les victimes et d’autres commerçants ont organisé une manifestation et érigé des barricades sur le marché de Kagbélen, accusant les forces de sécurité de piller leurs magasins. Selon un représentant syndical, les pillages ont cessé après qu’il a signalé les cambriolages au maire du canton de Dubreka, qui a compétence sur le marché de Kagbélen.

« Les abus perpétrés par les forces de sécurité exacerbent une méfiance déjà profonde envers les autorités, créant un obstacle supplémentaire à la lutte contre le Covid-19 », a conclu Ilaria Allegrozzi. « Le gouvernement devrait maîtriser ses forces de sécurité et veiller à ce qu’elles respectent les droits humains dans le cadre de la mise en œuvre des restrictions. »


HRW





Le FNDC appelle «les forces de défense et de sécurité à se mettre du côté du peuple»


Il est hors de question pour le FNDC de reconnaître une Institution ou une Constitution issue de cette mascarade électorale. Le peuple de Guinée ne reconnaît que la Constitution de 2010.

Déclaration N°92 du FNDC (25/03/2020)


Déclaration

En pleine épidémie de coronavirus, Alpha Condé a organisé un
simulacre de vote malgré des cas avérés d’infection, exposant ainsi les
populations guinéennes à la pandémie.

Le FNDC félicite le peuple de Guinée pour avoir massivement suivi, sur l’ensemble du territoire national, le mot d’ordre de s’opposer au coup d’état constitutionnel que Alpha Condé avait décidé de perpétrer le 22 mars 2020.

Le FNDC se réjouit de la détermination et du sens élevé de responsabilité avec lesquels le peuple de Guinée a empêché cette forfaiture.

Le FNDC déplore et condamne énergiquement les violences exercées sur les populations civiles par les forces de défense et de sécurité puissamment appuyées par les unités spéciales de l’Armée et une milice aux ordres du Pouvoir.
Ces violences inouïes ont entraîné la mort, dans des conditions atroces, de 9 personnes à Conakry, une à Dubréka, une à Mamou, plus de 21 personnes à Nzérékoré selon un bilan provisoire et une centaine de blessés par balles.

Au cours de ces tristes journées de terreur, des lieux de culte ont été incendiés et des bâtiments publics et privés ont été pillés et vandalisés par les forces de l’ordre et la milice aux ordres du Pouvoir.
Le FNDC présente ses condoléances aux familles éplorées et à tout le peuple de Guinée. Nous réaffirmons notre soutien et notre solidarité à toutes les victimes de ces violences, à toutes les personnes torturées, blessées et emprisonnées pour avoir défendu notre Constitution.

Nul besoin de démontrer l’échec du coup d’état constitutionnel du 22 mars 2020 grâce au combat mené par le peuple de Guinée uni et rassemblé autour du FNDC et des valeurs essentielles de la Nation.

Il est hors de question pour le FNDC de reconnaître une Institution ou une Constitution issue de cette mascarade électorale. Le peuple de Guinée ne reconnaît que la Constitution de 2010.

Le FNDC remercie la communauté internationale pour son soutien à la lutte légitime du peuple de Guinée en vue de l’instauration de la démocratie et l’État de droit.

Enfin, le FNDC appelle :
• le peuple de Guinée à plus de détermination dans la lutte pour la préservation des acquis démocratiques et pour la restauration de la dignité et de la fierté du guinéen.
• la communauté internationale à la mise en place d’une Commission d’enquête indépendante sous l’égide des Nations Unies pour faire la lumière sur les crimes commis dans le cadre des manifestations pour la défense de la Constitution guinéenne.
• les forces de défense et de sécurité à arrêter les violences contre les citoyens et à se mettre du côté du peuple dont elles tirent exclusivement la légalité et la légitimité de leur mission.
• le peuple de Guinée à rester uni et mobilisé pour mettre un terme au régime dictatorial d’Alpha Condé et à faire face au défi de la lutte contre le coronavirus.

Ensemble unis et solidaires, nous vaincrons !

Conakry, le 25 mars 2020





Le crash de la démocratie guinéenne: quelques titres de la presse nationale


Le crash de la démocratie guinéenne : la presse nationale s’interroge


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Guineenews



Guineematin


Ledjely


Mosaiqueguinee


Visionguinee


Africaguinee





Violences, mascarade électorale et des morts en Guinée : les titres de la presse internationale


Violences, mascarade électorale et des morts en Guinée : la presse internationale en parle


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La CROIX


RFI


EL PAIS


TAZ


France 24


Financial Afrik


Mediapart


Le Temps


The Guardian


WakatSéra


TV5 Monde


Aljazeera


Le Monde





La Guinée clôture une violente journée de référendum et de législatives


La
Guinée a vécu dimanche un référendum et des législatives ternis par des
violences, avec la mort d’au moins 10 manifestants tués par les forces
de l’ordre selon l’opposition, qui a boycotté ces scrutins pour faire
barrage à un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé.

Ce
bilan n’a cependant pu être confirmé de source indépendante et les
autorités n’étaient pas joignables pour réagir aux affirmations de
l’opposition.

Le vote, dont le terme était fixé à 18H00 (GMT et
locales), a été progressivement clôturé dimanche à Conakry où des
bureaux ont fermé plus tôt que prévu à cause des incidents, selon un
journaliste de l’AFP.

Les manifestants anti-Condé ont “bravé les balles des forces de l’ordre qui ont arrêté massivement, tiré aveuglément, molesté cruellement, tuant au moins 10 personnes et blessant par balle plusieurs dizaines” de personnes, a indiqué dans un communiqué le FNDC, le collectif de partis d’opposition et de la société civile qui lutte contre un éventuel troisième mandat de M. Condé

Le
FNDC “appelle à intensifier les manifestations demain lundi 23 mars et
mardi 24 mars 2020 avec pour objectif ultime le départ du dictateur
Alpha Condé”.

Au moins 32 manifestants avaient jusqu’à dimanche après-midi été tués depuis le début à la mi-octobre de la vague de protestation, qui a également coûté la vie à un gendarme, selon un décompte de l’AFP. M. Condé, 82 ans, a été élu en 2010 et réélu en 2015.

Aucune indication n’était disponible dimanche soir sur la
participation, les résultats et leur date de publication. Les
responsables de l’Administration territoriale (Intérieur) et la
Commission électorale n’ont pas répondu aux sollicitations de l’AFP.

L’actuelle
Constitution limite à deux le nombre de mandats, la nouvelle que
propose M. Condé également. Mais, accusent ses opposants, elle lui
permettrait de remettre son compteur à zéro afin de se succéder à
lui-même fin 2020.

– attaque contre des gendarmes –

Le début
du vote, prévu à 08H00 (GMT et locale), a commencé à l’heure indiquée
dans un bureau proche du palais présidentiel à Conakry mais il a été
perturbé à de nombreux endroits, selon un journaliste de l’AFP et des
témoins qui ont affirmé avoir constaté une faible participation.

A
Ratoma (banlieue de Conakry), des jeunes ont attaqué des gendarmes
devant des bureaux de vote dans une école. Une autre école dans la même
zone a été attaquée et le matériel électoral saccagé.

Des affrontements ont eu lieu dans des banlieues de Conakry comme Cosa, Hamdallaye, Dar-es-salam et Lambanyi.

Des
troubles sont aussi survenus à Mamou (centre), à Boké (ouest) et à
N’Zérékoré (sud-est), selon des témoins. Du matériel électoral a été
détruit dans des localités comme Kobéla (sud), Dinguiraye (nord-est) et
Konah (nord-est).

“J’espère que tout se passera dans la paix et la
tranquillité et que le peuple guinéen, comme en 1958, montrera sa
maturité”, a déclaré, après avoir voté à Conakry, le président Condé, en
allusion au “non” de la Guinée, alors colonie française, au référendum
organisé par De Gaulle et qui a ouvert dès 1958 la voie à l’indépendance
du pays ouest-africain.

Le référendum et les législatives
avaient été reportés à la dernière minute il y a trois semaines dans un
climat de vives tensions.

C’est surtout le projet de nouvelle Constitution qui déchaîne les passions.

– Troisième mandat? –

M.
Condé assure qu’il s’agit de doter son pays d’une Constitution
“moderne”. Elle codifierait l’égalité des sexes, interdirait l’excision
et le mariage des mineurs. Elle veillerait à une plus juste répartition
des richesses en faveur des jeunes et des pauvres. Mais M. Condé
entretient le flou sur sa volonté ou pas de briguer un troisième mandat.

Les remises en cause internationales quant à la crédibilité du vote se sont succédé, étayées par la présence sur les listes électorales de 2,5 millions de noms douteux, soit le tiers du fichier.

Les
recommandations des organisations internationales sur le fichier ont été
“intégralement prises en compte”, a affirmé le président Condé dans un
discours publié samedi sur la page Facebook de la présidence guinéenne.

L’opposition
avait promis de boycotter le vote et d’en empêcher la tenue. La
persistance des troubles n’a pas dissuadé le gouvernement d’organiser
les scrutins, pas même l’apparition récente du coronavirus.

La
Guinée a déclaré deux cas de contamination dont un a été guéri, a
annoncé samedi le gouvernement. La présence du Covid-19 suscite
l’attention dans un pays où la fièvre Ebola a fait 2.500 morts entre
2013 et 2016.

Des chefs d’Etat ouest-africains ont annulé leur mission de bons offices prévue au cours de la semaine. Avant le vote, deux grandes organisations régionales avaient renoncé à déployer leurs observateurs ou bien les avaient rappelé.

Par Mouctar BAH AFP


Cet article est republié à partir de information.tv5monde.com. Lire l’original ici





Le rapport de l’OIF qui pointe les failles du processus électoral en Guinée


Republication de contenu RFI








Cinq choses à savoir sur Alpha Condé


SCAN TV & VIDEO [LE CHOIX DE LA REDACTION]



Extrait de Le Monde Afrique : (12 mars 2020)





En Guinée, deux leaders du FNDC interpellés, un journaliste français expulsé


Republication de contenu*








Message du FNDC à l’armée nationale


Le FNDC

Appelle l’Armée nationale à demeurer républicaine et à cesser de protéger un seul Guinéen, M. Alpha Condé contre tout le Peuple de Guinée.


Déclaration

La Guinée entame une semaine cruciale de son Histoire.
Monsieur Alpha Condé est en passe de perpétrer son coup d’Etat constitutionnel
en dépit de la désapprobation du peuple de Guinée et des multiples
interventions des autorités morales et religieuses, des leaders d’opinion et de
la communauté internationale.

Ayant noté que tous les sacrifices consentis par le
Peuple de Guinée (assassinats, emprisonnement, kidnapping) ainsi que toutes les
démarches engagées pour convaincre Monsieur Alpha Condé d’abandonner son projet
de troisième mandat, ont toutes échoué ;

  • Considérant le Coup d’Etat civil en cours depuis le 19 décembre 2019 et qui est maquillé sous le label de ‘’référendum’’ ; 
  • Considérant le parjure dont M. Alpha CONDÉ s’est rendu coupable en violant son serment de respecter et de faire respecter la Constitution ;
  • Considérant le refus de M. Alpha Condé de mettre en place la Haute Cour de justice qui aurait pu le juger pour haute trahison ;

Le FNDC, porteur des aspirations démocratiques du Peuple de Guinée, décide de ne plus reconnaître M. Alpha CONDÉ comme Président de la République de Guinée et demande son départ immédiat et sans conditions du pouvoir.

Par conséquent, le FNDC :

  • Appelle toutes les guinéennes et tous les guinéens à sortir massivement à partir de ce jeudi 27 février pour empêcher par tous les moyens légaux le putsch constitutionnel de M. Alpha CONDE;
  • Invite tous les citoyens à user de la légitime défense pour résister, conformément à l’article 21, alinéa 4 de la Constitution, aux milices que M. Alpha Condé tente de constituer pour perpétrer son coup d’Etat constitutionnel ;
  • Appelle tous les citoyens guinéens civils et militaires à se mobiliser pour déjouer le coup d’Etat constitutionnel en cours ;  
  • Exhorte ses antennes dans les préfectures, les sous-préfectures, les communes, les quartiers et districts ainsi que toutes ses organisations membres et leurs démembrements sur l’ensemble du territoire à redoubler d’engagement pour éviter le recul démocratique; 
  • Met en garde les représentants des institutions de la République et les administrateurs territoriaux quant aux conséquences de leur collaboration directe ou indirecte avec ceux qui ont trahi la Constitution, la République et la souveraineté nationale ;     
  • Appelle l’Armée nationale à demeurer républicaine et à cesser de protéger un seul Guinéen, M. Alpha Condé contre tout le Peuple de Guinée.

Par ailleurs, le FNDC :

  • Invite la CEDEAO et l’UA au respect de leurs propres principes sur la gouvernance démocratique, notamment en ce qui concerne les coups d’Etat, car qu’il soit militaire ou civil, un Coup d’Etat équivaut à un Coup d’Etat ;
  • Félicite et remercie les députés européens pour leur courageuse prise de position et demande à la Commission de l’UE de prendre des sanctions concrètes contre le régime dictatorial et sanguinaire de M. Alpha Condé ;
  • Appelle la CEDEAO, l’UA et le Conseil de sécurité des Nations Unies à prendre des sanctions collectives et individuelles contre les promoteurs du coup d’Etat constitutionnel ainsi que les auteurs et commanditaires des répressions sanglantes et crimes contre l’humanité en Guinée ;

La lutte de longue haleine entreprise par le Peuple
souverain de Guinée épris de paix et de justice, ne s’arrêtera pas au 1er mars
et continuera jusqu’au départ de M. Alpha Condé.

Ensemble unis et solidaires, nous vaincrons !

Conakry, le 24 février 2020