Histoire Politique: 2 octobre 1958, proclamation de l’indépendance de la Guinée


Histoire Politique


Après avoir été membre de la fédération de l’Afrique-occidentale française (AOF) depuis 1904 et avoir obtenu une autonomie administrative relative en 1956, la Guinée rejette la proposition d’entrer au sein de la Communauté française et proclame son indépendance le 2 octobre 1958.

Le Parti démocratique de Guinée (PDG) d’Ahmed Sékou Touré est au cœur de la marche vers l’indépendance qui s’accélère à partir de 1958 avec la proposition de nouvelle Constitution présentée par le président français Charles de Gaulle. Lors du référendum du 28 septembre 1958, les Guinéens sont les seuls à refuser, et ce dans une proportion de 95 % (1 136 324 oui, contre 56 981 non), de joindre la Communauté française. L’indépendance est proclamée le 2 octobre, entraînant une rupture des liens administratifs et financiers entre la Guinée et la France qui retire ses cadres et ses crédits. Au cours des années qui suivent, la Guinée, un territoire riche en ressources naturelles, se rapproche du Mali et du Ghana avec qui elle forme l’Union des États africains. Elle obtient également des crédits de l’Union des républiques socialistes soviétiques (URSS) et signe un traité d’amitié avec la Chine. Le PDG y est parti unique et Sékou Touré, ardent défenseur de l’indépendance, est élu président le 15 janvier 1961 par 99 % des électeurs. Il le restera jusqu’à sa mort, en 1984.

La Guinée, cinq ans après le 28 septembre 1958

En 1963, Sékou Touré, dans une interview qu’il a accordé à un journaliste de la télévision française, revient sur les circonstances de l’indépendance de la Guinée.

« [  ] je dirais que j’ai une grande considération pour le général de Gaulle. Je vous le dis, parce que je connais la France, parce que je sais la mutation politique qu’il a pu opérer en un minimum de temps. Je sais surtout les graves problèmes qu’il a abordés et qu’il a pu résoudre, sans que l’unité nationale n’ait été mise en cause en France, et même l’indépendance de la Guinée. Nous pourrons dire que nous la devons au général de Gaulle [  ] » Sékou Touré



En votant « non » au référendum sur la Communauté française le 28 septembre 1958, la Guinée accède immédiatement à l’indépendance. La France interprète ce vote comme une volonté de « sécession ». Elle supprime brutalement ses contributions techniques et financières à la Guinée et tente de l’isoler. La République de Guinée est proclamée dès le 2 octobre. Son président, Sékou Touré, se tourne alors simultanément vers les pays africains, les pays de l’Est comme de l’Ouest pour obtenir sa reconnaissance et la conclusion d’accords de coopération. L’Union soviétique et ses satellites, puis la Chine répondent favorablement. Cet appui se matérialise dès 1959 par une série d’accords commerciaux (envoi de matériels, de textile et de biens de consommation en échange de produits agricoles), industriels et culturels (briqueterie, centrale électrique, imprimerie « Patrice Lumumba », etc.) et sur la sécurité (appui des services de la Sécurité tchécoslovaque). Mais Sékou Touré n’entend pas s’inféoder à l’Union Soviétique, d’autant plus qu’il se présente comme un fer de lance des non alignés. Il pratique surtout une politique de neutralité en demandant équitablement une aide à tous. Un rapprochement s’opère à partir de 1962 avec les États-Unis, avec l’envoi des Peace Corps, de surplus alimentaires, et le développement des investissements dans les gisements de bauxite. La situation économique reste très précaire en 1963 mais le régime guinéen résiste. Au lendemain des accords d’Évian, Sékou Touré tente un rapprochement avec de Gaulle. La France se montre plus réceptive à la main tendue, en partie en raison de la concurrence des intérêts américains, et des accords de coopération sont signés en mai 1963.

28 septembre 1958: le jour où la Guinée a dit non à de Gaulle

La Guinée est devenue le premier pays d’Afrique subsaharienne à devenir indépendant de la France, après avoir voté «non» le 28 septembre 1958 au référendum instituant une «communauté» franco-africaine, proposée par le général de Gaulle. Avant ce vote, de Gaulle avait effectué un périple en terre africaine pour défendre son idée de communauté avec la France. Retour sur ces événements.

Revenu au pouvoir à l’occasion de la crise algérienne du 13 mai 1958, le général de Gaulle se lance dans une série de réformes, dont la modification de la constitution qui inclut un processus de décolonisation africaine avec une idée maîtresse, réunir les futurs pays indépendants africains dans une large communauté avec la métropole. Ce projet est inscrit dans le texte constitutionnel qui doit être soumis à référendum, en septembre 1958, aux Français de métropole mais aussi aux habitants des territoires coloniaux.

Pour défendre son idée, à l’été 1958, le général se lance dans une grande tournée des pays africains, d’Alger à Dakar, en passant notamment par Conakry.

Le 24 août 1958, il engage à Brazzaville la décolonisation de l’Afrique noire en proposant la création de la Communauté, cadre qu’il veut donner à l’indépendance des Etats de l’Afrique noire francophone. Lors de cette tournée africaine, de Gaulle propose «au suffrage de tous les citoyens des territoires d’Afrique et des citoyens de métropole» de former une Communauté dans laquelle chacun des Etats membres accédera à l’autonomie, avec un pouvoir exécutif et législatif. La défense, la politique étrangère, la politique économique et financière, le contrôle de la justice relèveront de l’exécutif de la Communauté.

La Communauté, cela veut dire Paris… De Gaulle est clair lorsqu’il affirme: «Il est naturel et légitime que les peuples africains accèdent à ce degré politique où ils auront la responsabilité entière de leurs affaires intérieures, où il leur appartiendra d’en décider eux-mêmes». Les affaires intérieures, pas plus.

Le 28 août, de Gaulle arrive à Conakry, capitale de ce qui n’est pas encore la Guinée. Il est accueilli par le jeune maire et député (RDA, Rassemblement démocratique africain, apparenté PC) du territoire, Ahmed Sékou Touré. Du haut de ses 36 ans, vêtu de son boubou blanc, signe de son africanité, il oppose au vieux général, âgé de 67 ans, un discours fort: «Nous ne renoncerons pas et nous ne renoncerons jamais au droit légitime et naturel à l’indépendance.»

«Nous préférons la pauvreté dans la liberté à la richesse dans l’esclavage»

Le chantage à l’aide française n’a pas marché avec le jeune leader guinéen qui, fidèle aux rêves de l’époque, croit en une «Afrique libre et décomplexée, anti-colonialiste, panafricaniste». Il lance à de Gaulle une phrase qui restera dans la légende politique du continent: «Nous préférons la pauvreté dans la liberté à la richesse dans l’esclavage.» 

Ce à quoi le général répond: «On a parlé d’indépendance. Et bien, je le dis ici plus haut qu’ailleurs, l’indépendance est à la disposition de la Guinée. Elle peut la prendre en disant “non” à la proposition qui lui est faite et, dans ce cas, je garantis que la métropole ne s’y opposera pas.» Et il ajoute: «Elle en tirera, bien sûr, des conséquences, mais d’obstacles elle n’en fera pas et votre Territoire pourra comme il le voudra et dans les conditions qu’il voudra, suivre la route qu’il voudra.»

Selon les témoins de l’époque, le général de Gaulle est furieux. Il dira à ses proches: «La Guinée, Messieurs, n’est pas indispensable à la France. Qu’elle prenne ses responsabilités. (…) Nous n’avons plus rien à faire ici. Le 29 septembre, la France s’en ira.» Vexé, le chef du gouvernement français annulera toutes les réceptions prévues, ne dînera pas avec Sékou Touré comme convenu initialement.

95% de «non» en Guinée

Un mois plus tard, le 28 septembre, lors du référendum constitutionnel, tous les territoires d’Afrique (et surtout la métropolie) votent «oui»… sauf un: la Guinée. 95,2% des électeurs votent «non», alors que dans quasiment tous les autres futurs pays africains, le «oui» l’emporte avec des majorités dépassant les 90% (à l’exception de Magagascar, 77%, la future Djibouti (75%) et le Niger (78%).

Le «non» l’ayant emporté, la Guinée proclame son indépendance le 2 octobre. Mais les conséquences sont rapidement visibles. La France se retire brutalement. «Le 29 septembre, le gouverneur français informe Sékou Touré qu’à partir du 30, Paris mettra fin à toutes les aides jusqu’alors consenties et retirera son personnel technique, y compris les forces armées», rappelle un universitaire.

Le nouveau pays recherche des appuis en Afrique, auprès de Kwame N’Krumah (alors Premier ministre du Ghana) notamment, tandis que le monde soviétique propose de combler le départ des Français. Finalement, les relations avec la France se normalisent dans le milieu des années 60. Sékou Touré restera au pouvoir jusqu’à sa mort en 1984. Son geste historique restera cependant terni par sa gestion dictatoriale.





Quelques grandes dates de l’histoire politique de la Guinée (1958 à 2015)


2 octobre 1958 : Proclamation de l’indépendance de la Guinée. Ahmed Sékou Touré est président.

12 Décembre 1958 : La République de Guinée est admise à l’ONU

1 mars 1960 : La Guinée sort de la zone franc

1965-1976 : Rupture des relations diplomatiques entre la France et la Guinée.

25 sept. /2 oct 1967 : Congrès du Parti démocratique guinéen (PDG). Le socialisme est officiellement proclamé comme voie de développement en Guinée.

22 novembre 1970 : Tentative de débarquement de Portugais et d’exilés guinéens. 92 condamnations à mort sont prononcées lors d’un procès.

24/26 avril 1972 : Congrès du PDG. Sékou Touré est réélu à la présidence du parti. Création d’un poste de Premier ministre confié à Lansana Béavogui.

18 septembre 1973 : Rupture des relations diplomatiques avec le Sénégal.

14 juillet 1975 : Rétablissement des relations diplomatiques avec la France.

27 août 1977 : Révolte des femmes contre le régime de Sékou Touré.

18 mars 1978 : Réconciliation de la Guinée avec le Sénégal et la Côte d’Ivoire.

16-20 septembre 1982 : Visite du président Sekou Touré à Paris

Du 16 au 20, Ahmed Sekou Touré, président de la République de Guinée, est à Paris pour une visite officielle qui ne va pas sans créer un certain malaise, en particulier au sein du Parti socialiste français, en raison des violations des droits de l’homme en Guinée. À la veille de sa visite, le président guinéen a en effet confirmé l’exécution de huit détenus politiques mariés à des françaises. Cependant, cette visite a surtout des objectifs économiques et, le 17, au C.N.P.F., ont lieu des discussions concernant l’exploitation des riches gisements guinéens de bauxite, de fer et de phosphate, ainsi que la création d’une industrie électrométallurgique.

26-30 mars 1984 : Mort du président Sékou Touré

Le 26, Ahmed Sékou Touré, chef de l’État guinéen depuis 1958, date de l’accession à l’indépendance, meurt aux États-Unis, après avoir subi une intervention chirurgicale. Il avait eu la veille une crise cardiaque alors qu’il se trouvait en Arabie Saoudite, au cours d’un voyage qu’il effectuait pour préparer le sommet de l’O.U.A. prévu pour le mois de mai à Conakry.

Le 27, Lansana Beavogui, Premier ministre, est nommé chef du gouvernement par intérim.

Le 30, les obsèques du président décédé ont lieu à Conakry en présence de très nombreux chefs d’État étrangers. Pierre Mauroy représente la France.

3-11 avril 1984 : Prise du pouvoir par les militaires

Le 3, un Comité militaire de redressement national (C.M.R.N.) prend le pouvoir en Guinée, une semaine après la mort du président Sékou Touré. Les militaires annoncent la dissolution du Parti démocratique de Guinée (P.D.G.) ainsi que de l’Assemblée nationale, la suspension de la Constitution et s’engagent à créer « les bases d’une véritable démocratie évitant à l’avenir toute dictature personnelle ». Le colonel Lansana Conte, qui préside le C.M.R.M., est nommé chef de l’État.

Le 8, le colonel Lansana Conte tient sa première conférence de presse : il indique que les anciens responsables ne seront pas exécutés mais jugés pour fautes économiques et administratives. Les nouveaux dirigeants sont résolus à faire respecter les droits de l’homme.

Le 11, les grandes lignes de la politique du nouveau régime sont présentées: libéralisation de l’économie, réforme de structures en matière d’éducation et de santé. Le colonel Conte réaffirme l’adhésion de la Guinée aux chartes de l’O.N.U., de l’O.U.A. et du mouvement des Non-Alignés.

19-23 décembre 1993 : Victoire du président Lansana Conté à l’élection présidentielle

Le 19, la première élection présidentielle multipartite se déroule sur fond de violences meurtrières. Repoussée de quinze jours en raison de son impréparation, elle ne satisfait pas l’opposition qui demandait son report au début de l’année 1994.

Le 23, les résultats officiels font état de la victoire du président sortant, le général Lansana Conté, arrivé au pouvoir en avril 1984 à la faveur d’un coup d’État, qui recueille 51,70 p. 100 des suffrages exprimés. Rentré d’exil en mai 1991, Alpha Condé, candidat du Rassemblement du peuple de Guinée, obtient 19,55 p. 100 des voix. Ce dernier conteste la victoire au premier tour du président sortant.

11 juin 1995 : Élections législatives contestées

Le Parti de l’unité et du progrès du président Lansana Conté remporte les premières élections législatives pluralistes de l’histoire du pays, avec 71 sièges sur 114. Dans l’opposition, le Rassemblement du peuple de Guinée d’Alpha Condé obtient 19 élus ; le Parti du renouveau et du progrès de Siradiou Diallo et l’Union pour la nouvelle république de Ba Mamadou ont chacun 9 députés. La validité du scrutin est contestée par les observateurs internationaux et l’opposition qui dénoncent de nombreuses fraudes. En décembre 1993, l’élection du président Conté, au pouvoir depuis le coup d’État de mars 1984, avait rencontré les mêmes critiques.

2-21 février 1996 : Tentative de coup d’État

Le 2, des centaines de militaires manifestent, dans les rues de Conakry, pour obtenir l’augmentation de leur solde et le départ du ministre de la Défense, le colonel Abdourahamane Diallo. La mutinerie qui s’accompagne de pillages se transforme rapidement en tentative de putsch. Les militaires attaquent le palais présidentiel et constituent un Comité de salut national, sur le modèle du Conseil de salut national formé par les putschistes nigériens en janvier.

Le 4, les combats, qui ont fait une cinquantaine de morts, s’apaisent. Le président Lansana Conté confirme le limogeage du colonel Diallo et l’augmentation de la solde qui avaient été annoncés dès le début des troubles.

Le 6, cinq officiers, dont certains auraient déjà été à l’origine d’une précédente tentative de putsch en juin 1994, sont arrêtés.

Le 21, dans une « adresse à la nation », le président Conté distingue les soldats qui revendiquaient une amélioration de leur situation des « fils indignes » qui voulaient prendre le pouvoir. Il accuse sans les nommer certains membres de l’opposition de complicité avec les putschistes. Le chef de l’État n’évoque pas les conclusions de la « commission de réflexion » constituée par l’Assemblée nationale après les troubles, qui préconisent une réforme de l’armée ainsi qu’une concertation entre l’État et les syndicats au sujet de la politique salariale.

14-15 décembre 1998 : Réélection controversée du général Lansana Conté

Le 14, le général Lansana Conté remporte l’élection présidentielle dès le premier tour, avec 56,1 p. 100 des suffrages. Mamadou Bâ, du Parti du renouveau et du progrès, obtient 24,6 p. 100 des voix et Alpha Condé, chef du Rassemblement du peuple de Guinée, 16,9 p. 100. L’opposition, qui avait conclu un accord pour empêcher le président sortant d’être élu au premier tour, dénonce des fraudes. Des irrégularités avaient déjà entaché le premier scrutin présidentiel pluraliste remporté par le général Conté, en décembre 1993.

Le 15, Alpha Condé est arrêté alors qu’il aurait tenté de fuir le pays. Les jours suivants, des manifestants réclament sa libération, à Conakry et dans d’autres villes du pays.

11 septembre 2000 : Condamnation de l’opposant Alpha Condé

La Cour de sûreté de l’État annonce la condamnation de l’opposant Alpha Condé à cinq ans de prison pour atteinte à l’autorité de l’État, au terme d’un procès entamé en avril. Le chef du Rassemblement du peuple de Guinée était jugé pour avoir tenté d’organiser un putsch contre le régime du président Lansana Conté, lors de l’élection présidentielle de décembre 1998 à laquelle il était candidat. Il avait été arrêté avant la proclamation des résultats. Alpha Condé a toujours nié les faits qui lui sont reprochés.

11 novembre 2001 : Renforcement des pouvoirs du président Lansana Conté

La révision constitutionnelle visant à permettre au président Lansana Conté, au pouvoir depuis 1984, de briguer un troisième mandat en 2003 est approuvée par référendum par 98,4 p. 100 des suffrages. L’opposition, qui avait appelé au boycottage du scrutin, conteste les résultats. La limitation du nombre des mandats présidentiels est supprimée, ainsi que la limite d’âge du candidat. En outre, la réforme accroît le pouvoir du chef de l’État face à l’Assemblée nationale.

21 décembre 2003 : Réélection du président Lansana Conté

Lansana Conté, au pouvoir depuis avril 1984, est réélu dès le premier tour avec 95,6 p. 100 des suffrages en dépit de la grave maladie dont il est atteint. En raison du désistement du candidat de l’opposition, qui boycottait le scrutin, le général-président n’était confronté qu’à un seul candidat, inconnu, Mamadou Bhoye Barry, unique élu d’un petit parti.

10-26 janvier 2007 : Crise politique

Le 10, les syndicats lancent un mouvement de grève générale qui est brutalement réprimé. Les jours suivants, les manifestants, qui avançaient des revendications sociales et politiques ponctuelles, en viennent à exiger la démission du président Lansana Conté, qui est gravement malade.

Le 22, l’armée ouvre le feu sur une marche pacifique de manifestants.

Le 26, au terme de deux semaines de crise qui ont fait cinquante-neuf morts, le président Conté accepte de nommer un chef du gouvernement auquel serait déléguée une grande partie de ses prérogatives. Depuis le limogeage du précédent Premier ministre Cellou Diallo, en avril 2006, Lansana Conté assurait aussi les fonctions de chef du gouvernement.

9-26 février 2007 : Nomination d’un Premier ministre de consensus

Le 9, le président Lansana Conté, qui avait accepté en janvier de céder une partie de ses pouvoirs à un Premier ministre, nomme à ce poste un de ses proches, Eugène Camara. Face à cette décision qu’ils considèrent comme une « insulte », les syndicats appellent à la reprise de la grève générale. Les jours suivants, les troubles font des dizaines de morts à Conakry et dans les villes de province.

Le 11, les syndicats réclament pour la première fois la démission du président Conté.

Le 12, ce dernier proclame l’état de siège, qui interdit notamment toute manifestation.

Le 25, alors que l’Assemblée nationale a refusé de prolonger l’état de siège, Lansana Conté accepte de nommer un nouveau Premier ministre de consensus parmi quatre candidats proposés par les syndicats, selon un accord conclu sous l’égide de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest. La grève générale est suspendue.

Le 26, l’annonce de la nomination comme Premier ministre de Lansana Kouyaté, un diplomate de carrière, est accueillie par la rue comme une victoire sur le président Conté.

22-29 décembre 2008 : Mort du président Lansana Conté et coup d’État militaire

Le 22, le président Lansana Conté, au pouvoir depuis avril 1984, meurt des suites d’une maladie. Le président de l’Assemblée nationale Aboubacar Somparé doit assurer l’intérim du pouvoir.

Le 23, le Premier ministre Ahmed Tidiane Souaré appelle au calme et charge l’armée de maintenir l’ordre. Cependant, le capitaine Moussa Dadis Camara, responsable de l’approvisionnement en carburant de l’armée, déclarant agir au nom de la lutte contre « la corruption généralisée, l’impunité et l’anarchie » et contre « la situation économique catastrophique », annonce sur les ondes la dissolution du gouvernement, la suspension des institutions et la mise en place d’un Conseil national pour la démocratie et le développement composé de civils et de militaires. Le chef d’état-major, le général Diarra Camara, assure que les mutins sont minoritaires au sein d’une armée très divisée. L’Union africaine, l’O.N.U., l’Union européenne et les États-Unis condamnent la tentative de coup d’État.

Le 24, tandis que les putschistes promettent l’organisation d’élections libres en décembre 2010, le capitaine Camara se proclame président de la République.

Le 25, le Premier ministre et une trentaine de ministres font allégeance au capitaine Camara.

Le 26, le président du Sénégal Abdoulaye Wade appelle à soutenir la junte au pouvoir à Conakry.

Le 29, l’Union africaine suspend la Guinée.

15 janvier 2009 : Formation d’un gouvernement

La junte militaire, appelée Conseil national pour la démocratie et le développement et conduite par le capitaine Moussa Dadis Camara, qui s’est proclamé président de la République le 24 décembre 2008 à la suite d’un coup d’État, présente le nouveau gouvernement. Celui-ci est constitué majoritairement de civils, comme l’a souhaité la communauté internationale qui a fait pression sur la junte. Les États-Unis avaient ainsi suspendu leur aide – à l’exception de l’aide humanitaire – le 6 janvier; et la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest avait mis à pied la Guinée, le 10 janvier, « jusqu’à la restauration de l’ordre constitutionnel ». La communauté internationale demande également que des élections soient organisées au plus vite.

28 septembre – 16 octobre 2009 : Répression violente d’une manifestation par la junte militaire

Le 28, à l’appel de l’opposition, plusieurs dizaines de milliers de personnes se rassemblent dans le stade de Conakry pour manifester contre l’éventuelle candidature à la présidence – élection prévue pour le 31 janvier 2010 – du capitaine Moussa Dadis Camara, arrivé au pouvoir par la force en décembre 2008. Violemment réprimée par l’armée – et notamment par la Garde présidentielle –, la manifestation se solde, selon un bilan officiel, par cinquante-sept morts dont douze personnes tuées par balles, mais, d’après diverses O.N.G., par cent cinquante-sept morts, quelque mille deux cents blessés et de nombreuses arrestations.

Le 29, l’Union africaine condamne fermement la répression et la France annonce la suspension immédiate de sa coopération militaire et le réexamen de son aide bilatérale.

Le 29 également, le capitaine Moussa Dadis Camara rejette la responsabilité du massacre sur le Forum des forces vives de Guinée – groupement de partis d’opposition, de syndicats, et de représentants de la société civile.

Le 1er octobre, Moussa Dadis Camara invite ses opposants au dialogue; la veille, il avait demandé la mise en place d’une « commission d’enquête internationale ».

Le 2, le président du Burkina Faso Blaise Compaoré est nommé médiateur de la crise guinéenne par le président de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest.

Le 6, l’opposition exige le départ du capitaine Moussa Dadis Camara, la dissolution du Conseil national pour la démocratie et le développement – la junte au pouvoir – et la mise en place d’un organe de transition pour désigner un gouvernement d’union nationale, comme préalable à toute discussion.

Les 12 et 13, le Forum des forces vives de Guinée appelle à deux journées « ville morte » à Conakry afin d’obtenir le départ de la junte au pouvoir.

Le 16, le secrétaire général de l’O.N.U. Ban Ki-moon annonce la création de la commission d’enquête internationale chargée de faire la lumière sur les événements du 28 septembre.

3-22 décembre 2009 : Tentative d’assassinat contre le chef de la junte

Le 3, à Conakry, le chef de la junte militaire, le capitaine Moussa Dadis Camara, se fait tirer dessus par son aide de camp, le lieutenant Aboubacar Sidiki Diakité, dit « Toumba », au cours d’une fusillade dans une caserne. En tant que chef d’une unité de la garde présidentielle, Toumba est mis en cause par la commission d’enquête internationale chargée de faire la lumière sur les viols et les massacres qui ont fait cent cinquante-sept morts le 28 septembre dans le stade de Conakry. Blessé à la tête, le chef de la junte est évacué vers le Maroc, tandis que son aide de camp prend la fuite. L’intérim du pouvoir est assuré par un proche du capitaine Dadis Camara, le ministre de la Défense, le général Sékouba Konaté.

Le 8, le porte-parole du chef de la junte militaire accuse Bernard Kouchner, chef de la diplomatie française et « des services français » d’avoir voulu « préparer un coup d’État en Guinée ». Le Quai d’Orsay dément formellement toute implication.

Le 19, la commission d’enquête de l’O.N.U., mandatée par le secrétaire général Ban Ki-moon, remet au Conseil de sécurité un rapport dans lequel elle qualifie les massacres et violences perpétrées le 28 septembre de « crimes contre l’humanité »; elle en estime responsables le chef de la junte et plusieurs de ses proches. Elle demande que la Cour pénale internationale soit saisie.

Le 22, l’Union européenne durcit sa position à l’encontre de la junte en gelant des avoirs, en annulant un projet d’accord sur la pêche et en interdisant toute fourniture de matériel pouvant servir à la répression interne.

7-18 janvier 2010 : Accord de sortie de crise

Le 7, le général Sékouba Konaté, président par intérim depuis la tentative d’assassinat perpétrée en décembre 2009 contre le chef de la junte, le capitaine Moussa Dadis Camara, annonce sa décision de nommer un Premier ministre désigné par l’opposition, qui sera chargé de mettre en place un gouvernement transitoire d’union nationale.

Le 12, le capitaine Dadis Camara quitte le Maroc, où il était soigné, pour le Burkina Faso dont le président, Blaise Compaoré, fait office de médiateur dans la crise guinéenne.

Le 15, Moussa Dadis Camara, le général Konaté et le président Compaoré signent à Ouagadougou un accord qui prévoit le maintien du premier « en convalescence » au Burkina Faso et l’organisation d’une élection présidentielle en Guinée dans six mois.

Le 18, le général Konaté nomme au poste de Premier ministre l’opposant Jean-Marie Doré.

7 novembre – 10 décembre 2010 : Élection d’Alpha Condé à la présidence

Le 7 se déroule le second tour de l’élection présidentielle. Ce scrutin décidé à la suite du coup d’État de décembre 2008, puis reporté après la tentative d’assassinat du chef de la junte Moussa Dadis Camara en décembre 2009, constitue la première élection libre depuis l’indépendance du pays en octobre 1958. Lors du premier tour, le 27 juin, l’ancien Premier ministre Cellou Dalein Diallo, chef de l’Union des forces démocratiques de Guinée, est arrivé en tête avec 44 p. 100 des suffrages, devant l’opposant historique Alpha Condé, chef du Rassemblement du peuple de Guinée, qui a obtenu 18 p. 100 des voix. L’ancien Premier ministre Sidya Touré, chef de l’Union des forces républicaines, a recueilli 13 p. 100 des suffrages.

Le 15, la commission électorale annonce la victoire d’Alpha Condé, avec 52,5 p. 100 des suffrages. Cellou Dalein Diallo refuse d’admettre sa défaite, reprochant à la commission électorale de n’avoir pas examiné tous les recours pour fraude.

Le 17, le président par intérim Sékouba Konaté proclame l’état d’urgence et instaure un couvre-feu afin de contenir les violences meurtrières qui ont suivi l’annonce des résultats.

Le 3 décembre, la Cour suprême confirme l’élection d’Alpha Condé à la tête de l’État.

Le 10, l’état d’urgence est levé.

28-30 septembre 2013 : Tenue des élections législatives dans un contexte tendu

Le 28 se tiennent les premières élections législatives libres depuis 2002, dans un contexte de forte agitation après deux ans de vives tensions pour mettre en place le fichier électoral. Près de 30 formations et 2 000 candidats se disputent les 114 sièges de la Chambre, dont le Rassemblement du peuple de Guinée, le parti du président Alpha Condé qui a été élu en 2010, et l’Union des forces démocratiques de Guinée de Cellou Dalein Diallo, son principal opposant, qui s’est allié avec Sidya Touré, de l’Union des forces républicaines. En juillet, un accord politique avait été trouvé avec l’opposition, qui dénonçait le recensement électoral mais acceptait de participer aux élections si la Commission électorale nationale indépendante était mise sous contrôle.

Le 30, l’opposition dénonce des fraudes dans le processus de décompte et de centralisation des résultats et affirme que le pouvoir prépare un « hold-up électoral ».

11 octobre 2015 : Réélection du président Alpha Condé.

Le président Alpha Condé, candidat du Rassemblement du peuple guinéen, est réélu au premier tour avec 57,9 p. 100 des suffrages. Son principal adversaire Cellou Dalein Diallo, candidat de l’Union des forces démocratiques de Guinée, recueille 31,4 p. 100 des voix. Le taux de participation est de 68,4 p. 100. L’opposition dénonce des fraudes tout en appelant ses partisans au calme.


Sékou Chérif Diallo Fondateur/Administrateur www.guineepolitique.com