Recours de Dalein et Sidya: le président du TPI de Dixinn est bien compétent pour suspendre en référé un acte administratif


Gouvernance/Justice


Les pratiques nauséabondes d’intimidation des juges, qu’on croyait pourtant révolues depuis le coming-out opéré par certains juges devant le roi Mamadi Doumbouya 1er, refont de nouveau surface en Guinée. Pour une transition censée avoir pour seule boussole la justice, cela peut paraitre déroutant.

En effet, La double décision rendue ce matin du 28/02/2022, par la juge des référés du Tribunal de première instance (TPI) de Dixinn qui déclare son « incompétence matérielle » pour connaitre de deux actes administratifs adressés aux deux anciens Premiers ministres, pose question.

Pour rappel, contrairement au dualisme de juridiction en vigueur en France par exemple en attribuant à des organes distincts des compétences pour connaitre des questions administratives (juridiction administrative) et des questions judiciaires (ordre de juridiction judiciaire), La Guinée connait un seul ordre de juridiction ordinaire, appelé à trancher aussi bien des questions administratives que celles judiciaires.

Compétence du TPI en matière administrative

Il faut aussi rappeler que les compétences des différentes juridictions en Guinée sont définies, sauf dans les cas prévus par une loi organique spécifique, par la loi N° 2015/019/AN du 13 août 2015 portant organisation judiciaire en République de Guinée. Les dispositions de cette loi sont claires et érigent le TPI en juge de droit commun en matière administrative, c’est-à-dire le juge ordinaire et normal pour trancher les litiges mettant en cause un acte administratif (décision prise par une administration publique).

En effet, l’article 25 de la loi susmentionnée dispose que « Le tribunal de première instance statue en premier ressort en matière civile, commerciale, administrative, sociale et pénale… ». Cela veut dire qu’un citoyen souhaitant contester une décision de l’État ou de ses démembrements, doit en premier lieu s’adresser au TPI, sous réserve des matières réservées à la Cour suprême. L’article 27 est encore plus explicite en précisant que « Le tribunal de première instance connaît de toutes les affaires civiles, administratives, commerciales, sociales et pénales pour lesquelles compétence n’est pas expressément et exclusivement attribuée à une autre juridiction…

Sous réserve des dispositions de la loi organique portant attributions, organisation et fonctionnement de la Cour suprême, le tribunal de première instance est, en premier ressort, juge de droit commun du contentieux administratif. »

Dans le sens de ces deux dispositions rappelées, et contrairement à ce que la plupart des médias guinéens affirment, la compétence de statuer sur les actes administratifs n’est pas réservée à la Cour suprême, seules quelques matières limitativement énumérées relèvent de la compétence exclusive de la Cour suprême. Il revient bel et bien au TPI de trancher en premier ressort sur le contentieux administratif et dans le cas échéant, la Cour d’appel peut être saisie lorsque la décision rendue par le TPI ne convient pas à l’une des parties avant, in fine, de saisir éventuellement en cassation la Cour suprême.

Les domaines réservés de la Cour suprême

S’agissant de cette Cour suprême, les attributions et les compétences de sa chambre administrative sont prévues par les dispositions des article 2 et 36 de la loi organique du 23 février 2017 portant attributions, organisation et fonctionnement de la Cour suprême.

Plus précisément, les compétences de la Cour suprême en matière administrative sont définies dans son article 2 en ces termes : « La Cour Suprême est juge en premier et dernier ressort de la légalité des textes réglementaires et des actes des autorités exécutives, ainsi que des dispositions de forme législative à caractère réglementaire. »

Les attributions de la chambre administrative sont quant à elles déterminées par l’article 36 qui prévoit que cette chambre connait :

  • « en premier et dernier ressort, des recours en annulation pour excès de pouvoir, de la légalité des actes des collectivités locales,
  • « Du caractère règlementaire de certaines dispositions de forme législative ;
  • « Des pourvois en cassation contre les décisions rendu en dernier ressort sur le contentieux de pleine juridiction et les arrêts de la Cour des comptes ;
  • « Du recours en cassation contre les décisions rendues par les organismes administratifs à caractère juridictionnel ».

Il ressort de ces dispositions que la contestation des décrets, des ordonnances et des arrêtés ministériels est effectivement réservée à la seule Cour suprême. De même, il existe un principe qui reconnait « la compétence de la juridiction administrative pour annuler ou réformer les décisions prises, dans l’exercice des prérogatives de puissance publique », par l’État et ses démembrements. La cour suprême détient à elle seule, en Guinée, le pouvoir d’annulation d’un acte administratif. Ce recours en annulation, encore appelé recours pour excès de pouvoir (REP), ne peut effectivement être introduit qu’auprès de la Cour suprême.

Compétence du TPI pour statuer sur les ordonnances

Il est par conséquent évident que non seulement les recours introduits par les deux anciens Premiers ministres, MM. Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré, auprès du TPI de Dixinn ne sont pas des recours en annulation et de surcroit, les contestations introduites portent sur des actes administratifs – signés par le directeur général du patrimoine bâti public – qui ne relèvent pas de la compétence en premier et dernier ressort de la Cour suprême.

C’est à cette aune et eu égard à l’urgence imposée par le délai contraint de la date butoir fixée dans les sommations, que les recours introduits l’ont été sous forme de référé, dans ce cas référé-suspension, c’est-à-dire une procédure d’urgence ouverte « pour demander au juge d’empêcher l’exécution immédiate d’une décision administrative » qui semble illégale. C’est donc une décision provisoire qui a été demandée au TPI de Dixinn et non un recours pour excès de pouvoir, ce dernier recours étant réservé, comme évoqué plus haut, à la seule la Cour suprême.

C’est en mobilisant d’ailleurs l’article 39 de la loi du 13 août 2015 portant organisation judiciaire en République de Guinée que l’on apprend qu’« en toutes matières, le président du tribunal de première instance peut statuer en référé ou sur requête ». Il faut comprendre qu’en toutes matières renvoie à tous les domaines d’intervention du juge ordinaire, sauf ceux réservés expressément à d’autres juridictions. Il suit de là que le TPI est bel et bien compétent pour décider de surseoir à l’exécution des lettres adressées par le patrimoine bâti public aux deux anciens Premier ministres pour quitter leurs domiciles. C’est en ce sens que cette ordonnance rendue ce 28 février parait incompréhensible.

La prérogative du juge des référés du TPI pour trancher un référé est confirmée par l’article 850 du code de procédure civile, économique et administrative de la République de Guinée qui dispose que « …Le Président du Tribunal de première Instance ou le Juge de paix peut toujours prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite… »

À défaut d’avoir rendu public les deux décisions de la juge des référés du TPI de Dixinn sur les recours de MM. Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré, il n’est pas possible de connaitre les motivations qui sous-tendent cette décision de la juge. Au regard toutefois de ces règles de droit rappelées ci-dessus, il apparait que le président d’un TPI est pleinement compétent en droit guinéen pour ordonner en urgence la suspension d’un acte administratif.

En définitive, les images impressionnantes montrant une forte mobilisation des forces de défense et de sécurité, tel un pays en guerre, avec à leur tête les colonels Balla Samoura et Sadiba Koulibaly, pour aller récupérer les clés de maisons vides et sans résistance, semblent montrer que seul ce spectacle intéressait cette junte militaire au pouvoir. Il est par conséquent possible que la juge ait pu céder à une pression du CNRD pour ne pas dire le droit afin de lui permettre d’obtenir ces images symboliques et populistes de récupération des clés des maisons de MM. Cellou Dalein Diallo et Sidya Touré.

La boussole de la transition semble avoir perdu le Nord.

G.B (LeJour LaNuit)

Paris le 28/02/2022





Cadre juridique du droit de propriété des personnes publiques en Guinée


Les opérations de récupération des biens de l’État suscitent un débat nourri sur la légalité des procédures mises en œuvre par les autorités de la transition. Compte tenu des arguments juridiques contradictoires avancés par les uns et les autres, une revue détaillée des textes applicables s’impose. Cette présentation pédagogique a surtout pour objectif de donner un avis éclairé sur la légalité ou non des transactions immobilières au titre desquelles la junte a adressé une sommation aux deux anciens Premier ministres, M. Cellou Dalein Diallo et M. Sydia Touré. Il sera ainsi abordé le cadre juridique encadrant la propriété d’une personne publique (I) et les sujets d’actualité qui découlent de ce débat (II).

1. Domaine public et domaine privé des personnes publiques

Il faut d’emblée préciser que le droit de propriété a toujours été garanti au plus haut niveau en Guinée. De la Loi fondamentale du 23 décembre 1990 à nos jours, un article lui est systématiquement consacré. C’est ainsi que l’article 13 de la Constitution du 19 avril 2010 dispose que « Le droit de propriété est garanti. Nul ne peut être exproprié si ce n’est dans l’intérêt légalement constaté de tous et sous réserve d’une juste et préalable indemnité ». La Charte de la transition actuellement en vigueur, et qui fait office de constitution provisoire, ne fait pas exception à la garantie accordée au droit de propriété.

Plus particulièrement, c’est l’ordonnance n° 92/019 du 30 mars 1992 portant Code foncier et domanial de la République de Guinée, qui constitue le cadre juridique qui régit l’administration des terres, aussi bien publiques que privées en Guinée. C’est ce texte qui s’appliquait au moment des cessions litigieuses, ce texte reste encore en vigueur aujourd’hui.

S’agissant des biens de l’État au sens large (État central, établissements publics et collectivités locales), appelés biens domaniaux, l’ordonnance opère dans son article 95, une distinction entre le « domaine public » et le « domaine privé ». Cette distinction est d’une importance capitale dans la mesure où elle détermine les règles applicables à chaque catégorie.

a) Domaine public

En effet, d’après les dispositions de l’article 96 de ce code, « le domaine public des personnes publiques est constitué par l’ensemble des biens de toute nature, immobiliers et mobiliers, classés ou délimités dans le domaine public, affectés à l’usage du public ou à un service public. Il comprend le domaine naturel et le domaine artificiel. »

Le domaine public naturel concerne par exemple l’espace aérien, les forêts du domaine forestier classé, les rivages de la mer… alors que le domaine artificiel concerne les routes, voies ferrées, ouvrages d’éclairages, emplacements des halles et marchés, bureaux des ministères, et de « manière générale, tous les biens affectés à l’usage du public ou un service public, sous réserve d’aménagements spéciaux » (article 98).

C’est tout naturellement que le domaine public de l’État est protégé : les biens relevant de cette catégorie sont inaliénables1 et imprescriptibles2 (article 101). Il est toutefois possible de procéder au déclassement, par décret, d’un bien public lorsqu’il ne « correspond plus à l’affectation qui lui avait été donnée » (article 113) pour le faire entrer dans le domaine privé de la personne publique. Il en découle que toute cession d’un bien public, sans déclassement préalable, est illégale, nulle et non avenu, et ne produit aucun droit pour le bénéficiaire.

b) Domaine privé

A l’inverse, « les biens des personnes publiques qui ne font pas partie du domaine public constituent le domaine privé » (article 114). Et à ce titre, « les biens du domaine privé sont soumis au régime de la propriété privée tel qu’il est défini par le Code civil… » (article 115).

Et par conséquent, « les biens du domaine privé des personnes publiques sont gérés comme les biens appartenant à des particuliers. L’amodiation, les locations, l’aliénation des immeubles du domaine privé, la prise en location et les acquisitions immobilières faites à l’amiable par les personnes publiques sont régies par les règles du Code civil » (article 121).

La première observation qui peut être faite consiste dès lors à constater que des habitations ou terrains nus se trouvant dans le portefeuille d’une personne publique relèvent de son domaine privé. Les biens que les deux anciens Premier ministres déclarent avoir acquis relevaient donc bel et bien du domaine privé de l’État.

Il ressort également de ces dispositions que les biens relevant du domaine privé de l’État sont soumis à un régime de droit privé et qu’ils sont, au contraire des biens du domaine public, aliénables et prescriptibles3 . Il en résulte également que tout contentieux né des transactions portant sur un bien du domaine privé de l’État relève de la compétence du seul juge civil et dans les mêmes conditions qu’un litige entre deux particuliers. Les règles du droit administratif sont inopérantes dans ce cas et un acte administratif sous forme d’injonctions adressées aux acquéreurs est donc illégale. Il va de soi que les courriers adressés à M. Cellou Dalein Diallo et M. Sidya Touré, les invitant à libérer les locaux qu’ils occupent, sont illégaux et n’ont aucune valeur juridique.

De la même façon, la sommation envoyée à la famille de Télly Diallo, qui aurait occupé la même bien depuis 1959 selon les informations publiées par la presse, seraient illégales sur la base de la prescription acquisitive.

Il est de la même façon évident que toute action unilatérale entreprise par un service de l’État pour déloger de force un particulier ayant acquis un domaine privé, et donc obtenu le titre de propriété, porte atteinte à des droits fondamentaux du domicile (articles 16 et 17 de la Charte) et de propriété (article 28 Charte), tous pourtant garantis par la charte octroyée par la junte. Par ailleurs, une telle action pourrait être qualifiée d’une voie de fait dans la mesure où il viole des libertés fondamentales susmentionnées et conduire à des actions en responsabilité de l’État qui pourraient aboutir au versement de dommages et intérêts au profit des victimes.

En outre, et tout comme les transactions immobilières entre particuliers, la mise en vente d’un bien du domaine privé de l’État n’est soumise à aucune mesure d’appel à la concurrence au contraire des obligations pesant sur les procédures des marchés publics formalisés dans le cadre des opérations d’achat de l’État ou de ses démembrements.

La seule obligation fondamentale qui caractérise la cession des biens du domaine privé porte sur l’interdiction de les vendre à un prix inférieur au prix de marché : « Aucune aliénation d’un bien du domaine privé ne peut être réalisée à titre gratuit ou à un prix inférieur à sa valeur vénale, sauf motif d’intérêt général. » (Article 123). De ce point de vue, si l’État est en mesure de démontrer que les cessions en cause ont été réalisées à un prix sous-évalué, ce motif peut conduire à faire annuler ces transactions.

2. Sujets d’actualités afférents

a) Enseignement historique du régime de la propriété publique en Guinée

Il est à rappeler à titre liminaire et pour des fins historiques que l’ordonnance de 1992 susmentionnée s’est substituée à la législation qui s’appliquait depuis la Première République. De façon étonnante, cette première législation accordait un « monopole de l’État sur l’ensemble des terres du pays, les particuliers jouissant de la terre grâce à des cessions à durée limitée, sous le principe de la concession. »4

Ce rappel historique permet d’affirmer que tous les terrains en Guinée ont appartenu à un moment ou un autre à l’État. Il va sans dire que toutes les terres et tous les biens immobiliers qui relèvent de la propriété privée aujourd’hui, relevaient autrefois du patrimoine privé de l’État, et pourraient par conséquent faire l’objet de récupération si l’on transpose la logique qui est aujourd’hui appliquée à ces anciens Premier ministres de la Guinée. Je peux affirmer sans risque de me tromper que tous les guinéens se seraient opposés, sans aucune exception, à une démarche des autorités de la transition visant à revenir à la situation de la Première République en Guinée. Pourquoi donc accepter un tel procédé des autorités actuelles, même s’il ne touche que quelques-uns, fussent-ils les puissants d’hier ?

b) Période d’exception

Certains de nos compatriotes font allusion à la période d’exception que constituerait la transition pour justifier la normalité de ces sommations et reconnaissent ainsi un droit au CNRD et au Gouvernement de transition pour procéder aux expropriations entamées.

Il faut répondre aux défenseurs d’une telle thèse qu’une période d’exception n’est pas une période de non-droit, mais au contraire, un passage de la vie de la République où le droit est aménagé. Aujourd’hui, en Guinée, cet aménagement est opéré, en guise de clin d’œil à l’histoire, par la « Charte octroyée » par « l’empereur Mamadi Doumbouya 1 er ». C’est d’ailleurs à ce titre que l’article 81 de ladite charte prévoit que « sauf abrogation expresse, les dispositions de la législation et de la règlementation en vigueur non contraires à la présente Charte demeurent entièrement applicables. » Et considérant qu’aucune disposition de ce Code foncier et domanial n’est contraire à la charte, ni même qu’aucune abrogation de ce code ne soit intervenue, ce texte reste par conséquent pleinement en vigueur et constitue la principale référence pour traiter des questions immobilières. Il s’en suit de là que le CNRD, le Président de la transition et le Gouvernement sont tous tenus au respect des dispositions et mesures contenues dans ce code. Cet argument de période d’exception est donc inopérant.

c) Privilège du préalable

D’autres encore, au rang desquels le ministre de l’Habitat et de l’urbanisme M. Ousmane Gaoual Diallo, convoquent la notion du privilège du préalable, pour expliquer que les citoyens concernés par ces sommations devraient d’abord s’exécuter, charge à eux de saisir un juge dans le cadre d’un éventuel litige à l’encontre de l’État. Il est vrai que ce privilège constitue une caractéristique fondamentale du droit administratif français – ainsi que celui de tous les pays qui s’en inspirent – et permet à l’État de faire exécuter, de force si nécessaire, ses actes relevant de prérogatives de puissance publique sans attendre une décision de justice.

Mais comme cela a été dit plus haut, cette notion ne s’applique que dans le périmètre du droit administratif et non du droit civil. Or, il a été démontré dans la première partie de cette note que les biens du domaine privé de l’État, selon les termes du Code foncier et domanial de 1992, sont soumis au droit civil. Il s’en suit de là que cette notion de privilège du préalable, cher à notre ministre, est aussi inopérante dans le conflit opposant l’État aux personnes ayant légalement acquis leurs domiciles, malgré leurs mises en demeure pour libérer ces mêmes biens.

Il faut par ailleurs préciser que même dans si le droit administratif devait s’appliquer, le champ d’application du privilège du préalable est circonscrit et ne s’applique pas à tous les actes de l’administration. Et à ce titre, toute exécution forcée de la décision administrative n’est valable que dans des cas limitativement prévus par la loi. D’abord, il faut qu’il existe une disposition réglementaire ou légale qui confère à l’administration le droit explicite de recourir à l’exécution forcée de sa décision contre l’administré. Il se trouve heureusement qu’aucune disposition de ce code foncier ne confère une telle compétence à l’État s’agissant de son domaine privé.

En conclusion et puisque le ministre Ousmane Gaoual Diallo cite Maurice Hauriou dans son étonnante sortie « Wikipédia », il m’appartient de lui rappeler que ce même doyen expliquait dans son précis de droit administratif et de droit public (1919) que si le droit devait s’opérer sur le terrain de la morale, alors on « verserait immédiatement dans l’inquisition et dans l’oppression des consciences ».

Fait à Paris, le 21/02/2022.

LJN


NOTES

1 Qui ne peut être aliéné ; qui ne peut être cédé, tant à titre gratuit qu’onéreux. Ce principe évite les démembrements dans le domaine public.

2 Que le temps ne peut abolir. L’imprescribilité permet de protéger le domaine public de l’acquisition de droits par les personnes qui l’utiliseraient de façon prolongée

3 La prescription acquisitive est un moyen d’acquérir un bien ou un droit par l’effet de la possession sans que celui qui l’allègue soit obligé d’en rapporter un titre ou qu’on puisse lui opposer. On parle de prescription acquisitive lors qu’une possession s’est opérée de façon continue et non interrompue, paisible, publique, non équivoque, et à titre de propriétaire. En France cette durée est fixée à 30 ans.

4 Droit foncier, quelles perspectives pour la Guinée ? Réflexion sur la réforme foncière à partir de l’exemple de la Guinée Maritime – Pascal Rey





Edito: comment profiter de l’expertise de certains leaders politiques ?

Conduite de la transition

Les transitions politiques échouent parce qu’il y a une focalisation parfois naïve sur des schémas calqués et dont l’efficacité a déjà montré ses limites. « Gouvernement d’union nationale » « gouvernement de consensus » … tout tourne autour de : comment mettre en place un gouvernement de transition ? Certes, il faut bien sûr un gouvernement pour assurer la continuité de l’Etat. Mais, il faut surtout des hommes et femmes pour produire de la matière à agir permettant aux futurs ministres de travailler sur la base de recommandations précises. Pour ce faire, les leaders politiques peuvent aider. Non sur des questions strictement politiques, mais ils peuvent apporter leur expertise dans les domaines de la gestion de l’état en général. A cet effet, nous suggérons la mise en place de commissions spécifiques qui travailleront sur des questions spécifiques adaptées en période de transition politique.

Une commission dépenses et recettes de l’administration publique

Pour réussir une transition, il faudrait maitriser la gestion de l’argent public. Cette commission aura pour mission d’aider à la prise de décision concernant les dépenses essentielles en période de transition et proposer des solutions adaptées pour la mobilisation et la sécurisation des recettes publiques. Cette commission travaillera directement avec le ministre de l’économie et toutes les régies financières. Sidya Touré, leader de l’UFR pourrait efficacement diriger cette commission pour une durée de 6 mois. Il sera accompagné dans cette mission par une équipe de dix experts nationaux. Son parti politique est assez bien structuré et regorge de compétences capables d’assurer la continuité des activités strictement politiques du parti durant cette période.

Une commission audits et anti-corruption

Pour plus d’efficacité, les acteurs de la transition doivent procéder à l’audit du régime déchu. Cette commission d’experts aura pour mission d’aider à enquêter sur les affaires de malversations financières des onze dernières années. Elle aura six mois pour présenter un rapport et permettre à la justice d’engager les procédures. Cellou Dalein Diallo, leader de l’UFDG pourrait efficacement diriger cette commission. Comme l’UFR, l’UFDG peut être piloté sur le plan politique par d’autres cadres du parti durant cette période.

Une commission mines et partenaires techniques et financiers

L’assurance des acteurs miniers est essentielle pour permettre aux autorités de la transition de mener à bien leur mission. Cette commission, en plus de maintenir la confiance entre les acteurs du secteur et les nouvelles autorités, elle aura pour mission de procéder au toilettage du secteur. Depuis l’arrivée de Alpha Condé au pouvoir, ce secteur des mines a été au cœur des plus grands scandales financiers. La commission travaillera avec la commission audit pour établir une cartographie réelle des exploitations minières existantes et des permis miniers en circulation. Elle aura aussi pour mission d’aider à rassurer les partenaires techniques et financiers sur la nécessité d’accompagner le pays durant cette période de transition. Cette commission travaillera avec tous les ministres concernés. Lansana Kouyaté, président du PEDN pourrait efficacement diriger cette commission pour une durée de 6 mois.

Une commission fichier électoral

Sa mission sera d’aider à l’élaboration d’un fichier électoral. Pour ce faire, la commission aura une branche technique et dirigera toutes les opérations. En utilisant les ressources du ministère de l’administration du territoire (qui sera chargé de l’organisation des prochaines élections), la commission remplacera la CENI (qui devrait disparaitre) en ce qui concerne l’élaboration du fichier électoral. L’ancien ministre et journaliste Justin Morel Junior pourrait efficacement diriger cette commission. Elle sera composée d’experts électoraux essentiellement.

Une commission poursuites judiciaires et proposition de reformes

Sa mission sera de faire l’état des lieux du secteur. Toutefois, vu le temps d’une transition, les grandes réformes de la justice viendront après la transition. Cette commission sera chargée essentiellement de faire des propositions notamment sur le choix du personnel judiciaire (procureurs, juges …). Ces procureurs, juges et auxiliaires de justice identifiés et nommés se chargeront de l’organisation des premiers procès notamment sur les dossiers économiques (détournements de deniers publics, corruption …). Quant aux dossiers criminels, les autorités post transition se chargeront des poursuites et de l’organisations des procès. Cette commission aura aussi comme mission, l’élaboration d’un document de propositions de réformes du secteur de la justice. L’avocat Maître Mohamed Traoré pourrait efficacement diriger cette commission.

Une commission constitution et referendum

C’est une commission centrale du dispositif de la transition. Sa mission sera d’aider à la rédaction d’une nouvelle constitution et sa soumission au referendum. Bah Oury, président de l’UDRG pourrait efficacement diriger cette commission. Elle sera composée essentiellement de juristes constitutionnalistes.

Une transition est limitée dans le temps. Il revient aux acteurs de définir un chronogramme réaliste en tenant compte de la gigantesque mission qui consiste tout d’abord à « fabriquer » un instrument juridique (Constitution) essentiel pour une nation. Deux ans suffiront pour mettre en place les bases indispensables pour sortir de cette série de crises multidimensionnelles. Il est important que la gestion de cette transition soit inclusive car l’exclusion alimente les suspicions et crée des tensions. En sollicitant les services des leaders politiques et autres personnes ressources, pour aider à gérer la transition, cela engendrera une dynamique collective qui brisera toutes les barrières fabriquées pour diviser les guinéens. Pour une fois, faisons les choses correctement.

Sékou Chérif Diallo




SCAN : les réactions de quelques acteurs politiques après la chute de Alpha Condé

SCAN

Sidya Touré, Président de l’UFR

« Je ne vois pas pourquoi je vais bouder mon plaisir pour cela. Alpha était devenu un problème pour la Guinée. La paupérisation avait vraiment gangréné le pays, les guinéens étaient exténués, fatigués et dans la misère absolue. Et c’était quelque chose qui est intolérable pour un pays où il y a un potentiel énorme. »

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« Je peux dire « franchement pas ». Simplement, nous l’espérions tellement qu’on se disait que cela n’arriverait jamais. Mais les conditions étaient réunies pour que quelque chose comme ça se passe en Guinée. Avec la mauvaise gouvernance qu’on a eue, la déliquescence des institutions, la division qu’il a instaurée au sein des Guinéens, je pense que tout était prêt pour que l’on se retrouve dans une situation comme celle-là. Nous le regrettons, nous qui l’avons bien connu, on estimait qu’à un moment donné, à la fin de ces 10-11 ans, il aurait vraiment pris conscience de la situation dans laquelle il avait plongé le pays. Mais apparemment, non. Et il était aidé en cela par quelques journalistes alimentaires, dès fois même venus d’Occident. »

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Bah Oury, Président de l’UDRG, Union des Démocrates pour la Renaissance de la Guinée

« L’irruption des militaires du CNRD sur la scène politique, junte qui a renversé le régime du Président Alpha Condé était prévisible. Dans son obstination à obtenir un 3 éme mandat anti-constitutionnel M. Alpha Condé a suscité une accumulation de crises en Guinée. »

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« Ce qui s’est passé le 5 septembre, je ne dirai pas que c’est un putsch. Pour moi, c’est une rectification constitutionnelle. Le coup d’Etat a été organisé en 2020, quand le régime d’Alpha Condé a, de manière cavalière, procédé à un changement constitutionnel pour se maintenir au pouvoir. »

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Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG et L’ANAD

« Je suis soulagé et un peu inquiet. Soulagé parce que, vraiment, l’armée nous a débarrassés d’une dictature. Alpha Condé s’est emparé du pouvoir en modifiant la Constitution et en violant donc son serment. Ensuite, c’est un hold-up électoral qu’il a opéré le 18 octobre 2020. Si bien qu’il n’y avait plus d’issue. [ ] Ensuite, je suis inquiet parce que, d’habitude, lorsque les militaires viennent au pouvoir, souvent ils restent plus longtemps que prévu. [ ] »

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« L’ANAD prend acte de la déclaration de prise de pouvoir du CNRD. [ ] les motifs qui fondent son action salvatrice et leur finalité se confondent avec les aspirations de l’ANAD que sont le rassemblement de notre nation, la refondation de notre État, la lutte contre la corruption et l’impunité.  C’est pourquoi le CNRD peut compter sur le soutien de l’ANAD dans l’effort qui vise à construire une démocratie apaisée dans notre pays ».

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RPG-ARC-EN-CIEL, parti de l’ex président Alpha Condé

« Le RPG-ARC-EN-CIEL et ses Alliés de la CODEC, ont suivi de très près les événements de dimanche 5 septembre 2021 qui ont débouché sur l’avènement de nouvelles autorités à la tête du pays. Le RPG-ARC-EN-CIEL et ses Alliés de la CODEC, prennent acte de la situation de fait accompli. »

La source ici




Guinée : légitimité et confiance, les deux «institutions invisibles» qui empêchent le dialogue politique


Politique


Le 2 juin dernier, dans une tribune, trois responsables du parti d’opposition, Union des Forces Démocratiques de Guinée (UFDG), arrêtés après la présidentielle de 2020 et inculpés pour « trouble à l’État par la dévastation et le pillage, atteinte aux institutions de la République, participation à un mouvement insurrectionnel, menace de violences ou mort par le biais d’un système informatique, diffusion et la mise à disposition d’autrui de données de nature à troubler l’ordre public » clamaient une fois de plus leur innocence en réfutant « toutes les accusations de violence quelles qu’elles soient et qui seraient susceptibles de mettre en danger la paix sociale, de menacer la sécurité de nos compatriotes et de nos institutions ».

Dans ce dossier politico-judiciaire, les trois détenus politiques signataires de la tribune appellent à « l’impartialité de l’institution judiciaire, mais aussi à la neutralité de l’Exécutif ». Ils formulent l’espoir que, le « déroulement et l’issue qui en sortira constitueront un jalon essentiel dans la volonté de décrispation du climat politique ». Ils estiment « que ce serait là, un des premiers gages d’ouverture d’un dialogue constructif ». Enfin, les trois responsables politiques pensent « qu’il est fondamental d’œuvrer dans ce sens afin d’amorcer le processus d’apaisement par le dialogue et la concertation dans le souci de renforcer l’unité nationale et la cohésion sociale ».

Face aux diverses interprétations de cet « appel » au « dialogue » (résultat d’un curieux emballement médiatique) qui est plutôt un appel à l’institution judiciaire pour un traitement impartial du dossier, la direction de l’UFDG publie une déclaration dans laquelle, elle réitère la position du parti par rapport au dialogue politique qui, selon elle, « relève exclusivement de la direction nationale du parti et de ses instances compétentes ». Il n’en fallait pas plus pour alimenter les débats sur des « dissensions » qui mineraient ce parti d’opposition notamment, autour de la question d’un éventuel dialogue avec le pouvoir. Divisés sur la question, les acteurs politiques du pays font le tour des médias pour défendre les arguments qui sous-tendent leur positionnement. Rappelons que le 27 janvier dernier, un décret a été publié, instaurant un « dialogue politique et social » entre acteurs institutionnels, politiques et sociaux. Dans un contexte d’impasse politique et de difficultés financières (les récentes conclusions du FMI convergent dans ce sens), le gouvernement guinéen se voit contraint de rééditer sa recette traditionnelle, une fois le dos au mur : l’appel au dialogue. Après avoir bravé tous les interdits de la démocratie (modification de la constitution pour se maintenir au pouvoir, violation des droits de l’Homme), le pouvoir de Conakry s’est retrouvé isolé sur la scène internationale et souffrirait d’un manque de légitimité auprès d’une grande majorité des populations.

Comme en 2015, l’appel au dialogue est avant tout une contrainte pour le pouvoir qui se trouve acculé de toute part. La décrispation du climat politique, gage de confiance des investisseurs et d’autres partenaires financiers, devient une conditionnalité pour la normalisation des relations bi et multilatéraux. Pour ce faire, la participation à ce dialogue des ténors de l’opposition politique est un gage de crédibilité et le gouvernement est conscient du poids réel des partis d’opposition (le rétropédalage dans le projet mort-né de fabriquer une nouvelle opposition avec son chef de file est un exemple éloquent).

L’union des forces démocratiques de Guinée (UFDG) de Cellou Dalein Diallo est catégorique sur la question du dialogue. Pour ce parti de l’opposition, le dialogue n’est pas d’actualité. Lors d’une réunion extraordinaire du conseil politique du parti, le 9 juin dernier, il a été décidé ce qui suit : le parti s’abstient de tout commentaire sur la question du dialogue politique tant que « Les cadres et militants de l’UFDG de l’ANAD et du FNDC seront maintenus en prison ; les bâtiments de l’UFDG abritant son siège et ses bureaux seront fermés et occupés par les forces de défense et de sécurité ; le président du parti, son épouse et ses proches collaborateurs seront arbitrairement privés de leurs droits et libertés de voyager ».

En revanche, pour l’union des forces républicaines (UFR) de Sidya Touré, le dialogue est la seule issue possible pour résoudre la crise que traverse le pays. Dans une déclaration publiée le 30 décembre dernier, l’UFR lance « un appel à la concertation pour qu’au moins, le travail recommence et que les Guinéens puissent voir le bénéfice de tous ces débats politiques qui n’en finissent pas ».

Quant au parti de l’espoir et le développement national (PEDN) de Lansana Kouyaté, son parti « n’ira pas à ce dialogue ». Invité de l’émission « Sans Concession » de Guinéenews le 8 juin dernier, Lansana Kouyaté reste sceptique sur les véritables objectifs de ce dialogue : « Comment voulez-vous qu’on parte au dialogue dont on sait d’avance que c’est pour peut-être avoir du temps, pour que les choses se calment et qu’on passe à autres choses ».

Député et président de l’union des forces démocratiques (UFD), Baadiko Bah, dans un entretien accordé à Guineenews au mois de janvier dernier, est encore plus dubitatif sur la sincérité de cet appel au dialogue. Pour cet opposant, le dialogue est « un gadget pour amuser la galerie, faire semblant qu’on est ouvert à dialoguer sans que ça n’ait aucune portée pratique pour résoudre les véritables problèmes auxquels font face la Guinée ».

Dans une déclaration rendue publique le 20 juin dernier, le parti MoDel dirigé par Aliou Bah, exprime sa position sur la question du dialogue et reste ferme « il [le parti] ne se sent ni intéressé ni concerné par un simulacre de dialogue tel qu’il est annoncé et se déroule actuellement ».

Dialogue politique inter-guinéen, un espace d’insincérité

En août 1993, l’archevêque de Conakry, le cardinal Robert Sarah, dans une déclaration intitulée « la Guinée, une famille à construire » présentait un diagnostic assez critique de la société guinéenne dans son ensemble. Il disait ceci : « Le guinéen ne respecte plus rien, ni sa vie, ni la vie des autres, ni le bien des autres, ni les coutumes ou valeurs traditionnelles, ni les principes sacrés de la religion. Plus rien n’arrête le guinéen quand il a décidé de détruire, d’assassiner, de voler. Nous vivons, en conséquence, dans une société anarchique. [  ] Nous n’avons pas de projet de société cohérent. Nous naviguons à vue, inventant et improvisant des solutions, à la merci des évènements et des situations. » Dans un contexte de tensions politiques sur fond de violences au moment où la Guinée s’apprêtait à organiser ses premières élections (présidentielle et législatives) multipartistes, ces propos décrivent une société guinéenne malade.

Pour ce très respecté responsable religieux, cette Guinée peut s’en sortir car elle dispose des ressources nécessaires, mais il faudrait qu’il y ait une « vigoureuse volonté d’application du pouvoir judiciaire [ ] de façon à ne plus laisser impunis les grands crimes et à défendre efficacement les droits des plus faibles » Selon lui, sans volonté d’application, « la forêt des lois ne résout pas les problèmes essentiels ».

Vingt-huit ans après cette déclaration, la Guinée d’aujourd’hui semble fidèle à ce diagnostic et les acteurs sont presque les mêmes, à quelques exceptions près.

Les élections en Guinée ont toujours été des périodes d’exacerbation des violences. D’un côté nous avons une machine répressive de l’Etat qui n’hésite pas tirer sur sa population et de l’autre, des oppositions de plus en plus déterminées à se faire entendre en usant des seuls moyens dont elles disposent, à savoir, les manifestations de rue et les recours devant les tribunaux du pays même si elles savent à quoi s’attendre de l’appareil judiciaire. Lors de ces élections, deux facteurs contribuent à la cristallisation des tensions : la légitimité et la validité du processus. Toutes les tentatives et actions de contournement et d’instrumentalisation des règles du jeu électoral engendrent des contestations et ces dernières produisent de la violence.

Pour reprendre la formule de Carlos Santiso, de l’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale, une organisation intergouvernementale dont la mission est de promouvoir la démocratie durable dans le monde : « Les élections ne sont pas l’égal de la démocratie ». En observant la situation de la démocratie dans de nombreux pays, Santiso arrive à la conclusion que « les processus de démocratisation empruntent assez souvent des voies irrégulières, imprévisibles et parfois réversibles dans des environnements politiques changeants ».

Dans son ouvrage, La contre-démocratie, publié en 2006, Rosanvallon présente trois piliers qui, selon lui, compose l’expérience démocratique : le gouvernement électoral-représentatif qui assure l’assise institutionnelle, la contre-démocratie qui assure une certaine vitalité contestataire et le travail réflexif du politique qui assure une densité historique et sociale à la démocratie. Cependant, souligne l’auteur, ces trois dimensions intègrent des pathologies qui doivent pouvoir être surmontées. Selon lui, le gouvernement électoral-représentatif tend à se transformer en aristocratie élective, la contre-démocratie serait hantée par le populisme et l’antipolitique et le travail réflexif du politique risque d’être selon lui, aspiré par la facilité « décisionniste ».

Célébrée par tous les observateurs comme un tournant démocratique majeur, l’élection en 2010 de l’ancien opposant historique guinéen, avait suscité un immense espoir chez les guinéens et africains en général, même si les conditions de son accession au pouvoir laissaient déjà présager le jusqu’auboutisme du personnage pour arriver à ses fins, même par les moyens antidémocratiques. Plus de dix ans après, la déception est le sentiment le plus partagé par les guinéens. Les tendances autocratiques du régime sont bien réelles. Si la cour suprême guinéenne (symbole de la complaisance des contre-pouvoirs institutionnels) a bien entériné la « victoire » (certains diront plutôt le maintien) de Alpha Condé après la présidentielle contestée et surtout violente d’octobre 2020, force est de reconnaitre que le régime peine à asseoir son autorité parce qu’il souffre d’un manque de légitimité auprès de nombreux guinéens qui, par cet acte de la plus grande institution judiciaire du pays, ont le sentiment d’assister impuissant à une confiscation du pouvoir et redoutent de revivre un remake des dix dernières années avec ses corollaires  de violations des règles et principes démocratiques. Cette panne judiciaire (une réalité guinéenne) a pour cause une carence criarde d’indépendance de la justice, mise sous tutelle par un pouvoir exécutif oppressant.

Un président de la République avec un statut privilégie au-dessus de tous les autres pouvoirs. C’est cette relation, caractéristique des régimes africains que Claude Momo et Eric-Adol Gatsi dans un document intitulé L’exécutif dualiste dans les régimes politiques des Etats d’Afrique noire francophone, publié en 2020, tentent d’expliquer. Selon ces auteurs, la relation entre le président de la République et les autres pouvoirs « rame quasiment à contre-courant de l’idée de checks and balances chère à Montesquieu qui fait du pouvoir le contre-pouvoir du pouvoir et justifie l’étiquette de « monarque républicain » ou de « président impériale »

Pour celui qui avait promis de faire « disparaître » l’opposition de la scène politique guinéenne, la désillusion est aujourd’hui grande chez ses partisans. La lecture simpliste qui consiste à réduire « les oppositions » à l’opposition politique et plus particulièrement aux leaders de certains partis d’opposition, s’est révélée erronée. Ces dernières années, l’espace politique guinéen a connu l’émergence d’autres acteurs issus de la société civile, avec de nouvelles stratégies de lutte et une nouvelle dynamique d’engagement citoyen. Une preuve que l’exigence démocratique est de plus en plus grande chez les citoyens.

Ce citoyen n’est pas celui décrit par Richard Balme, c’est-à-dire, qui se cantonne dans un rôle minimal de pourvoyeur de voix. Il est ce citoyen qui surveille. Rosanvallon, dans un ouvrage collectif intitulé Chroniques de la gouvernance publié en 2009, explique qu’au « peuple-électeur s’ajoute le peuple-surveillant, le peuple-veto et le peuple-juge qui se manifestent dans des institutions ou de manière plus spontanée et informelle. À l’élection s’ajoute la surveillance, l’empêchement et le jugement ».

Du manque de légitimité au déficit de confiance, un « titre à gouverner » obsolète 

Dans son intervention lors du colloque « la justice du XXIe siècle » en 2014 à l’UNESCO, Pierre Rosanvallon disait qu’un pays ne fonctionne pas simplement avec des institutions et des valeurs. Il fonctionne aussi avec des « institutions invisibles », un concept développé par le prix Nobel d’économie Kenneth Arrow dans son ouvrage Les limites de l’organisation publié en 1974.

Pour ce sociologue et professeur au Collège de France, une société dans laquelle la confiance se délite, est une société dans laquelle le fonctionnement des institutions, le rapport entre les citoyens, le rapport des citoyens aux institutions, est rendu plus difficile.

La confiance occupe une place importante en démocratie. Comme nous le fait remarquer les auteurs d’un rapport de recherche publié en 2019 par le Centre de recherches politiques de Sciences Po (CEVIPOF) sur la crise de la confiance politique en France, où ils soutiennent que la confiance « est la valeur cardinale de la démocratie ». Selon ces auteurs, la « démocratie est le seul régime qui repose sur le consentement du gouverné. A la différence d’autres régimes politiques, la démocratie a besoin du soutien de celui sur lequel elle s’exerce ». Si le citoyen vote, il ne choisit pas simplement un candidat mais soutient la démocratie.

S’il y a bien une réalité dont l’évidence saute aux yeux, c’est bien le manque de confiance entre les acteurs politiques guinéens (un euphémisme, pour ne pas dire qu’ils se haïssent). D’ailleurs, cet environnement de détestation réciproque est propice à la fabrication de dictateurs, car ces derniers, se nourrissent des divisions. Quant aux relations de confiance entre les gouvernants et les gouvernés, elles sont aussi exécrables. Pour le citoyen, nous rejoignons Richard Balme, dans son ouvrage Les motifs de la confiance (et de la défiance) politique : intérêt, connaissance et conviction dans les formes du raisonnement politique, publié en 2003, quand il explique qu’aujourd’hui, « le citoyen aurait l’impression d’être cantonné dans un rôle minimal, se limitant à choisir épisodiquement un représentant, sans avoir la certitude que celui-ci prendra les bonnes décisions ni pouvoir l’y contraindre ».

En ce qui concerne la légitimité, elle revêt plusieurs facettes. Selon le petit Larousse, elle est « la qualité de ce qui est fondé en droit, en justice, ou en équité ». Dans son ouvrage intitulé, La légitimité démocratique : impartialité, réflexivité, proximité, publié en 2008, Rosanvallon explique que « Si la légitimité est au sens général du terme un simple économiseur de coercition, sa variante démocratique a pour fonction plus exigeante de tisser des liens constructifs entre le pouvoir et la société ». Dans la démocratie représentative, le vote est le principal mode de légitimation des gouvernants. Toutefois, si le peuple est la source de tout pouvoir démocratique, souligne l’auteur, il fait cependant remarquer que le verdict des urnes ne peut être le seul étalon de la légitimité. Pour lui, un pouvoir n’est désormais considéré comme pleinement démocratique que s’il est soumis à des épreuves de contrôle et de validation à la fois concurrentes et complémentaires de l’expression majoritaire.

Lipset, quant à lui, soutient que la légitimité implique la capacité d’un système politique à engendrer et à maintenir la croyance que les institutions politiques existantes sont les plus appropriées pour le bon fonctionnement de la société.

Eichholtzer Marie, dans un mémoire intitulé Transparence, légitimité et confiance dans la gouvernance européenne, soutenu en 2010 à Institut d’Études Politiques de Lyon, distingue deux types de légitimité : la légitimité formelle et la légitimité sociale. La première découle du bon respect des règles et des procédures. La seconde, est le lien affectif, la loyauté qui relient les citoyens à leurs institutions sur la base d’une identité collective forte et d’intérêts communs. Dans le même ordre d’idées, Rosanvallon, quant à lui, distingue trois types de légitimité : une légitimité procédurale qui est issue de l’élection qui donne un « permis de gouverner » ; une légitimité substantielle qui tient à des qualités intrinsèques, autrement dit, c’est le fait qu’en soi-même on représente quelque chose d’important ; et enfin une légitimité d’exercice qui repose sur la prise de conscience du fait que la volonté générale n’est pas simplement exprimée par le moment électoral.

Quand Alain Laquièze affirme dans un article intitulé Élection des gouvernants et légitimité démocratique, publié en 2018, que : « le gouvernant est légitime démocratiquement parce qu’il est légitime électoralement », il ressort la place prépondérante de l’élection dans l’acquisition de la légitimité. Par ailleurs, Thiébault Jean-Louis, dans un article intitulé Lipset et les conditions de la démocratie, publié en 2008 cite Larry Diamond dans son ouvrage intitulé Developping Democracy. Toward Consolidation, publié en 2000, qui établit un lien entre la légitimité et le niveau de démocratie dans un pays. Ce dernier soutient que « la légitimité est fortement corrélée avec le niveau de démocratie dans un pays. Plus une nation est démocratique, plus le système politique tend à être légitime. Les facteurs politiques (libertés civiles et politiques) sont plus importants que la simple performance économique pour prédire la légitimité d’un régime démocratique dans une nation ». Thiébault Jean-Louis, dans le même article souligne, quant à lui, que la légitimité peut être considérée comme un stock de crédibilité qui peut retarder ou réduire l’intensité des crises dans une démocratie.

Un point de vue partagé par Lipset, qui soutient que, les systèmes politiques, mêmes ceux qui sont autoritaires, ne reposent pas d’abord sur la force. L’alternative à la force est la légitimité, un « titre à gouverner » largement accepté ».

La pilule au goût amer du compromis

Polysémique, avec une certaine ambiguïté dans son interprétation, la notion de compromis selon Paul Ricœur « intervient lorsque plusieurs systèmes de justification sont en conflit ».

Si le conflit est un trait inhérent à la vie politique, comme le soutient Lipset dans son ouvrage intitulé L’Homme et la Politique, publié en 1963 (traduction française de Political Man paru en 1960), la démocratie doit être perçue comme un moyen « de canaliser ou de structurer, et non pas d’éradiquer, le conflit ». Selon cet auteur, « les luttes et rivalités pour la conquête des postes de direction, l’affrontement des partis et leur alternance dans l’exercice des fonctions de gouvernement sont les conditions d’une démocratie stable. Et sans un accord préalable sur la règle du jeu politique, sans la soumission des minoritaires aux décisions de la majorité réversible, sans la reconnaissance de la légitimité de ces décisions, il ne saurait y avoir de démocratie ».

Dans le même ordre d’idées, Paul Ricœur, dans une interview publiée par la revue Alternatives Non Violentes en 1991, souligne, quant à lui, que « le compromis est [  ] lié à un pluralisme de la justification, c’est-à-dire aux arguments que les gens mettent en avant dans les conflits ». Pour ce penseur de « l’éthique du compromis », il n’existe pas de super-règle pour résoudre les conflits, mais « on résout les conflits à l’intérieur d’un ordre homogène où les gens se reconnaissent ».

Dans le cadre d’un compromis, soutient quant à lui le professeur Thomas Meyer de l’université de Dotmund, dans une publication de 2012 intitulée L’art du compromis : le chemin vers la réalisation des idéaux dans une véritable démocratie, deux ou plusieurs parties s’engagent à renoncer à leur droit de faire valoir complètement leurs intérêts personnels, de manière à permettre à toutes les parties d’atteindre le maximum de leurs objectifs politiques. Pour cet universitaire, « la prise en compte du maximum d’intérêts et de valeurs est un objectif important de la démocratie. » Selon lui, la capacité de prendre en compte le maximum d’intérêts légitimes et de les intégrer dans les processus de délibérations et de prise de décision en politique est un principe fondamental d’une démocratie bien comprise.

En procédant à l’arrestation, à la condamnation et à l’incarcération de responsables politiques de son principal challenger, Alpha Condé fait ce que les autocrates font, à savoir, se servir de ses prisonniers comme monnaie d’échange à présenter lors d’un éventuel dialogue. Dans un tel contexte, l’envie d’atteindre un objectif politique l’emporte sur la nécessité d’aboutir à un compromis. Nous pensons que la manifestation d’une volonté réelle d’une décrispation doit venir du côté du pouvoir. Au-delà de la formalisation d’un cadre de dialogue, il est surtout important d’œuvrer pour la création de conditions favorables à un dialogue politique sincère. D’un compromis à une compromission, la frontière de l’amalgame est très étroite. En acceptant d’aller à un dialogue dans ces conditions, les partis concernés jouent leur survie en termes de crédibilité et de cohérence.

Sur les connotations péjoratives qui entourent l’idée de compromis et qui suscitent le plus souvent chez certains, une réaction de méfiance ou de rejet, Nachi Mohamed dans un article intitulé La vertu du compromis : dimensions éthique et pragmatique de l’accord publié en 2001 dans la Revue interdisciplinaire d’études juridiques, défend toutefois, « un compromis qui se distingue nettement de la compromission ». Une position que partage Ricœur dans un entretien publié en 1991 par la revue Alternatives Non Violentes où l’auteur souligne « qu’il y a méfiance à l’égard du compromis, parce qu’on le confond trop souvent avec la compromission. La compromission est un mélange vicieux des plans et de principes de références. Il n’y a pas de confusion dans le compromis comme dans la compromission. Dans le compromis, chacun reste à sa place, personne n’est dépouillé de son ordre de justification ». Par ailleurs, dans ce même entretien, Paul Ricœur pose la question : « Comment empêcher que les différends, les litiges, les conflits ne dégénèrent en violence ? ». Pour lui, le compromis est une barrière entre l’accord et la violence. Il soutient que c’est en absence d’accord que nous faisons des compromis pour le bien de la paix civique. Ce penseur du compromis, soutient que « l’intransigeance rend malheureusement impossible toute recherche de compromis ». Car, selon lui, le compromis exige la négociation.

Dans le même ordre d’idée, Daniel Weinstock, dans un article intitulé Compromis, religion et démocratie publié en 2005 dans la revue Bulletin d’histoire politique souligne qu’un « compromis se produit lorsque tous les participants à la délibération se rallient à une position qu’ils estiment inférieure à celle qu’ils adoptaient au départ. Ils s’y résignent à cause du poids indépendant qu’ils accordent à la résolution pacifique du conflit. Un compromis émerge ainsi lorsque tous estiment que le sacrifice qu’ils effectuent par rapport à leur position idéale est justifié par l’avantage que représentent le règlement du conflit et le maintien de relations pacifiques avec leurs partenaires. » Pour cet auteur, « une première condition du compromis est par conséquent que tous les citoyens et les groupes de citoyens accordent une importance suffisante au maintien du lien social. Si la préservation d’une certaine cohésion sociale est vue de manière indifférente par un ou plusieurs participants, ou si la volonté de préservation n’est pas également distribuée au sein de la société, le compromis devient impossible. »

Trop souvent pris pour de la faiblesse, l’art du compromis, comme le dénonce Frédéric Says dans un billet politique sur France culture, c’est comme s’il fallait forcément un « perdant terrassé » et un « gagnant triomphant ».

Concept paradoxal, le compromis est tantôt objet de méfiance, dévoiement du rapport à autrui, règlement sous-optimal qui aboutit à l’abandon de ses prétentions, tantôt considéré comme la meilleure option de gestion des conflits pour parvenir à une coexistence pacifique.

Dans Eloge du compromis. Pour une nouvelle pratique démocratique, Nachi Mohamed, souligne que le terme de compromis fut trop longtemps « coincé entre deux faux amis que l’on croyait proches par le sens mais qui, dans les faits, se sont avérés souvent éloignés de lui: le marchandage, la négociation habile et calculatrice entre des intérêts désincarnés ; la compromission, le renoncement aux valeurs, l’abandon des idéaux sur l’autel de l’arrangement ». Le compromis en tant que concept commun peut donc être considéré comme un mode de résolution de conflit ou, plus généralement, comme une forme de régulation sociale, c’est-à-dire un moyen de maintien de la paix civique entre des partenaires en situation de désaccord ou de conflit.

Dans le contexte guinéen, la question est : les acteurs concernés devraient-ils avaler cette pilule du compromis au goût amer ? La réponse est la formulation d’une question préalable : comment dialoguer avec un acteur dont la légitimité est remise en question ? En attendant de trouver des réponses, libérez tous les prisonniers politiques, des plus anonymes aux plus célèbres. À la justice guinéenne sous Alpha Condé, nous nous abstenons de demander l’ouverture des enquêtes sur les cas des centaines de guinéens tués ces deux dernières années, car nous savons ce qu’elle vaut : une machine répressive au service d’un autocrate. Il y aura un moment où il faudra vider tous les placards et refaire la décoration intérieure de la maison Guinée.

Sékou Chérif Diallo Fondateur/Administrateur www.guineepolitique.com




SCAN : «[ ] les deux constitutions qui se catapultent… Il faut les retirer» Sidya Touré


SCAN POLITIQUE [des paroles et des écrits]


Sidya Touré, Président de l’UFR (les conditions pour un éventuel dialogue avec le pouvoir) – 4 Juillet 2020

Les conditions : « la première chose, il faut qu’il (le pouvoir, ndlr) renonce au troisième mandat d’Alpha Condé qu’on n’en veut pas. La deuxième, les deux constitutions qui se catapultent… Il faut les retirer. L’Assemblée Nationale qui a été votée dans les conditions qu’on connaît, avec une distribution de députés, il faut la reprendre. Voilà les conditions dans lesquelles nous irons à un dialogue. Si ce n’est pas le cas, … nous continuerons à nous y opposer »

La source ici


Cellou Dalein Diallo, Président de l’UFDG (à l’occasion de l’inhumation des huit jeunes tués lors des manifestations du FNDC) – 3 juillet 2020

« Depuis qu’Alpha Condé est au pouvoir, nous avons enterré 194 jeunes personnes dont la plupart ont moins de 20 ans. Ce qui se passe aujourd’hui est plus grave par rapport à ce qui s’est passé au stade du 28 septembre où il y a eu 159 morts en 2009 ».

La source ici


Aliou Bah, Président de l’organe provisoire du MoDeL – 5 juillet 2020

« Au lieu de rester dans la critique passionnelle, l’indifférence naïve et l’équilibrisme hypocrite, regardons objectivement d’où nous venons et faisons ce que nous pouvons, autant que possible, pour faire bouger les lignes dans la bonne direction ».

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De la survie de l’opposition et du FNDC face enjeux futurs [Lettre ouverte aux personnalités politiques de l’opposition guinéenne – Par L. Petty Diallo]


Point de vue


Si l’opposition peut être perçue comme une entité horizontale, le front national pour la défense de la constitution (FNDC) est plutôt une organisation transversale par sa nature. Il est une coalition de mouvements, de partis politiques de plusieurs obédiences et aux parcours variés.

Face aux défis et enjeux à court et long terme, une réflexion excluant toute polémique tant sur la survie du FNDC que sur l’appartenance au mouvement est presque cruciale. L’actualité immédiate l’impose d’autant plus. 

De la marche du 8 juillet à la nécessité d’une approche contextuelle et programmatique du futur

La marche projetée le 8 juillet 2020 devrait, plus que les précédentes, prendre en compte le contexte actuel qui risque de devenir plus aigu dans les mois à venir.

Avant tout, une réflexion s’impose sur le mot d’ordre de la manifestation à venir. La récurrence d’appels : « Pour faire partir Alpha Condé » apparait de moins en moins crédible. Tout simplement, de marche en marche, d’appel en appel, c’est le même mot d’ordre qu’on voit partout : sur les banderoles, les poteaux, les véhicules, les arbres, carrefours et ronds-points. Sans compter la nuance entre « pour faire partir » et « faire partir ». Autrement dit, la nuance entre l’intention et de l’action.

Quoi qu’il en soit Alpha est toujours là. Comme un termite, il bâtit sa termitière. J’allais dire, prépare son troisième mandat. Il faudrait donc être plus pragmatique en adaptant la stratégie et la finalité. En prenant en compte le nouveau contexte politique né au lendemain du 22 mars 2020.


Lire aussi Donner la solution au-delà de l’espoir [Lettre ouverte aux personnalités politiques de l’opposition guinéenne – Par L. Petty Diallo]


Les arguments qui militent en faveur de cette approche ne manquent pas.

La constitution de 2010 a été mise dans les tiroirs. Pire, enterré au dire du pouvoir. Le référendum du 22 mars 2020 voté et promulgué dans les conditions bien connues. Du coup, la donne a changé tant de forme que de nature. Désormais, il s’agit plus de sauver la République et la Nation dépositaires des institutions et des lois.

A ces impératifs, s’ajoutent d’autres qui montrent que le FNDC ne saurait faire l’économie d’une autodiscipline en fixant clairement les limites à ne pas dépasser par les acteurs politiques qui s’en revendiquent. 

Il est aberrant qu’il y ait des guerres intestines, des dénonciations, des calomnies parfois, des contestations notoires, des initiatives individuelles au sein de l’organisation. Elles rappellent à bien des égards des pratiques politiques auxquelles le mouvement devrait être exempté. De tels comportements font dire aux mauvaises langues, que la FNDC est en voie de se transformer en « front national de la division et de la confusion ».

L’intention de certains responsables de partis politiques de participer à une hypothétique élection sont comparables aux fidélités politiques des amis du chef de file de l’opposition d’alors. Glorieusement plébiscités, sans appartenance à l’UFDG, ni mérite, ces derniers se beurrent et s’engraissent actuellement où l’on sait. Leur cible à abattre étant désormais leur promoteur.

La nécessité d’un choix excluant toute réponse alambiquée

Face au nouveau tour de magie qui est tendu aux ténors de l’opposition et du FNDC, plus aucune hésitation ni compromis n’est possible.

Les adhérents, militants et sympathisants attendent de vous une position claire, une attitude ferme et un comportement digne des espoirs jusque-là placés en vous. Le rejet de la date du 18 octobre 2020 pour la présidentielle doit être conséquent et vos décisions non négociables. Dorénavant vous devriez penser et œuvrer pour une troisième voie et non contre un troisième mandat en soi.

Pourquoi une troisième voie ? Deux premières ont été épuisées : celle des manifestations et du dialogue incluant les organisations internationales. La nouvelle voie a déjà été évoquée par certains sous la terminologie de « Transition politique ». Elle pourrait être le dernier gilet qui puisse sauver la Guinée à court et long terme. Peu importe son appellation.

Cette troisième voie ne devrait revêtir ni l’image des alliances du passé ni en prendre les contours. Tout autant, elle ne devrait se fonder sur un conglomérat de partis d’opposition, aux décisions fluctuantes et qui, on l’a vu, se révèleront au fil du temps en partis de position.

Des exigences s’imposent face aux enjeux

Le FNDC doit faire faire peau neuve. Il devrait taire les divisions tant de l’intérieur qu’à l’étranger où certaines antennes, si elles ne sont pas comateuses, sont dans la contestation. Au cas contraire, il risque fort bien de se révéler ingérable, caduc et inopérant face aux enjeux actuel et futur.

Il faudrait donc une rupture conséquente ; des réformes adéquates ; une fermeté de ton et d’action dans les prises de position face à l’adversaire. C’est l’une des manières d’éviter que les arbitrages du futur n’échappent au peuple ou à l’opposition.

Il est connu de tous, que ceux qui veulent être les maitres du jeu se préparent en douceur. Ils sont déjà à pied d’œuvre pour le troisième mandat et se posent peu de questions. Ils sont persuadés que tout passe par une élection qui octroierait une nouvelle mandature au président actuel avant de mettre en branle la machine de succession. Inexorablement, dirions-nous.

Il est donc grand temps que l’opposition ait une conscience aiguë des défis et enjeux en acceptant cette terrible réalité : s’il y avait, dans les conditions actuelles, une élection, rien ni personne ne pourrait empêcher la victoire du futur candidat de la majorité. La question n’est pas savoir s’il s’agit d’un postulant pour un troisième mandat ou pas.

Enfin, la stratégie de l’adversaire découle, faut-il le savoir, des leçons tirées de la fin politique tant de Sékou Touré que de Lansana Conté et des lendemains désenchanteurs de l’entourage ou des héritiers. L’alerte lancée, n’allons pas loin.

Des préconisations face au jugement de l’histoire

Si l’opposition guinéenne négligeait les préconisations évoquées, il ne serait pas étonnant que bien de choses changent en sa défaveur.

Sûrement certains pourraient considérer ces préconisations comme des lubies d’un analyste perturbateur de sommeil ou d’un lanceur d’alerte agité. Quoi qu’il en soit, les responsables politiques ont un devoir à assumer face à l’histoire, à leurs militants et sympathisants, à toutes celles et ceux qui ont tant sacrifié et tant perdu.

Ils devraient assumer afin de :

  • mettre fin aux injustices de toutes sortes : arrestations et emprisonnements arbitraires ; destructions de biens privés ; inégalités socio- professionnelles ; meurtres et assassinats de toutes sortes ; corruption généralisée et gabegie économique ;
  • soustraire la Guinée des aventuriers politiques qui nous mène dans les méandres de l’inconnu ; les affres de la division, de la misère et de la discrimination ethnique, etc ;
  • rendre plus utiles et constructives les dix années de manifestations qui ont, à ce jour, plus conduit au cimetière qu’à la victoire ;
  • venir à bout d’un système qui a perdu tout repère et légitimité en violant les textes fondateurs de la République ;
  • répondre en fin aux mille et une attente d’un peuple qui a souvent été berné, trahi et délaissé par ses représentants.

Pour relever ces différents défis, il faudrait que vous taisiez les divisions dues à des alliances de façade et de concupiscences politiques de mauvais alois ; aux embrassades diurnes qui cachent des coups de pattes la nuit tombée.

Vous devez tout simplement assumer la Guinée. C’est- à- dire la délivrer du système en place ; des relents ethnocentriques d’un pouvoir presque séculaire aux mains d’une poignée d’héritiers, de clans et de gangs politico-affairistes.

Si vous en êtes incapables, la présidentielle d’octobre 2020 risque de sonner tant le glas du pouvoir actuel que le vôtre. Au pire, ce dernier vous survivra. N’est-ce pas que des voix sourdent d’un peu partout qui n’en peuvent plus d’attendre et qui revendiquent la victoire maintenant et pas après ?

En définitive, les responsables politiques de l’opposition, FNDC compris, ont l’impérieuse obligation morale et politique d’empêcher un président de 82 ans de continuer d’envoyer, à ses dépens, ou sous ses ordres, peu importe, des jeunes de 22 à 32 ans, (moyenne d’âge des victimes) au cimetière.

Vous devez vous remettre des faiblesses inhérentes à toute organisation sociale ou politique en palliant aux incohérences internes.  Ainsi, la Guinée parviendrait-elle à sortir de l’impasse actuelle.

Dans ce cas, et dans ce cas seulement, vous, responsables politiques actuels de l’opposition, aurez assumé la Guinée.

Telle est l’attente, une lancinante attente, de la majorité de nos concitoyens.


Par M. Lamarana Petty Diallo – Guinéen – Professeur Hors-Classe, lettres-histoire, Orléans- France

 




Donner la solution au-delà de l’espoir [Lettre ouverte aux personnalités politiques de l’opposition guinéenne – Par L. Petty Diallo]


Point de vue


A quelques jours de la reprise programmée des manifestations de l’opposition guinéenne sous la bannière du front national de défense de la constitution, (FNDC), il me semble opportun de lancer l’alerte, d’interpeler, de proposer des pistes de réflexion.

Je n’userai ni de langue de bois ni de propos laudateurs à l’image de certains louangeurs à la recherche de pitance : ces squatteurs qui ont induit plus d’un homme politique en erreur. Des encenseurs qui vous font croire que vous êtes déjà Président de la République alors que les temps sont au combat. Autant dire que je ne me préoccuperai point de caresser dans le sens du poil. J’essaierai en revanche de relever les failles sans trop insister sur les acquis.

Cette lettre ouverte est l’expression de mes craintes d’assister à nouveau à la reproduction du passé. Elle expose mes pressentiments face aux dangers qui menacent le futur de notre pays.

 Elle est, tout naturellement, l’expression de mon engagement politique, de mes convictions personnelles et de mon amour patriotique et inaliénable pour la Guinée d’hier et celle de demain. Ces sentiments nourrissent les propos qui suivent et qui s’adressent aux acteurs politiques de notre pays.

Donner de l’espoir ne suffit plus

Les responsables politiques, présidents ou leaders des différents partis politiques : UFDG, UFR, PEDEN, Bloc Libéral entre autres, ne doivent plus se contenter de donner de l’espoir. Ils doivent désormais apporter des solutions. La solution.

La même exigence s’applique aux représentants des mouvements civiques, membres ou non du FNDC. Les uns et les autres doivent tout simplement assumer la Guinée. Assumez un pays, c’est le comprendre, le prendre en responsabilité, le libérer ou le délivrer. C’est cela la mission de l’homme politique.

Cependant, en invitant les uns et les autres à assumer la Guinée, une question me taraude en tant qu’historien et analyste. Dans la classe politique actuelle qui s’en donnera les moyens ? Qui réalisera le rêve des Guinéens tant leurs espoirs se sont souvent évanouis au fil de notre histoire ?

Qui va assumer notre pays : ses turpitudes, ses victoires, ses défaites, son avenir face aux flots d’interrogations, aux innombrables rivières de sang et de larmes dans lesquelles nous nageons depuis plus d’un demi-siècle ?

J’en ai une idée : ne pourrait le faire que celui-là qui revêtira, au-delà du manteau d’un simple président de parti politique d’opposition, l’habit d’un grand homme au sens historique du terme.

De Gaulle a assumé la France par l’appel du 18 juin 1940. Sékou Touré, l’indépendance de la Guinée par le non du 28 septembre 1958. Nelson Mandela a assumé l’Afrique du Sud en mettant fin à l’apartheid.  En cela, ce sont des grands hommes. Celui qui voudrait s’inscrire dans cette lignée devra sortir des sentiers politiques empruntés ces derniers temps. Il devra inventer, imposer et ne pas se complaire de titres, fermer la porte, autant que l’adversaire le fait, aux dialogues creux et interminables.

Je ne doute point de la capacité de vous, hommes politiques de l’opposition d’adopter de telles initiatives ou attitudes. Loin s’en faut.

Je me dis juste qu’il va falloir dépasser le courage dont certains d’entre-eux ont fait preuve en exposant leur vie dans la lutte pour un système démocratique en Guinée. Il faudrait désormais plus que le simple courage : il faut l’audace d’antonien de 1789.  Et pour cause ?

Un dictateur, africain en tout cas, n’est jamais vaincu sur la table des négociations : Compaoré, Mugabe, El Béchir, Moubarak, j’en passe.

Qui voudrait ouvrir la nouvelle page de la lutte politique en Guinée devrait se fonder sur ce précepte de l’histoire politique du continent.

L’histoire comme repère politique pour façonner le futur

Se baser sur l’histoire générale de la Guinée pourrait préserver de la répétition d’écueils ou d’erreurs du passé.

Notre histoire politique, de 1958 à nos jours est jalonnée de fuite en avant, d’attitudes passives ou complices, des mea-culpa tardifs, d’omissions volontaires, du laisser-aller. Si ce n’est de larmes et de sang. A se demander si nos ancêtres n’ont pas emporté les secrets de la geste, ces hauts-faits, ces grands actes héroïques, qui fondent les grandes nations et font les grands hommes. 

A nos hommes politiques, je leur dis, l’état actuel de notre pays vous impose une interrogation collective. L’heure vous oblige à jeter un regard en arrière. De procéder à une rétrospective de vos combats, de vos parcours, de vos stratégies, de vos réussites et surtout de nos échecs. C’est la seule manière de vous conforter dans vos convictions ou provoquer une remise en cause.

Cela est d’autant plus nécessaire qu’un responsable politique qui ne se remettrait pas en question ne peut courir qu’à l’échec. La clé de vos victoires comme de vos défaites futures en dépendent.

Il faudrait vous remémorer, à chaque instant, les espoirs que vous avez faits naître et les ratages qui en ont découlé afin de mieux vous préparer à la nouvelle adversité.  Pour ce faire, un bilan d’étape s’impose. Il vous appartient de le faire ou pas. Mais pour guérir notre pays qui se gangrène de jour en jour, de grandes actions et de nouvelles stratégies sont incontournables et sont possibles.

Faire l’autopsie du passé pour un diagnostic du lendemain

Il est temps de procéder à l’autopsie des dix années de marches et de manifestations, de négociations et de dialogues, de tête-à-tête, de bras de fer avec le pouvoir en place. Mais aussi de vos alliances ou coalitions, de vos stratégies de conquête du pouvoir individuellement et collectivement. Les appels et attentes de solutions qui devraient venir de la communauté internationale ne sauraient non plus échapper à cette mise à plat.

Une telle démarche rétrospective, condition sine-qua-non de toute prospective, fait appel à une vision politique clairvoyante qui réponde à l’éthique de conviction et à l’éthique de responsabilité. (Max Weber).

Cette théorie wébérienne, qui se prête tout particulièrement aux échéances électorales décisives, que l’auteur conseille aux hommes politiques en « période de gros temps », comme c’est le cas chez nous, pose l’équation de la fin et des moyens en politique.

La proposition de la tenue de l’élection présidentielle le 18 octobre 2020, phase ultime de la stratégie du pouvoir, qui a toutes les chances d’être validée par un décret présidentiel met au centre du débat cette théorie. A l’opposition de voir quels moyens usés pour quels résultats : aller et perdre ; ne pas aller et sortie vainqueur ? Et comment ?

Quant au pouvoir, nul doute qu’il n’hésitera pas d’user, à nouveau, des moyens les plus condamnables pour parvenir à ses fins. Déjà, le piège habituel commence à s’ouvrir alors que l’étau est en train de se resserrer, peu à peu, autour de vous, chers membres de l’opposition.

Le resurgissement de la question du dialogue avec les pièges qu’il traine n’est pas hasardeux. Voilà que vous y avez déjà mis un pied et de la manière la moins adroite en égrenant des « si » ; des « on » et des « il faut que ». Du genre : « si je dois aller ; on n’a pas dit que… ; on n’ira lorsque… ; pour qu’on y aille… ».

Loin de propositions carrées, de refus catégoriques, ces conditionnelles n’ébranleront pas le dernier chef de quartier de notre pays. L’arrogance d’en face, celle du pouvoir, appelle des positions fermes et catégoriques. Si ce n’est radicales.

A défaut, rien n’empêchera les scénarios de 2010 et 2015. En tous les cas, celui qui est habitué à rouler sa bosse pour escalader la montagne, ne craint point la colline. Alors, comme je l’ai souligné plus haut, le système ne reculera devant aucun obstacle ni danger dans l’optique de la conservation du pouvoir dans les prochains mois.

La deuxième partie étayera les enjeux, les défis, les stratégies et les choix qui s’offrent à vous.


Par M. Lamarana Petty Diallo – Guinéen – Professeur Hors-Classe, lettres-histoire, Orléans- France

Lire aussi De la survie de l’opposition et du FNDC face enjeux futurs [Lettre ouverte aux personnalités politiques de l’opposition guinéenne – Par L. Petty Diallo]





L’opposition boycotte les élections législatives du 16 février 2020 en Guinée


Au lendemain d’une nouvelle forte mobilisation contre l’hypothèse d’un troisième mandat du président Alpha Condé, les principaux partis d’opposition en Guinée confirment leur boycott du prochain scrutin législatif de février 2020.

Réunies sous la bannière du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC),
grandes formations de l’opposition et organisations de la société
civile ont renoncé à déposer des listes de candidats en vue des
législatives du 16 février 2020. La Commission électorale
nationale indépendante (CENI) a enregistré le dépôt de listes émanant de
29 partis, dont le Rassemblement pour le peuple de Guinée (RPG) du chef
de l’Etat, a indiqué, le 7 janvier lors d’une conférence de presse, le
président de cette institution, Amadou Salif Kébé. Aucune liste n’émane
de l’opposition.

Depuis plusieurs mois, le FNDC mène le combat contre un éventuel troisième mandat du président Alpha Condé, né en 1938, qui achève fin 2020 son deuxième et, en principe dernier, quinquennat.

“Ces élections, on les empêchera”

Nous confirmons le boycott. Les conditions pour une élection transparente ne sont pas réunies”, a déclaré à l’AFP le principal opposant guinéen, Cellou Dalein Diallo. Il a réclamé, pour changer de position, “un fichier électoral assaini, un recensement correct (des électeurs) et un président de la Commission électorale moins partisan“. “Ces élections, on les empêchera“,
a ajouté M. Diallo, conforté dans ce projet par un autre leader de
l’opposition, l’ex-Premier ministre Sidya Touré, sollicité par l’AFP. Ce
scrutin, contre lequel se dresse l’opposition guinéenne depuis le 23
décembre 2019, a déjà été reporté à plusieurs reprises.

Les
législatives en Guinée associent deux modes de scrutin. Vingt-neuf
partis vont concourir pour remporter 76 des 114 sièges de l’Assemblée
nationale mis en jeu sur des listes nationales, qui seront répartis à la
proportionnelle. Les sièges restants seront désignés lors de scrutins
majoritaires à un tour dans les 38 circonscriptions du pays (33 en
province et cinq à Conakry). Quatorze partis ont inscrit des candidats
pour ce scrutin majoritaire, selon la CENI.

Un coup monté d’Alpha Condé, selon l’opposition

Nous
sommes déterminés à organiser les législatives à la date prévue du 16
février 2020, puisque nous sommes techniquement et matériellement prêts
“, a affirmé son président M. Kébé. Ces élections visent à renouveler l’Assemblée nationale, dominée par le RPG.

Aux yeux de l’opposition, il s’agit purement et simplement d’une manœuvre du président Condé pour renforcer son pouvoir, alors qu’il a l’intention de faire adopter, par référendum, une modification de la Constitution lui permettant de briguer un troisième mandat en octobre 2020. Après des années de dictature dans ce petit pays de 13 millions d’habitants d’Afrique de l’Ouest, pauvre malgré d’importantes ressources minières, Alpha Condé a été le premier président démocratiquement élu en 2010. Mais, à l’instar de nombre de ses homologues d’Afrique ou d’ailleurs dans le monde, il semble aujourd’hui plus attaché au pouvoir qu’à sa remise en jeu, l’un des principes mêmes de la démocratie.


Cet article est republié à partir de francetvinfo.fr. Lire l’original ici





SCAN: «La résistance à l’oppression est un droit constitutionnel, la résistance à la dictature est un droit constitutionnel [ ]» Cellou Dalein Diallo


SCAN POLITIQUE [archiver des paroles et des écrits]


Abdourahmane Sano, coordinateur national du Front national pour la défense de
la constitution (FNDC) (à l’occasion de la marche dite de l’ultimatum du 6
janvier 2020)

« Alpha Condé n’est pas seul. Il est avec le président de la
cour constitutionnelle qui s’est rendu complice de sa démarche. Il doit
démissionner. Kory Kondiano, dont le mandat est terminé depuis le 14 janvier
2019, doit démissionner. Ces trois personnalités doivent désormais être dans la
ligne de mire de notre combat pour les libérer des bandits qui les prennent en
otage pour continuer à piller notre économie. »

La source ici


Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG (à l’occasion de la marche dite de l’ultimatum du 6 janvier 2020)

« La résistance à l’oppression est un droit
constitutionnel, la résistance à la dictature est un droit constitutionnel, il
faut qu’on se mobilise à partir du 13 janvier pour demander le départ d’un
président qui a perdu toute la légitimité parce qu’il a violé la constitution. »

La source ici


Faya Millimouno, président du Bloc Libéral (à l’occasion de la marche dite de l’ultimatum du 6 janvier 2020)

« Nous sommes confiants quant à la possibilité du
peuple de Guinée de se faire entendre. Il n’y aura plus jamais de 3e
mandat dans ce pays. Ça, c’est terminé »

La source ici

« Il n’y aura pas de référendum dans ce pays pour une
nouvelle Constitution. Nous avons également dit qu’il n’y aura pas une élection
bâclée dans ce pays qui pourrait conduire à la violence. C’est pour cette
raison qu’aucun parti majeur de l’opposition n’a déposé de dossier pour ces
élections programmées et nous ne reculerons pas. »

La source ici


Sidya Touré, président de l’UFR (à l’occasion de l’assemblée générale hebdomadaire de son parti le 4 janvier 2020)

« Les Guinéens ont trop souffert. Je l’ai dit dans mon
adresse à la nation. 2019 a été une année de perdu pour les Guinéens. [  ] En 2009, quand l’armée avait voulu
confisquer le pouvoir, nous nous sommes tous levés pour faire en sorte que le
pouvoir soit rendu au peuple. Nous poursuivons le même combat. Le pouvoir doit
revenir au peuple conformément à la constitution. »

La source ici

« Nous sommes en 2020, c’est la refondation de l’Etat.
Nous sommes dans un état néant, il n’y a rien, c’est une seule personne qui
fait tout. [  ] Nous sommes tombés trop
bas, notre pays est complément foutu »

La source ici


Sékou koundouno, responsable à la planification du FNDC (à l’occasion de la marche dite de l’ultimatum du 6 janvier 2020)

« On ne peut
pas laisser un groupe de gangsters faire de cette Guinée ce qu’ils veulent dans
l’illégalité totale. Le référendum se passera sur nos cadavres, car il n’y en
aura pas et nous empêcherons la tenue de n’importe quelle élection truquée »

La source ici





Les vœux du nouvel an de la classe politique : les extraits de Guinée Politique


Cellou Dalein Diallo, Lansana Kouyaté, Sidya Touré, Bah Oury, Alpha Condé, Aliou Bah, quelques acteurs politiques guinéens se sont prêtés à l’exercice des traditionnels vœux de nouvel an. La rédaction de Guinée Politique vous propose quelques extraits.


Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG (parti d’opposition) dresse un bilan sombre du régime d’Alpha Condé

L’intégralité ici

Lansana Kouyaté, président de PEDN (parti d’opposition) pour un message d’espoir présente quelques axes de son programme

L’intégralité ici

Alpha Condé (président de la République) parle des législatives de février 2020 et le projet de nouvelle constitution

L’intégralité ici

Aliou Bah, président du MODEL (parti d’opposition) parle de la nécessité d’une refonte de l’espace politique et d’une alternance en 2020

L’intégralité ici

Bah Oury, président de l’UDD (parti d’opposition) dénonce la mauvaise gouvernance et formule des vœux d’espoir

Le lien ici

Sidya Touré, président de l’UFR (parti d’opposition) parle de tourner la page

Le lien ici




Pour Sidya Touré, président de l’UFR «Les élections n’auront pas lieu en février 2020» [Vidéo]


Invité politique du journal TV5 Monde, l’opposant guinéen et membre actif du Front national pour la défense de la constitution (FNDC) dénonce le fichier électoral et la volonté du président Alpha Condé de s’éterniser au pouvoir.

L’intégralité de l’interview







SCAN : « Les guinéens sont en train de mourir partout alors que nous sommes l’un des pays les plus riches d’Afrique» Sidya Touré


Bah Oury, président de l’UDD (Décembre 2019, à l’occasion d’une marche du FNDC)

« Il ne peut pas y avoir du Koudéisme encore en Guinée.
Nous avons vu les effets du Koudéisme entre 2000 et 2010. On ne peut pas
répéter à chaque fois nos fautes antérieures »

« Le président Alpha Condé doit entendre la voix du
peuple qui lui dit ‘abandonne le projet de nouvelle constitution, organise
correctement les élections législatives et présidentielles et tu sortiras par
la grande porte et tu auras une sortie honorable. »

La source ici

« La CENI ne peut pas se permettre de dire qu’en 25 jours, elle peut enrôler tout le monde alors qu’il y a des risques, il y a du matériel qui manque un peu partout, comme s’ils font exprès, il y a des délais qui ne sont pas respectés du tout. Donc il y a une volonté manifeste de ne pas favoriser l’enrôlement de toute la population électorale guinéenne. »

La source ici


Abdourahmane Sanoh, coordinateur national du Front national pour la défense de la constitution (FNDC) (Décembre 2019, à l’occasion d’une marche du FNDC)

« Le pouvoir qu’il a, lui a été confié par le peuple.
Le 20 décembre 2020 le peuple va retirer son pouvoir et le remettre à quelqu’un
d’autre. Qu’il le veuille ou pas »

La source ici

« Nous allons mettre fin à cette volonté de tripatouiller notre constitution. Nous allons transformer leur rêve en cauchemar. »

La source ici


Sidya Touré, président de l’UFR

« Les guinéens sont en train de mourir partout alors
que nous sommes l’un des pays les plus riches d’Afrique. Mais cette richesse
est pillée par le pouvoir. Il faut qu’on change de régime. Il faut laisser la
place à un autre qui va nous proposer une autre solution. »

La source ici


Nicéphore Soglo, ancien président du Benin (Décembre
2019, en visite en Guinée dans le cadre d’une mission de bons offices du National
democratic institute)

« Si on veut que le train qui a démarré et que la
locomotive c’est le Nigéria, il faut que des wagons se mettent en place. Nous
sommes venus pour voir dans quel état se trouve le wagon de la Guinée. Dans une
famille, ceux qui sont les membres, s’il y a quelque chose, ce sont eux qui
viennent. C’est pourquoi nous sommes venus pour que la paix règne en Guinée.
Nous voulons que ce pays continue d’aller de l’avant avec toutes ses immenses richesses. »

La source ici


Elie Kamano, artiste reggaeman et président du parti
Nouvelle Guinée Possible (Décembre 2019)

« On n’a pas besoin de ces élections législatives, parce que le futur Président de la République de Guinée, aura besoin d’une légitimité parlementaire et organisera les élections législatives »

La source ici


Déclaration des femmes lors d’une marche contre les tueries
et l’impunité en Guinée (Décembre 2019)

« Nous ne voulons pas nous livrer à un décompte macabre mais nous avons le devoir d’informer l’opinion nationale et internationale que le chiffre 127 morts est atteint depuis la semaine dernière. Cela ne laisse pas une femme tranquille. Nous ne sommes pas loin des 157 guinéens massacrés au stade du 28 septembre 2009… Nous femmes de Guinée, nous réitérons notre exigence pour la mise en place de la commission d’enquête internationale pour faire la lumière sur les cas des 127 morts complètement identifiés »

La source ici


Gabriel Curtis, ministre en charge des
investissements et des partenariats public-privé (Décembre 2019, à
l’occasion de la journée internationale anti-corruption)

« En Guinée,
la corruption est encore persistante. Selon les rapports 2011 et 2017 de
l’Agence Nationale de Lutte contre la Corruption (ANLCL), le volume des pots de
vin en Guinée avoisine en moyenne 600 milliards de francs guinéens chaque
année. La même source indique que les opérateurs économiques déclarent avoir
payé près de 500 milliards de francs guinéens par an en paiement non officiel
et 75% des entreprises affirment faire des cadeaux pour obtenir des contrats »

La source ici


Un scan réalisé par Sékou Chérif Diallo





SCAN : « si l’opposition va aux législatives en février, ça sera seulement pour accompagner Alpha Condé » Aliou Barry


Aliou Barry, chercheur en
géopolitique et consultant sur les questions de paix, de sécurité et de défense
(Décembre 2019, Lynx fm)

« On n’a pas achevé le processus des élections
communales. Curieusement, tout le monde parle de législatives, alors qu’on n’a
pas installé les chefs de quartier qui sont les croix essentielles pour un
hold-up électoral. [   ] Partout où il y
a un fort électoral de l’opposition, il n’y a pas de récépissé, les machines
sont en panne. Donc, si l’opposition va aux législatives en février, ça sera
seulement pour accompagner Alpha Condé »

Lire la source


Bah Oury, président de l’UDD (Décembre 2019)

« Nous
souhaitons que le Président Alpha Condé soit également à l’écoute de son
peuple. Et son peuple lui demande de renoncer à ce changement constitutionnel
qui ne pourra rien apporter de bon au pays, ni à lui même, ni au RPG (…) »

Lire la source


Sidya Touré, président de l’UFR (Novembre 2019)

« Les anciens du RPG qui se sont battus pendant 20 ans
sont dans la misère. Même une vielle maison ils n’en ont pas. Ce sont ces
opportunistes qui font la campagne d’une présidence à vie ou de changement de
constitution qui sont en train de s’enrichir »

Lire la source


Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG (Novembre 2019)

« Cette révision se fait dans des conditions chaotiques
parce qu’il n’y a aucune organisation. Il y a un sabotage par l’institution
chargée d’organiser les élections, la CENI et le gouvernement de la République
qui devait veiller à ce que tous les guinéens puissent s’enrôler et voter.
Mais, malheureusement, nous constatons qu’il y a une sainte pagaille partout
dans le pays. On empêche les gens de s’enrôler dans les fiefs de l’opposition
en disant qu’il n’y a pas de consommables, il n’y a pas de récépissés, la
machine est en panne, l’agent est malade »

Lire la source


Aliou Bah, président du Model (Novembre 2019)

Sur la révision du fichier électoral : « un échec, une
catastrophe parce que la loi a été d’abord violée. Au lieu de trois mois prévus
par la loi en termes de révision ordinaire, la CENI a imposé un calendrier de
révision extraordinaire de 25 jours »

Lire la source


Alpha Condé, président guinéen (Novembre 2019)

« L’avenir de la Guinée se décide en Guinée et ça sera
fait par le peuple de Guinée ; comme nous l’avons fait en 1958. N’ayons
peur de rien sauf Dieu, car unis, nous sommes capables d’aller loin »

Lire la source


Un scan réalisé par Sékou Chérif Diallo





SCAN vidéo : Paroles d’acteurs politiques [Dalein, Sidya, Bah Oury]


“Les paroles s’envolent, les écrits restent” [Pas vraiment]

Archiver la parole publique, Guinée Politique suit les acteurs politiques guinéens.


Cellou Dalein Diallo, président de l’UFDG, entretien à Dakar avec Senflash7, novembre 2019. Source vidéo : Seneflash7

Cellou Dalein Diallo

Sidya Touré, président de l’UFR, plénière du FNDC le 18 novembre 2019. Source vidéo : Fodé Baldé

Sidya Touré

Bah Oury président de l’UDD, invité de TFM (Télévision sénégalaise) en novembre 2019. Source vidéo : ici

Bah Oury

Une revue hebdomadaire de Sékou Chérif Diallo





[Vidéo] Le FNDC appelle à une mobilisation générale : quelques leaders politiques délivrent leurs messages

Pour défendre la Constitution, toute la Guinée se mobilise ce jeudi 7 novembre 2019 pour dire NON au projet de 3e mandat de Alpha Condé. Crédits Vidéos : Page FNDC (Facebook)

Sidya Touré

Aliou Bah

Faya Millimouno

Cellou Dalein Diallo

Mamadou Sylla

Oumar Sylla

Abdoul Kabélé Camara

Le Guide du manifestant




Halte aux machinations, M. Le Président [Par Pr. Lansiné Kaba]


M. Le Président, vous venez de rentrer
de votre voyage en Russie. Bonne arrivée. Vous retournez dans un pays,
en émoi, vous le savez. Par conséquent, vous n’ignorez pas que ce séjour
en Russie, quoi que vos conseillers disent, n’était pas plus nécessaire
que votre séjour de septembre au Texas. Il était inutile. Ce sont des
déplacements coûteux et infructueux pour l’État et la nation. De plus,
le pays traverse une phase extraordinaire de son histoire depuis 1958.

Le « Navire national » guinéen chavire
depuis un bon moment. Vous le savez, vos thuriféraires, affabulateurs et
cupides, ne peuvent pas le cacher. Ce drame national se transforme
chaque jour en une tragédie déplorable et catastrophique. Le
« Commandant » qui oriente et dirige un bateau ne l’abandonne pas pour
répondre à l’invitation d’un autre capitaine, lui aussi, acharné à
rehausser le prestige de son « Paquebot »! La bonne gouvernance
requiert  de l’adresse et de la sagacité dans l’exercice des
responsabilités. Votre régime manque bien de ces qualités, M. le
Président, il faut se l’avouer.

Nul n’ignore que les services publics
fonctionnent mal depuis des années . Tout va à la dérive au pays. Aussi,
votre désir d’un troisième mandat est-il impossible. Pourquoi vous
est-il difficile de respecter la loi? Votre intention de briguer un
autre mandat se défend mal. L’intention crée l’épouvante. Le pays mérite
bien mieux sous un commandement, considéré au départ éclairé et sage.
Le projet correspond à la recherche et à l’imposition future d’une
dictature! Ce projet répand la terreur de Kaloum aux fonds fins de la
Forêt. Pour de bonnes raisons, tout le monde a raison de s’effrayer.

Car, M. le Président, votre régime, celui du RPG, sème la souffrance morale et physique. Les signes, visibles un peu partout, ne trompent pas. Le fonctionnement de l’administration déraille, depuis de longues années.

Les populations de la capitale sont sorties en grand nombre en octobre; elles ont courageusement manifesté leur mécontentement face aux répressions des forces de l’ordre. Bien sûr, elles sont ainsi sorties par pure conviction patriotique, scandant, si les bombes lacrymogènes ne heurtaient pas, la libération immédiate de Doura Sanoh et de ses compaganons que votre système a fait arrêter arbitrairement.

M. le Président, vous savez que Cellou Dalein Diallo,Sidya Touré, Ousmane Kaba et bien des autres de l’opposition, qui sont porteurs d’espoir pour des lendemains meilleurs, n’ont pas dépensé des milliards de FG pour faire sortir des milliers de protestataires en octobre. Votre gouvernement peut s’attendre à voir une foule encore plus formidable. Ces citoyennes et citoyens de diverses origines exigent la libération inconditionnelle des prisonniers mis dans vos geôles sans raison. Elles demandent aussi les corps des victimes des répressions policières de Conakry. Cette foule et les parents des victimes veulent récupérer et disposer, comme nos traditions le conseillent, des corps des victimes.

M. le Président, il y a de quoi rire que des camions partent de
Conakry dans les bastions du R.P.G pour démontrer à l’opinion
internationale votre popularité et la puissance de votre Parti! Nul ne
se trompe désormais; personne n’est dupe des machinations de votre
« machine ». Ce n’est autre chose que de faire sortir des milliards et
de renflouer les comptes de vos serviteurs, connus pour leur manque de
probité politique et morale.

Garde à vos forces de l’ordre! Si elles osent s’attaquer à cette foule de protestataires pacifiques, il y aura un tollé immense et dans le pays et au-delà dans la région. Votre projet de troisième mandat recevra et méritera alors encore plus d’opprobre.

Et, la Communauté internationale, dans son ensemble, saura comment votre régime est brutal, anti-démocratique, corrompu et inefficace dans la gouvernance judicieuse des ressources humaines et matérielles. La condamnation à l’échelle globale donnera raison aux opposants, nous tous qui rejetons vigoureusement votre projet de constitution et de troisième mandat.

Pr. Lansinè Kaba

Ledjely




Chronique : avec Kassory, Keïra et Kiridi, vous nous ramenez encore le vieux disque sur les anciens PM ?

Certains guinéens se souviennent et arrêtez maintenant d’insulter notre intelligence.

Les années Lansana Conté ont une telle spécificité et les guinéens ne l’ont pas oublié : les puissants de la République n’étaient pas les premiers ministres (ceux qu’ils appellent aujourd’hui anciens premiers ministres) mais des ministres et ministres conseillers à la présidence.

Tiens tiens ! Vous vous souvenez de Keïra ? C’est l’actuel ministre de la sécurité, comme par hasard, il serait clean comme un bébé qui sort de la maternité. Il était à la présidence sous Lansana Conté. Il suffit de dépoussiérer un tout petit peu nos souvenirs et la vérité sautera aux yeux.

Cette mémoire sélective qu’ils voudraient nous imposer découle d’une mémoire globale et tous les citoyens ne sont pas amnésiques dans ce pays. Et Kassory ? Vous vous souvenez du ministre de l’économie et des finances le plus puissant sous Lansana Conté ? On peut le dire, sans hésitation, le plus puissant de tous les ministres de l’économie et des finances depuis l’indépendance. C’est l’actuel premier ministre de Alpha Condé. Pour avoir un aperçu sur le personnage, je vous recommande les anciens albums de Kill Point (les initiés connaissent très bien cette période trouble, une cacophonie indescriptible au sommet de l’état guinéen).

Et Kiridi ? Ancien ministre de l’administration du territoire sous Lansana Conté et actuel ministre secrétaire général de la présidence. Ils ont tous réussi le test de recyclage sous Alpha Condé. De toute évidence, leurs compétences spécifiques et rares pouvaient encore servir.
Il faut rappeler que Lansana Conté n’a jamais accepté qu’un premier ministre soit très influent. Il suffit de se rappeler du contexte de leur nomination pour comprendre la nature de la collaboration.

Vous vous souvenez des clans au sommet de l’état sous Lansana Conté ? Aucun de ces clans n’avait à sa tête un premier ministre. Les premiers ministres ont plutôt été des victimes de ces différents clans où se mélangeaient des intérêts familiaux, d’acteurs du secteur privé, de sociétés étrangères…

Soulignons cette évidence : les anciens gouvernants qui ont effectivement pillé les ressources de ce pays (s’il y’a eu pillage comme ils le martèlent sans cesse) ne sont pas loin de ceux qui nous saoulent avec ce vieux tube de fabrication d’opinions pour les incultes, les amnésiques, les fragiles qui manquent de séances de musculation intellectuelle pour résister à la manipulation.

Sachez qu’on ne viole pas les règles démocratiques sous prétexte d’empêcher des acteurs politiques (anciens premiers ministres) d’accéder au pouvoir. Il revient au peuple de Guinée de choisir le prochain président de la république après le règne catastrophique de Alpha Condé. Sidya, Dalein, Kouyaté ou un acteur politique de la nouvelle génération (pour un dégagisme intégral), peu importe, c’est au peuple de Guinée de choisir à travers une élection libre et transparente.

Il ne s’agit pas de défendre ces anciens PM mais de dénoncer les justifications fallacieuses avancées par ce régime pour atteindre leurs objectifs.


Sékou Chérif Diallo Fondateur/Administrateur www.guineepolitique.com




Chronique: L’opposition politique dispose de peu de moyens de contrôle sur le processus électoral


Cette affirmation peut paraître bizarre parce qu’elle dénote le pessimisme ambiant quand le déficit de confiance est important entre acteurs institutionnels dans ce pays.

La CENI guinéenne est une machine à frauder les élections. Elle capitalise une longue expérience dans ce domaine.
Tout le processus (recensement, révision, installation des demembrements, opérations des votes, dépouillement au niveau local, centralisation des résultats, publication des résultats) est miné par les magouilles pilotées depuis le ministère de l’administration du territoire et la présidence.

L’indépendance de la CENI est un simple slogan. Les commissaires de l’opposition à la CENI sont démunis, impuissants car ils n’ont aucune maîtrise des opérations sur le terrain. Les informations partagées lors des plénières sont parcellaires et minutieusement choisies. Ces commissaires observent impuissants à la création de petits clans par des cooptations sur fond de corruption, très vite le bloc des commissaires de l’opposition se fissure et devient la valse des oppositions mutantes.

Dans cet environnement malsain, les QG politiques ont du mal à maîtriser leurs envoyés spéciaux car d’autres paramètres entrent en ligne de compte et tous arrivent à la conclusion largement partagée par les fonctionnaires et autres acteurs publics : « prenons notre part, de toutes les façons ce pays ne changera pas ». Une excuse de merde pour s’enrichir avec les bénédictions de toute la famille et amis afin d’échapper à la sentence populaire (T’es un maudit si tu ne profites pas des occasions…).

Avant, pendant et après les élections, l’opposition suivra la même démarche légale à savoir : constater et dénoncer les fraudes, rassembler toutes les preuves et déposer des recours. À partir de là, tout se complique davantage car le deuxième bras de la fraude électorale qui est l’appareil politico-judiciaire (cour constitutionnelle) maîtrise cette étape en se targuant de sa neutralité mais dans la réalité, sa partialité n’est plus à démontrer. Pour valider la forfaiture, il commence par écarter une bonne partie des preuves noyées dans un labyrinthe juridique incompréhensible et ensuite il se déclare incompétent. C’est du déjà vécu avec la cour constitutionnelle guinéenne.

Les institutions fortes de Barack Obama ont avant tout besoin d’hommes et femmes intègres pour impulser cette dynamique. En Guinée, la marche est encore longue pour espérer vivre un printemps des peuples avec leurs héros (les vrais, pas les modèles en carton qu’on invente chaque jour à Conakry).


Sékou Chérif Diallo Fondateur/Administrateur www.guineepolitique.com




Chronique : Le balai politique indispensable

Le dénominateur commun de tous les partis politiques et individus politiques qui veulent aller aux consultations chez Kassory Fofana : ils ont tous quelques suiveurs en attendant d’avoir des militants, une omniprésence dans les médias (réseaux sociaux) pour exister, une ligne politique hybride (parfois sans) pour faciliter le basculement saisonnier (les périodes des récoltes le plus souvent).
Peut-être qu’il est temps de conseiller les partis politiques guinéens de privilégier les coalitions/alliances politiques/électorales/parlementaires à la place des regroupements hybrides et inefficaces comme « Opposition Républicaine ». En procédant par une ouverture laxiste des adhésions et en privilégiant le nombre de partis adhérents aux convictions réelles des leaders, aux convergences d’objectifs et de valeurs, chaque retrait de partis, mêmes les plus insignifiants (mais médiatiquement bruyants), contribue à la fragilisation du groupe.
Quand vous offrez une tribune, une domiciliation à des girouettes politiques, ne soyez pas surpris de leur instabilité de mouvement.
Les grands partis politiques doivent reprendre l’initiative et éviter d’être parasité par des minuscules partis au positionnement politique douteux.

Sékou Chérif Diallo