Chronique : Rien ne sera comme avant, la rupture est inévitable


Ils s’accrochent désespérément à un système à bout de souffle. Ils s’accrochent parce qu’ils ont peur. Une peur plurielle (perte des privilèges, d’être rattrapé par la justice) résultante de parcours professionnels semés de corruption, de détournements de fonds, d’enrichissement illicite, pour les uns, de crimes, de trahison, pour les autres.

Rongés par cette peur d’un changement véritable, ils forment un bloc pour résister, une solidarité des voleurs, des criminels, avec un important renfort de fonctionnaires médiocres devenus par népotisme et clientélisme des grands commis de l’Etat. Cette confrérie politique adepte de la triche, du mensonge, de la délation résiste parce qu’elle a peur de voir le triomphe du travail qui récompense les meilleurs guinéens, de la justice qui protège tous les citoyens sans distinction, de la solidarité qui bannie les inégalités et œuvre pour l’équité.

Cette confrérie au sommet de l’état guinéen a peur du citoyen cultivé, ce citoyen qui oppose à la propagande nationale une lecture lucide de la réalité, ce citoyen qui refuse de monnayer sa liberté de penser, ce citoyen qui a le courage d’exprimer ses opinions et de défendre ses positions. Cette confrérie est une imposture à dénoncer et à combattre par tous les moyens (je précise : par tous les moyens légaux y compris les manifestations. N’offrons pas aux détectives privés des polémiques de la matière à polémiquer).
Depuis un certain temps, on observe une ambiance de fin de règne (qui est d’ailleurs normal), l’échéance de 2020 est proche. Ils essayeront de modifier la trajectoire, d’obtenir une prolongation, de modifier les règles du jeu mais ils échoueront lamentablement.
Rien ne sera comme avant dans ce pays. Alpha Condé sera contraint de quitter le pouvoir à la fin de son dernier mandat. Les guinéens ont changé et ils exigeront des élections libres et transparentes. Cependant, avec la CENI actuelle, il ne faut pas se leurrer, elle fonctionne comme un secrétariat permanent du RPG et son président est un militant à visage découvert. Le rapport de force est inévitable, contraindre les commissaires de cette institution à respecter la vérité des urnes.
Quand la confiance sera rétablie dans ce pays, la CENI disparaîtra et il reviendra au ministère d’organiser toutes les élections comme dans toutes les grandes démocraties. Pour réussir ce pari, il ne faut pas se tromper de combat. La hiérarchisation et la planification des actions sont indispensables. L’heure n’est pas au ralliement derrière tel ou tel leader politique. Il faut une mobilisation générale pour défendre le respect des règles démocratiques (la constitution). Si les guinéens, par rivalité politique inopportune, face au péril démocratique qui nous menace, valident cette forfaiture d’une nouvelle constitution, tout s’écroulera et ce pays renouera avec les démons des crises politiques majeures voire le retour des coups d’état avec leurs corollaires d’abus et de violations systématiques des droits de l’homme.

La seconde étape est d’exiger des élections libres et démocratiques avec un fichier électoral qui reflète la population électorale de ce pays. Si par miracle, le dégagisme intégral à la tunisienne se produit, tant mieux. Mais soyons réalistes, un scénario difficilement envisageable connaissant la sociologie électorale de la Guinée. Un important travail en amont est nécessaire pour faciliter la compréhension des programmes politiques par leur vulgarisation à travers des techniques et outils accessibles à tous. Un travail qui prendra du temps et une volonté réelle de sortir des alignements systématiques dictés exclusivement par des considérations subjectives. Il faut rappeler que l’écrasante majorité de la population guinéenne est rurale, l’activisme politique très visible des populations en milieu urbain ne doit pas occulter cette réalité statistique. Une variable importante à intégrer dans les démarches et stratégies de mobilisation.

En attendant ce travail de conscientisation généralisée pour favoriser une culture politique et démocratique chez tous les guinéens, qui découlera, on l’espère, sur une alternance générationnelle, un renouvellement du personnel politique et une réadaptation de l’offre politique aux besoins réels des populations guinéennes, on exigera des leaders politiques actuels une discipline de gouvernance vertueuse s’ils accèdent au pouvoir, avec une veille citoyenne en permanence. C’est la beauté de la limitation des mandats, du principe d’alternance politique en général. Le premier mandat est un test, une marque de confiance, les électeurs peuvent se tromper, le candidat élu peut trahir ses engagements. Le deuxième mandat est un renouvellement de confiance, un plébiscite. En respectant les règles du jeu démocratique, le peuple a cette opportunité de sanctionner l’incompétence, la trahison et les promesses non tenues.

Tous les cinq ans, le peuple est consulté pour élire, renouveler la confiance ou sanctionner. Au bout de deux ou trois cycles, le renouvellement du personnel politique se fera progressivement. Pourquoi une telle démonstration ? C’est pour rappeler une évidence : séquencer les objectifs permet une efficacité globale pour l’atteinte des résultats escomptés à court, moyen et long terme. Cette fixation permanente sur la classe politique actuelle en mettant tout le monde dans le même panier est non seulement contre productive mais elle contribue à conforter les promoteurs de la forfaiture en cours dans leurs positions et leur argumentaire.

Le mal est profond dans ce pays et commençons par respecter et faire respecter les fondamentaux du vivre ensemble: nos lois.


Sékou Chérif Diallo Fondateur/Administrateur www.guineepolitique.com

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