En Guinée, Alpha Condé joue son va-tout


Le référendum dimanche en Guinée couplé à des législatives ont été conçues par le président Alpha Condé pour s’accrocher au pouvoir malgré son âge et la contestation populaire.

81 ans et président de la République de Guinée depuis 2010. Alpha Condé entend bien le rester. Pour y parvenir, il a organisé un double scrutin qui doit se tenir ce dimanche, couplant ainsi élections législatives et référendum constitutionnel qui lui permettrait de briguer un troisième mandat présidentiel. Grâce à la crise du coronavirus qui a lui a permis d’annuler la médiation de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao), il y a fort à parier que celui qui fut une figure majeure de l’opposition lors des régimes précédents, parvienne à ses fins.

L’opposition a immédiatement réagi en appelant mercredi à un boycott électoral général et à descendre dans les rues pendant le week-end afin d’empêcher ce que certains désignent comme “un coup d’Etat constitutionnel”. Dans une allocution filmée, l’un des coordinateurs nationaux du Mouvement FDNC (Front national pour la défense de la Constitution) Sékou Koundouno a appelé les Guinéens à “se lever” pour faire de ces deux journées un élan de protestation historique. “Nous avons mis en place une batterie de stratégies. Nous allons lancer l’alerte rouge afin d’enterrer ce rêve suicidaire.”

Pour le gouvernement, l’élection ne va “sûrement pas répandre le virus”

Le FNDC a également dénoncé les manœuvres de l’Etat pour censurer Internet et des supposées pratiques illégales de mise sur écoute téléphonique. Des groupes de la société civile, quant à eux, ont demandé au chef d’Etat guinéen de reporter le scrutin jusqu’à la fin de l’épidémie de coronavirus. Le porte-parole du gouvernement, Amadou Damaro Camara, a rétorqué “que les deux cas répertoriés de personnes infectées ne pouvaient empêcher le reste du pays à exercer son droit de vote. Et que l’élection n’allait sûrement pas répandre le virus.”   

Alpha Condé avait pourtant bien commencé. Bon élève, il avait été envoyé en France à l’âge de 15 ans afin de poursuivre ses études. Il passe alors son bac au lycée Turgot à Paris où il sympathise avec Bernard Kouchner qu’il considère comme son frère. Puis c’est la Sorbonne et la faculté de droit où il décroche un doctorat d’Etat en droit public. Très vite, il devient un militant de la cause africaine et s’impose au fil des ans comme une figure majeure de l’opposition guinéenne. Il fonde trois partis politiques dont le Mouvement national démocratique (MND) qui passera de la clandestinité à la lutte légale en 1991.

En 2000, il est arrêté pendant vingt mois, jugé et condamné par une cour spéciale à cinq ans de prison. Son arrestation suscite un mouvement de protestation local et international. Madeleine Albright, ancienne Secrétaire d’Etat américaine se déplaçant même à Conakry, afin de rencontrer le célèbre opposant. Jacques Chirac s’impliquera aussi personnellement. Il sera libéré une année plus tard par une grâce présidentielle. Aujourd’hui, ses opposants lui reprochent d’avoir oublié tous les combats pour la justice et la liberté menés dans sa jeunesse.


Cet article est republié à partir de lejdd.fr. Lire l’original ici


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