La solution à la crise politique guinéenne [Par Lamarana Petty Diallo]


Depuis l’arrivée au pouvoir, en 2010 de Monsieur Alpha Condé, qui aime qu’on l’appelle plutôt professeur que président, la Guinée va de crise en crise.

Durant les 10 ans à la tête de son parti, au détriment de la République, M. Condé professe la haine, la division, l’ethnocentrisme et les conflits de tout genre. Il ne préside en réalité que le RPG et son arc qui dégaine depuis une décennie, non pas des simples flèches, mais du gaz lacrymogène et de balles réelles contre les citoyens.

Cette réalité politique pose nombre de questions tant aux Guinéens, partis politiques compris, qu’aux organisations internationales. Il me parait opportun de leur donner la réponse.

En effet, le sigle « RPG » du Rassemblement du Peuple de Guinée, renvoie à une arme bien connue : le fusil lance-grenade (ou lance-roquette). En anglais : « Rocket Propelled Grenades ». Cela explique que le RPG soit plutôt un parti belliqueux, va-t’en guerre et non pacifique. Dès lors, tous nos malheurs, déboires, échecs et conflits tiennent à ces trois lettres : R-P-G.

Autant dire que la guerre, du moins le conflit, est l’ADN du parti au pouvoir. Son histoire, sur laquelle nous ne reviendrons pas, le prouve à suffisance. Les discours enflammés de ses responsables politiques, plus bellicistes les uns que les autres, prônent la haine tout en rivalisant d’injures et d’arrogance. Le premier d’entre-eux à appeler, on s’en souvient, ses militants à « se préparer à l’affrontement ». Son système continue de s’armer et à militariser le pays.

Face à cette situation, nous devons montrer que notre ADN, c’est la paix, la cohésion sociale et la tolérance. Que nos gênes s’appellent unité, fraternité et coexistence ethnique et culturelle.

Cela ne signifie pas que le peuple doit être défaitiste ou capituler. Mais la lutte de l’opposition et du FNDC, des organisations régionales ou corporatistes n’est pas facile. Comme le faisait remarquer un de mes lecteurs « il est très difficile de parler de changement, de dignité et de conviction face à l’implication des autorités locales à servir le pouvoir pour conserver leurs postes et une population majoritairement illettrée et pauvre ».

En dépit de tout, la voie est tracée. Aux actions du front national de la défense de la constitution, se sont ajoutées celles des coordinations régionales de la Basse, Moyenne et Guinée-Forestière.

En se réunissant chez El Hajj Sékouna, les représentants desdites coordinations ont officiellement annoncé leur farouche opposition aux projets du pouvoir : nouvelle constitution et référendum, prélude à une présidence à vie. Malgré les intimidations, ils ont affiché sans aucune ambiguïté, leur détermination à contribuer à sauver le pays des dangers auxquels le pouvoir l’expose : conflit ethnique, présidence à vie, etc.

Le FNDC est sur la même voie depuis sa mobilisation historique du 14 octobre 2019. Il ne doit n’a pas faillir à la mission car les Guinéens semblent lui avoir donné carte blanche. Il doit les mener à la victoire du combat pour le respect des valeurs de la République incarnée par la constitution. Il le fait certes bien. Il nous reste désormais d’adapter la méthode à la finalité.

Dans tous les cas, face au FNDC, le pouvoir guinéen s’est montré impuissant. Le recours à la force par l’usage d’armes de guerre contre des citoyens désarmés est une preuve de faiblesse.  Lancer les milices du pouvoir et, sûrement celles de Malick Sankhon, qui a affirmé haut et fort avoir plus de trois milles hommes armés, n’a en rien entamé la détermination populaire.

L’atteinte des autorités morales, pour ne pas dire leur profanation, symbolisée par la violation du domicile du Khalife de la Moyenne-Guinée et celui d’El Hajj Badrou, Premier Imam de Labé, n’est qu’un degré de plus dans la violence d’Etat.

Plus besoin de prouver que les Guinéens vivent depuis 2010 sous la violence d’Etat. Plus de 140 morts, soit une dizaine de différence avec le chiffre officiel de 157 victimes des massacres du 28 septembre 2009.

Le reste dépasse l’entendement : refus de réception des corps des victimes des forces de sécurité dans les hôpitaux, assassinat d’un ambulancier, brimades et tirs à balles réelles dans les cimetières, appréhension d’un imam sur la route de la mosquée.

Le comble de l’horreur, c’est l’utilisation d’une femme, nourrice de surcroît, comme bouclier humain. Bref, on aura tout vu avec M. Condé et son pouvoir.

Il y a de quoi être fatigué et dire ça suffit.  Le peuple de Guinée l’a fait savoir en exprimant son ras-le-bol contre les projets de nouvelle constitution et de troisième mandat. C’est aussi une manière de dire qu’il en a assez des systèmes qui se suivent et qui sont plus catastrophiques les uns que les autres. Qu’il ne supporte plus l’arrogance des mêmes têtes, souvent de la même lignée, qui ne changent que pour asservir, mépriser les citoyens et exacerber les tensions.

Le FNDC doit prendre encore plus en compte la portée du message des Guinéens. Il lui appartient de montrer ce dont il est réellement capable car ses adhérents attendent de voir la matérialité des manifestations. Additionner le nombre des morts ? Mettre fin, comme cela s’est fait ailleurs : Burkina-Faso, Egypte, Tunisie, Algérie, à toutes velléités d’un homme de s’éterniser au pouvoir ?

La réponse réside en 2 mots : « Renoncer ou Démissionner » qui pourraient bien être le mot d’ordre des manifestations des 12 et 13 février. 

En tout état de cause, de nouvelles méthodes devraient être adoptées tant en ce qui concerne les manifestations que leur itinéraire et point de rassemblement. Kaloum ne fait-elle pas partie de Conakry commune tout autre commune, pourrait-on se demander.

Quelle que soit l’option la solution à la crise doit être trouvée avant qu’il ne soit trop tard.  On ose espérer que le rapprochement de toutes les organisations qui luttent pour la défense de la nation sera bientôt effective. Ainsi, sans se fondre dans le FNDC, les organisations syndicales pourraient faire comme le Groupe Organisé des Hommes d’Affaires (GOHA) en affichant ouvertement leur participation aux actions du front.

Le FNDC et tous les acteurs de la vie sociale et politique, surtout le pouvoir en place, qui fait encore preuve d’obstination, devraient comprendre que les Guinéens ne se laisseront plus faire. On ne pourra plus jamais rien leur imposer. A multiplier par 7 les 7 millions 7 cents mille électeurs (couvés pour les machines de la CENI), il n’en sortira aucun résultat car d’élections il n’y en aura pas. Si telle est la volonté de la majorité. En revanche, la solution sera trouvée d’ici le premier mars.

Il est grand temps d’avoir désormais présent à l’esprit que le peuple débout a compris que, bien pire que les despotes et le mal qu’ils imposent, le silence est encore plus coupable. D’où la lutte inlassable qu’il livre pour le respect de la constitution.

Le FNDC et les leaders politiques de l’opposition doivent être à la hauteur des enjeux et des finalités. Ils incarnent l’espoir face à un système qui se montre de plus en plus pernicieux et inhumain. Ils doivent se montrer capables de porter l’espoir et le rêve d’un meilleur avenir.

En tout état de cause, les Guinéens ont la détermination de prendre en main leur destin dans les plus proches échéances. Ils ont conscience que, c’est maintenant ou jamais.


M. Lamarana Petty Diallo Guinéen- Professeur Hors-Classe lettres-histoire – Orléans- France

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