Mamady Doumbouya prête serment comme président de transition


Politique


Le commandant des forces spéciales qui ont renversé le président Alpha Condé le 5 septembre a été investi vendredi 1er octobre dans un contexte encore flou. 

Ce vendredi 1er octobre a été déclaré férié. Demain la Guinée va célébrer le soixante-troizième anniversaire de la déclaration d’indépendance vis-à-vis de la France. C’est la veille de cette date symbolique pour l’histoire du pays qu’a choisie le chef de la junte, le colonel Mamady Doumbouya, pour prêter serment comme président, au palais Mohammed-V de Conakry pour une période de transition à la durée et au contenu toujours inconnus.

Ce qu’il a promis

Le commandant des forces spéciales qui ont renversé le président Alpha Condé le 5 septembre, en uniforme d’apparat beige, portant béret rouge et lunettes noires, a juré, devant la Cour suprême et un parterre de personnalités guinéennes et de diplomates étrangers ainsi que sa mère et son épouse, « de préserver en toute loyauté la souveraineté nationale », de « consolider les acquis démocratiques, de garantir l’indépendance de la patrie et l’intégrité du territoire national ». 

Le colonel Doumbouya s’est de nouveau engagé au respect par la Guinée, pays pauvre mais aux considérables ressources minières, de tous ses « engagements nationaux et internationaux ». Il a par ailleurs assuré que, comme prévu par la « charte » de la transition, sorte d’acte fondamental publié lundi, ni lui ni aucun membre de la junte ou des organes de transition ne serait candidat aux futures élections.

Avant de lui faire prêter serment, le président de la Cour suprême Mamadou Sylla a comparé la tâche du colonel Doumbouya au pilotage d’un navire « chargé de beaucoup d’événements douloureux, d’exigences nombreuses et d’attentes immenses et urgentes ». Il l’a appelé à ne pas se laisser dérouter « par la force des vagues de la démagogie et la tempête du culte de la personnalité ».

Après deux coups de force au Mali voisin, le colonel Doumbouya a conduit le troisième putsch en un an en Afrique de l’Ouest, réalisé en quelques heures au prix d’un nombre indéterminé de vies humaines, les médias faisant état d’une dizaine à une vingtaine de morts.

Vers la restauration d’un pouvoir civil élu ?

Ce coup d’État s’inscrit dans l’histoire tourmentée de ce pays éprouvé, dirigé pendant des décennies depuis l’indépendance par des régimes autoritaires ou dictatoriaux. Largement condamné par la communauté internationale qui réclame la libération d’Alpha Condé, 83 ans, il a en revanche été salué par des scènes de liesse parmi une population exaspérée par la pauvreté, la corruption et la répression du régime déchu.

Dans l’assistance figuraient les ambassadeurs de Chine et de Russie et de pays africains, ainsi que le président de l’organe législatif de transition au Mali, le colonel Malick Diaw. Plusieurs pays occidentaux avaient limité leur présence à des diplomates de rang moindre. Le colonel Doumbouya a assigné pour mission à cette transition une « refondation de l’État », la rédaction d’une nouvelle Constitution, la lutte contre la corruption, la réforme du système électoral, l’organisation d’élections « libres, crédibles et transparentes » et la « réconciliation nationale ».

La junte a dit qu’elle rendrait le pouvoir aux civils après des élections à la fin d’une période de transition. Mais elle n’a jamais précisé la durée de cette transition, qui doit encore être fixée d’un « commun accord » entre les militaires et les forces vives du pays, ni précisé ses plans.

La junte s’affirme face aux exigences de la communauté internationale

Le colonel Doumbouya, colosse aux manières posées, toujours protégé de près par ses hommes et apparaissant toujours en public en treillis et coiffé de son béret, semble résolu à se laisser du temps, malgré les pressions internationales, conviennent les analystes.

La Communauté des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), inquiète de l’instabilité et d’un effet de contagion dans une région où un certain nombre d’États sont malmenés, a réclamé des élections présidentielle et législatives sous six mois. Elle a décidé de geler les avoirs financiers des membres de la junte et de leur famille et de les interdire de voyage.

Depuis son avènement, celui que les communiqués officiels désignaient déjà comme président de la République avant même son investiture, a multiplié les propos rassurants envers les investisseurs et des partenaires étrangers. Il a garanti le respect des contrats miniers et fait rouvrir toutes les frontières aériennes et terrestres.

La « charte » de la transition confirme le colonel Doumbouya comme le nouvel homme fort de la Guinée, « chef de l’État et chef suprême des armées », qui « détermine la politique de la Nation » et qui « peut prendre des ordonnances ». Le président Doumbouya nommera par décret un Premier ministre de transition, qu’il pourra révoquer.


Cet article est republié à partir de lepoint.fr. Lire l’original ICI


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